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3,22

sur 74 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
J'avais beaucoup aimé le fameux roman de Shalom Auslander, La lamentation du prépuce, aussi, lorsque Babelio (que je remercie) m'a proposé ce livre, je n'ai pas hésité une seule seconde. L'histoire est particulière car nous nous trouvons face à une famille de cannibales. le personnage, Septième Seltzer, voit son monde s'écrouler lorsque son frère lui téléphone pour lui annoncer que leur mère est décédée. Ce bouleversement ne vient pas, bizarrement, de la funeste nouvelle en elle-même, mais plutôt de l'expectative de la suite des événements. Si la mère en question avalait des burgers à longueur de journée, il va falloir désormais manger cette dernière, ainsi que le veut la tradition…

Ami lecteur, s'il y a des références à Montaigne, ce qui ne peut que me réjouir, n'attends pas qu'il y ait le même style ! Ne prends surtout pas ton petit-déjeuner en le lisant, ou quelque nourriture que ce soit sous peine de la gâcher. Parce que pardon du peu mais « l'assimilation » de la mère (vous apprécierez la métaphore) se fait dans les détails, et pas des moindres !

J'ai apprécié ce livre qu'il ne faut surtout pas lire au 1er degré. Si l'on y retrouve, à travers Septième, les idées qui étaient déjà dans La Lamentation du prépuce, à savoir les critiques de sa propre culture, il s'agit ici, surtout, d'un cheminement de la pensée aboutissant à une meilleure compréhension de cette dernière, de ses rituels, et, finalement, s'opère un changement d'avis vis-à-vis de ce que le personnage pensait au départ. Sous des dehors à la fois sanglants et humoristiques, c'est toute une philosophie de vie qui transparaît et qui donne à réfléchir. Comme quoi, il ne faut jamais s'arrêter à une idée préconçue !
Lien : https://promenadesculturelle..
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Septième Selzer, un éditeur New-yorkais issu de la communauté Cannibalo-américaine n'a plus revu sa mère depuis plusieurs années. Elle n'a pas apprécié son mariage avec une non-cannibale. Alors quand on le convie à un dîner avec toute la famille, ça a de quoi le surprendre...Mais quand on l'informe qu'elle occupera une place de choix sur la table, il comprend que sa mère est morte. Et que suivant leur coutume son corps doit être mangé par tous ses enfants lors d'un repas de fête.
Un dîner pantagruélique les attend. Pour qu'il y ait un morceau de choix pour chacun, leur mère s'est empâtée en avalant une quantité astronomique de Whoppers, double bacon, supplément fromage, sans salade évidemment. C'est Onclissime, le gardien des traditions de  cette communauté anthropophage qui  va veiller  à ce que  toute la famille ingurgite leur maman...tyrannique.
Après sa fameuse Lamentation du prépuce qui racontait son enfance dans une famille juive orthodoxe, Shalom Auslander  poursuit ici  sa critique sur le fondamentalisme incarnée ici par une communauté d'un tout autre genre...C'est sur le mode de la farce de mauvais goût et de l'humour décapant  qu'il a choisi de  tabler. Pari réussi. J'ai bien ri  des préparatifs du repas, du choix des meilleurs morceaux à manger mais aussi des revendications identitaires tendance wokisme qui virent à l'absurde.
Maman pour le dîner, c'est excellent !
Je remercie Babelio, Masse Critique et Belfond pour ce livre que j'ai dévoré.
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Faisons simple : ce livre mérite d'être lu pour deux raisons. Premièrement, l'histoire est très originale ; elle semble inédite même. Deuxièmement, on rit aux provocations de l'auteur/de ses personnages. La mère a tous les défauts possibles, se permet de proférer les discours les plus anti-bien-pensance qui soit. On pourrait écrire un livre avec uniquement ses formules.
On rit à l'avance en imaginant le jour où des éditeurs essaieront d'édulcorer les propos de Shalom Auslander, pour créer une version woke de Maman pour le dîner. On leur souhaite du courage, vu qu'il y a les mots juif et noir toutes les 10 lignes, que la mère attribue à ces « communautés » les défauts les plus caricaturaux. Bref ça ne va pas être simple, et même impossible !
Un extrait pour finir : « le manuscrit qu'il était en train de lire, écrit par une Latino-Américano-juive-quatrième-vague-lesbienne-pro-immigration-anti-vaccin, avait évoqué Montaigne qu'elle traitait de mâle-pro-monothéiste-bourgeois-européen-patriarcal-catholique-cisgenre. »
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La famille Seltzer possède un lourd passé... Pur produit de l'immigration au début du XXè siècle, elle s'est "américanisée" en rejetant ses racines. Ou du moins, c'est ce que croient les enfants de Humphrey et Mudd. Soit dit en passant, Mudd est le surnom peu aimable donné à la mère, ce qui donne assez vite le ton.

Humphrey est le petit-fils de Julius, venu en Amérique avec sa soeur Julia, au début du XXè siècle. Ils ont quitté le Vieux Pays pour le Nouveau Monde. le récit familial, selon qu'il est conté par Humphrey ou par Mudd, fait jouer à Julius et Julia des rôles assez différents.

Humphrey et Mudd on eu 13 enfants, numérotés en guise de prénom. 12 garçons, de Premier à Douzième, et un fille, prénommée Zéro pour d'évidentes raisons. Ajoutons que Sixième est mort enfant, et que sa présence plane toujours sur tout le monde. Finalement, la famille Seltzer est à l'image de toutes les familles. Il y a les chouchous, les préférences, les enfants en opposition, ceux qui aiment leur père ou leur mère... Prévoyant (ou accélérant) sa mort prochaine, Mudd avale depuis 3 ans des Whoppers (une variété de hamburgers). La raison est évidente... comme tant de choses chez les Seltzer... les Seltzer sont des Can-Am... des Cannibales-Américains. Au décès d'un des leurs, ils le mange selon un rituel très codifié, enseigné par l'Onclissime, autre petit-fils de Julius, beau-frère de Mudd.

Le roman démarre donc à la mort de Mudd et nous raconte le long et pénible cheminement vers le rituel de cannibalisme qui doit conduire les enfants (sauf Zéro) de Mudd à la manger afin qu'elle acquière la vie éternelle... Car Shalom Auslander entend régler ses comptes avec la religion. Ou plutôt LES religions. On a des bouts de plein de religions qui s'entrechoquent chez les Can-Am. Mais en même temps Shalom Auslander taille un costard de premier ordre à l'Amérique et son rêve américain. En témoigne une photo de 1917 en exergue du roman, et montrant la cérémonie dite de "l'Américanisation" inventée par Henri Ford... et que les Can-Am vont s'approprier (car Julius l'a subie) lors du passage à l'âge adulte. Shalom Auslander passe le racisme et la xénophobie à la moulinette de sa plume acide. Il vitriolise Henri Ford, nazi et fervent admirateur d'Hitler. Il revisite les mythes fondateurs de l'Amérique. On est presque dans une atmosphère comparable aux films "The Purge"... L'auteur montre à quoi peuvent mener les dérives de la société.

D'ailleurs, les enfants Seltzer sont tous différents et représentent chacun une facette des USA. Un d'entre eux s'est converti au judaïsme ,un autre est devenu Vegan... ils ne peuvent donc manger leur mère. Il y a un gay. Un bas du front. Les jumeaux Onzième et Douzième veulent changer de sexe. Et on va suivre le récit tel que raconté par Septième, finalement le chouchou de Mudd et qui va se révéler digne (ou pas...) de ses racines.

Mentionnons le boulot de Septième, qui est éditeur, et classe les manuscrits reçus selon des classifications ethnico-sexuello-philosophiques, mâtinées de tares sociétales, mentales ou physiques. Ainsi on a une Nigériano-Irlando-Ukraino-Egyptienne-productrice-poétesse-comptable ou un christiano-Américano-toxico-autiste-diabétique, ou encore un Croato-Américano-lesbiano-pro-avortement... Ensuite, Michel de Montaigne s'invite dans les réflexions de Septième... c'est dire si on déconne !

Un roman déroutant mais qui remet beaucoup de choses en question et fait s'interroger le lecteur sur ses racines, les traditions, l'acceptation de soi et des autres... Malgré le sujet, on rit énormément. le sujet est lourd et sérieux, mais le traitement est leste et désinvolte. Je surkiffe.

J'ai vu dans ce roman une quête de sens d'abord. En filigrane, il pose la question de "peut-on aller quelque part quand on ne sait pas d'où on vient?". Il répond à sa manière, mais je vous laisse le soin de découvrir la position d'Auslander. Ensuite, Shalom Auslander s'attaque aux dogmes des religions. Je l'ai dit, toutes les religions en prennent pour leur grade. Puis vient sa critique des travers de la société. D'ailleurs, il s'en moque lui-même quand il fait état de commentaires émis sur le livre que Septième finit par écrire sur ses racines. Tour à tour le livre est qualifié de défense de la bobosphère, de brûlot fasciste, de défense honteuse des principes républicains... Jouissif.

J'avais adoré Shalom Auslander dans les Lamentations du Prépuce. Je l'adore de nouveau dans Maman pour le dîner.
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Cela faisait longtemps que je n'avais pas lu un roman avec comme idée de départ une idée aussi originale : l'auteur met en scène une famille « presque normale ».
Il s'agit d'une famille américaine qui a la particularité d'être cannibale. le personnage principal s'appelle Septième. Il est le septième fils d'une fratrie de 12. Fratrie qui est quand même composée d'une fille, le 12eme enfant. Quand la mère à la naissance voit que son 12ème enfant est une fille, elle l'appelle Zéro, parce qu'elle « ne vaut rien ». Tout est dit : cette femme est réellement une mère monstrueuse, tyrannique, qui a traumatisé tous ses enfants.
Pour ma part l'auteur a réussi, à partir d'une idée loufoque, à établir la carte d'une famille qui pourrait se retrouver partout : Athée, chrétienne musulmane, juive…
Il y a toute une galerie de personnages qui sont chacun symbolique d'un membre possible d'une famille : Premier, en constante colère, Deuxième qui se convertit au judaïsme, Troisième, le bon fils avec un QI ne dépassant pas celui d'un enfant de six ans, Septième qui a réussi à se sortir de sa famille, il a trouvé une épouse aimante et il a une petite fille de quatre ans, il a d'ailleurs dit à sa femme qu'il était fils unique et que tout sa famille etait disparue. Huitième et Neuvième sont des jumeaux, des garçons mais qui souhaitent se faire « transformer en fille ». Dixième est homosexuel.
Sixième est décédé lorsqu'il avait justement six ans par conséquent le narrateur Septième ressent énormément de culpabilité vis-à-vis de sa famille.
Vu la galerie de personnages, on se dit que ça va être compliqué à suivre et bien pas du tout, c'est à la fois vif et enjoué, également une analyse assez profonde de la société américaine.
La mère au tout début du livre décède, elle est obèse. Dans cette famille de cannibales, la dernière en Amérique, la tradition est de manger le défunt. Il y a tout un rituel autour de cela, toute une liturgie, des préceptes à suivre à la lettre. Préceptes qui sont psalmodiés par Onclissime, l'oncle des douze enfants de Mudd.
Les enfants du monstre mangeront ils leur mère ?
En tout cas ce roman m'a fait à la fois beaucoup rire (d'excellents passages sur Jack Nicholson, sur les disputes entre enfants devenus adultes….) et à la fois trembler d'effroi…

Un roman décapant !
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Grâce à une opération Masse critique, j'ai enfin eu la chance de retrouver Shalom Auslander, dont j'avais lu toutes les oeuvres. J'attendais avec impatience depuis quelques années son prochain roman. Il faut savoir être patient pour obtenir de la qualité.
Un peu à la Philip Roth (la comparaison s'arrêtera là), cet auteur a le talent de nous happer dès les premières pages, en nous abreuvant de mille informations, au point qu'on se demande ce qu'il aura encore à nous raconter dans les 230 pages qu'il reste.
Résultat : au moins une idée d'une grande originalité par page. Pas de pause. Dans l'humour non plus, surtout dans les dialogues.

C'est l'histoire d'une mère, de sa progéniture et de leur Onclissime. Il ne s'agit pas de n'importe quelle famille : ils sont adeptes (ou devraient l'être) d'une religion soit disant disparue car interdite, mais se battant discrètement pour survivre : les can-am, c'est à dire les cannibales américains. Donc, le titre est bien à prendre au premier degré.
Shalom Auslander est tellement doué qu'il arrive à nous expliquer l'histoire de cette religion et la justifier, ce qui la rend presque crédible !
Le but de cette mère : perpétuer la tradition de sa religion en ayant douze enfants, tous des garçons, pour qu'ils se reproduisent et ainsi gagner la guerre contre les autres religions par le nombre de pratiquants.
Pour cette mère détestable et débectante (jeu de mots), rien ne s'est bien sûr passé comme elle l'avait prévu. Certains ont pris fait et cause pour elle et les autres la haïssent.

Mais peut-on demander à nos enfants d'être ce qu'ils ne sont pas et de faire ce qu'ils ne veulent pas faire ? Est ce que l'amour inconditionnel qu'on leur porte "instinctivement" ne devrait pas nous pousser naturellement à les accepter comme ils sont ?

C'est ainsi que nous suivons plus particulièrement le destin de Septième Seltzer (ce nom ne serait pas une allusion à un produit qui aide à la digestion, surtout après avoir ingéré une mère amère ?), le septième né de la fratrie, qui a du mal à lutter contre cette mère envahissante, voire dévorante (re-jeu de mots, désolée) et ce qu'elle lui demande de faire après sa mort (comme à ses autres enfants) : Comment dire ? Suivre la tradition quoi... La manger !
Là, je ne dévoile à peine que les 40 premières pages (et la quatrième de couverture).
La mort de sa mère le mettra en quête de son identité. Qu'est-ce qui qualifie une personne ? Ses origines, sa religion, sa couleur de peau, son statut social, sa profession, son genre, son penchant en matière de sexualité et j'en passe...?

Je suis à nouveau entièrement entrée dans l'univers à l'humour noir et mordant (re-désolée, je ne peux pas m'en empêcher, trop tentant) de Shalom Auslander. Tout le monde en prend pour son grade (surtout Jack Nicholson). Les habitués ne devraient pas être déçus. Les autres, je vous encourage à tenter l'expérience Auslander et à déguster ce livre :-). le suspense nous tient jusqu'au bout.

De plus, derrière ces apparences d'humour caustique et "délicieux", ce récit aborde des thèmes universels comme l'appartenance à sa famille (que l'on ne choisit pas, c'est l'évidence même), une culture, des traditions.
Mais également le rapport des enfants aux parents, notre loyauté envers eux, la culpabilité qui peut nous poursuivre si on les déçoit, la difficulté de se détacher d'eux, de leur influence quelque soit notre âge. Et le rapport des parents à leurs enfants, l'acceptation de ce qu'ils sont sans se poser de questions, sans vouloir les changer et sans les renier une fois qu'ils suivent leur voie.

Un roman qui nous rappelle aussi ce qu'est l'humanité au-delà de l'importance que l'on donne aux apparences des autres, leur physique, leur couleur, leur religion... Il dénonce l'absurdité de nos pseudo différences. Une leçon d'humanité et de tolérance pleine de bon sens.

Je cite:
"La couleur de peau est malheureusement un des principaux marqueurs d'identité du genre humain. Il ne fait aucun doute que ce soit un marqueur primitif et affligeant, mais peut-être fallait-il s'y attendre aussi dans la mesure où nous ne sommes, malgré la haute opinion injustifiée que nous avons de nous, mêmes, qu'une espèce animale parmi d'autres, en lutte pour sa survie. Pour le zèbre, le lion est la mort, et personne ne ferait la morale au zèbre pour avoir réduit le roi de la jungle à cette définition. Il n'empêche, on ne peut qu'imaginer les hauteurs que nous humains atteindrions si des caractéristiques plus essentielles comme la gentillesse et l'intelligence étaient aussi immédiatement détectables et évaluées que les rayures et les taches de nos pelages. Il est douloureux et dégradant d'être jugé sur sa couleur de peau, comme le savent ceux qui en sont victimes. Mais il y a pire : être jugé sur la couleur de peau de tout le monde. Et pourtant, c'est la terrible situation dont les Cannibales souffrent aujourd'hui car ils n'ont la peau ni noire ni blanche, ni claire ni foncée, ni orientale ni occidentale. du fait d'avoir fui puis de s'être intégrés et d'avoir fui encore à de si nombreuses reprises au cours de leur histoire tourmentée, ils sont parvenus à un zéro racial absolu en termes de traits. Ce qui les caractérise est précisément de n'avoir aucune caractéristique et, en raison de la nuance particulièrement ambiguë de leur peau, on les prend - et on les hait à cause de cela pour toutes les races et tous les peuples de toutes les nations du monde."
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C'est l'histoire d'une famille.
Mudd, la mère, est énorme.
225 kg.
Depuis 3 ans , en prévision de sa mort prochaine, elle se goinfre quotidiennement de douze Whoppers bien gras de chez Burger King. En effet, Mudd fait partie du peuple cannibalo-américain (en voie d'extinction) et sa famille devra procéder au cérémonial des Victuailles, dès qu'elle aura passé l'arme à gauche.
Les Victuailles, comme le veut la tradition funéraire cannibale, consistent en 4 étapes de base : le Drainage (du sang), la Purge (des organes), la Répartition (du corps) et la Consommation (de la viande). Après la mort, les Cannibales ont deux heures pour Drainer le sang du corps, suivies de 24 heures pendant lesquelles ce dernier doit être être Consommé. Merde.
Parmi les treize enfants de Mudd, certains l'aimaient profondément et d'autres la détestaient. Ce sur quoi ils doivent se mettre d'accord, c'est ce qu'ils vont faire d'elle. Vont-ils la manger ou l'enterrer ?

Prendre la voie du repli identitaire ou celle de l'assimilation, telle est la question que nous pose Shalom Auslander. Ainsi, dans ce roman corrosif, on évoque des personnes qui se définissent comme Afro-Américano-féministe-progressiste-démocrate-baptiste-dominatrice, ou bien même comme nymphomane-Américano-militariste-orthodoxe-néo-conservatrice-juive, etc., etc.

L'auteur ridiculise et fustige l'importance attribuée aux préceptes des Anciens et aux religions plurimillénaires, comme le démontrent ces quelques lignes que je cite :
« Je n'ai jamais compris la fascination des hommes pour la tradition, dit Zéro. On ne sait quel crétin portait jadis tel chapeau ou mangeait tel plat ou faisait telle guerre ou mourait sur telle croix. Alors ? Alors, on porte le chapeau qu'il portait et on mange le plat qu'il mangeait et on arbore une petite croix autour du cou sans réfléchir une seconde au fait que ces anciens que nous imitons n'avaient pas la plus petite idée de la marche du monde. Un enfant de sept ans en sait davantage aujourd'hui que ces anciens. »

Je rajouterais que, tout comme les can-am (cannibalo-américains), les catholiques mangent le corps du Christ et boivent son sang, par le biais magique de la transsubstantiation. Quelle drôle de coutume que de communier avec son Dieu en le mangeant ! Philip.K.Dick, en son temps, dans une nouvelle intitulée « Le cas Rautavaara », s'était frotté à cette problématique.

Je remercie bien sûr Babelio et les Éditions BELFOND pour cet excellent livre (et savoureusement iconoclaste) qu'ils m'ont offert.
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On pourrait croire que le titre n'est pas à prendre au sens littéral, or c'est l'inverse, il est bien sujet d'une famille "can-am" (cannibalo-américaine) et d'enfants qui vont passer leur mère à la casserole comme le veut leur tradition lors du décès d'un proche. Heureusement que l'éditeur nous précise en préambule qu'il s'agit d'une oeuvre de fiction, on ne sait jamais.
Un livre loufoque et original, c'est le moins qu'on puisse dire. le narrateur raille à peu près tout: les traditions, les religions, la compétition victimaire, les revendications identitaires, la mère juive ou pas d'ailleurs, les éditeurs désabusés, les auteurs sans idées, les psychiatres etc.
On rit souvent, il cite Montaigne, raconte l'américanisation des immigrés depuis deux siècles et cette particularité du fameux grand "melting-pot". Il imagine un Jack Nicholson can-am ce qui est tout à fait plausible lorsqu'on pense à sa tête dans Shining. Je recommande la lecture de ce livre!
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Vous connaissez peut être la transsubstantiation (mot qui n'est pas facile à placer au scrabble) : c'est la conversion d'une substance en une autre. Pour les chrétiens, c'est le vin qui incarne le sang du Christ et l'ostie qui incarne le corps du Christ. de là à dire que les chrétiens sont cannibales ou vampire ...
Shalom Auslander nous fait pénétrer dans une famille réjouissante où les enfants s'appellent premier, deuxième, troisième, tous mâles .... jusqu'à Zéro qui est une fille. Ils font partie de la fière tribu des can-am à savoir cannibale américain, tribu pas piquée des vers où à la différence de la psychanalyse où l'on doit tuer le père et forniquer avec sa mère (symboliquement, ouf !), ici, il se faut manger le membre de la famille qui décède selon un rituel qui fait honneur à la boucherie/charcuterie. Septième, qui bosse dans l'édition, a que de nombreux membres de sa famille, fuit celle-ci, mais la mère (Mudd, j'ai fait le lien avec la boue en anglais et d'une certaine façon le limon originel dont nous sommes issus) décède (après s'être transformée en montagne de graisse, histoire de pourrir encore plus la vie de ses enfants après sa mort). Les frangins et la soeur se retrouvent dans la maison familiale et doivent ... trancher sur le sujet.
Voici un roman insolent, pas bien élevé, tendre et caustique, de l'auteur de "Les lamentations du prépuce" entre autres. J'ai vraiment beaucoup apprécié ce texte, qui m'a fait rire et pleurer, moi qui vient de perdre mon père, 2 ans après ma mère, moi qui ait enterré mes parents simplement sans passage à l'église, dans le cadre d'une cérémonie civile. Auslander ne lâche rien, il renâcle sur les règles, les obstacles, revient, négocie. Il s'interroge et trouver Michel de Montaigne dans un roman américain, ce n'est pas si courant pour y trouver beaucoup de plaisir.
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