A bientôt 33 ans, Bràs, fils d'un célèbre écrivain brésilien, se demande quel peut être aujourd'hui le véritable sens de sa vie. Ce matin par exemple, il aurait préféré l'oublier : oublier sa routine, toutes ces journées passées à chroniquer la mort de ses contemporains dans la rubrique nécrologique du plus grand quotidien de São Paulo. Seulement cette vie, a-t-elle commencé ? Bras peut-il rêver encore chaque nuit d'une vie de mots et voir ce même rêve, le rêve d'une vie, s'épuiser fatalement, à l'infini, dans l'ombre d'un père si grand et pourtant tellement absent ?
"Comme
Shakespeare, Bràs est mort le jour de son anniversaire. Il avait 32 ans." Chapitre 1. Des gens continuent de mourir et ça n'est souvent pour nous qu'un détail anodin.
Abrupt, je crois que c'est la première impression que m'ait laissé le premier chapitre de Daytripper. Sans doute parce que, sans attente, cette graphic novel me projetait devant l'une des crises existentielles les plus énigmatiques qui soit : la mort. Dès lors, la vie de l'homme aurait pu me paraître bien triste et tragique.
Or, tout le génie de
Fabio Moon et Gabriel Ba dans l'histoire est de parvenir à sublimer ce mot, le mot mort, en lui offrant les couleurs et le sens qui lui manque trop souvent. Ainsi, le caractère fabuleux de la fiction confère au récit une seconde dimension. Bras n'est plus seulement un être mortel, il traverse le monde et devient sur le fil de la vie, tour à tour un miracle, un fils, un compagnon, un ami, un père, l'écrivain, le démiurge, le rêveur : l'homme des milles et une vies.
Un jour, Bras dit à son fils : "La vie est comme un livre. Et tous les livres ont une fin. Peu importe combien tu aimes ce livre… Tu arriveras à la dernière page… Et ce sera fini. Aucun livre n'est complet sans une fin. Et une fois que tu y es… Au moment où tu lis les derniers moments… Tu sais à quel point le livre est bon. Ça sent le vrai."
Vivre au jour le jour, s'attacher aux petits détails de la vie, un message simple, oublié mais qui porté par la sensibilité de deux auteurs d'exceptions éveille le sentiment de découvrir en nous une nature humaine mystérieuse, cachée, presque onirique.
Un chef d'oeuvre fatalement.
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