Trois raisons ont motivé la rédaction de cet ouvrage. La première est le désir de faire fusionner la psychologie matérialiste ou extérieure et la psychologie introspective ou intérieure. La deuxième est le désir de rapprocher l'Occident matérialiste et l'Orient introspectif, en regardant audelà de la psychologie scientifique du passé, vers le domaine plus vaste de la pensée et de la psychologie de l'homme. La troisième est de montrer que tous ces aspects qui s'opposent ne sont que des facettes d'une seule vérité et que, ensemble, ils constituent l'unique Réalité.
La compréhension qui descend de l'espoir central du soi enveloppe le corps ; celui-ci devient une cité de significations et non plus simplement une cité de cellules. Ses organes ne sont pas de simples choses, mais des symboles, périlleux et profonds. Il devient en tant qu'ensemble un objet de valeur, de beauté ou de laideur, de grâce et de mécanisme, d'une philosophie implicite ; les attitudes d'orgueil et de honte l'intérêt infini de l'art, la diverse signification de la danse, tout devient intelligible. Les attitudes, les gestes et un million de changements subtils et expressifs de couleur et de tension deviennent les manifestations immédiates spontanées d'un jeu intérieur. La poésie et la morale, la religion et la logique retrouvent leur place dans nos membres comme dans notre mental, et le monde retrouve l'unité concrète dont nos analyses menaçaient de nous priver."
Les psychologues sont divisés en trois groupes, celui des psychologues du soi, celui des psychologues qui ignorent le soi et celui des psychologues qui se tiennent entre les deux. Le premier groupe maintient que le contenu de chaque processus conscient inclut un soi, la connaissance du soi et la conscience du soi. Par conséquent, toute conscience est une conscience ou connaissance de quelque chose par un soi.
"Le second groupe prétend être incapable de trouver un soi quelconque, ou une conscience de soi par l'introspection ; il nie son existence et soutient que les processus mentaux fonctionnent sans aucune réalité semblable. Le "Moi" et le "Vous" ne sont que des expressions rendues obligatoires par les besoins du langage."
Notre attitude à l'égard de la pensée philosophique et psychologique orientale est, en grande partie, soit une attitude d'admiration sans discernement, soit une méfiance manquant tout autant de discernement. C'est bien dommage. Ceux qui pratiquent l'adoration ne valent pas mieux que ceux qui pratiquent la méfiance. Ni les uns ni les autres ne nous facilitent une juste appréciation de ce vaste domaine de la pensée orientale si curieusement différente de la nôtre et qui est pourtant, comme on s'en aperçoit après quelque temps, si fondamentalement la même dans sa recherche essentielle.