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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
J'avais lu Polichinelle à sa sortie, comme beaucoup d'autres jurassiens. J'avoue. Il m'était tombé des mains. Lorsque j'ai vu L'Homme des bois sur la liste d'une LC à laquelle je participe, je me suis dit "oh, non !" Prenant mon courage à deux mains, j'ai fait le choix de commencer par lui, comme pour clore d'emblée tout débat intérieur, toute hésitation, m'en débarrasser en quelque sorte. Et je n'ai pas pu le lâcher !

Pierric Bailly a écrit ce livre suite à la mort accidentelle de son père : Il y a quelques années dans le Jura, le corps d'un homme d'une soixantaine d'années a été retrouvé après quelques jours dans la forêt de Revigny.

"C'est sur les flancs du premier plateau qu'il a dégringolé (...) de cette forêt sombre et pentue au sol meuble, de cette petite falaise, de la source du ruisseau, de la dalle de roche calcaire où son corps était étalé, sur le dos."

Une mort accidentelle qui laisse l'auteur en proie à des questions insolubles : Est-il mort sur le coup ? Que faisait-il avec ses chaussures de ville ? Était-il vraiment parti en quête de champignons ? L'idée du suicide que certains murmurent. Non, ce n'est pas possible... Et pourtant, comment ne pas se laisser envahir par de telles pensées ?

Alors, il fait et refait sans cesse le parcours de son père en forêt, dans les endroits qu'il aimait arpenter, essaie de trouver le lieu exact d'où il a pu tomber..., se remémore sa vie, ses engagements comme ses renoncements, tout en essayant peu à peu de débarrasser sa maison, trier ses affaires (celles à garder, donner ou ne pas toucher...).

Il y a la cérémonie, ce discours à préparer, ce père à honorer et cette mémoire à préserver. Alors les souvenirs des moments partagés refont surface. Ceux de l'enfance, de l'adolescence et ces derniers moments. Deux taiseux, deux hommes qui n'ont pas toujours su se dire qu'ils s'aimaient.

Pierric Bailly nous livre un portrait de son père, fort et sans complaisance : avec tendresse et bienveillance, il met en lumière ses failles, mais aussi ses qualités, ses aspirations et ses rêves inaboutis.

Il y a ce beau moment, très symbolique, où il emprunte un des tunnels de la voie verte, celui le moins fréquenté, en terre battue avec l'eau qui ruisselle des pierres et la lumière blafarde des néons. Il s'adresse à son père des entrailles de la terre, dans la pénombre et le froid, il lui raconte "l'après":

"Je me disais aussi que c'était l'endroit rêvé pour croiser le fantôme de mon père.
Ou simplement lui parler.
Un lieu calme, isolé, irréel, où je pouvais imaginer qu'il m'écoutait."

...jusqu'à la sortie du tunnel où la lumière du jour l'assaille et le rappelle parmi nous.

Cela sonne juste et beau. C'est parfois drôle et souvent bouleversant, car cela touche à un essentiel : peu importe l'âge ou les circonstances, on est toujours un môme lorsque l'on perd ses parents. Un môme qui se raisonne, redresse la tête et se console comme il peut...

"Je m'accrochais à cette idée qu'il était mort dans les bois comme un marin meurt en mer. La forêt qui prend l'homme. Mon père cet aventurier."
Lien : http://page39.eklablog.com/l..
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Dès le début le ton est donné : l'auteur vient de perdre son père, décédé lors d'une promenade en chutant d'une petite falaise, mort violente dont il faudra déterminer s'il s'agit réellement d'un accident, ou d'un suicide. Ainsi, au gré de promenades dans le Jura de son père, Pierric Bailly va évoquer de manière intime la semaine entre le décès et la dispersion des cendres de son père. Il questionne les souvenirs mais aussi les objets pour évoquer la vie de cet homme simple comme on aurait pu en trouver dans la littérature de Pierre Michon ; un homme intègre, de ceux qui ont voulu changer le monde et qui, à défaut d'y arriver, on décider de manière déterminée à se raccrocher à leur monde à eux et ont tout fait pour qu'il ne change pas. Mais il y a bien un détail, qui n'en est pas un d'ailleurs, sur lequel Bailly insiste : c'est la personnalité de son père qui n'était ni un héros, ni un anti-héros, un de ces hommes doux, mais capable de saute d'humeur difficile à vivre pour son entourage, discret et à la fois séducteur. Il y aussi ce trait de caractère dans lequel je me suis retrouvé (c'est peut-être pourquoi j'ai été tant touché par ce livre, allez savoir) c'est quand l'auteur note que son père "aurait aimé être ce genre de personne incarnée, qui possède une spécialité singulière, qui lui consacre tout son temps libre, qui rencontre et séduit l'autre par ce biais, qui a trouvé un sens à sa vie (...) Mais il a passé toute sa vie à papillonner". Dans le fond, L'Homme des Bois est aussi une façon de mentionner la Province - ici le Jura près de Lons-Le-Saunier -, et ces gens de l'ombre qui agissent sur le terrain, "en contact", comme le note l'auteur page 75, avec "ce fameux réel qu'on nous rabâche à longueur de discours, c'était son quotidien (...) les cas sociaux, les types ravagés (...) il ne les croisait pas qu'au cinéma, dans une représentation trop souvent édulcorée, acceptable, fréquentable, romantique (...)". On en prend pour son grade parfois, et c'est bien ce qu'on attend d'un livre, de la littérature, qu'elle nous secoue, qu'elle brise la mer gelée en nous comme disait Kafka...
Un beau livre donc, comme les éditions P.O.L. nous ont habitué avec Suicide d'Édouard Levé ou encore Martin de Bertrand Schefer, des livres dont la fausse simplicité n'a d'égal, lorsqu'on arrive à la dernière page, que la profondeur de la trace qu'il laisse en nous. J'en sors tout ému en tout cas, et il faut signaler aussi que ce livre de Pierric Bailly n'est entièrement dénué d'humour, ce qui le rend encore plus attachant, je vous laisse découvrir cette partie là en le lisant tout bientôt, je l'espère.
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J'avais entendu parler du dernier roman de l'auteur : "Le roman de Jim" de manière très positive (au Masque et la Plume notamment). Mais la lecture de la quatrième de couverture ne m'ayant pas emballé, je me suis rabattu sur son précédent roman : "L'homme des bois". Ai-je bien fait ? Je ne sais pas ; mais toujours est-il que celui-ci m'a énormément plu !

L'auteur fait face à la mort brutale de son père, ayant glissé lors d'une cueillette aux champignons. L'originalité de ce roman est que Pierrick Bailly nous raconte l'Après : l'enterrement, faire le vide et revendre l'appartement, etc. Et pendant les 160 pages de ce court livre, il nous raconte sa vie, celle de son père, de sa famille, mais il nous dépeint également la fresque de cette région qu'est le Jura, et nous immerge littéralement dans cette campagne "paumée".

J'ai vraiment été transporté par ce roman, la narration et les descriptions sont très prenantes et très réalistes, on achève cette lecture en étant persuadé de revenir d'un week-end dans le Jura. Malgré la brièveté de "L'homme des bois", l'auteur signe une très belle oeuvre que je conseille fortement !
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Pierric Bailly raconte la mort de son père, retrouvé mort en forêt, chacun y va de son hypothèse, s'est-il suicidé ? L'affaire est classée en mort suite à une chute accidentelle. Il essaie de comprendre, de reconstituer les dernières heures de son père. Il brosse le portrait d'un homme mais aussi d'une région, le Jura, et d'une génération de travailleurs sociaux, de militants.
Il raconte l'organisation de l'enterrement, sachant que son père ne voulait pas de cérémonie religieuse et avait des volontés bien précises. Pierric se retrouve dans l'appartement paternel, il tri les nombreux dossiers constitués par son père. Toute une vie se trouve dans ces murs et sur ces étagères.
« En reprenant l'avis de décès pour le journal, après les fleurs des champs et des jardins, j'ai ajouté : Sans chiens ni curés. C'est sorti tout seul. J'ai envoyé le texte par mail, il a été publié le lendemain.
Les semaines suivantes, j'ai reçu plusieurs courriers de prêtres qui s'étaient interdit d'assister aux obsèques. J'apprenais aussi qu'on s'offusquait du fait que les chiens passent avant les curés. Je n'avais pas imaginé une seconde qu'on pourrait le prendre au premier degré.
Si un curé ou même un chien avait voulu assister à la cérémonie, je l'aurais accueilli bien volontiers, pensez-vous. Un labrador catholique. Toute l'arche de Noé. Un chamois musulman, une marmotte juive… Oh là là, mes aïeux, quelle affaire. »
J'ai aimé l'écriture de Pierric Bailly. Je me suis laissée portée par son récit sobre, pudique et juste, non dénué d'humour. J'avais un peu l'impression d'être en tête à tête avec lui, qu'il me raconte cet événement tragique qui le touche, confessant ses émotions, ses états d'âme et se souvenant de son enfance aux côté de cet homme. Un cheminement vers le deuil en quelque sorte. Un récit poignant dans lequel l'auteur dessine un portrait tendre et bienveillant de son père.
Il décrit très bien le Jura, ses paysages et ses habitants. On a l'impression d'y être.
Je ne peux m'empêcher de faire le rapprochement avec le roman de Thomas Flahaut, « Les nuits d'été », qui se déroule dans le Jura, plus précisément à la frontière suisse.
J'ai emprunté ce livre en attendant de pouvoir lire celui que je vois passer sans cesse sur Instagram et dont je ne lis que des éloges, « le roman de Jim ». J'ai hâte de le lire !
Ce roman a obtenu le prix Blù Jean-Marc Roberts en 2017.
Lien : https://joellebooks.fr/2021/..
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