Un sentiment curieux s'est emparé de moi une fois la dernière page tournée. le sentiment d'être passé à côté. Mais finalement, en prenant un peu de recul, il en reste quelque chose, malgré quelques regrets.
Ce roman aurait aussi pu être intitulé : le divan - le même que celui de
Freud (dit le charlatan viennois), le dictateur - Iossif Vissarionovitch (dit Staline) et sa maîtresse - Lidia Semionova (dite la Vodieva).
Gravitent autour d'eux, dans le palais Likani perdu à Borjoni en Géorgie, le Major Général Proskrebychev, secrétaire personnel de Staline, le Lieutenant Général Vlassik, responsable de la protection personnelle de Staline et une foule d'autres personnages au service du Petit Père des Peuples, illustration à l'échelle de ce microcosme des rouages et des absurdités de la dictature soviétique.
Mais nous avons failli oublier l'artiste, l'invité de Staline - sur recommandation de sa maîtresse - Valery Yakovlevitch Danilov venu exposer son projet d'oeuvre magistrale à "la grandeur éternelle de Staline" destinée à faire face au mausolée de
Lénine sur la place rouge. À vrai dire, malgré la promesse initiale, il joue un rôle très limité.
La guerre fait rage en Corée. Les américains attaquent les camarades chinois. L'administration soviétique est à l'oeuvre, sans sentiments, sans conscience, implacable, poursuivant le mythe de l'idéal révolutionnaire, exécutant voire - pire - anticipant et imaginant les souhaits du Généralissime, pardon, du camarade Staline.
Mais voilà. le temps semble comme suspendu, seuls quelques télégrammes sélectionnés, des drapeaux bougeant sur une carte pour matérialiser les mouvements de troupes, ou le dossier que les services secrets lui présentent sur son invité, l'artiste, lui rappellent qu'il est le chef d'Etat, dictateur, de la deuxième puissance mondiale.
Staline sent la fin arriver. Staline jardine. Staline mange. Staline regarde des films (américains). Staline est sujet à des rêves, voire des cauchemars hantés par le fantôme de
Vladimir Ilitch Lenine. Il cherche à les confronter - avec l'aide de sa maîtresse - aux théories freudiennes.
À-t-il des doutes ? Voire des regrets ? A-t-il peur ? A raison ou par paranoïa ? Prend-il conscience que si
l'Etat et l'administration soviétique fonctionne comme elle le fait, c'est parce qu'une organisation à tendance par mimétisme et conformisme à se comporter comme son (ses) dirigeant(s) ?
Staline estime avoir une dette. Ou plutôt une responsabilité. Avant de réaliser un monument à sa gloire faisant face au mausolée de
Lénine, Danilov doit connaître le passé de sa famille, pour assumer l'oeuvre et son futur.
Mais Staline a-t-il vraiment envie de cette oeuvre ?
Sur la forme, je partage pleinement les avis précédents. Des phrases entrecoupées de description nécessitant de reprendre trop régulièrement le fil d'une lecture interrompue. Trop de personnages avec des noms différents (état-civil, surnom, diminutif...), sans logique apparente, rendant parfois la lecture laborieuse. C'est dommage, car l'on conserve cette impression mitigée jusqu'à la fin et même une fois le livre refermé.
Lu dans le cadre de Masse Critique : Merci à Babelio et aux éditions du Seuil