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Reugny, bourgade des Ardennes belges a peu changé en cette fin du vingtième siècle, l'Hotel du Grand Cerf est toujours tenu par les femmes Londroit, Léontine la grand-mère, Thérése la mère mais Anne Sophie la fille rêve de partir  et l'orphelinat voisin a été remplacé par un Centre de Motivation dirigé par Richard Lépine, héritier d'une famille assassinée au moment de l'épuration ...

C'est dans une des chambres de l'hôtel que l'actrice Rosa  Gulinghen a été retrouvée noyée dans sa baignoire , l'enquête avait conclu à l'époque à un accident mais tous les protagonistes étaient persuadés qu'il s'agissait d'un meurtre . Restent , cinquante ans plus tard un petit musée dans l'hôtel et une chambre fermée sur ses secrets.

Nicolas Thèque, journaliste vivant de petits reportages , est envoyé par un de ses patrons préparer un documentaire sur Rosa , le tournage du film interrompu par la mort de l'actrice principale et sur les quelques survivants de Reugny qui avaient été spectateurs du drame .

Or, au moment où Nicolas arrive dans le village, un vieux douanier , haï de tous car collectionneur de ragots écrits sur des ronds de verre de bière est retrouvé assassiné ainsi que un jeune garçon baptisé l'Idiot du village et Anne Sophie a disparu , seule est repêchée près de la scène du crime, sa mobylette .

L'inspecteur Vertigo Kubertus , un homme obsédé par la nourriture et la bière  et à quelques jours de sa retraite est dépêché  pour enquêter sur place .

Galerie de personnages au mieux atypiques mais le plus souvent désagréables et antipathiques et la conscience pas vraiment tranquille : l'arrivée des deux hommes, l'inspecteur et le journaliste n'est pas vu d'un bon oeil , d'autant plus que les méthodes du policier sont pour le moins inhabituelles , une interprétation très personnelle de son boulot de flic et de la justice .

Ecriture dichotomique, avec des dialogues à la Audiart , des références à Maigret et quelques moments de poésie, cela donne un roman plutôt amusant à mon goût !
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Le petit village de Reugny a connu son heure de gloire lorsque la star Rosa Gulingen est venu tourner son film. Plus encore, lorsqu'elle est retrouvée morte dans sa chambre d'hôtel. 50 ans plus tard, un journaliste revient sur les lieux pour réaliser un documentaire et peut être lever les doutes sur cette mort peut être pas si accidentelle que ça.

Le tableau ne serait pas complet sans le douanier, haï de tous, qui passe l'arme à gauche dans des circonstances troubles. C'est l'inspecteur Kulbertus qui est envoyé pour élucider tous ces mystères.

L'auteur a su parfaitement planté le décor de son roman : un petit village perdu dans la campagne, théâtre idéal pour commettre les plus terribles forfaits, des habitants qui se connaissant depuis toujours pour le pire et le meilleur.

Ajoutez au tableau un policier à 14 jours de la retraite, obèse donc limitant ses déplacements au maximum, brut de décoffrage. sous ses airs nonchalants, il enregistre les moindres détails et assemble une à une les pièces du puzzle jusqu'à trouver la solution. A la manière d'un Hercule Poirot, il cuisine tour à tour les coupables potentiels avec un certain délice (pour un gourmet et un gourmand comme lui c'est un comble !).

Ce roman ne révolutionne pas le genre mais surtout pour sa galerie de personnages qui vaut le coup d'être lu.
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[lu pour l'opération Masse Critique]

Reugny est un petit village de l'Ardenne belge, où coule la Sémois, proche de la frontière française.
Le douanier du coin vient d'être assassiné, ainsi que l'idiot du village. La fille de l'hôtelière disparait.
On est en 1999, on compte en francs. Les faits divers de Reugny passent au second plan de l'actualité et des préoccupations de la police belge monopolisée par des attentats meurtriers à la bombe dans Bruxelles et Liège (à l'époque ce sont des braqueurs de banque qui font ainsi diversion).
Le dernier drame à Reugny remontait quarante ans en arrière quand une actrice, célébrité de l'après-guerre venue en tournage à l'Hôtel du Grand Cerf, avait été retrouvée morte dans son bain en plein après-midi.

Je venais juste d'enchaîner les derniers Vargas et Thilliez histoire de "me faire" au polar à la mode.
Pas que je déteste ou méprise, non, mais ceux-là me lassent, et me surprennent de moins en moins.
Alors qu'avec Franz Bartelt, on retrouve les fondamentaux du genre à l'ancienne (Simenon, Boileau-Narcejac, ...), mais bousculés et poussés loin dans les coins jusqu'à l'absurde, le surréalisme et l'humour noir.

Son inspecteur Vertigo Kulbertus, flic à quelques jours de la retraite, obèse et bouffon, est inoubliable.
C'est un Falstaff gonflé de bière, de cervelas et de frites, affuté et retors. Son agilité d'esprit et de répartie, sa finesse d'observation, compensent son impotence fonctionnelle. Ses interrogatoires sont des chefs-d'oeuvre de mauvais goût, sa méthode est de ne pas en avoir. Pourtant ses déductions surprenantes sont imparables, évidemment. La démesure du personnage pourrait porter ombrage aux autres caractères, s'ils n'étaient eux aussi, brillamment croqués à vif.

D'ailleurs est-ce le personnage ou l'auteur qui s'exprime dans ce polar plus déjanté que classique, quand il dit qu'il veut :
" que personne n'y comprenne plus rien, qu'on ne sache plus qui cherche qui, qui a tué, qui n'a pas tué.
A bon lecteur, salut !

et merci Babelio et le Seuil pour cette excellente lecture :)
Lien : http://tillybayardrichard.ty..
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à la frontière des Ardennes belges, l'hôtel du Grand Cerf de Reugny est réputé pour avoir hébergé la star Rosa Gulingen qui crevait jadis l'écran géant et à l'hôtel ses dernières bulles... dans l'eau du bain moussant.
Plusieurs décennies plus tard, le jeune romantique et nostalgique Nicolas Tèque se rend sur place en vue d'un documentaire sur la mort mystérieuse de l'idole
et se retrouve plongé dans un village en pleine effervescence, secoué par des meurtres et disparitions inquiétantes.
A quelques jours de la retraite, le ventripotent inspecteur Vertigo est désigné d'office pour se décarcasser sur ce chaos des familles... ce qui ne lui coupe pas l'appétit !
L'auteur du Jardin de bossu se lance avec son habituel humour noir, son imagination débridée et sa plume acidulée dans une enquête à priori très classique qu'il baigne de mauvaises herbes de sa région et d'un brin de folie champêtre.
Il jongle avec dextérité avec deux enquêtes et enquêteurs décalés - un inspecteur gargantuesque rouleau compresseur en fin de course à la répartie hardie et outrancière et un petit journaliste du dimanche - qui vont plonger dans la vie, les souvenirs, les jalousies et secrets bien gardés d'Ardennais franco- belges très cintrés et ultra... motivés.
les réflexions décalées et les méthodes peu orthodoxes...de Vertigo en font un enquêteur hors norme qu'il est difficile d'oublier.
l'Hôtel du Grand Cerf, un genre rural très très baroque qui ne manque pas d' excès ni d'éclats.
Je remercie Babelio, Masse critique et les éditions du Seuil pour le nouveau grand roman noir du très bon Franz Bartelt.
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Comment ne pas flancher devant cette galerie de portraits qui défilent dans ce récit alors que l'on tente tant bien que mal de calmer nos spasmes abdominaux. Ces contractions musculaires nous sont offertes par monsieur Bartelt en personne. Ce pourrait être une gentille pantalonnade mais la malice de l'auteur - sa faculté à détourner les événements, à mettre ses personnages dans des situations inextricables, à composer avec ceux-ci dans ce tourbillon saugrenu où ce qui ressemble à une imposture n'est autre qu'un douloureux revers du passé - est aussi experte que déraisonnable, aussi savoureuse que judicieuse car portée par un style remarquable.

C'est dans cet hôtel qu'une vedette de cinéma fut retrouvée raide dead dans son bain. Plusieurs dizaines d'années plus tard un enquêteur y est envoyé par un admirateur qui suspecte un éventuel crime et souhaite tourner un documentaire. Dans ce petit patelin des Ardennes belges un habitant perd la tête - l'occupation privée du douanier est très inhabituelle voir plus que douteuse et on le retrouve décapité. de ce fait l'on va découvrir le phénomène. Voici venir l'inspecteur Vertigo Kulbertus. Un phénomène de foire ? Il additionne tous les superlatifs à lui tout seul. C'est un ogre plutôt grossier qui se satisfait de peu, quatre repas par jour avec des lampées de bière et du cervelas. de plus, il applique une recette bien particulière pour ses interrogatoires - la scène qui se déroule dans sa chambre est tout bonnement irrésistible, on ne peut s'éviter de penser au personnage de Ma Loute de Bruno Dumont. de prime abord, Gros dégueulasse conviendrait parfaitement pour le définir. Mais Vertigo est beaucoup plus subtil qu'il ne laisse paraître. La jeune fille de la patronne de l'hôtel disparaît. L'enquête va s'avérer pointue pour ce flic qui prend sa retraite dans quelques semaines. [...]
La suite sur : http://bobpolarexpress.over-blog.com/2017/06/hotel-du-grand-cerf-franz-bartelt.html
Lien : http://bobpolarexpress.over-..
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Si vous êtes perdu dans les Ardennes , que vous roulez aux abords de la frontière franco-belge, alors le hasard vous amènera peut-être jusqu'à la petite commune de Reugny, où l'espérance de vie n'est guère élevée ces derniers temps. 

Le hasard, c'est un peu ce qui m'a amené à lire cet étrange roman policier. Entre autres choix, c'est celui-ci qui m'a été attribué lors de la dernière masse critique. Après Au scalpel de Sam Millar, j'avais bien envie de poursuivre ma découverte de la collection Cadre noir aux éditions du seuil. Que je remercie bien sûr, ainsi que Babelio, pour cet envoi.

Je ne connaissais pas du tout Franz Bartelt, même pas de nom, et pourtant il n'est pas le premier venu. Auteur de presque quarante romans ou recueils, lauréat du grand prix de l'humour noir en 2000 avec Les bottes rouges et Goncourt de la nouvelle en 2006 pour le bar des habitudes, il est un auteur discret écrivant aussi bien des polars que de la littérature dîte générale.

En outre, la couverture avait également attiré mon regard. En guise de trophée accroché au mur, nulle tête de cerf ou de sanglier mais ... un vieux téléphone à cadran sur une ancienne tapisserie, comme vu au travers d'un trou de serrure.
Ce côté absurde et décalé, qui semble être la marque de fabrique de l'auteur, on le retrouvera tout au long des pages. 

Reugny, à la frontière belge, était un petit village paisible jusqu'à ce que des crimes y soient commis. Et pire encore : deux intervenants extérieurs vont venir se mêler à une populace qui n'a aucune envie de les intégrer ou même de leur parler. Ces deux hommes viendront en effet tous deux essayer d'élucider leur propre mystère et secoueront la fourmilière.
"Cette petite communauté fonctionnait à la manière d'une secte."
"Ce sont des affaires qui ne regardent pas la police."

La première énigme est vieille de presque cinquante ans. Il s'agit de la mort de Rosa Gulingen, actrice allemande de films désormais démodés qui a été retrouvé noyée dans sa baignoire. Une heure auparavant, elle jouait encore une scène de son prochain long métrage : "Le village oublié." Accident ? Suicide ? Meurtre ? C'est ce que cherchera à établir le journaliste Nicolas Tèque en interrogeant notamment les personnes qui étaient déjà là au moment de la tragédie.
"On l'a noyée dans sa baignoire, le 06 juin 1960 à six heures du soir, à l'hôtel du grand cerf, à Reugny."

Au même moment, de nos jours, un premier meurtre est commis, aussitôt suivi d'un second. Par ailleurs, une jeune fille, peut-être témoin des évènements, disparaît. Mais ce ne sont pas ces crimes qui vont ébranler la population. Même le bûcheron Paul Meyer ne semble guère s'émouvoir du décès tragique de son simplet de fils. Tous s'accomodent très bien en tout cas de la décapitation du douanier Rousselet. Celui-ci connaissait tous les petits secrets de tout le monde et prenait son rôle frontalier très au sérieux. 
Chacun aurait pu avoir un mobile.
"Les gens de Reugny ont toujours su tenir leur langue. Il se détestent, mais n'iraient jamais dénoncer leur pire ennemi à la police."
Mais l'enquêteur envoyé sur place, Vertigo Kulbertus, va secouer le cocotier avec une élégance pachydermique pour retrouver l'assassin. Ce qui ne sera pas une sinécure dans une commune où chacun aime à régler ses propres comptes.
Est-il possible que les deux affaires soient liées ?

Le roman de Franz Bartelt se présente comme un compte à rebours. Chaque partie correspond à un jour de la semaine, et chacun de ces jours qui s'écoule est un pas de plus vers la retraite pour l'inspecteur Kulbertus. Retraite salvatrice dont l'approche revient de façon récurrente dans les propos de l'enquêteur.
"A onze jours de la retraite, on m'impose de courir derrière d'abominables assassins."

Au niveau des lieux, certains passages nous emmènent à Bouillon, Verviers, Paris, Dinant et même en Pologne. Malgré tout, la grande majorité du roman se déroule en vase clos à Reugny, et plus particulièrement à l'hôtel qui a donné son titre au roman ou au centre de motivation dirigé par le riche Richard Lépine. Qu'est-ce qu'un centre de motivation ? Malgré ma lecture attentive j'avoue ne pas l'avoir bien compris, ce qui a gêné ma progression. On y effectue des stages, on y mêle discipline militaire et développement personnel au travers d'exercices spirituels ou métaphysiques. C'est tout ce que j'en ai retenu.

Le début du roman m'a un peu perdu. Chaque paragraphe nous réserve un point de vue différent et l'auteur y présente tour à tour chaque protagoniste. Le lecteur fait donc connaissance avec le journaliste, l'enquêteur, les victimes et les principaux habitants du village. Parmi lesquels trois générations de femmes qui ont tenu l'hôtel du grand cerf, Sylvie Monsoir, chauffeur de taxi et son époux le jaloux Freddy. Mais très vite, cette confusion intitiale dans la présentation d'une dizaine de principaux personnages ( et presque autant de suspects ) va se clarifier et passer de l'un à l'autre se fera naturellement, chacun ayant ses spécificités.

Mais l'un d'eux écrase tous les autres. Ce qui pourrait paraître un mauvais jeu de mots étant donné le poids de l'inspecteur Vertigo. 
"Il s'était fait de l'obésité une spécialité, comme d'autres s'en font une du marathon ou de l'alpinisme."
"On commence toujours par grossir du ventre. Mais je grossis aussi des genoux et des oreilles."
Au-delà de sa carrure et de son appétit gargantuesque ( ses menus, immuables, se composent dès le petit matin d'une importante quantité de frites et de cervelas ) ou de sa soif de bière sans mousse, le bonhomme est aussi le policier le plus farfelu qu'il m'ait été donné de rencontrer depuis longtemps.
"Ma méthode, avait expliqué le policier, c'est de ne pas avoir de méthode."
Paraîssant maladroit, Kulbertus soupçonne et accuse tout le monde presque ouvertement à chacun de ses interrogatoires, se mettant ainsi toute une population déjà hostile à dos. 
Et que penser de ses pratiques plus que douteuses ? Il organisera par exemple un vote pour déterminer le coupable. Il obligera en effet chaque habitant à désigner leur principal suspect en inscrivant son nom sur un bulletin anonyme. Quel sera le résultat de ce sondage inaccoutumé ?
Ce personnage nous régale et nous fascine avec le maniement du vocabulaire ( "Il y avait longtemps qu'il ne s'était pas senti aussi suprêmement en verve. Lancé comme il l'était , il avait la ressource verbale pour tenir jusqu'au soir." ), avec son auto-dérision, avec ses provocations et sa faculté innée d'énerver profondément autrui.
Son originalité, son côté clownesque non dépourvu de poésie, sa façon calculée d'irriter et de répugner les villageois, fait qu'on a envie de le retrouver tant pour connaître sa prochaine bévue que sa prochaine déduction ou son prochain propos scandaleux. le problème étant que ce personnage a tellement d'envergure, qu'il est tellement réussi dans la démesure qu'il fait de l'ombre aux autres.

Un blogueur du site "San Antonio, demandez les nouvelles !" a fait un parallèle très intéressant pour parler de ce roman, en écrivant qu'on avait l'impression de voir l'extravagant Bérurier débarquer dans un roman de Simenon, caractérisé par ces petits villages où règnent les non-dits et un climat pesant de haine et de suspicion entre les habitants.
Un choc des cultures particulièrement audacieux au résultat dépaysant, c'est le pari réussi effectué ici par Franz Bartelt.

Quant à l'éditeur, il dit vrai en évoquant la plume de Bartelt, "entre burlesque et mélancolie". On est à la croisée des chemins entre un humour qui pourrait paraître lourd mais qui est manié avec élégance et qui contribue à donner à ce roman policier moderne un charme désuet.

Même si j'émets quelques réserves, il s'agit vraiment une oeuvre pleine de contrastes, à la croisée des genres et des styles que l'auteur manie à la perfection. 

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Une semaine du dernier été du XXe siècle
Bienvenue à Reugny, bourgade lovée dans une boucle de la Semois côté belge non loin de Charleville rebaptisée Larcheville par l'auteur, présente dans la plupart de ses livres.
Reugny et son hôtel du Grand Cerf tenu de mère en fille par Léontine, Thérèse et Anne Sophie Londroit..., son centre de Motivation pour cadres dont la sélection draconienne du directeur Richard Lépine et son adjointe Elizabeth Grandjean entraine des éliminations immédiates qui font le bonheur de Sophie Monsoir chauffeur de taxi qui se charge de les raccompagner à la gare......
Mais "À Reugny comme partout ailleurs, le crime était la face cachée de l'innocence". Celui qui connaissait en détail tous les dessous sales était Jeff Rousselet le douanier qui avait consigné sur des cartons à bière toute l'intimité sordide de ce village à l'air faussement endormi.

Deux enquêteurs se croisent Nicolas Tèque et Vertigo Kulbertus :
Nicolas Tèque journaliste recherche, en vue d'un film documentaire, des éléments du passé qui pourrait prouver qu'une actrice morte au Grand Cerf il y a quarante ans a peut-être été assassinée.
Vertigo Kulbertus inspecteur venu de Liège proche de la retraite, obèse qui fait tout pour le demeurer, enquête lui sur les morts récents.

A la fin passé et présent se rejoignent et s'il apparaît de vrais coupables, il y a aussi de faux innocents.

Un excellent Bartelt à l'égal du "Grand Bercail" paru il y a maintenant 15 ans, où se croisent humour noir, poésie et tendresse, des personnages grotesques et touchants, inoubliables.
Un roman parsemé de moments poétiques et mélancoliques, plein d'humanité. Autant de traits lumineux qui viennent nuancer la noirceur de l'âme humaine :
"Le taxi progressait entre deux rangées de digitales et d'épilobes, dont les mauves accordés éclataient sur le fond noir des sapinières."
" Kulbertus se laissa distraire par le chant d'un merle...
Le chant du merle avait varié sept fois et Kulbertus s'émerveillait qu'un oiseau aussi rudimentaire pût, en si peu de temps et sans presque reprendre son souffle donner plusieurs versions de la vérité."

Bartelt déstabilise le lecteur en faisant ressortir les petites lâchetés, les craintes qui peuvent mener au crime même sans l'avoir voulu, beaucoup de travers qui sont aussi les nôtres. Son regard décalé les fait accepter en déclenchant le rire. Et avec une écriture, un style qui n'appartiennent qu'à lui comme ses remarques sous forme d'aphorismes cocasses : "Tous les assassins ont des alibis. Un assassin sans alibi, c'est un pompier sans échelle."

Sans oublier la conclusion de l'histoire par la voix de Vertigo Kulbertus : " Il n'y a que dans les romans qu'on connaît le fin mot de l'histoire, Nicolas. Dans la vie, on n'arrive jamais à tout savoir. Ce n'est d'ailleurs pas très utile. Mais, à propos de toutes ces histoires, s'il fallait savoir une chose, Nicolas, une seule, ce serait que nous ne sommes pas dans un roman."
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Voilà cinquante ans que Rosa Gulingen, héroïne de films à l'eau de rose, a rendu son dernier soupir dans une baignoire de l'hôtel du Grand Cerf, de Reugny, petit village belge des Ardennes. C'est l'occasion pour un producteur parisien de se lancer dans la réalisation d'un documentaire sur les circonstances de cette mort. C'est Nicolas Tèque, enquêteur, régisseur, accessoiriste… bref, tout et n'importe quoi, qui est chargé d'aller effectuer des repérages et, pourquoi pas, confirmer que Gulingen est morte, non pas d'un accident domestique, mais assassinée.
Sauf qu'à Reugny, au même moment, un tueur est justement à l'oeuvre, qui vient de décapiter à la chevrotine le douanier à la retraite – et unanimement haï– du patelin, et que Vertigo Kulbertus, éléphantesque inspecteur à quinze jours de la retraite et aux méthodes singulières débarque lui aussi.
On ne va pas s'en cacher, c'est toujours un immense plaisir que de retrouver Franz Bartelt et l'on ne peut que se réjouir qu'il ait trouvé sa place dans la nouvelle collection du Seuil, Cadre Noir. D'autant plus qu'Hôtel du Grand Cerf et sa galerie de personnages étonnants associe avec bonheur humour et portrait au vitriol d'une petite communauté faussement tranquille aux vieilles haines recuites dans un emballage de whodunit dynamité par un Vertigo Kulbertus dont la manière d'enquêter repose plus sur un approvisionnement régulier en bières, frites et cervelas ainsi que dans la déstabilisation des témoins et suspects que dans la recherche de preuves :
« - […] je vais vous poser une question difficile. Je peux ?
-Oui.
-Quels rapports entreteniez-vous avec Jeff Rousselet ?
Meyer eut un instant d'hésitation. Kulbertus fit celui qui en sait plus long qu'il ne veut bien le dire et qui n'en attend que la confirmation.
"Bé, à vrai dire, on n'avait pas de rapports…
-Vous ne l'aimiez pas.
-Non.
-Vous ne l'aimiez vraiment pas.
-C'est-à-dire que… on vous l'a peut-être dit au village…
-On dit bien des choses au village.
-Il a tiré mon père comme un lapin. C'est de la vieille histoire, mais on n'oublie pas. Question de respect pour les morts.
-Comme un lapin, vous dites, Meyer ?
-Oui. Comme un lapin.
-J'aime bien le lapin."
L'inspecteur défroissa une feuille de papier, l'étala devant lui et écrivit, en grosses capitales : LAPIN. »
C'est ainsi, avec humour et sensibilité ainsi qu'avec une écriture toujours imaginative que Bartelt déroule une enquête qui met au jour la triste banalité du crime et la manière dont finissent par se confire les détestations dans une petite communauté refermée sur elle-même. Pour autant, là où le cynisme pourrait permettre de dresser une interminable galerie de portraits de salauds, Bartelt laisse toujours un peu de place à l'empathie sans jamais verser dans la moralisation facile : « Il aimait encore assez bien boire, de temps en temps. Même trop, s'il le fallait. Il y a des moments où l'excès met un peu de grandeur dans les petitesses de l'existence ». Et si, d'ailleurs, les plus pourris finiront par être punis, ce sera d'une façon tout ce qu'il peut y avoir d'immorale, Vertigo Kulbertus n'étant pas forcément du genre à laisser la justice faire tout le travail.
C'est dire si Hôtel du Grand-Cerf se lit avec un double plaisir : celui de la langue de Bartelt et de ses aphorismes, et celui du récit délicieusement subversif.

Lien : http://www.encoredunoir.com/..
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Quand Nicolas Tèque se voit confier une mission, il ne sait pas qu'il va mettre les pieds dans une espèce de nid de vipères particulièrement voraces… Et c'est peu dire ! Chargé en effet, en tant que journaliste, d'aller enquêter sur la mort a priori accidentelle d'une jeune actrice, Rosa Gulingen, décédée dans sa baignoire un demi-siècle plus tôt, il n'est pas bien convaincu de l'intérêt de sa mission, mais comme il est vaguement désoeuvré et désargenté, il obtempère.
Les renseignements qu'il glanera sur place permettront à un producteur de réaliser un documentaire sur cette actrice et son ami de l'époque, un certain Armand Grétry.
Et voilà notre Nicolas parti pour Reugny, petit village au coeur des Ardennes : une chambre lui est réservée à l'Hôtel du Grand Cerf, tenu par une certaine Thérèse Londroit qui voue un culte absolu à cette Rosa Gulingen qui a eu la bonne idée de se noyer dans la baignoire d'une des chambres de l'hôtel où elle logeait avec toute l'équipe du tournage, ce qui a apporté une certaine renommée à l'établissement.
Mais lorsque Nicolas débarque de Paris, il découvre un village sens dessus dessous : deux meurtres viennent d'avoir lieu et une disparition. du jamais vu dans ce pays où tout le monde connaît tout le monde depuis la nuit des temps et où « on règle ses comptes avec trois siècles de retard, mais on les règle. » Douce humanité…
C'est donc logiquement qu'arrive à l'auberge du village un certain Vertigo Kulbertus… Inspecteur…
Alors, comment vous dire ? Vertigo Kulbertus… (Ah, ce nom !)
Rien que pour ce personnage, le livre vaut le détour… et plus que ça même… A quatorze jours de la retraite, le dit inspecteur qui a horreur des déplacements, sa masse corporelle dépassant l'impensable, arrive à l'auberge en râlant, en demandant un lit très large soutenu par des parpaings et des briques. Trois oreillers : monsieur ne peut dormir allongé. Pour les repas, c'est simple, il mange tous les jours la même chose: frites et boulettes le matin, frites et cervelas le midi, frites et fricadelles à quatre heures, frites et brochettes de steak haché le soir : « Toujours dans le même ordre et toujours avec des frites. » On avait compris ! Et la bière, sans mousse, s'il vous plait. Un gars qui dit ce qu'il a à dire et plus, si besoin est, direct quand il le faut, logique à sa manière : « tous les assassins ont des alibis. Un assassin sans alibi, c'est un pompier sans échelle », sans gêne, plus qu'un brin vulgaire, très cabotin, s'arrangeant avec la justice et la morale si nécessaire, un gars dont le naïf du coin se dit en le voyant : l'assassin peut dormir sur ses deux oreilles, il ne risque pas d'être arrêté par cet excentrique un peu barge…
Mais, méfions-nous de l'eau qui dort… Thérèse Londroit n'est pas dupe : elle a bien senti qu'il fallait se méfier de l'inspecteur qui « cachait son jeu sous des manières loufoques. A travers le grotesque, elle percevait quelque chose de subtil, une logique tortueuse, un genre d'inspiration… » Il sait ce qu'il fait, l'animal et son plan est clair et bien pensé : « J'installe la folie dans le pays. En trois jours, j'ai réussi à semer la pagaille dans les esprits. Ils me prennent pour un dingue. Mais quelque chose en eux les somme de se méfier de moi… Alors je fiche un coup de pied dans la fourmilière, je piétine le bon sens, la logique, la politesse. J'abuse des pouvoirs qui me sont conférés. A la fin, il sortira bien une vérité de ce sac de noeuds. » Une figure de flic qu'on n'est pas près d'oublier…
Un vrai plaisir de lecture : c'est drôle, incisif et le tout parfaitement ficelé…
Un seul bémol : dites-moi, Monsieur Franz Bartelt, votre Vertigo Kulbertus, il ne pourrait pas faire un peu de rab parce que quand on s'attache… Allez, remettez-le au boulot, on l'aime tellement !

Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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