Le me suis plongé dans la lecture de ce livre avec plaisir. J'ai beaucoup aimé l'aura du derviche, qui m'a fait penser au Candide de
Voltaire : son regard posé sur le monde, son absence de jugement et l'étonnement quand il découvre que d'autres imposent le leur.
Selon moi l'intérêt du livre réside dans l'historicisation de l'homosexualité (terme bien sûr anachronique). En se demandant si c'est normal pour un homme d'aimer un autre homme, Buckingham réfléchit sur le genre de l'amour et les amours homosexuelles à travers le temps, en partant de la Grèce antique. Or savoir d'où l'on vient me paraît extrêmement important. Tout d'abord pour prendre conscience que les acquis ne sont pas éternels : du jour au lendemain, l'homophobie peut prendre le dessus sur l'acceptation, quand le dominant impose sa façon de penser aux vaincus. Sujet hautement d'actualité quand on regarde ce qu'il se passe aux portes de l'Europe ou même chez nous, avec les LGBTphobies qui frappent par vagues contre les digues de l'acceptation : agressions homophobes, débats stériles sur l'entrée du pronom iel dans le Robert en ligne, etc.
Connaître l'histoire de l'homosexualité permet aussi de se rassurer, de comprendre que l'homophobie est une construction sociale. Attention néanmoins à ne pas commettre de raccourcis : certes, des hommes pouvaient coucher avec d'autres hommes dans la Grèce antique, par exemple, mais il ne s'agissait pas de couple gay à proprement parler. La culture gay est une culture. Qu'on l'embrasse ou la rejette, elle existe. le terme “homosexuel” n'apparaît qu'à la fin du XIXe siècle, après Buckingham qui meurt en 1855. Néanmoins, le savoir qu'apporte Laurent Baudoin à travers Buckingham se présente comme une arme dont on peut s'équiper face aux attaques du type : “ce n'est pas naturel”, “c'est une passade”, etc. Comme on peut le lire dans
le Derviche amoureux, l'homosexualité n'est pas une mode récente apparue ex nihilo.
L'autre intérêt du livre réside dans les magnifiques illustrations de Rachid Boukharta. Ses planches coloriées, aux traits minimalistes et fins, viennent éclairer le livre.
Enfin, au-delà d'une simple compilation des textes de Buckingham, le livre se clôt sur une analyse de Laurent Baudoin sur le texte que nous venons de lire. C'est brillant, léger et intéressant.
Lien :
https://lgbtheque.fr/livre/b..