Sous le soleil de Satan/
Georges Bernanos
Ce roman publié en 1926 connut d'entrée un franc succès. Il est divisé en plusieurs parties.
Le prologue concerne l'histoire de Germaine Malorthy dite Mouchette, jeune fille de seize ans qui annonce à ses parents qu'elle est enceinte tout en refusant de dire de qui. le marquis de Cadignan est soupçonné de par sa réputation de séducteur des oies blanches. Mais Mouchette a deux amants, le second étant le député, le Dr Gallet, « son autre secret, son autre silencieux défit ».
Dans un style poétique magnifique de puissance et de lyrisme,
Bernanos, grand écrivain catholique dont le thème favori est le combat du bien et du mal, évoque avec talent la ruse et le mensonge qui sont les armes de Mouchette, « cette petite âme obscure et petite fille au corps frêle », à quoi s'ajoutent le vice et une certaine folie.
« Voici l'horizon qui se défait, un grand nuage d'ivoire au couchant et, du zénith au sol, le ciel crépusculaire, la solitude immense, déjà glacée, plein d'un silence liquide…Voici l'heure du poète qui distillait la vie dans son coeur, pour en extraire l'essence secrète, embaumée, empoisonnée…. À seize ans, Germaine savait aimer (non point rêver d'amour, qui n'est qu'un jeu de société). Germaine savait aimer, c'est à dire qu'elle nourrissait en elle, comme un beau fruit mûrissant, la curiosité du plaisir et du risque, la confiance intrépide de celles qui jouent toute leur chance en un coup, affrontent un monde inconnu, recommencent à chaque génération l'histoire du vieil univers. »
Mouchette, fille nerveuse d'hérédité alcoolique, pubère à treize ans, va sombrer peu à peu dans une quasi démence.
Au prologue fait suite la première partie au cours de laquelle le chemin de Mouchette va croiser celui de l'abbé Donissan en quête de sainteté. L'ascension mystique dans l'ascèse de l'abbé dont l'âme tourmentée se trouve aux prises avec Satan sous la forme d'un maquignon rencontré au détour d'un chemin de l'Artois, va se poursuivre au fil des pages. On assiste au désespoir de l'abbé qui en vient à douter de sa foi.
On prête à l'abbé des pouvoirs particuliers : dans la seconde partie du roman, il devient le saint de Lumbres qui voit l'oeuvre de Satan se manifester de façon ubiquitaire, contre qui il n'aura de cesse de lutter.
Dans ce roman, il faut bien le dire, d'une lecture assez ardue, l'analyse de la vie intérieure des personnages est remarquablement menée. Cette lecture demande naturellement un effort de concentration pour saisir toutes les subtilités de la description de la psychologie des protagonistes.
En bref, un ouvrage pour lecteurs avertis.