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Critiques filtrées sur 3 étoiles  
J'avoue être totalement passé à côté de l'oeuvre de Beckett. J'ai le vague souvenir d'avoir vu il y a longtemps (probablement sur le petit écran) l'une de ses pièces, "Oh les beaux jours" , qui narre les élucubrations d'une dame d'un certain âge enterrée dans le sable jusqu'au cou et affublée d'une ombrelle, pièce qui m'avait semblé assez tartouille, pour tout dire. Eh bien, en dépit de mes préventions, le livre de Maylis Besserie m'a paru plutôt original. Un auteur qui se met dans la peau d'un de ses aînés, ce n'est pas fondamentalement nouveau. Or, la peinture de cette homme en fin de vie sonne juste, elle a d'ailleurs fait écho, au moment de ma lecture, aux événements survenus en temps de confinement dans nos maisons de retraite (ou Ehpad, en langage chic). Plusieurs passages sur la vie de l'écrivain irlandais nécessitent une consultation de Wikipedia pour le non initié, ils ne m'ont pas semblé nuire pour autant à la lecture de l'ouvrage. Et puis surtout, on découvre le style très singulier de Maylis Besserie, à la fois dense et coloré, qui invite à suivre de près cet auteur (ou de cette auteure, si ces dames y tiennent...) à qui les jurés Goncourt ont attribué à juste titre leur prix du premier roman. Bref, une découverte.
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Le premier roman de Maylis Besserie dévoile un Samuel Beckett dans son dernier lieu de vie : le Tiers Temps

Un roman qui retrace le parcours de Beckett, sa vision de ce qui l'entoure, de la condition humaine. Entrer dans sa pensée, au plus près de cet homme au charme particulier et à la drôle de mélancolie. Là où il a résidé après la disparition de sa femme, dans le nouveau théâtre de son introspection, en témoin, à l'écoute. Un cadre de vie au quotidien banal, où se retrouvent confrontées les personnes âgées, fait de rapports avec le personnel soignant. Tout semble comme consigné. Maylis Besserie est productrice de documentaires radio sur France Culture.

« Je voulais une voix qui soit la sienne, comme un long monologue qui entend le monde mais qui lui arrive presque de l'extérieur, le cerveau qui se délite, c'est un mélange des temporalités. le monde de la maison de retraite c'est son monde qui s'est réduit. Et c'est un système de voix off » – Maylis Besserie.
Le 22 décembre 1989, Beckett meurt. Ses dons, il avait fait le choix de ne pas trop les disséminer inutilement durant sa vie. Non, pas de profusion, de trop, de plein. Effacer les frontières entre les genres et les arts. La notion d'oeuvre, il la transforme en un fragment. Il est isolement, résistance, errance, retrait du monde. Il a reçu le Prix Nobel de Littérature en 1969.
La maison de retraite à Paris dans laquelle atterrit Samuel Beckett s'appelle le Tiers Temps. Dans le récit, trois périodes vont correspondre à l'évolution de son état. Sous forme de journal intime, le temps s'égraine comme le pain qu'il cache dans ses poches pour le lancer ensuite aux oiseaux lorsqu'il sort. Évocation de son enfance, des souvenirs jouissifs dont ceux ayant attrait aux moments d'écriture. Il se souvient des mots de son ami James Joyce, des chansons de l'Irlande de sa jeunesse, parle de sa mère, de son engagement pendant la guerre en France, de sa maison à Ussy - ville découverte dans les années cinquante -…
« Je pense que je pourrais vivre ici maintenant toute l'année. Il me semble que je récupère quelque chose dans le silence et la solitude. » – extrait du livre La Seine et Marne des Écrivains.
« Lorsqu'il s'installe à Paris, il découvre le village d'Ussy-sur-Marne. Il va dès lors venir s'y ressourcer régulièrement, dans une petite maison qu'il fait construire, entourée d'un jardin qu'il aime entretenir. […] auteur du silence, il n'est pas difficile d'y voir là un lien avec le calme rencontré à Ussy. […] une vue globale des vastes étendues alentours, Beckett croit retrouver là une part de son Irlande natale. » – extrait d'article tiré du Pays Briard (31/10/2014)

« une cachette dans laquelle je me plaisais à écrire […] Dans mon trou[…] les mains libres pour noircir frénétiquement les pages […] Gratter, ça soulage […] A mes côtés, parmi les innombrables personnages, les innommables auxquels il fallait pourtant que je trouve un nom. Ça venait comme ça : Molloy, Estragon, Vladimir, Malone […] le trou était plein. »

A la même époque, en ce milieu de siècle, les romans Molloy et Malone meurt mettent sur papier sa recherche du silence et du peu suffisant. Peu de décorum, ni de fiction. Absence de contenu, d'idéologique, de psychologie. Des personnages abandonnés sans costumes, des êtres figés dans l'immobilité, vides, dominés sans passé et sans avenir. Leur déclin physique n'est que la réalité des choses. Puis vient la pièce En attendant Godot. Ensuite avec l'Innommable, il sous-tend que l'oeuvre pourrait aussi bien se stopper qu'avancer.

« Il faut en effet être particulièrement libre, c'est-à-dire à la fois proche et distant, pour oser – contre toutes les injonctions scolaires et universitaires – faire un usage non philosophique de la philosophie. En d'autres termes, tout se passe comme si Beckett allait peu à peu inventer un nouveau type de rapport avec les textes abstraits et conceptuels de la philosophie » – Pascale Casanova
Avec Endgame* - Fin de partie, rédigée en français -, il s'agit d'une maison située dans un monde désert, dévasté et post-apocalyptique. Pas d'observation des conventions théâtrales classiques. Rien ne se produit au cours de la pièce affiliée au théâtre de l'absurde (d'après-guerre) alors que Beckett ne cherche pas à appartenir à un quelconque courant littéraire. Juste des personnages usés par le monde, déshumanisés bloqués dans le temps, physiquement handicapés qui s'adressent parfois au public pour déclarer qu'ils s'ennuient à mourir.
« Toute production de Endgame qui ignore mes directions de scène est complètement inacceptable pour moi. Ma pièce nécessite une pièce vide et deux petites fenêtres. » – Samuel Beckett
La dernière partie du livre le Tiers Temps évoque l'hospitalisation en fin d'année de Beckett. Des extraits du texte de Film lui apparaissent pendant son état comateux. C'est un court-métrage muet qu'il a réalisé en 1965. On voit à l'image le parcours d'un homme - Buster Keaton - longeant un mur et montant dans une pièce. Il s'isole, se cache de tous, déchire des portraits-photos. Gilles Deleuze cite George Berkeley dans Les Principes de la connaissance humaine : "Esse est percipi aut percipere", « être c'est être perçu ou percevoir » en mentionnant ce film : l'homme se déroberait aux regards pour se trouver face à lui-même... Ou bien, une idée sur le sentiment d'être surveillé et de chercher à se protéger.
La nouvellement romancière, Maylis Besserie, puisque c'est d'un roman qu'il s'agit, nous précise en dernière page que cet ouvrage s'est voulu être un recueil de faits réels et imaginaires plaçant Beckett au centre de son propre examen face à l'arrivée en bout de course de la vie. Implacable, lucide, sans filtre.
« les taiseux dont je suis ont, en général, une propension incroyable à se trouver face à des individus dont l'art à ceci de particulier qu'il consiste à dire très peu avec un nombre incalculable de mots. […] la parole, une malédiction. Non, je ne dis rien qui vaille. A l'écrit peut-être. Voire »

184 pages
Date de parution : 6 février 2020
* en 1992, une production vidéo dans le cadre de la série Beckett Directs Beckett puis une autre réalisée par Conor McPherson en 2000 pour le projet Beckett on Film : https://www.youtube.com/watch?v=ok7Vc3jczNg
Le texte de la pièce : https://edisciplinas.usp.br/pluginfile.php/3346220/mod_resource/content/1/ENDGAME%20BY%20SAMUEL%20BECKETT.pdf
https://asu77260.blogspot.com/2015/03/samuel-beckett-ussy-sur-marne.html
Lien : https://www.youtube.com/watc..
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je n'arrive vraiment pas à finir ce livre. cette écriture par suites de pensées courtes souvent, de phrases de 3 mots sans verbe m'empêchent de rentrer dans le fil dune idée.
Je veux arriver au bout par principe d'abord et pour peut-être enfin changer d'avis mais il doit rester une vingtaine de pages et je n'arrive à en lire que 2 avant de lorgner mon livre suivant qui m'attend...
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