AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,44

sur 1276 notes
J'aurais adoré adorer ce livre, tant le pitch en était attrayant : quoi de plus réjouissant en effet que se faire tamponner les certitudes et mettre l'ethnocentrisme à l'envers. Je me souviens d'un documentaire sur l'état du monde qui m'avait frappée dans lequel un historien chinois affirmait que l'essor du monde occidental était une anomalie de l'Histoire. Quid donc si cette anomalie n'était pas advenue du tout?
Du renversant, il y en a à foison dans cette contre-fresque historique qui envoie les Vikings à Cuba et deux cent Incas à Lisbonne pour conquérir l'Europe. Je suis pourtant restée sur ma faim, car le récit porte justement plus sur les modalités de cette conquête que sur ses effets. Il y a bien un regard décalé porté sur l'exercice du pouvoir au 16ème siècle dans nos contrées et le poids d'une église aux moeurs bien étranges, mais cela s'arrête à peu près là pour ce que j'avais envie de lire.
Ce n'est pas la faute de l'auteur s'il n'a pas écrit le livre que j'avais envie de lire, encore heureux, mais voilà,lui et moi on ne s'est pas rencontré sur le même essentiel dans ces pages. Ce qui ne m'a pas empêché de savourer une plume vive et une (contre) culture impressionnante, qui m'aura au moins permis de réviser, la tête à l'envers, quelques notions d'histoire.
Commenter  J’apprécie          330
Je ne comptais pas rester sur un avis négatif concernant Laurent Binet (pour rappel La septième fonction du langage fut pour moi une grande déception). Alors, en lisant la quatrième de couv de Civilizations, je me suis dis "celui-là, il est pour moi !" Bien et mal m'en a pris... Bien, car je ne peux pas dire que je n'ai pas apprécié ce livre. L'idée est audacieuse et son développement original. Laurent Binet a su rendre le choc des civilisations : ces adorateurs du soleil déboulant à moitié ou totalement nus, en plein tremblement de terre de Lisbonne. Ces regards ébahis, choqués et ces signes de croix incessants à la vision de ces hommes et femmes dont les habitants ne savent s'ils sont envoyés de Dieu ou du Diable...
Tout cela pour s'apercevoir que les civilisations se suivent et se ressemblent, malheureusement, pour le pire et le meilleur...

Voilà pour l'idée et le contenu. Là où je suis plus mitigée, c'est sur le récit lui-même, je l'aurai souhaité plus vivant du début à la fin. Autant je suis rentrée d'emblée dans l'histoire, narrée comme un conte livré de longues années après :

"je dis et j'affirme que ce qui est contenu dans ce livre est très véridique. Ce ne sont pas là de vieux contes et des histoires de Mochicas et de Chimus qui remontent à sept cents récoltes : c'est hier, peut-on dire, que se passèrent les événements qu'on peut lire dans cette histoire, avec le comme et le quand et la véritable manière."

Autant la fin m'a laissée sur le bord du chemin. J'ai eu l'impression qu'il ne savait comment conclure ; je ne voyais pas bien où il voulait m'emmener...

Dommage ! Car certains passages sont jouissifs. Sous un air faussement naïf, on sent que Laurent Binet s'amuse...

"Ils étaient obsédés par l'endroit où ils iraient après leur mort, et du meilleur moyen d'être sauvés, c'est-à-dire d'aller au ciel rejoindre leur dieu cloué (qui pourtant devait revenir sur terre à une date indéterminée, si bien que Chalco Chimac pensait qu'ils risquaient de se croiser) et non sous la terre où l'on brûlait les morts indéfiniment, sauf dans un endroit transitoire d'où l'on pouvait sortir au bout d'un certain temps, mais sûrement pas en rachetant son séjour, de son vivant, avec des florins".

Alors peut-être retourner aux sources et enfin lire HHhH ? Pourquoi pas !
Lien : http://page39.eklablog.com/c..
Commenter  J’apprécie          334

J'avais choisi ce livre avant qu'il reçoive un prix. On dénigre généralement les prix littéraires, mais ils ne sont pas forcément de si mauvais choix. A vrai dire je ne les lis pas parce qu'il ont été distingués mais parce qu'il m'ont plu avant. L'année dernière j'avais lu Frère d'âme de David Diop et j'avais également beaucoup aimé, les années précédentes je ne sais pas, je n'étais pas du tout attentive à ces distributions.

Donc, Civilizations, une dystopie qui part de l'idée que si les peuples d'Amérique ont été vaincus, c'est parce qu'il n'avaient pas connaissance du travail du fer, des chevaux, et qu'ils ont subi un choc microbien. du coup il imagine que ces problèmes ont été réglés avant l'arrivée de Christophe Colomb.
Pour cela il rédige une saga scandinave qui montre comment ces hommes et ces femmes du Nord en navigant tout le long de la côte est ont mis fin à ces manques.
Suivent les chroniques d'Atahualpa, partie la plus longue mais aussi la plus intéressante. Nous y apprenons comment une guerre fratricide chez les Inca a poussé ce Fils du Soleil à traverser l'Atlantique pour débarquer en 1531 à Lisbonne, qui vient d'être ravagée par un séisme. C'est un des éléments redondants de ce livre que de jouer avec les dates comme dans une exclamation qui rappelle évidemment celle de Manon Roland “O liberté que de crimes on commet en ton nom“. Mais aussi de changer des faits comme la rencontre du Camp du drap d'or par exemple ou de changer les rôles de personnages historiques comme Pizarro.
La venue de l'Inca va bouleverser l'Histoire, en particulier religieuse mais aussi agricole et sociale. (Je ne veux pas en dire plus). Jusqu'à une deuxième invasion qui va finir de bouleverser la vieille Europe.
On n'en voit les effets dans le troisième texte, Les aventures de Cervantès. Qui finit assez abruptement.

Chaque partie ressemble à son modèle. L'auteur a réussi trois pastiches au service d'une histoire qui renverse les évènement et fait de l'Europe le Nouveau Monde.
Cette dystopie à l'avantage de mettre certains faits historiques sous un autre angle, ce qui est toujours stimulant.
Le seul petit reproche que je pourrais faire c'est quelques longueurs.

Voici un récit qui allie divertissement et réflexion.
Commenter  J’apprécie          320
J'imagine que tout le monde a entendu parler de "Civilizations" de Laurent Binet, l'un des best-sellers de l'année 2019. Ce roman suscite ma curiosité depuis sa sortie, du fait d'une idée de départ qui a pu surprendre les lecteurs peu familiers avec l'uchronie : l'auteur imagine un 16ème siècle où ce ne sont pas les Européens qui "découvrent" l'Amérique, mais les Incas qui débarquent en Espagne...

Un peu à la manière des "Lettres Persanes" où l'Étranger, l'Autre, est là pour nous offrir un nouveau regard sur nous-mêmes, dans "Civilizations" il est moins question de l'Amérique précolombienne que de notre propre culture européenne. Malgré l'irruption d'Incas puis d'Aztèques sur les terres de Charles Quint et de François Ier, le 16ème siècle fictif qui nous est présenté ressemble à celui que nous connaissons. On retrouvera quelques-uns des grands événements de l'époque : les 95 Thèses placardées à Wittemberg, le camp du drap d'or, la bataille de Lépante... évidemment adaptés au nouveau contexte historique mis en place par l'auteur. le côté ludique de l'uchronie est ainsi très présent : "Civilizations" est émaillé de multiples références à l'histoire et aux personnages réels, ainsi que de clins d'oeil qui peuvent faire sourire, comme lorsque les Mexicains font édifier une de leurs fameuses pyramides dans la cour du Louvre !

Cet aspect référentiel se retrouve jusque dans le style d'écriture, qui adopte successivement la forme d'une saga scandinave, d'un journal de bord, de chroniques historiques, d'échanges épistolaires, de textes de lois, d'un récit picaresque... Autant de pastiches des écrits qui ont pu inspirer Laurent Binet. Ce choix de l'auteur est tout à fait respectable et courageux, on ne peut qu'admirer le tour de force stylistique, mais ce n'est pas forcément le plus confortable pour le lecteur. La narration de type "chronique historique" occupant la majeure partie de ces pages, on a donc une relation assez brute des faits, manquant fatalement de vie et pouvant engendrer une certaine frustration : une scène comme le débarquement des Aztèques en Normandie le 6 juin 1544 (!), on aurait aimé la vivre pleinement, et pas juste en avoir connaissance au détour d'une unique phrase... J'ai d'ailleurs senti poindre l'ennui un peu avant la mi-parcours, lors de l'errance d'Atahualpa à travers l'Espagne ; mais une fois que l'Inca s'est emparé du pouvoir et que l'on peut enfin constater l'impact politique, économique, culturel, religieux, de la rencontre entre les deux mondes, l'ensemble devient d'autant plus intéressant et invite à la réflexion.

Pas tout à fait satisfaisant d'un strict point de vue romanesque, "Civilizations" n'en est pas moins une uchronie solide, très stimulante pour quiconque aime ce genre d'exercice – et comme c'est mon cas, j'ai globalement apprécié ma lecture. Je reste un peu étonné du succès rencontré par ce roman, qui ne semble pas calibré pour plaire au plus grand nombre... mais si cela signifie qu'il existe un vrai public pour l'uchronie, c'est une bonne nouvelle. On peut tout de même penser que le même roman publié non pas par Grasset, mais par n'importe quelle maison d'édition spécialisée dans les Littératures de l'Imaginaire, n'aurait reçu aucun prix, et son auteur aurait été bien content d'en écouler quelques centaines d'exemplaires... Une uchronie où Laurent Binet vivote en tant qu'écrivain d'Imaginaire, voilà une idée de roman !
Commenter  J’apprécie          315
Erik le Rouge, bien que vivant dans un pays réputé pour son climat froid, avait le sang chaud. Un jour, il n'apprécia pas que son voisin, Eyjolf la Fiente tue ses esclaves. Alors, il tua Eyjolf la Fiente. Il tua aussi Harfn le Duelliste. Contrairement à ce qu'on croit, il y a des lois chez les Vikings. Erik fut banni de Norvège.
Il s'installa en Islande. Il prêta généreusement des poutres à son voisin, mais quand il vint les récupérer, celui-ci refusa de les rendre… Mauvaise idée ! Ils se battirent et d'autres hommes moururent. Erik fut banni d'Islande.
Comme il lui était impossible de rentrer en Norvège, il vogua vers un pays découvert par le fils d'Ulf la Corneille. Il décida de l'appeler Groenland (Pays vert) espérant par cette publicité mensongère, avec un si joli nom, y attirer des gens…

Critique :

Bon, je ne vais pas vous raconter toute l'histoire puisque Laurent Binet l'a déjà excellemment bien fait. Mais où sont les Incas dans tout ça ? Petits impatients ! L'auteur démarre son roman comme un livre d'Histoire (vous avez bien pris note que j'ai mis un « H » majuscule ?).

Après le court passage consacré à Erik le Rouge, Laurent Binet nous rapporte les aventures vécues par la fille du Viking, Freydis. Sacré caractère ! Freydis se met à explorer les côtes à l'Ouest (notons au passage qu'elle a occis deux de ses frères pour s'emparer du bateau) et finit par rencontrer des Skraelings (que nous, nous appelons Indiens). Les échanges sont fructueux… ou non car tous les Skraelings ne sont pas accueillants. Ce que les guerriers nordiques ignorent c'est qu'ils apportent avec eux des maladies qui vont décimer leurs hôtes. Ils le découvriront à leurs dépens jusqu'à ce que Freydis sache en tirer profit permettant à ses Vikings de se croiser avec des Skreylings.

Laissons là les Vikings, avançons dans le temps et voyons ce que ce cher Christophe Colomb vient faire sur ces terres qu'il croit faire partie des Indes. Au début, ses relations avec les autochtones, sont bonnes, mais vouloir en emmener de force pour les présenter aux très catholiques roi et reine d'Espagne est, comment dire, mal perçu par la population locale… Qui fait appel à un grand cacique, un roi vraisemblablement, qui dispose de nombreux guerriers bien dotés en armes de fer. Pas sûr que notre Colomb reverra les côtes européennes de sitôt…

Laurent Binet impose le respect par son sens de la narration, en particulier lorsqu'il se glisse dans la peau de Christophe Colomb rédigeant son journal de bord. Toute la narration de Colomb est empreinte de religiosité comme pouvait l'être l'homme de la Renaissance qui ne pouvait que croire en Dieu.

Et les Incas dans tout ça ? Ils arrivent, mais j'ai décidé de n'en souffler mot ! Lisez le livre ! Comment ? … Vous n'aimez pas les uchronies ? … Vous lisez des romans historiques ? Vous aimez les histoires de diplomatie, d'alliances, de complots, de batailles ? Ce livre est fait pour vous !

Ah, encore un mot ! Ou deux !... Voire plus ! Pour le même prix, vous aurez droit dans cet ouvrage à Charles Quint, François Ier, Henri VIII, Luther, le pape Pie V, le pirate Barberousse, Cervantès, Montesquieu… Et en prime, les Aztèques…

Laurent Binet donne à l'uchronie, si besoin était, ses lettres de noblesse.
Commenter  J’apprécie          318
1/2 étoile en note signifie pour moi abandon de la lecture. Je déclare forfait à la page 178. Je n'ai pas pu aller plus loin, mais quand le plaisir de lire n'est pas là, il faut savoir "passer la main".

La découverte du monde, revisitée par Laurent Binet, aurait pu être intéressante si l'écriture ne m'avait pas semblé aussi impénétrable que la jungle amazonienne. J'ai relativement apprécié l'épopée nordique puis j'ai trouvé que le récit s'enlisait totalement en Espagne. Une succession de faits sans réelle romance pour lier le tout et bien sûr, comme je l'ai déjà dit des noms propres impossibles à retenir, des termes inconnus de ma modeste personne. Ce roman ayant obtenu le Grand Prix du Roman de l'Académie Française 2019, je conçois tout à fait que ce style tortueux et emphatique ait plus aux Immortels mais moi, j'aspire à davantage de simplicité. J'en suis désolée !
Commenter  J’apprécie          312
J'ai mis un peu de temps à me décider à lire Civilizations de Laurent Binet car, bien que le pitch était tentant, l'ouvrage me semblait ardu. J'ai bien fait de dépasser mes a priori car j'ai beaucoup aimé ce roman.

Jubilatoire est le mot qui me vient à l'esprit tant l'auteur s'amuse avec L Histoire et nous la joue à l'envers. Civilizations est un roman dense, riche et très documentée. Même s'il s'agit d'une uchronie, il faut de solides bases en Histoire pour pondre un récit qui tienne à ce point la route.

Pourtant le roman n'est pas « parfait » car il y a quelques longueurs. Les cent premières pages ne sont pas folichonnes : des bagarres, des morts, des évasions, des bagarres, des morts, des évasions... et une multitudes de personnages avec des noms à coucher dehors. Et puis, d'un coup, je me laisse prendre et la lecture devient plaisir.

C'est le premier roman de Binet que je lis et quelque chose me dit que ça ne sera pas le dernier !
Commenter  J’apprécie          304
Qui n'a pas joué à ce best-seller des jeux stratégique qu'est Civilisations ? Nous nous plaisions à incarner tel conquérant, tel peuple pour asseoir notre puissance sur ce monde virtuel. Nous prenions évidemment les carthaginois pour finir ce qu'Hannibal avait commencé, Alexandre le Grand pour lancer la conquête à l'est et bien sûr nous prenions plaisir à anéantir les espagnols en choisissant une civilisation sud américaine.
Laurent Binet a pris le parti de nous raconter cette Histoire alternative dan son dernier roman.
Quel plaisir de lire l'aventure d'Atahualpa débarquant à Lisbonne quelques jours après le grand tremblement de terre de 1531 ! Rencontrant Charles Quint et son banquier Fugger, jouant la scène du Camp du drap d'or entre François Ier et des aztèques fraîchement débarqués, réécrivant les 95 libelles de Luther…
C'est jouissif au possible !
C'est intelligent, bien écrit, solidement documenté et parfaitement construit. du grand Binet, comme toujours. Bien sûr, on aimerait lire les développements du Saint empire romain germanique et inca, on aimerait voir l'évolution de la nouvelle religion solaire. Comment la France aurait évolué sans les guerres de religion ? L'Italie sans ses républiques ? La monarchie hasbourgeoise sans son empire allemand ?
Le nouveau roman de Binet ouvre des perspectives, laissant le lecteur rêveur et après tout, c'est bien ce que l'on attend de lui !
Commenter  J’apprécie          290
Laurent binet mets l, histoire a l, envers pour notre plaisir. et si Christophe Colomb n, était pas revenu d, Amérique et si les incas avaient débarqué au Portugal.quel
visage aurait pris la planète. c'est ce qu' imagine Laurent binet.
tout commence lorsque les Vikings en perdition dirigés par la fille d, Eric le rouge apporte aux habitants des terres nouvelles ( des amérindiens jusqu'au incas ) quelques éléments utiles comme le fer, le cheval, ou encore les anticorps.
on sent la joie qu'il a du ressentir a se glisser dans la peau de personnages issus de civilisation si éloignées. une uchronie
inventive autour d'une mondialisation inversée.
un régal 😋
Commenter  J’apprécie          290
Dans cette fresque uchronique ambitieuse, Laurent Binet règle ses comptes avec différents personnages historiques de l'époque : Christophe Colomb d'abord dont l'expédition tourne au fiasco total, mais aussi Charles-Quint et son fils assassiné avant de régner sous le nom de Philippe II, Luther trop irascible et antisémite, François Ier... le problème avec son personnage central, l'Inca conquérant, c'est qu'on n'y croit pas une seconde à sa mainmise sur l'Espagne et à son organisation utopique... On est un peu perdus au milieu de cette vaste épopée à peine esquissée, aux personnages multiples, où l'on croise Erasme et Montaigne. C'est pourquoi on est contents de s'attacher à Cervantes, dont les aventures picaresques clôturent le récit sans que l'auteur nous apprenne finalement comment le monde va sortir de ce chaos où des alliances improbables se nouent entre la Papauté et le Turc contre ! Comme Umberto Eco dans des romans comme Baudolino, l'érudition, l'ironie ne suffisent pas à embarquer le lecteur dans une fresque uchronique qui aurait mérité plus de profondeur.
Commenter  J’apprécie          291




Lecteurs (2612) Voir plus




{* *}