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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Ce roman s'inspire de la vie du chef d'orchestre Fürtwängler et s'intéresse à son comportement durant la Seconde Guerre mondiale (bien que s'opposant aux nazis, il resta en Allemagne pour diriger l'orchestre de Berlin et participa ainsi à la propagande nazie). Il suit par ailleurs le parcours, cette fois imaginaire, de la chanteuse lyrique Christa Meister et de son fils, alors que les nazis prennent le pouvoir.

Le mélange de réel et de fiction dans un roman est toujours délicat, et je suis souvent réservé sur ce type d'ouvrage, ne sachant pas quels éléments sont inventés ou vécus. Mais ici, je n'ai aucune réserve, le mélange est parfaitement réussi, permettant de s'interroger sur les relations de Fürtzwängler avec les nazis tout en ajoutant une intrigue romanesque passionnante liée à la famille Meister (avant, pendant et après la guerre).

Le sujet est donc très intéressant (Fallait-il rester en Allemagne ou fuir ? Qui sont les plus courageux, ceux qui sont restés pour s'opposer ou ceux qui ont tout abandonné pour lutter à distance ?), son traitement bien pensé et le texte joliment écrit (malgré quelques passages descriptifs ou métaphoriques un peu longuets à mon goût). Une vraie réussite.
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J'ai apprécié ce livre très bien écrit qui a pour toile de fond la montée du nazisme, son apogée et sa chute avec comme personnage principal le grand chef d'orchestre Wilhelm Fürtwangler.

Cet amoureux de la musique qui place son art au-dessus de tout est confronté à un dilemme douloureux : élu par Hitler qu'il méprise, comme l'éminent représentant artistique de l'Allemagne, il renonce à certaines fonctions mais continue à assurer la direction de la Philharmonique de Berlin protégeant autant que faire se peut ses musiciens dont le tiers est juif.
Beaucoup s'exileront mais Fürtwangler ne peut se soumettre à ce choix.

Deux personnages fictifs, une célèbre cantatrice Christa Meister et son fils Rodolphe qui succédera dans le livre à Fürtwangler apportent une note sentimentale au roman avec une jolie chute.

Nous sommes plongés dans cette terrible période avec sa cruauté, ses personnages monstrueux, les Himmler, Goebbels, Göring et le pire de tous, Hitler. Ressurgissent les terribles images des camps que Christa Meister va connaître car considérée comme juive. Elle échappera aux fours crématoires en raison de sa notoriété.

L'imbrication des histoires personnelles et artistiques en fait un livre que j'ai eu beaucoup de plaisir à lire ; Fürtwangler apparaît comme un personnage introverti habité par la musique et piégé par le régime nazi. Soupçonné d'intelligence avec le régime nazi, il sera lavé de tout soupçon en 1946.
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Berlin 1934, les nuages noirs s'accumulent.
Ils s'accumulent sur la tête de Rodolphe, jeune garçon de 9 ans dont la mère la grande cantatrice Christa Meister a toujours refusé de lui dire qui est son père.
Et portant Rodolphe est fasciné par les beaux uniformes que portent les nazis, et est influencé par Eva l'employée de maison qui s'occupe de lui lors des absences bien trop fréquentes de sa mère, et qui il en est sûr l'épousera lorsqu'il sera grand.
Christa Meister, elle ne se fait pas d'illusions sur ce que sont vraiment Hitler et sa clique, même si elle a chanté pour le Führer, elle ne se cache pas pour dire tout haut ce qu'elle pense.
Les nazis vont alors lui découvrir un ancêtre juif, ce qui suffira à la mettre au ban de la société.
Elle décidera alors dès 1938 de se réfugier à Paris avec Rodolphe, même si quitter l'Allemagne est un véritable déchirement pour les deux.
Mais les armées nazies ne tarderont pas à les rattraper.
Pendant ce temps, le chef d'orchestre Wilhem Furwängler continue à diriger l 'Orchestre philharmonique de Berlin, essayant par son influence sur les plus hauts dignitaires nazis de sauver les musiciens juifs du philharmonique.
Mais même si Furwängler n'a pas totalement adhéré aux idées nazies, il ne les a pas non plus dénoncées, ce qui lui vaudra bien des problèmes après-guerre
Et ce n'est qu'en 1954, au soir de la vie du grand chef que Rodophe fera sa connaissance mêlant ainsi sa propre histoire avec la grande histoire.
L'auteur nous fait ici un superbe récit mélangeant à la fois biographie de Wilhem Furwängler au cours des années noires de l'Allemagne qui est resté à Berlin se compromettant ainsi à jamais, et le parcours Christa et Rodolphe Meister personnages de fiction qui eux ont fui.
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Berlin requiemXavier Marie Bonnot : Berlin, 1932. Wilhelm Furtwängler est l'un des plus grands chefs d'orchestre allemands. Il dirige l'orchestre philarmonique de Berlin et éblouit son public par son génie virtuose.1934. Hitler est chancelier et détient tous les pouvoirs, c'est le début des années noires. le nazisme s'impose et dépossède les artistes de leur art. Les juifs sont exclus de l'orchestre et contraints de s'exiler. La culture devient politique. Wilhelm Furtwängler fut un grand chef d'orchestre, peut-être même le plus grand qui dirigea l'Orchestre philharmonique de Berlin ! Cette biographie romancée le raconte pendant la montée en puissance du nazisme jusqu'à la fin de la guerre.
Il n'a jamais voulu s'exiler, n'a jamais voulu quitter son pays, son Orchestre, ses musiciens, juifs pour les plus talentueux ! Il n'avait pas pris la mesure de la détermination des nazis et a fait preuve de pas mal de naïveté à ce niveau, ce qui ne l'empêcha pas de défendre ses musiciens. A-t-il eu raison, a-t-il eu tort ? Est-ce possible de savoir ce que d'autres auraient fait à sa place ? Comment imaginer se mettre dans la peau des personnes qui ont vécu à cette période ? Au procès du chef d'orchestre, on l'accuse d'avoir voulu profiter du régime pour son confort personnel, il répond : je ne regrette pas d'avoir agit ainsi, l'art doit se placer au-dessus de la politique. Il déclare : l'art n'a rien à voir avec la politique, rien à voir avec la guerre. Je me sentais responsable de la musique allemande et il était de mon devoir d'aider à surmonter cette crise autant que je le pouvais. Je ne regrette pas d'être demeuré parmi les allemands qui devaient vivre sous la terreur de Himmler. Deux personnages ont été inventés dans ce livre mais c'est tellement bien écrit qu'ils sont dans l'histoire comme s'ils avaient existé. (gros coup de coeur pour ce livre)
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Voici donc une biographie, en partie romancée, du plus grand chef d'orchestre allemand des années 30, 40 et début 50. Je suis impressionné par la somme des connaissances que l'auteur a du accumuler pour réussir à s'imprégner de la réalité historique de ces époques. Et, évidemment, de son amour immense pour la musique classique sans lequel il lui aurait été impossible de rendre ce roman aussi vivant. J'ai beaucoup lu sur la seconde guerre mondiale, je n'avais jamais entendu parler de Wilhelm Furtwängler, j'ai pourtant trouvé cette lecture passionnante. Elle m'a aussi permis de mieux comprendre comment un non sympathisant du nazisme arrive à vivre avec, quitte à accepter quelques compromissions.
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J'ai une bonne culture musicale en ce qui concerne la musique classique et j'aime beaucoup l'opéra ; Bach, Beethoven et Mozart sont parmi mes compositeurs préférés. Par ailleurs, j'apprécie les romans historiques et je m'intéresse tout particulièrement à ceux qui font référence à la seconde guerre mondiale et à la Shoah. À la lecture de la quatrième de couverture, je n'ai donc pas hésité et je n'ai pas été déçue !

Voici la présentation faite par l'éditeur :
« Juin 1954, l'opéra royal du Danemark cherche un nouveau chef d'orchestre pour remplacer le grand Wilhelm Furtwängler, parvenu au terme de sa vie. Un jeune musicien est choisi : Rodolphe Meister, le fils d'une célèbre cantatrice. Tous trois sont nés à Berlin, se sont connus et fréquentés. Mais, en 1933, tandis que les nazis font de Furtwängler un trésor national, le destin de Rodolphe et de sa mère va basculer. L'enfant n'a que huit ans, et comme beaucoup le nazisme le fascine… Jusqu'au jour où la Gestapo découvre à sa mère une ascendance juive.

En 1954, lorsque Rodolphe retrouve Furtwängler, mourant, leurs histoires s'entrechoquent. Des questions surgissent entre un exilé, fils d'une mère déportée à Birkenau, et le chef qui a eu les honneurs de Hitler en personne… Comment Furtwängler a-t-il pu accepter la reconnaissance d'un régime barbare ? Dans un tel contexte, est-il encore possible de placer l'art au-dessus de la morale ?

À travers ce passé douloureux, les deux hommes vont découvrir que la musique n'est peut-être pas la seule chose qui les unit… »

Ce livre est dû à Xavier-Marie Bonnot, écrivain et réalisateur de documentaires, auteur de plusieurs romans dont La Dame de pierre, prix du meilleur polar francophone au festival de Cognac 2016 et le Tombeau d'Appolinaire, prix du Roman historique 2019 aux Rendez-vous de l'Histoire de Blois.

Dans le prologue, l'auteur prévient que « seuls, les personnages de Christa et Rodolphe Meister relèvent de la pure fiction, les autres appartenant à l'histoire la plus sombre de l'humanité, celle du Troisième Reich ».
On voit se dérouler la vie de Christa et Rodolphe mais aussi celle du grand chef d'orchestre Wilhelm Furtwängler parmi des musiciens comme le talentueux violoniste Szymon Goldberg, ou le chef d'orchestre Bruno Walter et qui est amené à côtoyer des personnages plus menaçants comme Goebbels, Göring et Hitler…

Furtwängler n'a pas voulu quitter son pays, son orchestre, ses musiciens, dont plusieurs étaient juifs ! Il n'a pas mesuré l'importance du danger et la puissance des maîtres de l'Allemagne, de ce troisième Reich qui l'a utilisé pour sa propagande. En cela, il a fait preuve de manque de discernement voire de naïveté. Il déclare page 65 : « Ma vie est ici. Si nous abandonnons l'Allemagne, ils auront les mains libres… Il faut résister à cette vague de bêtise qui contamine notre peuple. Ça passera ».
La question centrale du livre est donc : L'art peut-il se placer au-dessus de la morale ?
On assiste à la montée de la violence et de l'antisémitisme, on observe la Nuit de cristal, l'incendie du Reichtag, des livres sont brûlés, des compositeurs interdits, on constate les violences et les exactions ; mais à aucun moment le chef ne doute de son choix : il doit rester en Allemagne pour faire vivre la musique.
De la musique, l'auteur sait en parler avec sensibilité. de nombreuses oeuvres sont évoquées, deux d'entre elles sont au coeur du livre ; d'une part la Neuvième symphonie de Beethoven, dont des paroles prennent dans ce contexte un sens très fort :
Tous les hommes deviennent frères
Où ton aile nous conduit,
Si le sort comblant ton âme,
D'un ami t'a fait l'ami,
Si tu as conquis l'amour d'une noble femme,
Mêle ton exaltation à la nôtre !
D'autre part, l'opéra de Richard Wagner Tristan et Isolde avec, en particulier, l'air de la mort d'Isolde à l'acte III.

On apprend des détails de la vie de Furtwängler, on suit les péripéties des trois personnages principaux, on s'attache à eux au fil d'un livre qu'on ne lâche pas. En même temps, on s'imprègne de musique et de poésie, quelles que soient les circonstances. Pour ma part, je considère que ce livre est une réussite. Je l'ai lu en trois jours et cette lecture m'a donné envie d'en savoir plus à propos des musiciens cités et de réécouter des oeuvres d'une autre manière.
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J'évoquais, voilà quelques jours, un phénomène curieux de liens : après avoir vu une série évoquant des diamants de sang, voilà qu'avec Marchands de mort subite, je retrouvais une thématique proche, avec des minerais de sang. Et bien voilà que cela se reproduit, même si c'est un peu plus à distance : après avoir vu déjà apparaître Wilhelm Furtwängler dans le Stradivarius de Goebbels, en début d'année, le voilà cette fois-ci au centre de ce livre. Et, toujours au rang des liens entre livres, il faut peut-être citer L'offrande grecque, de Philipp Kerr.

En effet, l'une des questions soulevées par ce livre est clairement celle de la responsabilité de Furtwängler, accusé par les américains, notamment, mais, plus largement par les alliés, de ne pas avoir quitté l'Allemagne pendant la guerre, et donc d'avoir implicitement mis son talent au service des nazis. Pourtant, on voit nettement, dans l'histoire que nous raconte Xavier-Marie Bonnot, qu'il n'existe aucun "bon choix", quand L Histoire vous joue le tour de cochon de vous placer dans une telle situation. Fuir, c'est laisser la place libre, et donc faire preuve de lâcheté ; rester, et survivre, c'est pactiser.

Ainsi, comme Bernie Gunther, Wilhelm Furtwängler apparait comme un de ces allemands qui ont été broyés par l'histoire de leur pays. Quitter l'Allemagne, on le voit d'ailleurs au travers des personnages de Christa et de Rodolphe, ce n'est pas non plus l'assurance de vivre bien. Et rester, c'est prendre le risque d'effleurements qui pourraient un jour être considérés comme coupables.

Également très intéressante, l'attitude des américains après la défaite du Reich. La citation qui figure au début de cet article, je l'ai choisie parce qu'en lisant ce passage, j'ai eu l'impression de lire quelque chose que les nazis auraient pu écrire des juifs : "dressage", "tricherie", "ils sont toujours là et ils réfléchissent à demain"... je trouve cela glaçant. Et quand on lit (pages 245 à 260) la façon dont le général Robert McClure, et le major Steve Arnold, s'arrogent le droit de juger sans tenir compte des avis et des témoignages - par exemple, la lettre de Yehudi Menuhin, venant défendre le Maître -, alors même que les mêmes américains n'inquiètent pas Herbert von Karajan, qui, lui, avait pourtant demandé et obtenu sa carte du NSDAP... et, surtout, qu'ils sont en train de faire leurs "courses" parmi les scientifiques nazis. Ainsi, l'opération Paperclip a consisté à exfiltrer et embaucher près de 1500 scientifiques allemands ayant contribué à la mise en place du complexe-militaro-industriel nazi. Realpolitik, peut-être... mais surtout pas très propre !

Et puis, évidemment, on suit ce jeune Rodolphe. Il a 8 ans quand les nazis prennent le pouvoir, il est impressionné par les uniformes, l'ordre, le décorum. Il n'a jamais connu son père, et sa mère refuse de lui dire de qui il s'agit, si elle le sait seulement - certaines périodes de sa vie sentimentale ont été agitées -. Elle le laisse souvent, lorsqu'elle part donner un concert, à la garde d'Eva, une jeune allemande fraîche et séduisante, dont il tombe amoureux, et à qui il jure de l'épouser, plus tard. Décidée à quitter l'Allemagne, elle part finalement pour Paris, mais les nazis, ne supportant pas qu'elle ne se plie pas à leurs exigences, lui trouvent un grand-père juif. Finalement arrêtée, elle est envoyée à Drancy, puis à Birkenau, d'où elle revient brisée.

Je me rends compte que cette chronique n'est pas très organisée, voire même carrément décousue. Mais, en y réfléchissant, il me semble que c'est peut-être normal. Ce roman est parcouru de sentiments, de sensations, et d'une quête - chaque personnage a la sienne. L'auteur parvient, par les mots, à faire vivre la musique et la tentative des chefs d'orchestre de faire revivre le génie des grands compositeurs, par une vibration, par un silence, par un temps suspendu. Et, cela, comment le raconter ?

Ce livre est un très beau livre. Il donne envie d'aller écouter la 9e symphonie de Beethoven, et Tristan et Isolde, sous la direction de Furtwängler... Il me semble que c'est précisément le signe que Xavier-Marie Bonnot a réussi son pari... Et vous, serez-vous sensibles à la plume de Bonnot, à la baguette de Furtwängler, à la détresse de Rodolphe ?
Lien : https://ogrimoire.com/2021/1..
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Maestro !

Ce roman fait revivre le Berlin d'avant guerre et plonge dans les coeurs contrastés des Allemands pendant la montée du nazisme.
Le Führer a besoin de symboles forts pour construire une Allemagne puissante et légendaire. La musique Allemande doit être la plus grande et Furtwrängler, chef d'orchestre du philharmonique de Berlin sera choisi pour servir cette cause malgré lui. Alors que de grands génies, des artistes fuient le regime nazi, lui, choisira de rester à Berlin, comme un capitaine sur son navire, malgré la barbarie qui s'empare de la ville, malgré la terreur dont ses musiciens juifs sont la cible, malgré le dégoût que lui inspire Hitler et ses sbires. Il restera parce qu'il pense que l'art, son art, passe avant tout et que sa place est ici près de l'orchestre.
Cela lui sera reproché et il sera jugé après la guerre.
C'est la question delicate que soulève ce roman, l'art et les artistes peuvent ils être au dessus de la politique et de la morale, question toujours d'actualité si on en juge les scandales récents qui ont secoué écrivains et cineastes….
Ce Furtwrängler a réellement existé, c'est l'un ou le plus grand chef d'orchestre du siècle dernier, plus grand que Karajan qui lui a échappé à la chasse aux sorcières alors qu'il était membre du parti nazi. Furtwrängler ne l'a jamais été.
D'autres personnages historiques traversent ces pages, comme le lumineux Yehudi Menuhin, et la plume précise oh combien imagée de Xavier-Marie Bonnot redonne vie et chair à Hitler, Goebbels mais aussi à des personnages de fiction plus vrai que nature, Christa la cantatrice et son fils prodigue Rodolphe qui vont fuir Berlin pour venir à Paris. le voyage se terminera dans les camps…
La musique vue par Furtwrängler est aussi un personnage à part entière et elle prend vie dans les pages du roman avec les yeux du grand chef. On aime même si on n'est pas expert.
C'est un roman fort, saisissant de réalisme, qui aborde une facette de l'histoire du nazisme sous un angle méconnu.
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Berlin requiem raconte le parcours, presque pas à pas, de Furtwängler des années trente jusqu'à sa mort en 1954. Soit, les débuts du nazisme et sa montée au pouvoir, la guerre, les règlements de compte d'après guerre et sa dernière ligne droite.

Ce n'est pas un livre d'histoire quoique très documenté et Xavier-Marie Bonnot ainsi qu'il l'annonce en avant propos et afin d'étoffer son roman, imagine deux personnages, Christa Meister, cantatrice, et Rodolphe, son fils.

Furtwängler, n'ayant pas quitté l'Allemagne nazie, et ayant continué à se produire en scène dont des concerts lors d'événements nazis, il fut jugé à Vienne puis Berlin, et innocenté.

Citons quelques extraits d'une lettre de Yehudi Menuhin, venu à son secours.
Cet homme n'a jamais été membre du parti ni occupé des fonctions officielles.
Il a risqué sa vie pour protéger amis et musiciens de son orchestre.
Je ne crois pas que le fait d'être resté dans son pays soit de nature à justifier une condamnation.

Idem. extraits d'une note de Furtwängler.
L'Allemagne n'était pas une Allemagne nazie, mais une Allemagne dominée par les nazis.
Le fait que je sois resté est la meilleure preuve qu'il y a une autre Allemagne.

Rajoutons que beaucoup ont parlé de la naïveté politique de Furtwängler manipulé par les nazis. Qu'il a dirigé sous pression pour les nazis, sans ferme opposition certes, mais qu'aurait il risqué lui ou ses proches.
Enfin, Speer lui conseilla de quitter l'Allemagne en débâcle car il était sur la liste de la Gestapo des gens à éliminer.

Par delà Furtwängler, le livre pose la question, la musique, les arts et on pourrait étendre la réflexion à d'autres domaines, rester apolitique, prendre parti. Rien n'est simple.

Berlin Requiem agréablement écrit et construit, nous interroge et nous enrichit.
Le recours à deux personnages de fiction se discute. L'histoire est bien agencée mais cela aurait il plu à Furtwängler et ses proches, ce que je vous laisse découvrir en fin de livre.

Faut il ne plus lire Céline car il vira antisémite ?
Faut il ne plus écouter Beethoven car c'est un homme dixit une féministe excessive ?
En dictature faut il quitter le pays. ?
Fallait il etc.

Savoir mesurer les choses, savoir mesurer les risques, savoir agir à hauteur de ce que l'on peut, savoir se dépasser. Facile à écrire. Je l'écris.
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Paris, le 6 mai 1954. Rodolphe a vingt-neuf ans. Il est chef d'orchestre et, ce soir, il a dirigé la Neuvième symphonie de Beethoven. A son retour, sa mère l'informe que son imprésario a téléphoné : « le Théâtre national du Danemark cherche un chef pour Tristan et Isolde. » (p. 18) Christa connaît les raisons de l'hésitation de son fils : cet opéra en trois actes a été composé par Wagner, celui que les nazis aimaient tant. Elle lui indique qu'il s'agit de remplacer le célèbre maestro, Wilhelm Furtwängler. Elle ajoute que c'est un devoir pour lui d'accepter. Rodolphe a été Résistant et sa mère a été déportée. Aussi, avant de prendre sa décision, il accepte de rencontrer Furtwängler. Les deux hommes, chacun de leur côté, se sont interrogés sur ce qui avait permis l'arrivée d'Hitler au pouvoir. L'un était un jeune enfant, l'autre, un artiste adulé par une nation entière et son image a été utilisée par la propagande nazie.


Dans l'avant-propos, Xavier-Marie Bonnot précise que « seuls les personnages de Christa et Rodolphe Meister relèvent de la pure fiction. Les autres appartiennent à l'histoire la plus sombre de l'humanité, celle du Troisième Reich » (p. 9).


En 1932, quand il avait sept ans, Rodolphe avait rencontré Wilhelm Furtwängler. le petit garçon vivait seul, à Berlin, avec sa mère, une cantatrice talentueuse. Elle se produisait sur les plus grandes scènes et il souffrait de ses absences. Il était souvent gardé par Eva, une Allemande de dix-huit ans, qui admirait Hitler. Aussi, il était lui-même fasciné par le nazisme, puisque son rêve de gamin était d'épouser la jeune fille. Christa avait « choisi la rébellion » (p. 123), refusant, par exemple, de faire le salut nazi. le parti lui avait alors trouvé un grand-père juif et, en 1938, elle avait dû quitter l'Allemagne avec son enfant. Ils s'étaient réfugiés à Paris. Hélas, la France occupée n'a plus été un abri et la cantatrice a été emmenée à Birkenau.


En 1933, le Reich et Hitler avaient confié la responsabilité de l'Orchestre philharmonique de Berlin à Wilhelm Furtwängler. Alors que Goebbels avait ordonné que plus aucun Juif ne devait jouer dans un orchestre, Furtwängler a profité de son statut pour sauver des musiciens Juifs de la déportation. Refusant de mêler l'art à la politique, il a démissionné de ses fonctions, mais les nazis ont utilisé sa notoriété dans leur propagande. Après la guerre, il lui sera reproché de ne pas avoir quitté l'Allemagne. Thomas Mann lui a écrit que ce choix avait apporté « une caution passive aux nazis », alors que Yehudi Menuhin l'a soutenu. L'auteur décrit la complexité de la position de Wilhelm Furtwängler. Il a été forcé à certaines compromissions, mais il estimait que rester et continuer à faire vivre la musique était sa manière de résister. Xavier-Marie Bonnot dépeint les doutes qui ont agité le chef d'orchestre et l'image qu'il a renvoyée. Ce roman relate, également, les accusations perpétrées contre lui, après la guerre, ainsi que sa comparution judiciaire. le passage au sujet de son procès m'a fortement émue.


L'art peut-il se placer au-dessus de la morale ? C'est la question que pose l'auteur, à travers l'histoire de Wilhelm Furtwängler et celle de Christa et son fils, ce qui lui permet d'apporter plusieurs réponses à cette interrogation. La vision de Rodolphe enfant se joint à sa perception d'adulte, il raconte l'évolution de celle-ci, à la lecture des évènements qu'il a vécus. J'ai adoré Berlin Requiem, qui rappelle que chaque acte, que chaque parole et chaque refus pouvait conduire dans les camps de la mort et que ces mêmes faits ont été perçus de manière contraire, après la guerre, avec le prisme de l'Histoire. Pour prolonger la lecture, j'ai écouté les oeuvres citées dans le livre, car les descriptions de Xavier-Marie Bonnot ont attisé ma curiosité.


Lien : https://valmyvoyoulit.com/20..
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