Citations sur Fahrenheit 451 (807)
Ce n’est pas de livres que vous avez besoin, mais de ce qu’il y avait autrefois dans les livres. […] Les livres n’étaient qu’un des nombreux types de réceptacles destinés à conserver ce que nous avions peur d’oublier. Ils n’ont absolument rien de magique. Il n’y a de magie que dans ce qu’ils disent, dans la façon dont il cousent les pièces et les morceaux de l’univers pour nous en faire un vêtement.
— Je bazarde les enfants à l'école neuf jours sur dix. Je n'ai à les supporter que trois jours par mois à la maison ; ce n'est pas la mer à boire. On les fourre dans le salon et on appuie sur le bouton. C'est comme la lessive ; on enfourne le linge dans la machine et on claque le couvercle.
"Chacun doit laisser quelque chose derrière soi à sa mort, disait mon grand-père. Un enfant, un livre, un tableau, une maison, un mur que l'on a construit ou une paire de chaussures que l'on s'est fabriquée. Ou un jardin que l'on a aménagé. Quelque chose que la main a touché d'une façon ou d'une autre pour que l'âme ait un endroit où aller après la mort; comme ça quand les gens regardent l'arbre ou la fleur que vous avez plantés, vous êtes là. Peu importe ce que tu fais, disait-il, tant que tu changes une chose en une autre, différente de ce qu'elle était avant que tu la touches, une chose qui te ressemble une fois que tu en as fini avec elle. La différence entre l'homme qui ne fait que tondre le gazon et un vrai jardinier réside dans le toucher, disait-il. L'homme qui tond pourrait tout aussi bien n'avoir jamais existé; le jardinier, lui, existera toute sa vie dans son oeuvre."
p 225
Est-ce parce qu'on s'amuse tellement chez nous qu'on a oublié le reste du monde ? Est-ce que nous sommes si riches et tous les autres si pauvres que nous nous en fichons éperdument ? Des bruits courent; le monde meurt de faim, mais nous, nous mangeons à satiété. Est-ce vrai que le monde trime tandis que nous prenons du bon temps ? Est-ce pour cette raison qu'on nous hait tellement ? J'ai entendu les bruits qui courent là-dessus aussi, de temps en temps, depuis des années et des années. Sais-tu pourquoi ? Moi pas, ça c'est sûr. Peut-être les livres peuvent nous sortir un peu de cette caverne. Peut-être y a-t-il une chance qu'ils nous empêchent de commettre les mêmes erreurs insensées! Ces pauvres crétins dans ton salons, je ne les entends jamais en parler. bon sang, Millie, tu ne te rends pas compte ? Une heure par jour, deux heures, avec ces bouquins, et peut-être…
Page 88 (édition Denoël).
Nous sommes tous des brebis à qui il est arrivé de s'égarer.
Rentrez chez vous et pensez à votre premier mari divorcé, au second qui s'est tué en avion, au troisième qui s'est fait sauter la cervelle ; rentrez chez vous et pensez à votre bonne douzaine d'avortements, à vos maudites césariennes et à vos gosses qui vous détestent ! Rentrez chez vous et demandez-vous comment tout ça est arrivé et ce que vous avez fait pour l'empêcher. Rentrez chez vous, rentrez chez vous ! hurla-t-il. Avant que je vous cogne dessus et que je vous flanque dehors à coups de pied !
C'est le bon côté de la mort ; quand on n'a rien à perdre, on est prêt à courir tous les risques.
Oh, Dieu ! La tyrannie terrible de la majorité.
...Cette nuit, j’ai pensé à tout le pétrole que j’ai déversé depuis dix ans. Et j’ai pensé aux livres. Et pour la première fois, je me suis rendu compte que derrière chacun de ces livres, il y avait un homme. Un homme qui les avait conçus. Un homme qui avait mis du temps pour les écrire. Jamais cette idée ne m’était venue. » Il sortit du lit. « Si ça se trouve, il a fallu toute une vie à un homme pour mettre certaines de ses idées par écrit, observer le monde et la vie autour de lui, et moi j’arrive en deux minutes et boum ! Tout est fini.
Il y est aussi et surtout question de l’impérialisme des médias, du grand décervelage auquel procèdent la publicité, les jeux, les feuilletons, les «informations» télévisées. Car, comme le dit ailleurs Bradbury, « il y a plus d’une façon de brûler un livre », l’une d’elles, peut-être la plus radicale, étant de rendre les gens incapables de lire par atrophie de tout intérêt pour la chose littéraire, paresse mentale ou simple désinformation.
[in préface de Jacques Chambon]