Sous Charles VI, vers 1393, un bourgeois aisé mais d'un âge avancé trouva utile d'écrire
le mesnagier de Paris, qui fait - mais ce n'est pas innocent - une association entre les recommandations qu'il fait à son épouse pour tenir sa place dans le couple, la vie en société et la vie domestique et dans sa propre existence aussi et un ensemble de recette que les notes ajoutées dans cette édition permettent de reconstituer tant dans les ingrédients décrits que dans la manière de suivre l'ordre de préparation des plats.
Nous sommes dans un univers où l'homme entend gouverner, et l'homme riche se permet donc d'indiquer à son épouse la manière dont elle doit se conduire - esprit patriarcal et machiste dirait-on aujourd'hui, et pas une femme n'accepterait en effet qu'un homme se comportât ainsi avec elle de nos jours.
De quoi se mêlait un homme, qui avait du bien, commerçait et faisait des affaires et qui était maître chez lui aux yeux de tous à la fin du XIVe siècle ? de tout.
Ainsi l'épouse, la femme, n'est-elle aucunement libre d'elle-même à cette époque : rendre grâce à Dieu (et accepter son sort de bonne grâce, sans se plaindre) semble être son premier devoir imposé. Et la suite est à l'avenant : garder continence, s'habiller convenablement, être discrète, se montrer amoureuse de son époux, prendre soin de son ménage et de son intérieur, diriger (comme le veut le maître de maison sans doute) le personnel de maison quand l'on a assez de moyens pour en avoir, ne faire d'observations à son conjoint qu'avec prudence et douceur. Bref, la femme, d'après ce bon bourgeois n'a que des devoirs et qu'à bien tenir son rang.
L'homme lui peut vaquer tranquillement à ses occupations et à ses loisirs... comme chasser à l'épervier.
On va trouver que j'exagère. Lisez, vous serez conscient du chemin que nos sociétés ont parcouru depuis.
Ce texte est un bon témoignage non seulement du mode de vie des couples bourgeois de l'époque - ici l'homme prend pour compagne une femme plus jeune et ne semble pas si sûr de lui pour qu'il ait besoin de rédiger un tel écrit - mais aussi des rapports entre hommes et femmes, où l'homme pense pouvoir décider de tout pour deux, selon ce qui l'arrange.
On ne m'en voudra pas de penser ma critique en la bâtissant sur des jugements de valeur. Il est vrai que je ne me place pas ici en lecteur d'un texte médiéval mais seulement en individu de mon temps, en oubliant pour une fois mes habituelles nuances.
François Sarindar