Au XVIIIe siècle, par exemple, les philosophes avaient déjà utilisé l'Antiquité classique contre le christianisme : guide de toutes les nations et de tous les âges, la Grèce était considérée comme un modèle de culture émancipée de tout dogme religieux; et aux Grecs reviendrait l'honneur d'avoir découvert la primauté de la raison. Cette admiration professée pour la Grèce n'allait cependant pas sans réserves: les superstitions antiques et les dieux de la mythologie représentaient, aux yeux de Voltaire notamment, le produit de l'imagination puérile d'une humanité encore au berceau. Il reviendra au XIXe siècle - et particulièrement à Nerval - de réhabiliter le polythéisme des Anciens et de faire succéder une grécité des mystères à la grécité "solaire", ou d'or, célébrée par la France classique. (p.152-153)
Les philosophes du XIIIe siècle se sont employés par leurs écrits à renverser de son piédestal la religion chrétienne pour élever une statue à la triade formée par la raison, la science et le progrès. p.79
Fidèle au passé, l'écrivain romantique ne peut guère que se trouver en conflit avec la société européenne du XIXe siècle, assoiffée de progrès, insoucieuse de ses racines et de ses origines. A l'encontre des impératifs d'ordre, de propreté, d'uniformisation, de symétrie ou de modernité, la volonté de perpétuer ce qui subsiste du passé est aussi une revendication de liberté. (p.226)
Une fiction permet parfois d'expliquer la réalité mieux qu'une savante dissertation historique. - p.101