Gérald Bronner nous fait la brillante démonstration de tout ce qui entrave notre capacité à penser par nous même, ce fameux « temps de cerveau disponible » si cher aux publicitaires. « C'est dans ce temps de cerveau que se trouve potentiellement des chefs d'oeuvre ou de grandes découvertes scientifiques » comme il nous le fait savoir à la page 63
Ce livre nous dresse la liste de toutes les sollicitations face auxquelles notre cerveau doit composer, entre en compétition, afin de retrouver cette liberté de penser, de créer. On y parle de plaisir immédiat, de néo-populisme, de narcissisme.
C'est une véritable mutation que vivent nos sociétés sans cesse sollicitées par des breaking news, des alertes, des notifications. Par des informations qui créent le sentiment de vivre l'événement, celui qu'il ne faut pas rater. Notre cerveau est ainsi constamment en alerte. Or, ce ne sont pas des évènements, mais de simples informations que nous livrent notamment les chaînes d'informations continues. Car elles aussi sont sous l'emprise de la rentabilité. Et dans le fond, c'est par l'excès de libéralisme que nos cerveaux sont constamment sollicités. À tel point que nous n'avons plus le temps de nous ennuyer. Cet ennui si vital pour la création, l'innovation, la réflexion.
Il y a, selon la thèse développée par
Gérald Bronner, deux mondes qui se font face. L'un réel et l'autre virtuel. Or, parce que notre univers virtuel n'est pas encore discipliné et donc règlementé, nous assistons à une multitude de travers, d'erreurs qu'il nous faut rectifier au plus vite. Il en va ainsi des forums qui nous ramènent à nos comportements les plus vils. Ceux-ci ne sont plus que des exutoires sans lois ni règles face à une indignation toujours plus virulente et face auquel chacun doit avoir son avis à donner au risque d'être ostracisé.
Gérald Bronner nous donne l'exemple de la célèbre hydroxichloroquine. Face aux soi-disant bienfaits de cette molécule nous avons assisté à une véritable dictature, celle du plus grand nombre qui s'est imposée face aux plus grands médecins et spécialistes.
Enfin, on y apprend, par des chiffres, des expériences approuvées, des études sérieuses que la stratégie des publicistes est de nous offrir un plaisir immédiat, instantané qui n'a de valeur que pour l'instant présent. Aucun publiciste ou marketer ne nous offre un plaisir plus susceptible, plus profond que la simple satisfaction instantanée. Ce bonheur qui ne peut être prévisible que sur le long terme et dont on ne peut pas ou on ne veut pas, par impatience, percevoir les contours.
Ce livre est une réelle réflexion sur cette révolution à laquelle nous assistons. Et il insiste sur le fait que l' « apocalypse » n'est pas cette fin du monde prédite par les récits bibliques mais un avenir qu'il faut entrevoir.