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sur 180 notes
Shirley est un roman passionnant mais, reconnaissons le, parfois dur à comprendre pour un lecteur français pas très au fait de l'histoire anglaise. Entre les aléas des filatures de draps anglaise pendant les guerres napoléoniennes et les complexités de la religion de l'autre côté de la Manche, entre différents courants protestants...Disons juste que je suis prêtre à parier que pas mal de choses m'ont échappées malgré une consultation intensive d'encyclopédie! Thématiques sociales et féministes marquées, critique des hommes de religion qui sont tous sauf ce qu'ils devraient être, et intrigues romantiques par dessus le marché, autant dire que c'est une oeuvre riche, dense, avec parfois, que personne ne me jette de pierre, quelques longueurs.
J'avoue avoir été surprise par la fin, je pensais que cela prendrait une toute autre direction, mais je ne vais pas risquer de trop en dévoiler!

Les portraits de personnages sont sans concession, et cela même pour les rôles principaux, à commencer par Robert Moore, industriel qui pour sauver sa filature commence à regarder d'un oeil fort intéressée sa jolie voisine et propriétaire, et surtout sa dot. Dur et sans concession face aux revendications ouvrières, qu'il n'a à vrai dire aucune façon de recevoir positivement vu l'état des finances de la fabrique , il peut se trouver pris de remords et faire preuve de compassion et de bonté, mais en secret. C'est lui et sa cousine Caroline, qui éprouve pour lui une tendre inclination qui semblent au début les personnages principaux....jusqu'à l'arrivée de Shirley, riche, têtue comme une mule et qui jamais , elle l'a juré, n'épousera un homme qu'elle ne peut respecter. A côté de la douce et calme Caroline, à vrai dire un peu fade quand on ne prend pas la peine de la regarder plus avant, Shirley détonne dans le paysage rural. Un paysage qui n'a rien d'idyllique d'ailleurs, oubliez la campagne anglaise fantasmée: ici, on crève de faim et pendant ce temps là, les vicaires se remplissent la panse!

Je m'attendais à un drame industriel, je suis tombée sur un roman d'amour, un étonnant virage pris par le roman, ce qui l'en rend d'autant plus marquant.


Un roman brillant, étonnamment moderne par certains côtés, dense et prenant malgré quelques passages un peu longs et que je ne suis pas prête d'oublier.
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Mes découvertes des titres de Charlotte sont décidément bien difficiles car hormis Jane Eyre aucun ne parvient à m'emporter malgré une très belle plume et de bonnes idées.


Ouvrage le plus mature à l'heure actuelle parmi ceux que j'ai lus, Shirley est aussi celui où j'ai le plus aimé les petites phrases de l'autrice en dehors de Jane Eyre. Elle se propose dans deux parties distinctes, pour moi, de faire le portrait de la campagne anglaise, celle du Yorkshire, dans les années 1810 alors qu'elle est agitée par des troubles sociaux liés aux conditions de travail et à la politique économique de la couronne.

La première partie est drôle et caustique avec des portraits savoureux de cette faune anglaise remplie de vicaires et autres petits notables mais aussi de gens du peuple qui s'agitent face aux conséquences des guerres napoléoniennes et des décisions politiques prises plus haut avec cette Révolution industrielle qui bouleverse tout. Ça critique sec, ça bouillonne et ça réfléchit aussi. Cela rappelle les tableaux d'Elisabeth Gaskell (Nord et Sud arrive quelques années plus tard avec le même cadre industriel critiqué) sur cette Angleterre populaire ainsi que ceux de Dickens mais avec la touche caustique et féminine de Charlotte. Ainsi même si c'est très long, qu'il ne se passe pas forcément grand-chose car il n'y a pas de réelle tension narrative ou d'ambition autre que le récit de la vie de ces gens, j'ai trouvé plein de petites phrases qui font mouche.

"Depuis quelques années, une véritable pluie de vicaires s'est abattue sur le nord de l'Angleterre : aussi, chaque paroisse en possède-t-elle un, sinon plusieurs, assez jeunes pour être actifs, et qui doivent certainement faire beaucoup de bien."

Comme indiqué dans la préface signée Isabelle Viéville Degeorges, une rupture se produit après le chapitre 23, écrit après des décès qui auront douloureusement marqué l'autrice. L'autrice change totalement son fusil d'épaule et l'optique de ce roman n'est plus le même. Il ne s'agit plus d'un tranche de vie campagnard qui prêtait à sourire, telle une version anglaise de la Petite maison dans la prairie. On tombe plutôt dans un récit sociétal sur des familles cherchant à marier leurs filles qui elles ne le souhaitent pas forcément. Ce n'est pas ce que je préfère surtout qu'il y a à nouveau des longueurs et des longueurs et très peu d'humour et de causticité cette fois... Heureusement qu'il y a également une critique sous-jacente sur la place de la femme, son célibat, son envie d'apprendre et d'entreprendre et ses capacités à le faire. Cela compense un peu.

"L'avenir, parfois, semble, dans un sanglot, vouloir nous donner tout bas un avertissement sur le destin qui nous est réservé, un peu comme la tempête qui s'amoncelle au loin annonce, par les sursauts du vent, le tumulte du ciel et l'étrange draperie déchirée des nuages, le soulèvement terrible qui couvrira la mer d'épaves."

Heureusement les portraits des personnages sont intéressants. Charlotte s'est amusée à glisser les particularités de ses soeurs dans les caractères de deux de ses personnages principaux : Caroline et Shirley, ce qui donne une toute autre saveur à leur découverte quand on le sait. J'ai beaucoup aimé Shirley, la version romanesque d'Emily, même si on met longtemps à la rencontrer, ce qui faisait bizarre de lire un roman sans son héroïne pendant plus de 200 pages... C'est une jeune femme intelligente, qui sait ce qu'elle veut, qui a un esprit critique et qui va fasciner la jeune et introvertie Caroline, son antithèse. Celle-ci est peut-être encore plus l'héroïne de cette histoire. Elle ne variera pas ou très peu, si ce n'est en prenant confiance, contrairement à sa camarade. En effet, à partir de ce chapitre 24, on peine à reconnaître Shirley qui tombe dans le trope de la fille à marier, qui ne sait pas ce qu'elle veut ou du moins qui ne le montre pas, ce qui est assez pénible.

Du coup, je suis assez embêtée en vous chroniquant ce roman car à part dire que j'ai aimé les fulgurances de la plume de l'autrice à plusieurs reprises, que j'ai trouvé le contexte de la première partie riche et prenant (et rarement vu / lu chez moi) et que j'ai aimé qu'elle transpose le portrait de ses soeurs dans deux personnages à qui elle va offrir le happy end qu'elles n'auront pas eu dans la vraie vie ; pour le reste je me suis largement ennuyée dans un roman, où j'ai cherché une trame narrative longtemps absente, puis inintéressante à mes yeux. En terme d'objet littéraire, Shirley m'a plu, comme plaisir de lecture, ce fut un flop. 
Lien : https://lesblablasdetachan.w..
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Le Yorkshire était un bastion de l'industrie européenne des filatures et du commerce des draps, aux temps des guerres napoléoniennes, période où se déroule l'histoire contée dans le présent volume. Il fut conséquemment le théâtre privilégié de la fermentation d'une conscience sociale, alors que l'essor des métiers à tisser menaçait de priver la main d'oeuvre des moyens de subsistance les plus élémentaires et que l'Angleterre était soumise à un blocus des plus sévères; il se vit de surcroît le terrain d'affrontement d'une lutte d'influence de nombreuses sectes et chapelles dissidentes à la religion d'état, l'anglicanisme. Ces différentes données historiques forme le fond contextuel du présent volume.

Fresque historico-sociale et sentimentale, oeuvre qu'on peut qualifier de proto-feministe, contenant une critique sévère des prétentions ridicules des ministres du culte, Shirley est un roman de facture assez classique, n'atteignant pas les sommets de la production littéraire de la géniale famille Brontë.
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Charlotte Brontë, c'est Jane Eyre. Mais, avec Shirley, c'est un tout autre aspect de la romancière que nous découvrons.
Le roman se déroule dans les petits villages du Yorkshire. Petite aristocratie locale, pasteurs et vicaires, un monde que Charlotte connaît bien. Mais, nous sommes au début du 19ème siècle. Ce monde tranquille est touchée par les problèmes que connaissent les manufactures textiles. le blocus napoléonien et les nouvelles machines provoquent le chômage. R.Moore est confronté à ces difficultés. Son attitude intransigeante lui attire des ennuis.
Roman social mais aussi roman féministe. Shirley revendique l'égalité des femmes. «  Je lis tout ce que lisent les hommes. «  «  Les hommes, je crois, se figurent que l'esprit des femmes ressemble un peu à celui des enfants. Eh, bien ! C'est une erreur. « Les femmes dans les romans des Brontë réclament leur indépendance. Elles sont, comme Caroline, prêtes à accepter le statut difficile de gouvernante. le roman reflète la vie des soeurs Brontë. Shirley, c'est la sauvage Emily, Caroline la douce Anne et peut être aussi Charlotte.
Le romantisme n'est pas oublié. Il imprègne toute l'oeuvre. Les jeunes filles parcourent les landes et les bois. La nature change avec les saisons. Et les chassés croisés amoureux entretiennent tout au long de ce roman de 700pages un suspense qui incite à la lecture.
Oui, il faut lire et relire les soeurs Brontë et en particulier Shirley. Indépendantes, volontaires, revendicatrices, elles nous parlent encore aujourd'hui de la condition des femmes. Alors, bonne lecture.
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Panthère indomptée Shirley, est une jeune fille courageuse, pure et très originale, Caroline Helstone est aussi une jeune fille dotée de multiples vertus faisant pendant à la forte personnalité de Shirley mais dans ce roman tout tourne autour d'un homme, l'énigmatique et imposant  Robert Gérard-Moore, entrepreneur textile en prise aux troubles sociaux. Dans l'Angleterre industrielle du XIXième siècle, les Ordonnances Royales répondant au Blocus continental voulu par Napoléon provoquent chômage, misère et luttes sociales. Dans la paisible campagne du Yorkshire la révolte gronde et Moore est menacé par la ruine en proie à la vindicte des ouvriers. La mécanisation en cours accentue le sentiment d'abandon des classes ouvrières.
Les relations amicales et sentimentales entre les trois principaux personnages sont délicates et plutôt bien menées. Les rencontres, les dialogues, les non-dits, les anecdotes – comme par exemple la très inattendue morsure de Shirley – constituent une trame vivante. J'ai pris plaisir aussi à la présence de personnages secondaires très typés Hortense, soeur de M.  Moore, Mme Yorke, le jeune Martin, les ridicules vicaires Donne ainsi que l'ineffable Peter-Augustus Malone et même le rigide et machiste M. Helstone.
Pourtant l'ensemble manque de liant. La distribution des personnages dans le roman est inégale. Il faut ainsi attendre près de 200 pages avant que Shirley n'apparaisse dans le récit ; des personnages de premier plan disparaissent trop longtemps du récit, d'autres prennent subitement toute la place, comme le frère de Gérard-Moore prenant rapidement un rôle très important. J'ai eu l'impression d'un roman sans plan initial écrit au fil de la plume. Il manque d'unité et aurait gagné à être mieux structuré. J'ai eu la sensation parfois de lire des scènes plaquées ici de façon artificielle surtout en seconde partie. Je ne fais pas ici une analyse littéraire mais c'est un ressenti fortement à la lecture.
Charlotte Brontë s'adresse souvent directement au lecteur avec connivence, humour et pédagogie. En lecteur obéissant on sourit avec ravissement et délectation devant ses leçons de morale. Elle s'adresse aussi à ses personnages...qui eux ne peuvent l'écouter ce qui crée un décalage amusant.
Le roman n'est pas totalement réussi, souvent redondant. C'est néanmoins une lecture plaisante.
Merci aux challenges sur les classiques qui m'incitent à sortir des ouvrages poussiéreux - au sens figuré - d'une bibliothèque familiale sous cloche.
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Après Jane Eyre (1847) et avant Villette (1853), Charlotte Brontë a évoqué le Yorkshire du début du 19ème siècle, encore rural, mais dont les filatures ne pouvaient écouler leurs produits à cause des guerres napoléoniennes. de plus les propriétaires, installant des machines coûteuses, étaient proches de la ruine, tandis que les ouvriers, devenus sans travail, survivaient à peine à leur misère, et se révoltaient.

Dans ce contexte historique, l'auteur se focalise sur quelques héros : la douce Caroline, nièce d'un pasteur, amoureuse (en secret) de Robert Moore, propriétaire désargenté d'une filature. Shirley, qui apparaît au tiers du roman, est une orpheline financièrement indépendante, aux idées bien arrêtées, qui nouera avec Caroline une amitié indéfectible. Vers la fin apparaît Louis Moore, frère de Robert.

A l'époque, Shirley était un prénom masculin (ses parents étaient déçus de ne pas avoir de fils), mais de nos jours ce choix de l'auteur a perdu évidemment de sa force. Si j'en crois wikimachin, c'est suite au succès du roman que le prénom est devenu féminin...

Autour de ces personnages principaux, évoluent des membres du clergé, croqués parfois avec causticité, des couples, les inévitables femmes non mariées et vouées à une vie étriquée à l'époque. Charlotte Brontë plaide pour qu'elles aient le droit d'avoir des occupations plus intéressantes et profitables que celles acceptées à l'époque.Mais sans trop révolutionner non plus. ^_^

J'ai trouvé ce roman intéressant à découvrir, le thème ouvrier est assez vite en toile de fond, sans plus, pour se consacrer à de jolies histoires amoureuses, sans grande surprise, le lecteur ayant une longueur d'avance... Pareil pour l'identité de la mère de Caroline, vite devinée. J'ai trouvé aussi que Charlotte Brontë va vite en besogne pour tirer défauts et qualités à partir d'un portrait physique, et que les enfants Yorke sont étonnamment (pour l'époque) discoureurs et critiques à propos des adultes présents. Pas mal de références religieuses (expliquées en notes) car notre auteur est bien fille de pasteur! Aussi le contexte entre différentes "chapelles" protestantes peut demeurer obscur.

Un indispensable pour les fans de romans victoriens, pour les autres, je ne sais pas. de beaux passages, quelques longueurs.
Lien : http://enlisantenvoyageant.b..
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- Shirley Tome 1 -

Je continue la suite de ma collection des classiques féminins / féministes du 19ème siècle avec le tome 1 de Shirley. Connaissant évidemment Charlotte Brontë pour son célèbre roman Jane Eyre, j'étais contente de découvrir un nouvel ouvrage.

Bien que la lecture soit facile, je dois dire que je n'ai pas réussi à rentrer totalement dans le roman.
Au fond de la campagne anglaise, Caroline Helstone, une jeune femme orpheline, est élevée par son oncle qui fait partie du clergé.
Elle tombe alors amoureuse de son cousin, le controversé Roger Moore, qui doit calmer ses employés. En effet, avec les débuts des usines et de l'industrie, il doit faire face aux demandes "syndicales" et à la violence des employés qui se retrouvent sans travail.

En parallèle à tout cela, Shirley Keeldar arrive dans le village, devient ami avec Caroline et sème le trouble avec Roger Moore.
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1811 - Yorkshire : la tranquillité de cette région est troublée. Nous sommes dans une période de dépression industrielle due aux guerres napoléoniennes et à l'embargo sur les produits britanniques.
Les gens ont faim, ils n'ont pas d'emploi et l'achat de machines par les industriels leur promet un avenir encore plus dur. Les révoltes grondent.
Quatre personnages centraux sont présents, définis par contrastes - les hommes : Robert Moore (industriel dont le Moulin tourne à vide en raison de la guerre) et Louis Moore (précepteur privé attaché aux enfants d'une famille) ; et les femmes : Caroline Helstone, timide et incertaine et Shirley Keeldar, héritière d'une fortune, au caractère bien trempé.
Leurs personnalités permettent à l'autrice de développer des thèmes féministes, comme la place de la femme dans la société du XIXe, leur peu de possibilité d'avenir, les limites imposées à leur parole et développement personnel, mais aussi de souligner le soutien entre femmes, Shirley et Mrs Pryor par exemple, ou l'amitié entre Carolina et Shirley.
Peut-être moins connu et lu que Jane Eyre, Shirley est tout de même un roman magistral, plutôt assez innovant et provocant pour son époque, développant des thématiques féministes et points de vue sociétaux peu conformes aux us et coutumes de l'époque.
Une excellente lecture malgré quelques passages un peu longs sur la religion.
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Ce n'est pas l'histoire d'amour qui m'a marquée en lisant Shirley.
Celle-ci, celles-ci même puisqu'il y en a deux, sont à l'image de toutes les histoires d'amour victoriennes, quelques soupirs, quelques regards, on passe par quelques quiproquos et désespoirs avant de se reconnaître et de s'aimer pour toujours.

Mais c'est aussi un roman social, les débuts de la société industrielle telle que nous la connaissons. Les luttes entre classe ouvrière et patronat, la disparition des métiers traditionnels.

Et surtout, ce que j'aime le plus et ce qui fait que je retourne régulièrement lire un Brontë, un Austen ou un Gaskell, c'est me plonger dans cette époque, pas si lointaine (débuts 1800 ici) où le temps s'écoule différemment. Pas d'électricité, pas de téléphone, pas de télévision encore moins de réseaux sociaux. Lorsque l'on voyage on part en calèche les trajets prennent des semaines. On vit au rythme des saisons, on est bloqués par la neige, on rentre tôt l'hiver quand le soleil se couche, on revit au printemps. On coud ses vêtements, on cuisine avec ce qu'on a sur place, on se visite, on se parle..
Bref je trouve que ça fait du bien..

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Robert Moore voit son commerce de draps péricliter en raison de la guerre qui oppose la France et l'Angleterre. En outre, ses ouvriers refusent qu'il installe des métiers à tisser dans la fabrique, craignant de perdre leur emploi. À ses côtés, sa soeur Hortense tient le ménage et à fort à faire avec des domestiques indisciplinés. Leur cousine, la douce et jolie Caroline, orpheline de père et de mère, est très éprise de Robert et désespère d'en être aimée en retour. Mais le jeune homme ne se préoccupe que de son entreprise. À proximité de Hollow se trouve Fieldhead, le domaine de la jeune Shirley, également orpheline et héritière d'une belle fortune. Indépendante et fougueuse, elle dirige sa vie avec sagesse et liberté, guidée par sa gouvernante, la mystérieuse Mistress Pryor, et bien décidée à ne pas se plier à la volonté de son oncle qui voudrait la voir se marier au plus vite. Shirley se lie d'amitié avec Caroline, mais un nuage plane sur leur relation. La fortune de la première peut-être sauver le négoce de Robert Moore ? Si oui, ce ne sera qu'avec un mariage et au désespoir de Caroline. Arrive Louis Moore, le jeune frère de Robert, précepteur très épris d'une ancienne élève. À chacun sa chacune, reste à savoir qui épousera qui.

Ce roman met longtemps, longtemps, longtemps à démarrer. le décor est bien posé, l'atmosphère bien installée, l'histoire peut enfin commencer. Outre l'amour, ce roman parle du mariage et cette institution est à la fois moquée et honorée. « S'il est une chose que je haïsse par-dessus tout, c'est l'idée du mariage. J'entends le mariage dans le sens vulgaire, et comme pure matière de sentiment : deux fous consentent à unir leur indigence par quelque fantastique lien de sympathie mutuelle, quelle absurdité ! Mais une union formée en vue de solides intérêts n'est pas si mauvaise, qu'en dites-vous ? » Entre l'union toute commerciale et l'alliance sentimentale, il n'est pas difficile de comprendre vers où le coeur de l'auteure se penche. Non, ne vous fiez pas à la citation précédente ! le roman est également un plaidoyer en faveur de l'éducation des filles qui ne sont pas que bonnes à faire de la broderie ou à du piano. Selon Charlotte Brontë, le mariage doit élever les deux époux et les placer à égalité. « Un homme et une famille rendent un homme prudent. »

Ceci dit, nous sommes encore dans une histoire où les jeunes filles dépérissent d'amour et où les hommes sont aveugles aux peines des femmes tant qu'elles ne s'effondrent pas dans leurs bras. « Je crois que le chagrin est et a toujours été le vif aliment de ma maladie. Je pense quelquefois qu'un peu de bonheur me ferait pleinement revivre. » Passons cela. Les personnages sont finement construits. Je retiens avec délectation les portraits liminaires et finaux des vicaires Malone, Donne et Sweeting. J'ai aussi vraiment apprécié l'introduction progressive des personnages : Shirley n'entre en scène qu'après un tiers du roman et Louis Moore environ 100 pages avant la fin. Ça redéfinit le sens de personnage principal et déplace l'intérêt d'un protagoniste à un autre sans en léser aucun. Petit détail cocasse : quand le roman est paru, Shirley était un prénom masculin ; il est devenu féminin après l'immense succès du roman. Les lecteurs de l'époque s'attendaient à un héros masculin : quelle surprise cela a dû être de voir débarquer l'impétueuse jeune héroïne !

Shirley n'est pas tragico-gothique comme l'est Jane Eyre, roman que j'aimerai d'amour pour toujours. Il a toutes les qualités sociales d'un roman d'Elizabeth Gaskell et tout le piquant cynique d'un roman de Jane Austen. Oubliée ma déception après ma lecture du professeur ! Shirley est un excellent roman de Charlotte Brontë, pour un peu qu'on lui laisse sa chance et qu'on survive à ses cent premières pages.
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