Quelques mois de la vie d'une jeune Américaine, dans l'état de Mississipi. Une fille qui a fui l'emprise et les tentatives incestueuses de son père, brute incapable en outre d'assurer la vie matérielle de sa famille. On suit l'errance pleine de risques de
Fay, dans une Amérique qui ne fait pas rêver. le rêve, en tout cas, s'il lui est donné de le vivre quelque temps au sein d'un couple fracassé mais aimant, se termine tragiquement, et
Fay doit reprendre sa route, sans but et sans moyens de subsistance.
Pas à pas, rencontres après expédients, à pied ou en 4x4, dans des bars quelconques ou des boîtes interlopes, à travers des violences inévitables et des douceurs inattendues,
Fay découvre ce qui fait le quotidien de cette frange de la population américaine, pauvre et souvent délinquante. C'est sur la côte, entre Mobile et La Nouvelle-Orléans, il y a des bateaux, des plages, il fait chaud, les hôtels sont climatisés. Mais le luxe ou le simple confort,
Fay et ceux qu'elle rencontre en sont spectateurs. Ou, s'ils vivent bien, c'est grâce à des trafics et des activités glauques. Sexe, tarifé le plus souvent, alcool, drogue, bagarres et agressions, les dix-sept ans ignorants de
Fay vont devoir apprendre très vite comment on vit quand on n'a rien, quand on n'est personne. Et découvrir que dans ce contexte-là, l'amour, si désintéressé qu'il soit, n'échappe pas à la violence. Parce que la violence est la substance essentielle, fondamentale, des jours et des nuits des personnages de ce livre, de cette Amérique-là.
J'ai découvert ce roman, après « Sanctuaire », sur le conseil d'@Isidoreinthedark. Il y a une parenté effectivement, entre ces deux univers et ces deux écritures. «
Fay » est pourtant moins pessimiste, les personnages principaux conservant une envie simple d'amour et de bonheur, y retrouvant même un besoin de droiture ; ce qui offre des pauses de respiration, des pages lumineuses, au milieu de toute cette condamnation à la noirceur.
Un beau roman, sans doute très américain, et pourtant d'une humanité sans frontières. Merci Isidore !