Confieriez-vous à l'enfant inconscient ayant mis le feu à votre maison en jouant avec des allumettes le soin d'évaluer les dégâts qu'il a lui-même commis et de vous dicter votre conduite pour circonscrire le sinistre ? Eh bien c'est pourtant l'aberration à laquelle se sont livrés et se livrent les états en recourant à
Larry Fink pionnier dans la titrisation des crédits hypothécaires avec les CMO collateralized mortgage obligation dans les années 80. En 86 bardaf, c'est l'embardée et l'ex-employeur de Fink, la First Boston datant de 1932, de se retrouver avec un trou de plus d'un milliard et de n'avoir d'autre issue que se faire reprendre par le Crédit Suisse.
Mais qu'importe
Larry Fink faisant sien l'adage politique "responsable mais pas coupable" continue de jouer avec l'argent qui ne lui appartient pas et ... Bingo 2008 ! Nouvelle crise hypothécaire US qui enflamme les marchés jusqu'à faire des ravages en Europe et la crise de la dette par un bel effet domino.
Le monstre de Frankenstein porte ici un nom :
BlackRock dont les actifs sous gestion équivalent grosso merdo à 2 fois le PIB de l'Allemagne, 3 fois celui de la France. Mais quelle est donc l'activité dont ce groupe s'est fait une spécificité ? En quelque sorte on peut la voir comme mettre sa main gauche dans la poche droite du vendeur et sa main droite dans la gauche de l'acheteur tout en prétendant avec une hypocrisie consommée échapper à tout conflit d'intérêt puisque chaque main étant en train de fourrager dans une poche est de part nature masquée à l'autre. C'est d'autant plus crédible que l'habile équipe de Mr Fink a maintenant automatisé cette tâche au sein d'un hyper-ordinateur très malicieusement baptisé Aladdin.
Bref ce ne sont plus des allumettes, mais disons le docteur Folamour assis sur sa bombe nucléaire.
Bien intéressante investigation de la journaliste financière
Heike Buchter correspondante de Die Zeit à New York pour laquelle je remercie les éditions Massot et Babelio dans le cadre de la masse critique non fiction. Pour ma part je déplore quelque peu cette espèce de côté people avec une tendance au "name dropping" et collection de cartes de visites faisant trop grand étalage de titres et fonctions n'apportant pas grand chose si ce n'est des indices de collusions et d'un entre-soi malsain avec de fréquents passages du privé au institutions publiques où
BlackRock s'est fait une spécialité de placer ses pions. J'aurais préféré au lieu de s'éparpiller en surface des révélations plus fouillées sur des exemples précis comme le rôle de
BlackRock dans le rachat de Monsanto par Bayer, les gains qu'ils ont pu en retirer et les pertes générées par ricochets aux Allemands.
Enfin je me permettrai de terminer sur une petite touche plus littéraire par cette petite fable qui m'est venue à l'esprit au cours de cette lecture, oserai-je enrichissante ?
Une grenouille vit un Boeuf
Qui lui sembla de belle taille.
Elle qui n'était pas grosse en tout comme un oeuf,
Envieuse s'étend, et s'enfle, et se travaille
Pour égaler l'animal en grosseur,
Disant : « Regardez bien, ma soeur,
Est-ce assez ? dites-moi : n'y suis-je point encore ?
— Nenni. — M'y voici donc ? — Point du tout. — M'y voilà ?
— Vous n'en approchez point. » La chétive pécore
S'enfla si bien qu'elle creva.
Le monde est plein de gens qui ne sont pas plus sages :
Tout Bourgeois veut bâtir comme les grands Seigneurs,
Tout petit Prince a des Ambassadeurs,
Tout Marquis veut avoir des Pages.
—
Jean de la Fontaine, Fables de la Fontaine, La Grenouille qui se veut faire aussi grosse que le boeuf