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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
" Mascarade est le deuxième volet d'une série de quatre ouvrages retraçant l'histoire du jazz et de la mafia pendant cinquante ans au XX ° siècle. selon un procédé inspiré par l'Oulipo, chacune des quatre parties présente une ville, une décennie, un morceau, un thème et des conditions météorologiques différentes".
Ainsi présenté par l'auteur en personne à la fin de ce roman, je vous invite à remonter le temps et à atterrir en 1922 à Chicago ,USA.
Louis Armstrong, vient d'arriver en ville . Deux détectives privés de la première agence au monde, (j'ai nommé la célèbre Agence Pinkerton ) sont chargés par une maman , de retrouver une jeune fille qui a disparu en même temps que son fiancé.
Al Capone charge Dante, ( un de ses anciens "soldats" débarqué de New-York ) , d'une enquête et un photographe de scène de crime "bosse" sur un cadavre qui pourrait bien relier tous ces personnages ...
Alcool frelaté, prohibition, attentats , macchabées, cocaïne , ségrégation, héroïne : il ne fait pas bon vivre à Chicago.
Heureusement, il y a le jazz , les clubs qui réunissent tout le monde, juste le temps d'une nuit : riches, pauvres , blancs, noirs, gangsters, putes , flics. Oui, heureusement qu'il y a la musique pour oublier... le jazz est en plein essor,
" On disait parfois parmi les musiciens que le jazz était né à La Nouvelle -Orléans et qu'il avait grandi à Chicago ."
D'une immense richesse historique, bourré d'anecdotes, ce projet de quatre romans , est sacrément ambitieux et intelligent. L'auteur est ultra documenté.
" Certains lecteurs auront peut-être remarqué que la structure du roman copie celle de l'enregistrement de " West End Blues" de Louis Armstrong telle qu'elle est décrite dans un des chapitres de la fin de l'ouvrage. J'avais l'intention de faire en sorte que mon livre suive fidèlement l'arrangement de ce morceau et que chaque personnage constitue un élément de l'instrumentalisation. je n'ai malheureusement pas tout à fait réussi "
Qu'importe ! Mascarade est comme une ballade dans les rues de Chicago dans les années 20, de jour et de nuit, , version noire, version blanche .
On sent cette ville pulser , la musique se déverser dehors sur les trottoirs. la mafia qui gangrène tout ...
On sent le monde qui change .
Un roman à offrir aux amoureux de musique , aux férus d'histoire des USA, aux amateurs de films de gangsters ...
Ne faites pas comme moi, commencez par le premier tome , "Carnaval ".
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Après avoir adoré Carnaval, c'est avec beaucoup de plaisir et d'attente que je commence ma lecture de Mascarade. Très bonne lecture, j'ai été, encore une fois, totalement happée par l'atmosphère que se dégage du roman et par son intrigue haletante ! Ray Celestin fait encore un sans-faute et nous démontre encore une fois qu'il est un auteur de policier plein de talent, vivement le prochain roman !

Neuf ans après Carnaval, nous retrouvons nos deux personnages Michael Talbot et Ida Davies, aujourd'hui associés. Après avoir arpenté les bayous de la Nouvelle-Orléans à la recherche du tueur à la hache dans Carnaval, nos deux détectives nous amènent à découvrir la ville de Chicago en 1928, là où le jazz et la mafia sont rois. Chicago est une ville aux nombreuses facettes et qui regorge de nombreux secrets. Un certain Louis Armstrong et Al Capone seront bien entendus de la partie.

En seulement quelques pages, Ray Celestin réussit le pari de nous immergé totalement dans une époque et une ville. On s'y croit réellement. Avec une plume fluide et de nombreux dialogues intelligemment écrits et percutants, l'auteur nous propose un bon petit pavé de plus de 500 pages qui se lit d'une traite. Les personnages Michael et Ida ont été un plaisir à retrouver.

Si on rajoute à tout cela une enquête policière qui mêle le clan d'al Capone et ses ennemis, on a un roman détonnant. L'intrigue policière bien que chargée d'action n'en reste pas moins plutôt dense et intrigante. Règlements de comptes, intrigues politiques, trafics en tous genres et antisémitisme seront les ingrédients principaux. On ressent encore une fois le travail titanesque de l'auteur au niveau de ses recherches. de nombreux personnages et d'événements sont inspirés de faits réels et cela rajoute réellement un plaisir supplémentaire à la lecture.

Mascarade, comme son prédécesseur, est bien plus qu'un simple roman policier. C'est un réel dépaysement pour le lecteur et c'est pour cela que je vous les conseille fortement.
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Je commence par une anecdote : ce livre est tellement prenant qu'un matin je me suis réveillé, car je rêvais que je continuais mon moment de lecture de la veille !

Ce roman suit Carnaval. Vous pouvez lire « Mascarade » sans avoir lu le tome précédent. Mais…
Vous passerez à côté d'un excellent polar, du passé de trois des principaux personnages. Alors, n'hésitez pas !

Ray Celestin écrit des polars historiques. Historiques ?
Il pioche des évènements réels : l'émergence d'une nouvelle musique, des combats de boxe, des funérailles, des criminels, existants, des hommes politiques, des villes, des personnages célèbres, des crimes…
Il tisse une intrigue, il crée des personnages pour écrire un polar prenant qui s'appuie sur une ville, une époque et des thèmes forts.
Alors c'est vrai, il prend des libertés avec les dates. Il choisit les évènements les plus spectaculaires. Il met en scène des rencontres qui ne sont pas connues ou documentées, mais qui sont probables et crédibles.
Il prend des libertés, mais il dit lesquelles en fin de livre.

Que raconte « Mascarade » ?

Une ville : Chicago
Une époque : La prohibition
Une intrigue : La fille unique d'une des familles les plus riches de Chicago a disparu et quelqu'un aimerait que cette disparition ne soit pas résolue.
Des enquêteurs : L'histoire commence assez classiquement la mère de la disparue vient demander à deux privés d'enquêter : la police ne trouve rien et surtout pas sa fille. L'enquête commence et plusieurs autres crimes attirent la curiosité d'autres personnes. Certains vont payer cher cette curiosité.
Mais petit à petit les éléments s'emboitent et se rejoignent

Il y a 4-5 personnages principaux intéressants, fouillés, ayant un passé, des motivations crédibles.
L'ambiance générale est très bien rendue. Les thèmes aussi : crimes, prohibition, ségrégation entre blancs et personnes de couleur, corruption.

Mon conseil ?

Je venais justement de regarder sur Arte La Prohibition (1920-1933) Une expérience américaine. Je vous conseille absolument de regarder le documentaire avant de lire le livre.

Le prochain roman se passe à New York. Il s'agit de « Mafioso ». J'ai hâte de le lire, mais ma Pile à Lire est vaste !
Lien : https://post-tenebras-lire.n..
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« Cadrage noir » par Jeanne Faivre d'Arcier
Le Chicago des Années Vingt vit au rythme du jazz et de la Prohibition…
Dans ce roman noir fiévreux écrit par un scénariste anglais, passent en guest stars Louis Amstrong dont la carrière décolle après un échec retentissant à New York et Al Capone qui a contracté la syphilis et commence à perdre sérieusement les pédales — ou à craindre de les perdre, le résultat étant le même quand on est hypermnésique et qu'on a assis son pouvoir sur la cruauté mentale, une connaissance très fine des failles de ses rivaux et des vices des hommes haut placés qu'on a corrompus et faits chanter.
Dans cette ville qui ne dort jamais, où les Blancs aisés dansent et séduisent pour un soir les Noires pauvres des ghettos dans les boîtes de jazz tandis que les abattoirs et les usines tournent à plein régime jour et nuit en détruisant l'environnement, une bizarre série de morts par empoisonnement touche des hommes politiques, des mafieux et des jeunes gens issus des plus riches familles. Capone s'inquiète pour son business et demande à Dante, un ami de jeunesse devenu héroïnomane après avoir perdu sa femme et toute sa famille en fournissant de l'alcool frelaté au mariage de sa soeur, de mener l'enquête. Mais Dante a l'esprit embrouillé et aussi piètre allure que le chien galeux qu'il a recueilli alors qu'il se faisait un shoot sur les bords d'un fleuve et qu'il traîne partout avec lui. Sa route va croiser celle de Michael et d'Ida, un détective blanc et son assistante métisse qui enquêtent sur la disparition, à la veille de leur mariage, d'un couple de jeunes issus des deux plus grandes dynasties de Chicago. Pendant ce temps-là, les meurtres se multiplient, étrangement semblables les uns aux autres…
Un thriller haletant qui s'inspire de faits réels et se lit d'une seule traite. Les personnages sont attachants, la description d'un Chicago en pleine effervescence passionnante. Et puis il y a ces jazzmen noirs sans le sou venus du Sud et de la Nouvelle Orléans tenter leur chance dans cette ville du Nord, froide et hautaine qui les méprise et qui, pourtant, va succomber à leur charme et vivre à leur rythme frénétique…
Lien : https://collectifpolar.com/2..
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Je découvre cet auteur avec ce second volet des aventures des détectives Michael Talbot et Ida Davies et je dois dire que je n'ai pas été déçue - manière de dire que j'ai vraiment beaucoup aimé ce livre, dont l'épaisseur m'avait pourtant un peu effrayée au début. Epaisseur qui n'est pas gratuite : il n'est rien à retrancher dans cette enquête.
Des détectives chargés de retrouver une jeune fille disparue et, éventuellement, son fiancé : un classique. Ce qui l'est moins est la couleur de la peau des détectives - pourquoi une riche femme blanche engagerait-elle des détectives de couleur ? Ah, oui : parce que son futur gendre aimait à s'encanailler dans certains quartiers chauds. Surtout, pourquoi le père de la jeune fille et le père du jeune homme sont-ils bien d'accord sur un point : ne rien faire pour les retrouver. Tout détective respectueux de sa hiérarchie (il s'agit de la fameuse agence Pinkerton, tout de même) cesserait aussitôt d'enquêter. Sauf qu'ils sentent que quelque chose clochent. Sauf que leur hiérarchie restera toujours leur hiérarchie, il n'y aura pas de moyen de gravir les échelons pour Ida. Sauf que leur première cliente leur offre les moyens (peut-être) de quitter l'agence.
Parallèlement à cette enquête, nous découvrons Dante, qui revient à Chicago après plusieurs années hors de cette ville, plusieurs années pour oublier, pour survivre avec sa culpabilité. Il revient, parce qu'Al Capone a besoin de lui, lui que tous ou presque croyaient mort. Il l'était - presque - et son retour n'a rien d'une renaissance. Il se retrouve en pleine guerre des gangs, et presque tous les coups sont permis pour obtenir la suprématie sur un territoire le plus vaste possible.
Guerre des gangs ou pas, le noyau de ce livre est la famille, les siens, les proches. Que veut-on pour ses enfants ? le meilleur ? Mais le meilleur pour qui ? Pour Michael Talbot, c'est évident : permettre à ses enfants de faire des études de leur choix. Quand on dirige un gang ou quand on s'est enrichi de manière pas vraiment honnête, on pense avant tout aux apparences, à ce qui est mieux pour soi, piégeant parfois son enfant avec des directives contradictoires. L'époque veut cela, me dira-t-on : on ne demandait pas son avis à ses enfants. Certes. On peut cependant éviter de choisir le plus déraisonnable.
Et la musique ? Elle nous réserve de beaux moments, sincères. Louis Armstrong aide Ida Davies, mais il est aussi le joueur de jazz en plein ascension, bien décidé lui aussi à garder son indépendance musicale. Il est un homme, pris entre deux amours, dévoué à son neveu Clarence, handicapé mental depuis un accident.
Il est tant d'autres choses que j'aurai à dire sur ce livre. Tenez, je n'ai pas encore parlé de Jacob, le photographe qui aide lui aussi Ida, figure charismatique et émouvante.
Mascarade, un polar historique aux intrigues complexes et développées.
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Chicago dans les année 20 est la toile de fond, et même un peu plus, qu'utilise Celestin pour camper son deuxième opus de sa saga “Michael Talbot et Ida Davies”. L'atmosphère folle de la cité est parfaitement restituée en cette période de prohibition et d'émergence du jazz, tout cela dans un contexte de racisme omniprésent. Bâti autour d'acteurs réels de l'époque tels que Al Capone, Louis Armstrong, Jack Dempsey et autres, le récit aborde certains faits réels légèrement modifiés pour mieux se fondre dans le roman comme l'explique l'auteur dans la postface.

Le coté policier alterne entre trois groupes: Pinkerton, l'Organisation (lire la mafia) et un duo policier et photographe judiciaire. Les enquêtes de tout ce beau monde se croiseront, certaines débouchant sur de surprenantes avenues. le rythme est excellent, les intrigues complexes mais étonnamment faciles à suivre, les personnages bien campés. le duo de détectives vedettes est fascinant à voir évoluer, l'époque est recréée avec brio et et les points d'intérêt ne manquent pas. C'est un tour de force d'avoir ainsi réuni ces différents aspects en un tout cohérent et à ce point évocateur. Une réussite sur toute la ligne.
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Mascarade, je viens juste de refermer les pages de ce magnifique roman de Ray Célestin . Il est comme le premier un swing sur tempo de Jazz . L'écriture historique et soignée, les termes dans le livre, aborde a été très bien choisie . L'auteur a écrit un roman magistral . Il a fait des recherches et ça se sent , se tellement bien travailler . Quand on lit le roman tout autour de soi, on a l'impression d'être à Chicago, en 1928, tout le décor autour de nous change et on se sent complètement envoûter par cette plume . On retrouve cette époque avec le célèbre gangster Al Capone , la prohibition de l'alcool frelaté, l'héroïne . Et l'histoire cette histoire berce de son de Jazz avec Louis Armstrong . Ce roman et une pépite . Ici il s'agit d'une femme appartenant à l'une des plus grandes dynasties de la ville de Chicago qui fait appel à l'agence Pinkerton . Celle où retrouvent les deux détectives Michael Talbot et Ida Davis.Aidés par un jeune jazzman Louis Amstrong vont se charger des investigations . Et ils vont se retrouver dans une histoire rocambolesque, dur , et semer d'embûches. Se à nouveau un gros coup de coeur ❤️ pour cet auteur . J'avais lu Son premier " Carnaval " que j'avais dévoré et celui de ci m'a laissé complètement satisfaite et je ne sais de source sûre que je réitérais à nouveau avec son prochain roman. Se un thriller inspiré de faits réels. Se de la dynamite , se profond , se un superbe roman avec le tempo du jazz qui résonne à chaque page. La couverture est magnifique et le livre tout bleu foncé et dorer les chapitres illustrés. Bravo 👏 l'auteur mérite vraiment d'être plus connus . 🎙
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J'avais adoré Carnaval du même auteur, avec MascaradeRay Celestin continue de nous surprendre !

Chacun de ses romans est un hommage à une époque et à une ville qui sont propres aux États-Unis, tout cela en y ajoutant une enquête policière fascinante. J'aime beaucoup son univers car il sait créer une harmonie entre une investigation à part entière, l'approfondissement des personnages et la description d'une période et d'un lieu. C'est vraiment passionnant !

Nous sommes à Chicago dans les années 20, une ville qui connait le crime, la violence c'est dans ce cadre spatio-temporel que des meurtres et disparitions vont amener des personnages à s'allier pour comprendre et résoudre cet ensemble. Est-ce une conséquence de l'arrivée de nouveaux criminels qui font de l'ombre aux anciens dans la lignée de Capone ? Est-ce l'oeuvre d'un tueur solitaire ? Deux affaires se mettent en place mais sont-elles liées ? Il n'y a aucun temps mort dans cette lecture ! Je verrais bien ce livre adapté dans la lignée d'une saison de True Detective.

Ce petit pavé de 550 et quelques pages ne se lâche pas, il nous plonge tête la première dans une atmosphère addictive et prenante, Ray Celestin est réellement un maitre du thriller historique ! Sa plume est fluide, elle passe de dialogues percutants à des descriptions pointilleuses. Mascarade est aussi bon que son prédécesseur et j'ai donc terriblement hâte de lire le prochain de l'auteur !

En définitive, un thriller incontournable et extrêmement bien maitrisé !
Lien : http://leatouchbook.blogspot..
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Second tome d'une quartologie (je ne sais pas si ça se dit ;) pour une saga en quatre tomes), dont le 4e opus ne sortira qu'à la fin de l'automne prochain en langue originale anglaise, ce livre propose une nouvelle multi-enquête époustouflante. Il reprend, en quelque sorte, les ingrédients qui ont fait le succès du premier, tout en proposant suffisamment de différences pour que ce ne soit pas un remake qui serait devenu fastidieux au fil des pages - ce qui n'est donc pas le cas ! Si je lui donne une note un tout petit peu plus basse (18 au lieu de 19/20 pour le premier), c'est peut-être parce que l'effet de surprise formidable du 1er tome, lu dans la première quinzaine de ce mois de juin, n'est désormais plus présent. Aurais-je dû lire ce 2e tome un peu plus tard, le temps de laisser couler et « d'oublier » toutes les sensations que cet auteur incroyable parvient à faire naître ?
Je crois d'ailleurs qu'on peut lire ce 2e volet sans avoir lu le précédent – bon, je n'en ai pas l'expérience, puisque je suis en train de tout lire « dans l'ordre », mais voilà : les deux personnages principaux ont mûri, on les retrouve 10 ans plus tard dans une autre ville, et si certains traits de leur passé apparaissent ici ou là (la mention à leur famille pour Michael, ou la relation avec Louis Armstrong pour Ida), ils sont de toute façon réexpliqués brièvement et ne gênent en rien ni la compréhension ni l'évolution de l'enquête.

Ainsi donc, peut-être au même titre qu'un personnage à part entière, c'est une nouvelle ville qui est mise à l'honneur : le Chicago de la fin des années 1920. Alors que La Nouvelle-Orléans était célébrée et réellement « aimée » dans le tome 1, malgré ses revers qui n'étaient jamais cachés, ici Chicago est présentée dans toute sa noirceur, sans aucune concession. On ne retrouve plus ce sentiment de profond attachement, qui n'est peut-être pas utile d'ailleurs, mais au contraire une certaine désespérance sans fond.
Mais peut-être est-ce davantage lié au contexte qu'à la ville même, quoique… Je m'explique : Ray Celestin place cet opus en pleine Prohibition, synonyme du florissement intempestif (et souvent couvert, voire encouragé par la police et les élus locaux) des réseaux de production clandestine et/ou de distribution d'alcools de contrebande – avec toutes les dérives, notamment au niveau de la santé des consommateurs, que cela implique. C'est l'âge d'or de la mafia (encore !) et en particulier d'un certain Al Capone, véritable roi de la ville, plus puissant que les puissants, richissime, c'est vraiment lui qui tire toutes les ficelles de ce trafic incroyablement lucratif (en y ajoutant quelques bordels et autres activités annexes) ; pourtant l'auteur n'hésite pas à le montrer comme très malade, aussi, ce qui paradoxalement le rend terriblement humain, presque « acceptable » (pour ne pas dire attachant, mais non, n'exagérons rien !) malgré tous ses méfaits.

Et, peut-être encore davantage que dans le 1er tome et une certaine indolence typique de cette ville sudiste qu'est La Nouvelle-Orléans, l'auteur dénonce la ségrégation qui règne à Chicago. A nouveau, il la montre à travers quelques exemples qui laissent pantois. On notera l'interdiction pour les orchestres de ce jazz de plus en plus à la mode, de réunir musiciens Blancs et Noirs, ce qui a conduit à l'appropriation du jazz par certains orchestres blancs, permettant ainsi de le diffuser dans des quartiers moins ghetto-isés, et l'amenant dès lors à un succès encore plus fulgurant, tandis que lesdits musiciens ne s'arrêtent pas, eux, à une différence de couleur, mais ne peuvent jouer ensemble que dans la clandestinité. On souligne le fait que les Blancs aisés paient des intermédiaires Noirs-mais-pas-trop pour aller s'encanailler dans les quartiers Noirs lors de certains de ces concerts, ou pour bénéficier des services de certaines jeunes filles, un autre business bien lucratif ! Surprenante aussi, et probablement vraie, la révélation selon laquelle les abattoirs de Chicago, alors parmi les plus importants au monde, n'ont pas réussi à mettre en place un quelconque syndicat pour ses très nombreux ouvriers, tout simplement parce que ceux-ci, issus de diverses origines (Polonais, Irlandais, Italiens, autre Européens arrivés après la 1re guerre mondiale, et Noirs bien sûr) ne s'entendant pas entre elles, restaient éternellement incapables de s'associer pour défendre leurs droits et intérêts pourtant communs… A noter aussi une autre forme de ségrégation, qui est ici touchée du doigt à quelques reprises : on parle d'homosexualité, alors tout à fait illégale et considérée comme une maladie, que les Blancs aisés font soigner à coups de psychanalyse et d'électrochocs en hôpital psychiatrique.

Ce qui me touche sans doute particulièrement ici, au-delà de l'Histoire, c'est que toute cette histoire de ségrégation semble avoir traversé le temps et reste accrochée à cette ville, peut-être même à tous les États-Unis (qui prétendent par ailleurs enseigner la démocratie au monde entier) ! Dans ce livre, on est à la fin des années 1920 comme je disais plus haut ; pourtant, Prohibition en moins et modernité en plus, ce sont les mêmes conditions de ghetto-isation qu'on retrouvait dans le magnifique « Devenir » de Michelle Obama, sa ville de naissance où elle a grandi à la fin du XXe siècle pourtant, situation dont elle avait pu s'extraire grâce à l'éducation (et probablement un bon lot de chance, notamment d'avoir eu des parents qui la poussaient en ce sens), mais dans le fond, c'est ahurissant de se dire que rien n'a fondamentalement changé en près d'un siècle…

Mais revenons à notre livre : on retrouve l'ex-policier Michael Talbot et l'ex-apprentie détective Ida Davis. Tous deux ont quitté La Nouvelle-Orléans pour Chicago, ils ont mûri avec 10 ans de plus, et travaillent désormais en équipe pour cette grosse agence de détectives qui employait déjà Ida. Michael reste l'image de l'incorruptibilité, il pose toujours ses divers choix dans cette optique-là, la plupart du temps avec une grande assurance, quel que soit le prix à payer. Ida quant à elle, grâce à son opiniâtreté et au soutien implicite de son aîné, a enfin obtenu un vrai poste d'enquêtrice et révèle de réelles dispositions pour ce métier. Elle reste amie, et le croise à plusieurs reprises, avec ex-Lewis devenu Louis Armstrong qui, après un passage raté par New York, est désormais en pleine ascension. Il fait partie d'un orchestre de jazz à Chicago et se découvre alors à lui-même plus que jamais, encore en début de carrière mais déjà avec la virtuosité et la reconnaissance d'un public de plus en plus conquis.

En parallèle à ces personnages du 1er tome, on a ici deux autres personnages principaux qui vont eux aussi mener la même enquête, en la prenant – comme c'était déjà le cas dans le 1er tome – par un bout différent car leurs points de départ ou motivations sont différentes.
On rencontre ainsi Jacob Russo, photographe professionnel, de plus en plus souvent armé de son tout nouveau Leica (en mentionnant au passage à quel point ce nouvel appareil a été une révolution pour les photographes !), qui immortalise les scènes de crime pour la police – nombreuses vu le taux de criminalité de cette ville ! Il rêvait de devenir lui-même policier, mais une cheville boiteuse fait qu'il a été recalé ; pourtant, il profite de son travail de photographe pour s'intéresser lui aussi aux enquêtes, soutenu par l'un ou l'autre enquêteur qui le connaissent, car il fait aussi preuve d'une grande sagacité souvent supérieure à celle d'autres policiers, et peut ainsi réaliser son rêve malgré tout, sous le titre « d'attaché » à la police.
Et on a aussi Dante Sanfelipe : ancien membre de la garde rapprochée d'al Capone, il s'est enfui à New York après le décès (par ingestion de champagne frelaté) de toute sa famille, morts plurielles dont il se sent responsable puisque c'est lui qui avait fait entrer chez lui ce champagne… Devenu héroïnomane, désabusé de la vie à laquelle il s'accroche pourtant, en compagnie de son chien bâtard aussi hirsute que fidèle qu'il a recueilli autrefois sans jamais le nommer, il retourne auprès d'al Capone qui lui confie la résolution d'une enquête qui s'avèrera (évidemment !) la même que celle de tous les autres, mais prise par un autre bout donc.

Pourtant, ici, et c'est sans doute (outre la présentation d'une nouvelle ville et la maturité des deux premiers personnages) le plus grand changement par rapport au 1er tome : les enquêtes sont menées en parallèle avec bien des différences, et offrent tout au long du livre des approches différentes dont on tente de comprendre les ramifications, mais cette fois ces différents enquêteurs vont réellement se rencontrer ! Et ainsi, les différentes facettes d'une même vérité bien complexe sont à nouveau présentées par petits bouts au lecteur (ce qui avait été un coup de génie dans le premier tome, du moins à mes yeux). Mais désormais l'auteur opte pour une approche un peu plus classique dans la résolution finale de l'enquête, en permettant à ces différents bouts de vérité de se recouper – cela dit, ça ne se fait pas en un instant ! ces « rencontres » sont mêmes tardives, et pas simultanées, ce qui permet d'entretenir un certain suspense dans le suspense – autrement dit, ce procédé des différents aspects d'une même solution est à nouveau exploité de façon magistrale, tout en permettant aux lecteurs plus « classiques » de s'y retrouver dans une résolution finale désormais complète.

À travers tout cela, au risque de me répéter, l'auteur réussit à créer un attachement fort envers ses différents personnages. La famille de Michael est nettement moins « présente » que dans le 1er tome, et à vrai dire ça m'a bien un peu manqué, mais c'est un moindre mal car son image d'incorruptible et quelque peu ténébreux détective est suffisante pour le rendre presque séduisant. Ida quant à elle prend toute son ampleur dans ce roman, entre ses contradictions toujours présentes mais mieux assumées, sa découverte de l'amour, ou son lien d'amitié indéfectible depuis l'enfance avec Louis –ce qui permet d'ailleurs de donner un « petit rôle » au musicien dans l'enquête, dépassant ainsi les seules limites du décor jazzy historique. Jacob est d'emblée attachant, peut-être à cause de son handicap qui l'a rendu pugnace, et son intelligence qu'il laisse s'exprimer. Enfin, même Dante, qui mérite sans doute un certain titre d'anti-héros (on le voit se piquer bien plus d'une fois ! pour ne citer qu'un exemple) est, à l'image d'al Capone pour qui il travaille, incroyablement humain dans son désespoir, ses regrets tout entachés de culpabilité, mais aussi son attachement pas assumé et pourtant réel envers son chien, ainsi que son désir de vivre malgré tout !

Tout cela est toujours sublimé par une écriture apparemment neutre mais toujours très précise, au scalpel, extrêmement bien traduite qui plus est. Elle est aussi très visuelle, notamment dans les scènes d'action – le passage d'Ida sur les toits du stade (chut je n'en dirai pas plus !) est vraiment exceptionnel et m'a donné des frissons !

C'est donc un nouveau tome magistral, qui fait écho au premier tout en étant probablement assez indépendant pour pouvoir être lu seul ; il est sans complaisance envers la ville de tous les délits, dans un contexte historique très lourd, mais avec énormément d'humanité dans tous ses personnages même les plus improbables. Pour moi une nouvelle, très grande réussite !
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C'est tout d'abord un plaisir de retrouver les personnages de Carnaval. La fin du roman précédent était assez ouverte, et je savais que la jeune détective Ida Davies partait pour Chicago. Ce sont donc les deux détectives, Ida et Michael, ainsi que notre jazzman favori, Louis Armstrong himself, qui vivent, une décennie plus tard, en 1928, à Chicago.
C'est la pleine époque de la prohibition. Al Capone règne sur le trafic d'alcool et gare à qui ose s'immiscer dans ses affaires ou lui faire de la concurrence !
Le début de la modernité, des premières automobiles, la grande époque des clubs de jazz va aussi avec une grande pauvreté, des discriminations moins marquées que dans le sud, mais réelles, des emplois physiques éreintants, notamment aux abattoirs, et un omniprésence du crime organisé.
Une femme de haute bourgeoisie vient demander à Ida et Michael d'enquêter sur la disparition de sa fille et de son fiancé. En même temps, un homme est trouvé mort et mutilé dans une ruelle.
D'autres personnages vont mener des enquêtes à leur manière, un photographe qui se rêvait policier, et un type hanté par son passé qui revient pourtant à Chicago où tout lui rappelle ses malheurs. Les différentes affaires vont, on le pressent tout de suite, se croiser, mais Ray Celestin n'est pas un auteur qui traite à la va-vite la psychologie pour se précipiter dans les scènes d'action. Elles existent, certes, mais il prend le temps d'installer les personnages, de créer une atmosphère, de décrire les lieux, et cette fois encore, comme à La Nouvelle-Orléans en 1918, l'effet est magistral, on s'y croirait vraiment. Pour moi, ce roman est aussi réussi que Un pays à l'aube de Dennis Lehane, et ce n'est pas un mince compliment !
L'auteur s'est donné un projet des plus ambitieux, qu'il explique à la fin de Mascarade : écrire un cycle de quatre romans, sur l'histoire du jazz et la mafia, en changeant à chaque fois de décennie, de ville, de saison, de condition météorologique, et même en y associant un thème musical ! le suivant sera en automne… à New York, bien entendu, et je me réjouis déjà de le lire.
Pour amateur de polars, certes, mais qui sont particulièrement sensibles aux aspects historiques, sociaux et géographiques.

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