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sur 1334 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Ma petite victoire de l'année, m'attaquer à un monument de la littérature classique! En fait, une fois le roman ouvert, il a été très facile d'y entrer et d'en tourner les pages, du moins au début. On rencontre immédiatement ce drôle, totalement incroyable et attachant hurluberlu qui, échauffé par ses lectures de romans de chevalerie dont il se repaît jours après jours, prend la décision ultime de se faire lui-même chevalier errant, ce qui consiste à partir sur les chemins et y trouver des combats à mener pour que justice soit gardée tout en louant et priant sa bien-aimée. Celle-ci, toute trouvée, est la paysanne Aldonza Lorenzo, rebaptisée pour l'occasion et à son insu: Dulcinée du Toboso.
Prenant le pauvre bougre Sancho Panza ("qui n'avait pas grand chose dans la cervelle") comme écuyer après lui avoir promis de lui céder la gouvernance d'un archipel dès sa première victoire, il part donc sur les chemins, se laissant guider au gré des envies de Rossinante, son vieux cheval. Sancho Panza, ne doutant pas que son heure de gloire arrivera bientôt, le suit fidèlement. Ainsi commence l'errance riche en rencontres de nos deux compagnons, l'un totalement aveuglé par ses visions irréalistes de la chevalerie et le deuxième petit-à-petit entraîné dans ses fantasmes loufoques tout en essayant de le raisonner.
Alors franchement, c'est drôle et j'ai bien ri à la lecture des aventures de Don Quichotte qui prend des auberges pour des châteaux et des servantes pour des princesses, des moulins pour des géants et des troupeaux de bêtes pour des armées (pauvres bêtes qu'il attaquera avec fureur et courage). Les deux hommes iront de bagarres en bagarres et leurs descriptions sont dignes des meilleurs films muets du genre.
Mais il n'y a pas que ça. Au moment où je commençais à de demander si les presque six cents pages ne seraient qu'une succession de ces mésaventures burlesques arrivent d'autres personnages dont le curé qui par ses ruses et sa bonté tentera de ramener Don Quichotte chez lui, l'aubergiste auquel Don Quichotte n'apportera que des malheurs, ainsi que de jeunes amoureux dont on aura conté l'histoire. Cette deuxième partie se compose essentiellement de récits d'amours contrariés et de guerres contre les Turcs. J'ai eu un peu plus de mal à entrer dans ces récits, un peu déçue, avant d'y trouver mon compte et de découvrir plus profondément les différentes classes sociales du dix-septième siècle et des règles qui régissent les unions maritales.
Il y a tout dans ce roman: de l'aventure, de l'humour, de l'honneur, de l'incroyable, de l'amour, de la violence, de l'amitié, de la poésie. En fait, j'aurais aimé les rencontrer, ces personnages, pour pouvoir les observer à loisir et peut-être même entrer les bonnes grâces de ce valeureux et courageux chevalier.
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Si je ne devais emporter qu'un seul livre dans une île déserte ce serait "Don Quichotte", chef d'oeuvre d'entre les chefs d'oeuvre.
Si je ne devais sauver qu'un seul ouvrage d'une bibliothèque en flamme ce serait "El ingenioso Don Quijote de la Mancha".
Si je ne devais sauver la vie qu'à un seul écrivain ce serait celle de Miguel de Cervantès, au soir de la bataille de Lépante (1571), où il faillit vraiment perdre la vie. Et le monde aurait été bien plus pauvre sans son "Don Quichotte" pas encore écrit.
Si je devais faire aimer la lecture à un enfant récalcitrant je lui ferais lire "Don Quichotte" en bande dessinée, ou en version abrégée pour les enfants.
Si je devais avoir la méchante maladie d'Alzheimer j'espère que le dernier livre dont je me souviendrais serait "Don Quichotte".
Lien : https://www.amazon.fr/LArtil..
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N°903– Mai 2015

Don Quichotte . Miguel de Cervantes

Je viens de relire Don Quichotte, oeuvre qu'il est inutile de résumer puisque depuis sa parution on l'a abondamment commentée. Je me suis seulement demandé si cet étrange roman n'était pas toujours d'actualité et si la folie n'était pas un refuge bienvenu surtout dans une société si marquée par la réussite, l'argent, la recherche de la notoriété, du profit, des apparences et si, face à cela qui ne me convient décidément pas, il ne valait mieux pas vivre dans un monde parallèle, si marginal soit-il, pour ne pas vivre selon les critères sus-nommés.
N'est-il pas en effet rassurant de poursuivre des « châteaux en Espagne » (sans mauvais jeu de mots) c'est à dire des choses qui n'ont aucune chance de se produire, ne serait-ce que pour nous aider à vivre dans cette vallée de larmes qu'est la vie. D'aucuns nommeront cela fantasmes, oui, et après ! Poursuivre un rêve, de préférence un peu fou, qu'on peut aussi nommer ambition personnelle n'est-ce pas un peu faire le même parcours que notre pauvre chevalier ? Comme lui on peut toujours rêver de faire quelque chose de notre pauvre vie , de marquer notre passage sur terre et ne jamais y parvenir tant sont nombreux ceux qui ont décidé de nous en empêcher, de nous trahir jusque dans notre immédiat entourage. Il en va de même quand notre pauvre ami décide de faire une confiance aveugle à ceux qu'il rencontre. Dans notre monde où la trahison est presque érigée en règle du jeu, nous savons tous, pour l'avoir expérimenté que s'en remettre ainsi aux autres est une attitude bien risquée. Quant à vouloir à toute force s'improviser redresseur de torts, même si cela témoigne d'une grandeur d'âme, cela ne peut vous attirer bien souvent que des ennuis. L'actualité est riche de ces expériences avortées.
En ce qui concerne la promesse que fait Don Quichotte à Sancho Panza de lui confier le gouvernement d'une île imaginaire, cela me rappelle, toutes choses égales par ailleurs, Don Quichotte n'étant pas susceptible de mauvaise foi, les promesses électorales dont nos élus ne sont pas avares mais qui ont la particularité de ne jamais voir le jour. Un ancien président de la République n'a-t-il pas dit qu'elles n'engageaient que ceux qui les croyaient ? Sauf que dans le cas des politiques il n'y a ni la naïveté ni l'idéalisme du Chevalier à la triste figure.
Quant à se battre contre les moulins, il nous est sans doute arrivé de nombreuses fois dans notre vie de le faire à notre tour sans forcément que l'issue soit semblable à celle qu'a connue notre pauvre chevalier. Cet épisode qu'on retient volontiers, malgré toutes les autres aventures de notre héro, est emblématique et il est évidemment facile de s'en moquer. Pour autant, n'a-t-on jamais fait, sous influence, des choses qui plus tard, la période d'émotion passée, ont heurté notre propre raison et notre propre logique ? Bien malin sans doute qui pourrait affirmer le contraire.
Idéaliser une femme comme le fait Don Quichotte en lui donnant les attributs de la belle Dulcine de Toboso, cela aussi nous l'avons tous fait, et pas forcément pour notre bonheur. Au moins notre chevalier en va-t-il pas jusqu'au mariage, reste-t-il dans son monde et n'est-il pas confronté à la trahison, au mensonge, à l'adultère qui sont souvent les conséquences de cet aveuglement.
Est-ce que cette manière de s'improviser chevalier errant à une période où ils n'existaient plus n'était pas finalement une marque d'originalité, une volonté de se démarquer face à l'instinct grégaire qui veut que chacun ressemble à son voisin ou plus sûrement à des personnages connus ? Plongé dans une société qu'il réprouve et désireux de s'en démarquer, il sera quand même rejoint par ceux qui la font et qui ne manqueront pas de saisir l'occasion d'abuser de sa naïveté et ce malgré la voix de la raison de son bon Sancho qui, à l'occasion, en profite même un peu lui aussi. Et d'ailleurs n'avons-nous pas nous-mêmes parfois saisi de pareilles opportunités au détriment d'êtres plus fragiles pour les mystifier encore davantage.
Quant à la méditation sur la vanité des choses, cela vaut bien tous les messages philosophiques ! Cette histoire sur la relativité des choses humaines est bienvenue. L'homme est naturellement porté vers la puissance, le pouvoir, la richesse. le fait d'être important un jour et le lendemain n'être plus rien est très actuel et carrément éternel, les Romains ne disaient pas autre chose parlant de la Roche Tarpéienne si proche du Capitole.
Quant à cette période un peu folle qui voit Don Quichotte, hidalgo paisible, se transformer en chevalier errant, c'est sans doute aussi la jouissance intérieure que nous ressentons tous quand le hasard nous prête ce « quart d'heure de gloire » si agréable qui nous fait sortir, forcément provisoirement, de la condition de quidam.
En réalité ce roman, derrière des apparences volontiers critiques voire comiques, me paraît camper à travers Don Quichotte un personnage emblématique de la condition humaine. Ce faisant, Miguel Cervantes a évoqué, comme le feront plus tard Shakespeare, Molière, Victor Hugo ou Céline une part de nous-mêmes.

Une des causes de la folie de Don Quichotte est la lecture effrénée des romans de chevalerie qui lui auraient asséché la cervelle. La lecture aurait donc des effets néfastes sur le cerveau. C'est vrai que même si la chevalerie n'est pas vraiment ma tasse de thé, j'aime bien les romans. Ils me procurent un dépaysement bienvenu et d'autant plus apprécié que mon quotidien se révèle de jour en jour plus délétère. Et je dois avouer que « ce vice impuni » me taraude depuis bien longtemps, cette chronique en est notamment le témoin. Pourtant, je ne me sens pas menacé. Quoique !

©Hervé GAUTIER – Mai 2015 - http://hervegautier.e-monsite.com
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Je me rappelle de mon appréhension à l'idée de lire Don Quichotte en cours de littérature comparée.
Quoi, nous pauvres étudiants, nous attaquer à ce monument ? Avaler sans coups férir ces centaines de pages d'une langue certes traduite mais probablement érudite ? En serions-nous capables ? Et surtout, allions-nous aimer ça ? C'est qu'il est long le pavé. Et lourd. Et nous en avions tant d'autres à lire...

Mes camarades et moi-même nous sommes lancés. Je ne sais plus ce qu'il en fut pour les autres, mais pour moi, quels fous rires ! Quel plaisir ! Je me suis tant et si bien attachée à l'hidalgo et à son Sancho Panza que je me suis mise en tête de le relire il y a peu. Toujours avec le même plaisir. Et les mêmes éclats de rire.

Don Quichotte, c'est ce triste sire espagnol qui ne lit que des romans de chevalerie. Tous y passent : des classiques aux méconnus, des chefs d'oeuvre aux ratés, des romans les plus sobres aux compositions les plus kitsch. Il les dévore avec tant d'ardeur qu'il en devient fou (comme quoi, la lecture est vraiment néfaste pour la santé ! Des années qu'on nous prévient et qu'on persiste et signe dans notre erreur!) et finit par se prendre pour un authentique chevalier errant, Lancelot hispanique mâtiné d'Amadis, dont la mission sacrée est de parcourir l'Espagne pour défendre la veuve et l'orphelin, combattre le mal sous toutes ses formes et oeuvrer pour le Bien avec un grand B. Tout chevalier qui se respecte se doit d'avoir une gente dame à aimer d'amour tendre et à servir. Pour Don Quichotte, ce sera Dulcinée du Toboso, une paysanne de sa région qu'il ne rencontrera jamais mais dont il chantera les louanges et la beauté face à un Sancho médusé -la jeune dame ne lui a jamais paru si gracieuse à lui!-. Parlons-en de Sancho : lui sera le fidèle valet du chevalier. Par appât du gain et un peu par affection aussi, il s'en tiendra à la conception du monde de son maître et le suivra dans toutes ses aventures, la plus ardue étant de rompre l'enchantement qui emprisonne Dulcinée. Enfin, que seraient Alexandre sans Bucéphale et Roland sans Veillantif ? Pour Don Quichotte, ce sera Rossinante, une fière et vieille jument.
Une fois équipé, Don Quichotte part en quête d'aventures. Les moulins à vents pris pour des géants ne sont que l'une d'elles et même si elle est savoureuse, ce n'est pas la plus drôle, car c'est ça Don Quichotte : un roman hilarant. Cervantes ne ménage pas son héros qui ne recule devant aucune occasion de se montrer parfait chevalier et parfaitement ridicule... Toutefois, l'auteur ne peut s'empêcher d'avoir de la tendresse pour son personnage, tendresse qu'il nous transmet. On rit de Don Quichotte sans méchanceté... Et puis, au delà du rire éclatant, il nous serre un peu le coeur aussi l'hidalgo. Il y croit tellement fort qu'il en est touchant, presque poignant. Clown grave et triste, mais clown quand même.
Cette folle histoire n'est pas écrite pour le simple divertissement du lecteur, même si elle relève brillamment ce défi ; elle est aussi pour Cervantes un moyen de parodier la littérature de son temps, ce XVI°siècle obsédé par des romans de chevalerie de plus en plus précieux et abracadabrantesques au détriment d'ouvrages plus concis, plus réalistes, plus en adéquation avec l'époque. Roman comique, plaidoyer pour une nouvelle littérature, Don Quichotte est une oeuvre tonitruante, rabelaisienne d'une étonnante modernité et d'une rare intelligence.
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Tout simplement le meilleur roman d'aventures jamais écrit selon moi. Chaque chapitre a son lot d'aventures incroyables et on en demande toujours plus. le langage est plein d'esprit et d'humour. Heureux de m'être enfin lancé dans la lecture de ce chef d'oeuvre.

Le genre de bouquin qu'on doit lire plusieurs fois dans une vie tellement c'est brillant et exquis. La portée métafictionnelle est incroyable et on comprend vite pourquoi la réputation de Quichotte est aussi vivace plus de 400 ans après sa première apparition. Cervantes a été touché par la grâce quand il a conçu cette oeuvre dont l'influence sur l'art littéraire mondial est immortelle. le vaniteux Quichotte et son compère Sancho Panza forment un sacré duo!!

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En voila un classique qu'il faut lire pour ne pas mourir idiot.Plus de mille pages qui raconte l'incroyable histoire de Don Quichotte aussi fou qu'il est sage aussi lucide que rêveur, il est accompagné dans sa tache par un drôle de loustic Sancho Panza qui tartine ses discours de proverbe plutôt bien sentit des punchlines on va dire, j'arrête la le spoil. Dans la traduction des édition Point la lecture y est très facile et fluide et j'ai beaucoup rit( J'avais même la banane par moment). J'ai le sentiment profond que Cervantes en dépit qu'il à de l'affection pour ses personnages se moque d'eux aussi (Il doit détester les romans de chevalerie) Mention spécial sur les chapitres se passant à l'auberge.Bref classique des classique qu'il faut lire absolument.
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Même les doux-dingues peuvent être les héros de nos enfants si tant est qu'ils puissent agréablement les inspirer.

Quichada, le héros, était grand amateur de récits de chevalerie, c'était l'"Emma Bovary" masculin si l'on peut dire.

Afin de vivre l'histoire de sa vie comme l'aventure d'un de ses romans préférés, le quinquagénaire se rebaptisa Don Quichotte de la Manche et s'est ainsi equipé d'une armure et sur son destrier qu'il fila son chemin à la rencontre de sa nouvelle destinée.



Il nous amuse, transposant, transformant certains aspects de sa vie et de son quotidien à la faveur du scénario qu'il s'était fixé.

Il s'est trouvé une dame à sauver, qu'il rebaptisera aussi pour le rôle qu'elle tient et se fera adouber par un aubergiste.

C'est le décalage entre la fiction de Don Quichotte et la réalité qui fera le sel de l'aventure.



Vieil illuminé plein de grâce et pétri de vertus, Don Quichotte ne peut qu'attirer la sympathie dès lors que sa mission est de faire le bien, il pourrait se déclarer Reine d'Angleterre que cela ne soucierait pas si il aidait le pauvre et l'orphelin en retour.

Bien qu'il inquiète son entourage proche tout de même, ces "folies" inspirantes, dont nous parlions, capteront les lecteurs.



Les badauds ne se priveront pas de se moquer et de jouer le jeu de ce nouveau chasseur de dragons d'un temps révolu.

Cela fait passer le temps, on imagine.

Le fada gentil sera parfois la victime de farces un peu cruelles, par principe, à priori. Ce qui amuse tout le monde semble sans états d'âme toujours de bonne guerre.

Un pauvre paysan accepta néanmoins de devenir son écuyer, le célèbre Sancho Panza. Sancho aussi se donnera l'occasion de changer son destin.



Qui a t-il à apprendre de Don Quichotte?

Son obsession des récits de chevalerie, donnant dans la comédie à la fois drôle et pathétique, fera pourtant paradoxalement de cet homme le plus honorable et le meilleur des hommes.



Les raccourcis sur le roman prévu pour des adultes offrent une aventure délectable pour lés jeunes lecteurs.

L'expérience est très drôle et le moins que l'on puisse dire, c'est que Don Quichotte est très habité par son fantasme.

Sancho est adorable en "garde malade" attentionné.

On ne sait qui sont les vrais héros, notre rêveur les yeux ouverts ou tous ses mauvais comédiens improvisés de la situation, cet autre angle transformant alors la farce en satire des gens " bien pensants".
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Parfois les personnages de romans ou de pièces de théâtre se hissent à la hauteur du mythe : c'est sans doute parce qu'ils incarnent au plus haut degré soit un type humain, soit une valeur, positive ou négative, soit encore une qualité, ou au contraire un défaut…
Don Quichotte est l'exemple même du personnage de roman devenu un mythe. En l'occurrence c'est même le mythe errant (excusez-moi, je n'ai pas pu m'en empêcher).
Alonso Quixano (ou Quijano, ou Quichano), est un hidalgo (gentilhomme) espagnol, dans la province de la Mancha (Manche). Plus riches en idées farfelues qu'en doublons et ducats, il passe son temps dans sa bibliothèque à lire des romans de chevalerie, au point d'en perdre la raison. C'est ainsi qu'il décide d'être un chevalier errant. Il fourbit les armes de ses ancêtres, transforme son vieux bidet en valeureux palefroi qu'il baptise Rossinante, et part à l'aventure. Il prend le nom de Don Quichotte, la « quixotte » ou en français « cuissot » étant une des pièces de l'armure du chevalier, et se choisit une « dame de ses pensées » qu'il nomme Dulcinée. A la première auberge (qu'il prend pour un château) il se fait « adouber » par l'aubergiste (qu'il prend pour le châtelain) et le voilà parti. Ses premières aventures, bien évidemment, se retournent contre lui, et le voilà de retour, roué de coups et contusionné, dans sa maison où sa nièce le recueille. Entretemps, le curé et le barbier ont détruit les livres qui lui ont fait tant de mal (attribuant cette destruction à des enchanteurs). Remis sur pieds, Don Quichotte n'a rien perdu de sa folie, mais cette première sortie lui a fait comprendre qu'il vaut mieux être accompagné quand on court les chemins tel un chevalier errant. Il avise donc un paysan du voisinage, Sancho Panza, dont il fait son écuyer.
Et voilà constitué un des plus beaux duos de la littérature. Nos deux héros vont vivre maintes aventures (dont celle des Moulins à vent) avant de revenir au bercail. Là, entouré de l'affection des siens, et libéré de toute influence chevaleresque, il retrouve un semblant de raison et meurt apaisé.
Don Quichotte, c'est d'abord une silhouette : un grand maigre juché sur une rosse aussi maigre que lui, avec en contrepoint un petit gros juché sur une mule. C'est ensuite la juxtaposition de deux archétypes : le fou et le sage, ou pour être plus précis, l'homme plein de déraison, et l'homme plein de bon sens. Ce qui n'empêche pas nos deux héros d'être parfaitement humains : Don Quichotte, dans sa folie, reste généreux, et même courageux ; Sancho Panza, dans sa sagesse, fait preuve de couardise et de vanité : l'être humain est un ensemble de qualités et de défauts… tout est dans le dosage ! On assiste curieusement à l'évolution de Sancho qui, de balourd plein de bon sens, devient un être fin et clairvoyant, d'un jugement assuré. Alors que Don Quichotte, lui, ne change pas une seconde, sauf à la toute fin.
Cervantès a très vite su qu'il créait un type universel. Quand il se met à écrire la deuxième partie (en 1615), il sait déjà que la première a rencontré un grand succès. Et, avec malice, il se met lui-même en scène à l'intérieur du roman pour le commenter.
Don Quichotte est une oeuvre multiforme qui appelle plusieurs lectures : on peut y voir un roman satirique (à plusieurs cibles : la folie des petits hobereaux, la société espagnole, l'influence contestable des romans de chevalerie, le déclin de cette même chevalerie), un roman politique (à plusieurs reprises l'absolutisme espagnol du Siglo de Oro est pris à partie : galériens, persécutions religieuses…), un roman métaphysique sur le sens de la vie, la sagesse et la folie, l'absurde ; dans la forme, également, il est novateur, faisant le lien entre une littérature post médiévale, marquée encore par les romans de chevalerie (il les tourne en dérision, mais utilise les mêmes ressorts), et les romans picaresques du XVIème siècle (Aleman, Quevedo).
Le succès de Don Quichotte a cependant un revers de la médaille : le meilleur roman espagnol de tous les temps (ce qualificatif lui a été donné dès sa sortie) n'a pas eu de postérité : il faudra attendre le XXème siècle pour voir des écrivains espagnols atteindre une audience universelle (et encore ce sont plus souvent des poètes que des romanciers).



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Quand le temps vint de remplir mes onze mois d'obligations militaires, au début des années 70, je me suis mis en tête d'y lire les grands classiques : la Bible (chiant), Proust (pas mal), Rabelais (savoureux). Mais rien qui n'arrive à la cheville du Don Quichotte de Cervantes.

Tous les jours, je trimballais mon gros bouquin jaune (éditions Garnier, les deux Livres en un) dans la poche latérale de mon pantalon de treillis ( vachement pratique pour marcher au pas !). Je le dévorais à la moindre occasion, en rejoignant le pas de tir, au pied de la rampe de lancement de missiles sur laquelle on m'avait affectée, pendant les transports en camion, le soir dans la chambrée…

J'adorais ce type complètement frappadingue… mais toujours du bon côté du manche de la vraie justice et de l'honneur chevaleresque et des amours impossibles. Orson Welles disait de Don Quichotte qu'il était l'incarnation de l'élégance poussée jusqu'au délire.
Lien : https://www.yeti-editions.fr/
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Un classique que je n'avais jamais lu mais il n'est jamais trop tard pour découvrir un tel roman. L'occasion m'en a été donné par le site lecteurs.com et les éditions "le livre de poche" que je remercie au passage.

Pas de suspens, j'ai adoré ce premier volume. Ce roman m'a d'abord frappé par sa modernité, il n'a clairement pas pris une ride et c'est un vrai tour de force. Mais cela ne s'arrête bien sur pas là et ce roman a d'autres (très) nombreuses qualités. En vrac, et sans en faire trop puisque beaucoup de critiques on déjà été publiées sur ce roman et tout semble avoir été dit, c'est remarquablement bien écrit, c'est drôle voir très drôle, c'est fin...Bref, que des superlatifs.

Les personnages sont attachants (et parfois énervants mais c'est voulu et sans excès). Quelques longueurs peut-être mais la plume est tellement bien maniée que ce n'est absolument pas gênant, cela me dérange presque d'employer le mot "longueur" tant le plaisir est là et on voudrait que cela ne s'arrête pas, ça continuera d'ailleurs un peu avec le tome 2.

Par ailleurs, les nombreuses critiques sur la société (qui s'appliquent d'ailleurs encore aujourd'hui pour la plupart) renforcent la profondeur de ce roman. le côté parodique du roman de chevalerie ne donne jamais l'impression d'être trop forcé, tout est savamment dosé et c'est assez remarquable pour le souligner.

Voilà ce que je pouvais dire sur cet ouvrage, pas besoin d'en rajouter, je ne pourrai de toute façon jamais écrire une critique qui soit à la hauteur de ce monument de la littérature que je recommande sans hésiter au plus grand nombre.
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