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sur 1328 notes
Qui est Don Quichotte ?
Pour écrire cette critique il m'a fallu non seulement rassembler des souvenirs, ce qui n'est pas encore si difficile, mais également tâcher d'aller au-delà et, ce faisant, affuter mon propre sens critique et le diriger vers moi-même dans un lourd travail d'introspection.
En effet, qui est Don Quichotte ? Question a priori simple qui appelle des réponses complexes et variées, presque aussi diversifiées qu'il y aura de sombres illuminés pour se la poser.
Don Quichotte, c'est quelqu'un qui est en décalage avec le monde dans lequel il vit. Un membre d'une époque qui rêverait d'en habiter une autre, plus ancienne, plus noble, plus féérique à ses yeux. Cette époque rêvée il ne la connaît pas, il l'a seulement fantasmée à partir de livres désuets et fabulateurs qui, même en leur temps, étaient des légendes, des symboles, des paraboles tout sauf la réalité d'un moment.
Don Quichotte refuse de voir les évolutions en marche, il reste campé, braqué, les quatre sabots fichés dans le sol comme une vieille bourrique qui refuse d'avancer.
Ouvrir les yeux, voir la réalité en face c'est renoncer à son rêve, c'est renoncer à sa définition du bonheur, c'est perdre le sens de sa vie. Voilà pourquoi son cerveau, qu'un oeil extérieur pourrait juger défaillant, s'ingénie à déformer les réalités, les patentes erreurs qu'il commet, les lourds revers qu'il essuie pour les faire cadrer avec son monde fantasmé, bâti de toute pièce, son monde chéri, ce qui lui donne l'impression de vivre. C'est la définition même du bovarisme poussé à l'extrême.
Quand je dresse ce tableau et que j'ai l'outrecuidance de me regarder moi-même à l'oeuvre, mes classiques à la main, ces livres d'un autre temps, quand je sonde mon coeur pour découvrir quels sentiments j'attendrais de mes concitoyens, force m'est de constater que moi-aussi, moi surtout, peut-être, je suis une manière de Don Quichotte.
Qui est Don Quichotte ? Don Quichotte, c'est moi.
Quand, par les temps qui courent, je m'en vais au vent mauvais, qui m'emporte, deçà delà, pareille à la feuille morte dans sa monotone chanson d'automne, que je furette à droite et à gauche, que j'observe tout le monde, que j'observe chacun, je vois que nombreux sont ceux qui affectionnent les histoires de pirates ou de Moyen-Âge, les mondes peuplés d'elfes et de Hobbits, les ouvrages dits de fantaisie héroïque, les enquêtes fabuleuses des années 1920 ou bien encore les sagas étoilées riches en sabres laser qui débutent toutes par un lancinant " Il y a longtemps, très longtemps, dans une galaxie lointaine, très lointaine... " bref toutes choses fantasmées et révolues. Je me dis alors que vous aussi vous vivez dans les brumes, dans les vapeurs éthérées d'un rêve qui vous extrait, l'espace d'un instant, des noirceurs et des contours trop nets de la réalité ; je me dis que vous aussi vous vous téléportez par la pensée dans des époques lointaines et qui jamais, sûrement, n'ont existé ou n'existeront ; je me dis enfin que tuer cette aptitude à rêver vos vies ce serait vous tuer pour de bon car même les dictatures les plus féroces qui ont pu faire tant de mal aux hommes n'ont jamais totalement réussi à les empêcher de s'extraire du réel par le rêve.
En somme, qui est Don Quichotte ? Don Quichotte, c'est vous.

À ce stade, il me faut certainement dire un mot ou deux de l'impression suscitée par ce roman à la lecture. J'ai souvenir d'un démarrage sur les chapeaux de roues, particulièrement drôle et efficace au début, peut-être jusqu'au premier tiers, d'un milieu de roman qui, sans être désagréable, m'a semblé plus poussif, un peu lassant à la longue et répétitif par ses situations toujours un peu téléphonées, mais d'une fin qui retrouve un élan magistral.
C'est ce milieu surtout qui explique mes quatre étoiles sur le ressenti global. Il me faut aussi préciser que L'Ingénieux Hidalgo Don Quichotte de la Manche est une oeuvre à facettes ou à plusieurs niveaux de lecture.
Il y a d'une part la narration et son style, qui sont responsables d'une bonne partie de l'impression générale de la lecture et il y a d'autre part la portée philosophique, politique, sociétale, littéraire et historique du roman.
Don Quichotte c'est la naissance du roman. Avec votre oeil d'aujourd'hui, vous pouvez peut-être lui trouver un petit côté poussiéreux, mais si on le met en place dans la succession historique de la production littéraire, ce livre marque une évolution heureuse, l'un des tout premiers apanages de ce que l'on nomme désormais le roman.
La technique narrative est basée sur le décalage. Dit autrement, c'est la définition même de l'humour et de la situation comique. Est drôle ce qui est décalé par rapport à ce que l'on sait d'une norme ou d'une réalité.
Miguel de Cervantès a aussi la géniale intuition de rafraîchir le dialogue à la Platon. Il fallait donc un interlocuteur privilégié à Don Quichotte. Il a encore l'intelligence de jouer sur le contraste : l'un sera aussi haut et grêle que l'autre sera court et replet. le maître sera d'autant plus évanescent dans les nuages que le serviteur sera prosaïque les pieds dans la fange. L'un aura un langage aussi affecté et recherché que l'autre maniera la langue torse de ceux qui lèchent les pots de confiture.
Vous avez deviné que cet acolyte de choix n'est autre que le paysan Sancho Panza. C'est un personnage-clé car il permet soit de mettre en évidence les décalages de son maître, soit d'être un degré de folie intermédiaire entre les " saints d'esprit " et Don Quichotte, soit de permettre un double décalage comique de part et d'autre d'une ligne médiane.
À mon avis, la plus grosse portion de la critique sociale, de la dénonciation politique de Cervantès repose sur ce personnage de Sancho. Comme s'il nous disait : " Vous êtes sains d'esprit vous, pourtant ! Vous êtes aptes à voir la réalité vous, pourtant ! et vous foncez tête baissée dans les discours et les chimères de ceux qui vous gouvernent. L'autre, c'est un fou, mais, vous, VOUS, qu'êtes-vous si vous adhérez à sa folie ? "
Je me plais à voir dans le Quichotte une bourrade farouche contre la religion, faite de fantasmes qu'on nous demande de suivre aveuglément, une institution sclérosée incapable de percevoir les évolutions du monde, qui répète ses dogmes inlassablement même quand les plus élémentaires réfutations viennent contredire tout l'édifice nébuleux dont elle est constituée. On sait que l'Espagne de Cervantès est étranglée par une religion omniprésente, omnipotente et omnipressante.
Ce qui caractérise le couple Don Quichotte / Sancho Panza c'est cette incroyable naïveté à toute épreuve. Dans ce long voyage initiatique on perçoit l'annonce des Lumières, tels le Candide de Voltaire ou, plus flagrant encore, le Jacques le Fataliste de Diderot. le message étant : il y a le monde comme on vous l'a dit et le monde tel qu'il est. Les deux images ne concordant pas, vous vous en doutez.
Nous même, depuis que nous sommes petits, on nous rebat les oreilles avec ces histoires de démocratie, de république, de choix des citoyens et de " élu par le peuple pour le peuple ". Certains y croient toute leur vie, ils pensent sincèrement qu'ils ont le choix alors qu'un élémentaire esprit d'analyse leur prouverait que tous ces hommes, de gauche, de droite, du milieu, du haut, du bas, sont tous des copains de promo, qu'ils viennent tous du même milieu et qu'ils repensent périodiquement au peuple, quelques semaines avant le renouvellement de leur CDD. On sait bien que le suffrage universel n'est qu'un leurre et que ce qui compte c'est le choix dans le candidat, choix qui n'existe absolument pas. On sait bien que toute notre vie on se fait rouler dans la farine de ce gigantesque dîner de cons, mais pourtant, nombreux sont ceux qui s'imaginent encore vivre dans une réelle démocratie, que les informations sont objectives, qu'ils ont une parfaite liberté de choix, etc...
Qui est Sancho Panza ? Sancho Panza, c'est nous.
Oeuvre majeure s'il en est, qu'on a intérêt à lire soit pour son volet de critique sociale, soit pour son volet de critique politique, soit pour son volet philosophique, soit pour son volet d'information historique sur l'Espagne du siècle d'or mais je persiste à penser que le grand, grand intérêt du Quichotte, c'est de le lire pour tout le comique qui est contenu dedans et qui, à lui seul, nous ouvre les portes d'une réflexion tournante et enlevée, comme les ailes d'un moulin. Au demeurant, ceci n'est que mon avis, long et grêle monté sur animal squelettique, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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Dans ce conte à épisodes, histoire à n'en plus finir d'une grande drôlerie,
Cervantes nous invite à rire de la folie de son héros à la tête farcie de ces absurdités que l'on trouve dans les romans de chevalerie — genre très prisé notamment en Espagne entre 1300 et 1600, où tout le monde aime à en écouter (on en fait des lectures publiques) ou à en lire, le peuple comme les têtes couronnées.

Parodie désopilante des romans de chevalerie, véritable critique sociale au moment où la puissance espagnole connaît une crise décisive, Don Quichotte est aussi une oeuvre émouvante. Peut-être parce qu'elle a beaucoup à voir avec la vie mouvementée de Cervantes, qui fut blessé pendant la bataille victorieuse de Lépante contre les Turcs, puis plus tard emprisonné à Alger pendant cinq longues années en attente d'être racheté.

Des épisodes traumatisants qui furent malheureusement suivis d'autres. Mais si toute sa vie Cervantes rencontra des difficultés familiales, professionnelles et financières, celles-ci ne furent sans doute pas étrangères à l'ironie tendre et la bonté foncière portées à ses personnages, qui d'une oeuvre d'une modernité immarcescible en ont fait un inoubliable chef-d'oeuvre d'une humanité profonde.

Challenge MULTI-DÉFIS 2020
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L'avantage d'avoir peu de grands lecteurs dans son entourage, c'est de pouvoir découvrir les grands classiques comme les sorties littéraires du mois, sans avoir la moindre idée de ce qui nous attend. de don Quichotte, je ne connaissais qu'une très vague histoire de moulins, qui a d'ailleurs le bon goût d'apparaître très tôt dans le livre, faisant des 1400 pages restantes une surprise continue.

Cervantès développe le thème, qui reviendra à chaque nouveau média, du virtuel qui contamine le réel : à force de lire des romans de chevalerie, don Quichotte se persuade que le monde est peuplé de géants vindicatifs, de princesses désespérées et d'enchanteurs malicieux. Il décide alors de ressusciter l'errante chevalerie, et se met en route, avec une vieille rosse, une armure de carton, et Sancho, son écuyer d'une naïveté sans égale, en quête de royaumes à sauver et d'orphelins à défendre.

Et ces aventures, contre toute attente, le duo les trouve ! L'imagination débordante de don Quichotte lui fait prendre les moulins pour des géants, et les troupeaux de moutons pour des armées en campagne. Devant son comportement étrange, certaines personnes s'énervent et en viennent aux mains, devenant dans l'esprit du chevalier un duel dans les règles de l'art. D'autres s'amusent à leurs dépens en les plaçant dans des situations impossibles. Même quand le pot aux roses est sur le point d'être découvert, les incohérences sont mises sur le compte d'un enchanteur particulièrement tenace.

Je m'attendais bien à tomber sous le charme désuet des livres anciens avec celui-ci, mais certainement pas à rire autant. Que ce soit dans les situations ou dans les répliques, le mélange de sagesse et de folie fait souvent mouche. J'ai aussi trouvé l'écriture étonnamment moderne (caractéristique du roman ou tour de force du traducteur?). Ce roman m'a accompagné pendant deux mois, et c'est avec regret que j'ai tourné la dernière page. Les classiques, ça fait peur, mais c'est souvent payant !
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CDXLVIIMXIX
Qui traite de mes impressions de lecture sur les aventures d'un Chevalier Errant

Les Moulins de Don Quichotte (à pas confondre avec ceux de Michel Legrand). Voilà l'image d'épinal pour l'imaginaire collectif, notamment des espagnols pour qui le Quichotte est un livre incontournable du parcours scolaire. La France a connu les farces de Rabelais, avec Cervantès, l'autre versant des Pyrénées n'a rien à nous envier.

Avec Don Quichotte et Sancho Panza, Cervantès invente, avec génie, le duo comique. Ce duo nous parait aujourd'hui familier et répandu, le cinéma s'en est largement emparé. L'humour débridé, les nombreux gags potaches, qui ont besoin de la personnalité de l'un comme de l'autre pour fonctionner semblent nous indiquer une permanence dans le comique. En effet, quatre siècles plus tard nous rions encore des quiproquos, de la bêtise et de la folie et les sketches « bigardiens » n'ont rien à envier à la scène déconcertante de la colique de Sancho Panza que l'on pourrait écrire à l'identique aujourd'hui !

Avoir un léger « background » en littérature chevaleresque n'est pas un prérequis mais peut être un atout utile, qui m'as sans doute manqué, car la dérision de Cervantès n'est pas hors sol (codes, errance, pénitence, langage etc) mais, en plus d'être très érudite, elle aime à détourner nombre d'oeuvres connues des afficionados de cette littérature, condamnée par l'Eglise, mais adorée par les puissants eux-mêmes comme Charles Quint ou François Ier.

Cervantès aime à nous faire croire que cette oeuvre monumentale a été rapportée par un historien maure et ce n'est peut-être pas tout à fait un hasard, certaines exégèses de son oeuvre y voient une forte influence arabe.

Mise en abime. C'est aussi un roman à « épisodes » à l'image de l'Heptaméron de Marguerite de Navarre, où nous laissons à plusieurs reprises l'intrigue principale de l'Hidalgo de la Mancha pour nous plonger dans des contes ou longs souvenirs narrés par les personnages eux-mêmes. Cela peut parfois être exaspérant pour le lecteur qui a l'impression de lire plusieurs livres en un mais cela participe de l'intérêt du livre.

« La bonne volonté peut faire autant de dégâts que la méchanceté, si elle n'est pas éclairée ». Don Quichotte me semble être l'incarnation de cette phrase d'Albert Camus. En effet alors même que Don Quichotte s'engage sur un code d'honneur moral sans faille, dans la réalité (qu'il perçoit si peu) il fait exactement l'inverse. Qu'il libère des prisonniers justement condamnés ou qu'il pense faire le bien en libérant un serviteur qui sera, dès son départ, roué doublement de coups, chaque fois qu'il entreprend de venir en aide à son prochain, l'enfer étant pavé de bonnes intentions, cela se termine mal, sans mentionner les nombreuses fois où, aveuglé par le folklore de son imaginaire chevaleresque, il s'attaque gratuitement à de simples voyageurs ou passants sans aucune raison. C'est le paradoxe de Don Quichotte qui nous pousse à réfléchir sur la notion d'intention et sur celle de conséquence.
A l'heure du bilan, suffit-il de vouloir faire le bien ou n'importent que les conséquences positives y compris d'une action que l'on voulait nuisible au départ ?

Ensuite, comme l'explique dans sa contre-histoire de la littérature Michel Onfray, pour Don Quichotte, le réel n'a pas eu lieu. Cela est immanquablement illustré par ses dialogues avec Sancho Panza qui s'évertue à le confronter au réel (alors même que le curé et le barbier savent que pour venir à bout de l'entêtement de l'Hidalgo, il faut entrer sur son terrain, dans son jeu).
A chaque fois qu'il est rattrapé par l'évidence, Don Quichotte met toute sa volonté, toute sa foi, et toute son intelligence à la fuir, à la contester, Onfray parle de « dénégation ». Il fait le lien avec notamment la politique, hypertrophie de la dénégation. On se crée un monde illusoire et cohérent et surtout lorsque la réalité nous rattrape, lorsque l'on est pris la main dans le pot de confiture, toute la rhétorique est mobilisée pour nous dire que ce n'était pas notre main, et que ce ne n'était pas non plus un pot de confiture.

L'imaginaire n'est excusable et admis que chez les enfants et les vieillards n'est-ce pas ? Qui imagine un homme, dans la force de l'âge, intégré dans la société, commencer à jouer la comédie, à inventer sa vie. Qui peut devenir chevalier sans passer son “diplôme”, sans être coopté par ses pairs, dans son milieu ? Il n'y a que deux formes d'inventions permises dans la société, la catharsis du théâtre ou du cinéma, confiné à un espace limité, et l'hypocrisie sociale, la « communication ». Autrement, la société a prévu des infrastructures psychiatriques où isoler les fous.

Mais Don Quichotte, avec ses chimères et son panache, n'a cure de ces conventions sociales, il s'autorise l'imaginaire, il va vivre plusieurs vies en une. Est-ce pour fuir l'ennui de n'être que soi ? Valéry écrivait « mon possible ne m'abandonne jamais », l'Hidalgo n'est il pas simplement à la recherche de son « possible » ? N'a-t-il pas décidé qu'il vivrait son « possible » dès à présent, sans se confronter aux obstacles qu'une carrière de chevalier lui infligerait dans la vraie vie ?

Lassé des pastiches et des usurpateurs avides de faire du commerce sur le dos de l'Hidalgo, Miguel de Cervantès reprendra la plume, près de quinze ans plus tard, pour faire revivre son Don Quichotte dans un second tome.

“Toi chevalier, avec ta droite épée
Dans les bois rigides, tu poursuivras
Ton pas, le temps que dureront les hommes,
Imperturbable, illusoire, éternel”
Jorge Luis Borgès.

LXVCIXIVI
Où d'autres lecteurs donnent leur avis sur les aventures de l'Hidalgo Don Quichotte de la Mancha : Qu'en pensez-vous ?
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Don Quichotte, c'est avant tout une guerre littéraire que Cervantès entreprend en faveur d'une littérature plus réaliste et originale contre les romans de chevalerie qui sont, d'une part, pleins de rêve et de magie, et d'autre part, une répétition à l'infini autour d'un même thème jusqu'à la saturation.
L'absurdité et le ridicule de l'idéal chevaleresque seront d'abord exposés par le biais du personnage de Don Quichotte, ce petit provincial à qui les romans de chevalerie ont tourné l'esprit à un tel point qu'il se croit réellement chevalier en mission dans un monde rempli de sortilèges et d'enchantements. Comme tout chevalier a besoin d'un écuyer, Cervantès lui fournit le secours de Sancho Panza, petit gros bonasse, peureux et superstitieux, mais également doté d'un gros bon sens rusé de paysan. Comme cheval, Don Quichotte devra se résoudre à une rachitique bestiole nommée Rossinante et en guise de dame à aimer, Dulcinée du Toboso, une paysanne des environs qu'il ne verra jamais deviendra l'élue de son coeur. Enfin, toute l'histoire consiste à promener son illuminé sur sa branlante monture avec son paysan d'écuyer dans les parages de leur village où ils s'émerveillent, s'effraient et s'enorgueillissent de leurs mésaventures insignifiantes pour le plus grand plaisir du lecteur.
D'autre part, Cervantès impose son propre style, déjà moderne, en intervenant personnellement afin d'introduire un constant rapport à la réalité au coeur même de son écriture. (À noter que Chrétien de Troyes intervenait aussi déjà personnellement dans ses premiers romans de chevalerie, mais que c'était plutôt pour faire de la surenchère vers le merveilleux que pour ramener son lecteur sur terre.) L'auteur s'amuse aussi à singer l'expression souvent fleurie à l'excès des mauvais romans de chevalerie pour accentuer la bouffonnerie et le ridicule des situations.
Cervantès use également de la position de « fou » qu'il a donné à Don Quichotte pour juger, en étranger d'occasion, les absurdités qui se glissent, par quelque détours de l'histoire, au sein de toutes structures sociales normales, comme le feront Montesquieu dans ses Lettres persanes ou encore Cyrano de Bergerac dans ses voyages sur la lune et le soleil.
Enfin, et c'est l'essentiel pour qu'une oeuvre intelligente et brillante devienne un classique de la littérature, le roman, dans tous ses détails, est un véritable plaisir à lire. On se laisse entraîner à survoler les excursions de Don Quichotte, Rossinante et Sancho Panza, toujours le sourire aux lèvres, parfois en riant franchement et même, comme il m'est arrivé quelques fois, en riant au point de devoir interrompre ma lecture car je riais jusqu'aux larmes. Et le plaisir quelque peu extrême qu'a provoqué chez moi ce livre ne date pas d'hier. Prosper Mérimé, dans une préface au chef-d'oeuvre de Cervantès, rapporte, en effet, que « Philippe III étant à un balcon de son palais de Madrid...aperçut un étudiant qui lisait au bord de la rivière, riait, se frappait le front et donnait les signes d'un plaisir extraordinaire. « Ce garçon est fou, dit le roi, ou bien il lit Don Quichotte. » Un courtisan s'empressa d'aller demander le titre de ce livre si amusant : c'était en effet le Don Quichotte. »
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Que dire si ce n'est de vous encourager à courir acheter ce livre et à le lire ! Enfin, dans la traduction offerte par la collection Points Seuil, bien plus accessible que d'autres pour avoir lu les prologues dans trois éditions différentes.

L'histoire des moulins à vent, ce n'est que la première aventure, il y en a tellement d'autres. Et puis, l'auteur profite de la moindre occasion pour faire l'une ou l'autre digression sur les moeurs de son époque, avec un modernisme étonnant.

Mais surtout, Cervantes nous offre un humour indéfectible, une immense parodie de son temps et c'est fort plaisant à lire. Pour ceux de ma génération, qui ont vu les films des Monty Python, je dirai qu'ils ont dû s'inspirer de l'humour de Cervantes tant le leur est comparable.

Ne vous dites pas, c'est vieux, certes l'ouvrage date, mais pas ces aventures qui m'ont bien divertie.
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J'aurai mis le temps à découvrir ce grand classique! Pour être honnête, je redoutais justement le classicisme de ce roman. Je craignais que cette écriture du 17ème siècle racontant les aventures d'un chevalier errant et de son écuyer soit particulièrement ennuyeuse et poussiéreuse... et je freinais des deux pieds à l'idée de me plonger dans la lecture d'un ouvrage de plus de 1 100 pages! Et puis, ce fût une excellente surprise. Nos deux héros, don Quichotte et Sancho sont deux personnages sympathiques et attachants. Ce livre est très drôle, alerte, très agréable à lire, et excessivement moderne. J'ai adoré au point de recommander cette parodie de roman de chevalerie à mes amis lecteurs. Donc ce Cervantès est vraiment une valeur sûre et un roman qui amuse et dépayse. Excellent livre!
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Je remercie Masse Critique- Babelio jeunesse de m'avoir offert la possibilité de revisiter l'immense Don Quichotte à travers cette édition pour tout-petits ( les parents sont les bienvenus...), en papier cartonné, superbement illustrée. Quelques pages au graphisme de qualité ( le dessinateur Frédéric Laurent a le trait sûr et les couleurs de ses pinceaux régaleront les pupilles des lecteurs ) permettront aux uns et aux autres de s'immerger dans la légende de ce gentilhomme tellement féru de livres de chevalerie qu'il décide de devenir l'un d'entre eux et de se faire le défenseur des faibles et des opprimés. Ses aventures leur permettront de découvrir ou de retrouver sa monture "Rossinante", son fidèle serviteur " Sancho Panza", sa bien-aimée " Dulcinée du Toboso ", ainsi que quelques uns de ses incontournables combats contre " les moulins-géants ", contre " une armée de moutons ", son duel contre " le chevalier de la Blanche Lune ". Bref un panorama qui met en relief ce que tout un chacun se doit de connaître sur ce mythe monument de la littérature.
Une très bonne surprise, et à l'approche des fêtes, pour un anniversaire ou tout simplement en cadeau pour le plaisir de faire plaisir, je n'hésiterais pas, si j'avais des enfants, des petits-enfants, des neveux, des nièces ou un gamin à qui offrir du rêve intelligent, à me tourner vers ce genre de présent... présent qui donnera sûrement aux lecteurs devenus grands l'envie d'acquérir l'oeuvre originale du grand Miguel de Cervantès...
Un petit livre que je recommande vivement.
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Je remercie chaleureusement les Éditions Balivernes ainsi que Babelio pour cette lecture et leur confiance !

Quel plaisir pour les parents d'initier leurs tout-petits à un texte aussi inventif, truculent, joyeux et drôle que le célébrissime roman d'aventure de Miguel de Cervantès « Don Quichotte » devenu un mythe à transmettre de générations en générations.

Le texte adapté pour les tous petits par Pierre Crooks d'après Miguel de Cervantès est un pur bonheur pour petits et grands. En 20 pages, votre tout jeune enfant va suivre cette histoire cocasse qui va le faire rire grâce aux merveilleuses illustrations d'un dessinateur, Frédéric Laurent, qui a déjà travaillé avec les Editions Balivernes pour l'adaptation des « Trois Mousquetaires ».

La collection « Farfadaises » des Editions Balivernes réserve de très jolies surprises. Ma nièce de 5 ans, Léane, a adoré « Don Quichotte » et les illustrations savoureuses de Frédéric Laurent. Un livre qui pour un prix modeste (moins de 10 euro) va faire rire votre enfant, développer son imaginaire, le faire rêver tout simplement.

L'épisode des Moulins à vent pris pour des géants par Don Quichotte est sans doute la plus emblématique des séquences. Don Quichotte et son fidèle destrier « Rossinante », Sancho Panza son modeste écuyer, et des aventures nombreuses pour retrouver la belle princesse Dulcinée de Toboso.. Tout est mis en place pour que texte et illustrations accompagnent aux mieux la lecture des parents et le regard amusé de vos tout-petits.

En ces temps difficile pour les petites maisons d'éditions, les librairies, les illustrateurs, les auteur(e)s, pensez à offrir à vos enfants, neveux et nièces en bas âge, pour les fêtes de noël et pas seulement, des livres des Editions Balivernes. Ils sont un gage de qualité et ils offriront un moment de doux partage entre les parents, grands parents et leurs tout-petits.

« Don Quichotte » c'est intemporel, culte et surtout c'est très drôle. Je tiens à saluer tout particulièrement le travail d'illustrateur de Frédéric Laurent qui est une franche réussite. Je vous recommande chaudement ce « Don Quichotte » paru aux Editions Balivernes.
Lien : https://thedude524.com/2020/..
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Un coffret somptueux . Je n'ai pas souhaité qu'il soit emballé dès son achat, pour pouvoir en profiter, juste un peu, avant de l'offrir, cadeau de Noël pour un de mes proches.
Une édition prestigieuse , traduite par Louis Viardot (1800-1886) , illustrée par Gustave Doré (1832-1883). Les dessins sont hyper réalistes, ils expriment avec une rude vérité les physiques, les mentalités, les tourments, ceux de ce pauvre hidalgo utopiste, fiévreux, maboul , de son serviteur, le replet Sancho, de bien d'autres personnages, ils décrivent férocement par de multiples détails cette Espagne du Siècle d'or, riche et rigide , on y retrouve les paysages spectaculaires de Castille et de la Manche, les géants de Consuegra, Don Quichotte dans son lit, agonisant...
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