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EAN : 9782910233044
95 pages
1001 Nuits (01/02/1998)
3.21/5   7 notes
Résumé :
L’Amant généreux est l’un des douze textes qui composent le recueil des Nouvelles exemplaires, paru à Madrid en 1613.
« J’ai donné à ces nouvelles le titre d’exemplaires, car à bien les considérer il n’y en a aucune dont on puisse tirer un exemple utile » (Miguel de Cervantès, 1547-1616).
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
C'est par cette nouvelle extraite du recueil "Nouvelles exemplaires" que je fais la connaissance de Miguel de Cervantes, le père du célèbre Don Quichotte.

L'histoire est simple et semble emboîter le pas aux tragédies shakespeariennes : Ricardo, un bel Italien au tempérament passionné, est depuis toujours violemment épris de Leonisa, une jeune femme auprès de laquelle il a grandi et qui réunit à elle seule toutes les grâces, les vertus, les qualités et les talents que les autres femmes doivent d'ordinaire parcimonieusement partager entre elles.

Fort de ses sentiments, Ricardo n'a visiblement jamais douté qu'à l'heure où l'Amour frapperait à la porte de leurs coeurs, sa belle amie tomberait naturellement et sans effort dans ses bras virils. Or, un autre soupirant, quoique moins empressé, semble prendre auprès de Leonisa la place tant convoitée par Ricardo. le sang de ce dernier ne fait qu'un tour et alors que rien ne laisse encore supposer un amour partagé entre Leonisa et son galant, notre bouillonnant Italien va provoquer un scandale en public. Or, au même instant, coïncidence ou Providence, voilà que des Turcs débarquent (littéralement puisqu'ils viennent d'accoster) et enlèvent Leonisa et Ricardo, séparant les prisonniers...

Vient une tempête, le navire qui emmène sa dulcinée loin de Ricardo se brise sur les rochers, laissant peu d'espoir quant aux chances de survie des passagers...

Voilà, vous n'en saurez pas plus, mon synopsis deviendrait alors un spoil et ça, non, non, non, je m'y refuse, ce ne serait pas bien du tout !

Nous sommes au début du 17ème siècle, ce qui signifie que pour le style, ne vous attendez à rien de "fluide" (clin d'oeil appuyé aux initiés).

Pour ce qui est des personnages et bien, que dire ?
A cette époque, il devait vraiment être merveilleux pour une femme (noble, cela va sans dire) d'être adulée, adorée, vénérée... car non seulement les hommes de ce récit semblent prêts à toutes les extrémités pour obtenir une faveur de leur belle (et attention, je ne parle pas d'une nuit d'amour, je ne parle pas non plus d'un baiser, je ne parle même pas d'une caresse sur la main du bout de l'index... non, je veux bien sûr parler d'un dixième de regard !) mais, de plus, ils témoignent dans leur affection d'une ténacité, d'une ferveur, d'une foi et d'une abnégation véritablement extraordinaires. J'avoue que je n'étais plus habituée à cette intensité idéalisée dans l'amour porté à une héroïne et pourtant, c'est bien un auteur espagnol du 17ème siècle qui me rafraîchit la mémoire !

Les figures masculines, Ricardo et son ami Mahamoud qui le secourt, sont très énergiques, attachantes, volontaires et le lecteur se prend d'affection pour eux et a envie que leurs entreprises réussissent. Tout va très vite dans cette nouvelle bien qu'il se passe bien des choses : amour, tempête, rapt, batailles navales, voyages et même des pirates ! le talent de Cervantes est de réussir à intégrer beaucoup d'humour dans son récit qui se veut pourtant exalté et dramatique.

Mais se prenait-il lui-même vraiment au sérieux ou cherchait-il avant tout à se divertir par un conte ? La fin (la phrase du dénouement) m'en a presque convaincue, sans compter qu'à plusieurs reprises il m'a semblé que l'auteur se moquait gentiment des sentiments de son héros, Ricardo.

En tout cas, la chute réserve une jolie surprise au lecteur qui songeait déjà à classer ce récit d'aventures parmi les tragédies !


Challenge AUTOUR DU MONDE
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L'amant généreux est une des nouvelles composant le recueil "Nouvelles exemplaires" parues à Madrid en 1613. Cet ouvrage ne comporte que des nouvelles dont le sujet est l'Amour.
Celle-ci parle d'amour, naturellement, mais aussi s'attarde sur le trafic d'esclaves, organisé par les Turcs et les Maures qui sévissaient sur les côtes et îles du nord de la Méditerranée. Ce sujet tient particulièrement à coeur à Cervantes et il connaît bien le problème car en 1575 la galère sur laquelle il se trouvait a été attaquée par les Turcs, fait prisonnier et conduit à Alger, il devient alors esclave de rachat. Il ne recouvrira la liberté qu'en 1580 contre remise d'une forte rançon.
J'ai apprécié cette nouvelle, qui parle d'aventures maritimes, batailles, naufrages, mais elle n'a bien sûr pas la force de L'Ingénieux Hidalgo Don Quichotte de la Manche, qui offre des passages très savoureux par leur drôlerie. "L'amant généreux" se contentant d'amour et d'aventure, mais restant un texte sobre et sérieux.
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Bien qu'on sait que Cervantés fut un écrivain génial, dont l'oeuvre majeur Don Quichotte continue de traverser les âges, il fut aussi un aventurier qui vogua dans les mers et qui connut les batailles navales tout comme les prisons sordides. C'est cet aspect souvent oublié à son propos qui est retranscrite dans cette longue nouvelle, l'Amant généreux.
Écrite avant le célèbre roman, cette nouvelle est à la fois une nouvelle d'amour et une nouvelle d'aventure, assez surprenante. Au début de la nouvelle, Nicosie, la ville de Chypre a été prise par les Turcs, faisant de leurs habitants des captifs. Parmi eux, un jeune chrétien du nom de Ricardo, qui se lamente sur son sort. Un Turc Mahamoud (pardon si j'écris mal son nom) intrigué et ayant de la sympathie envers lui demande pourquoi il est si triste. Ricardo va alors raconter au Turc sa tragédie : il était terriblement amoureux de la belle Leonisa mais qui en aimait un autre et lors de sa déclaration d'amour à celle-ci, les Turcs ont débarqué et les ont capturés... mais lors d'une tempête, le bateau coule et Leonisa meurt, alors que Ricardo en est le seul survivant. Il a été capturé à nouveau et se retrouve à Nicosie. Mais voilà qu'un homme se pointe devant les chefs turcs pour leur vendre une jolie esclave qui n'est d'autre que... Leonisa ! Comment a -t-elle survécus ? Comment Ricardo parviendra à la sauver ? L'amour entre elle et lui résistera à tout ?
L'amant généreux est une nouvelle du XVIIeme siècle, dont évidemment le style est beau, noble et distingué mais avec la touche de Cervantés qui y met de l'ironie et un peu d'humour. Et bien que c'est une nouvelle fictive, Cervantés y ajoute quelques éléments de sa vie, comme sa capture par les Turcs où son rachat fort coûteux, ce qui explique le parfum de voyage : on vogue dans la Méditerranée, on affronte des pirates et corsaires belliqueux ainsi que des naufrages, on se rend dans des pays chauds... on retrouvera cette envie de voyager dans Don Quichotte où notre chevalier va parcourir l'Espagne...
On a un peu d'orientalisme avec cette incursion chez les Turcs et leurs habitudes, ainsi que l'esclavage, en vogue alors. de plus, ici, si beaucoup d'entre eux sont vils et mesquins (n'oublions pas qu'à cette époque, le Turc était le parfait méchant dans les romans d'aventures dans ce temps-là), mais Mahamoud est le plus juste et le plus loyal et qui veut aider Ricardo.
Quant à l'amour ici, c'est l'amour fougueux et passionné qu'éprouve Ricardo pour la belle Leonisa (qui a les canons de l'époque, une chevelure dorée, des joues rouges et tout ça...) mais également platonique. Ici, les hommes veulent limite s'entre-tuer pour avoir ne serait-ce qu'un regard de mademoiselle ! Bien sûr, Cervantés fait aussi des allusion gaillards bien subtile avec certaines phrases (celle avec le tronc et la lierre est une preuve éclatante). Mais Cervantés en même temps parodie les romans d'amour justement ses rebondissements tellement incroyables qu'ils sont presque invraisemblables et surtout la fin qui est une belle chute !
En revanche, la nouvelle est bien courte, cela aurait été bien que Cervantés l'allonge d'autant plus qu'on a une Leonisa passive et soumise, collant bien à l'idée de la femme (ce qui est un peu surprenant quand on voit des figures comme Camille dans Don Quichotte qui sont plus pertinente ) sans compter évidemment que l'amour est ici très platonique et conventionnel dans le genre.
Mais une nouvelle très interessante qui nous fait découvrir encore plus le style de Cervantés et qui allie bien l'aventure et l'amour !
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
- C'est elle, ô Mahamoud ! répondit Ricardo ; c'est elle, mon ami, la grande cause de tout mon bien et de toute ma mésaventure ; c'est pour elle, et non pour la liberté perdue, que mes yeux ont versé, versent et verseront des larmes sans nombre ; pour elle que mes soupirs embrasent l'air, ici et là, et c'est pour elle encore que mes plaintes lassent le ciel qui les écoute et les oreilles qui les entendent ; elle à cause de qui tu m'as cru fou ou tout au moins privé de courage et de vertu ; c'est Leonisa, lionne pour moi, tendre agnelle pour un autre, qui me tient en ce misérable état.
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Tout à coup, une nuée de Turcs se précipitèrent dans le jardin : ils sortaient de deux galiotes corsaires de Bizerte, qui avaient jeté l'ancre dans une cale près de là, et étaient débarqués sans être aperçus par les sentinelles des tours de la marine, ni découverts par les gardes-côtes. Dès que mes adversaires les aperçurent, ils m'eurent bientôt laissé seul pour s'enfuir à toutes jambes. De tous ceux qui se trouvaient dans le jardin, les Turcs ne purent s'emparer que de trois personnes, et de Léonisa, qui était encore évanouie. Pour moi, ils me prirent, atteint de quatre larges blessures, après que ma main les eut d'abord vengées sur quatre Turcs, que de quatre autres coups je jetai sans vie à mes pieds. Les Turcs firent cette expédition avec leur diligence accoutumée, et, non fort satisfaits du résultat, ils se rembarquèrent aussitôt, levèrent l'ancre, et, faisant force de rames et de voiles, ils eurent bientôt gagné la Fabiana. Là, ils firent un appel pour savoir qui leur manquait ; et, voyant que les quatre morts étaient quatre soldats de ceux qu'ils appellent Levantins, des meilleurs et des plus estimés, ils voulurent tirer vengeance de leur mort. L'arraëz de la capitane fit donc baisser la grande vergue pour qu'on me pendît.
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"Ô lamentables ruines de la malheureuse Nicosie, à peine sèches du sang de vos courageux et infortunés défenseurs! Si, au lieu d'être insensibles, vous étiez à cette heure douées de sentiment, nous pourrions, dans la solitude où nous sommes, déplorer ensemble nos disgrâces, et peut-être que les partager allégerait nos tourments. Cette espérance peut vous être restée, tours et murailles injustement abattues : car une autre fois, bien que non pour une si noble défense que celle où l'on vous abattit, vous pouvez vous voir relever. Mais moi, malheureux, quel bien puis-je espérer dans le comble de misère où je me trouve, quand même je reviendrais à l'état où j'étais avant celui où je me vois condamné? Telle est mon infortune, que, dans la liberté, je fus privé du bonheur, et que, dans la captivité, je ne l'ai ni ne l'espère." Ainsi s'exprimait un captif chrétien, en regardant du haut d'une colline les murailles renversées de Nicosie conquise...
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En ce moment entra une espèce d'alguazil ou d'huissier, lequel dit qu'il y avait à la porte un Juif qui amenait vendre une très belle chrétienne. Le cadi ordonna qu'on le fit entrer. L'alguazil sortit et revint presque aussitôt, précédant un vénérable Juif qui conduisait par la main une femme vêtue en costume de Berbérie, si bien mise et si bien parée, que la plus riche Moresque de Fez ou de Maroc n'aurait pu l'être mieux ; et ce sont pourtant les femmes de ces deux villes qui l'emportent pour le bon goût de la parure sur toutes les Africaines, y compris celles d'Alger, malgré toutes leurs perles. Elle avait le visage couvert par un masque de taffetas cramoisi. Au-dessus des cous-de-pied, que sa robe laissait à découvert, se montraient deux carcadj, nom qu'on donne en arabe aux bracelets des jambes, qui semblaient d'or pur ; et sur les bras, qu'on apercevait aussi à travers une fine chemise de lin, elle portait d'autres bracelets semés de perles. Enfin, quant à l'accoutrement, elle était parée avec richesse et élégance. Etonnés et ravis à son premier aspect, le cadi et les deux pachas, avant de dire ou de demander autre chose, ordonnèrent au Juif d'ôter le masque à la chrétienne. Il obéït, et découvrit un visage qui éblouit les yeux et réjouit les coeurs de tous les assistants, comme le soleil qui, perçant d'épaisses nuées, s'offre aux yeux de ceux qui désirent sa lumière : tant étaient grandes la beauté de la captive chrétienne, sa grâce et sa noblesse.
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Mais elle, qui n'avait d'yeux que pour Cornelio, le fils d'Ascanio Rotulo-tu vois de qui il s'agit : ce jeune galant, coquet, aux mains molles et aux cheveux bouclés, à la voix melliflue et aux propos sucrés, finalement tout d'ambre et d'alphénic, vêtu d'étoffes légères et paré de brocards- ne daigna ni voir mon visage, moins délicat que celui de Cornelio, ni même me remercier de mes soins innombrables et constants, et paya de dédain et d'aversion mon attachement ; si bien que mon amour exacerbé s'estima plus heureux d'être anéanti à force de dédains et de disgrâce que d'être témoin des évidences et toutefois honnêtes faveurs accordées à Cornelio.
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Videos de Miguel de Cervantes (7) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Miguel de Cervantes
Miguel de Cervantès parmi nous avec Philippe Sollers - Anniversaire Cervantès (1966 / France Culture). Par Denise Centore et Severo Sarduy. Avec Philippe Sollers. Diffusion sur France Culture le 20 avril 1966. Illustration : Miguel de Cervantes Saavedra, 1547-1616. Détail de la gravure de Frederick Mackenzie (1787-88 - 1854). Miguel de Cervantes, francisé en Miguel de Cervantès (de son nom complet Miguel de Cervantes Saavedra), né le 29 septembre 1547 à Alcalá de Henares et enterré le 23 avril 1616 à Madrida, est un romancier, poète et dramaturge espagnol. Il est célèbre pour son roman "L’Ingénieux Hidalgo Don Quichotte de la Manche", publié en 1605 et reconnu comme le premier roman moderne. Cervantes mène d'abord une vie aventureuse de soldat et participe à la bataille de Lépante en 1571, où il perd l'usage de la main gauche. Cette main paralysée lui vaut le surnom de « Manchot de Lépante ». Le 26 septembre 1575, à son retour vers l'Espagne, il est capturé par les Barbaresques avec son frère, Rodrigo, et, malgré quatre tentatives d'évasion, il reste captif à Alger. En 1580, il est racheté en même temps que d'autres prisonniers espagnols et regagne son pays. Marié et séparé de son épouse et occupant diverses fonctions, il se lance alors dans l'écriture par le roman pastoral "La Galatea" en 1585. En 1605, il publie la première partie de ce qui reste comme son chef-d'œuvre : "L'ingénieux Hidalgo Don Quichotte de la Manche" dont la deuxième partie ne paraît qu'en 1615. Sa parodie grandiose des romans de chevalerie et la création des personnages mythiques de Don Quichotte, Sancho Panza et Dulcinée, ont fait de Cervantes la plus grande figure de la littérature espagnole et l'un des romanciers les plus éminents du monde. Son roman "Don Quichotte" a été traduit dans plus de 140 langues et dialectes et fait partie des livres les plus traduits au monde. Ses premières œuvres théâtrales, peu appréciées de son vivant, ont pourtant donné lieu à de nombreuses imitations. En particulier, la tragédie en vers, "Le Siège de Numance", écrite de 1581 à 1583, a connu entre 1600 et 1813 cinq imitations sous des titres divers et a inspiré à Lope de Vega "La Sainte Ligue". Lectures de textes de Cervantès et de Jorge Luis Borges par Jean Topart et Michel Bouquet.
1ère partie : 00:00 2ème partie : 43:23
Sources : France Culture et Wikipédia
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