Ça commence comme le Mystère de la chambre jaune avec une vielle dame empoisonnée dans une chambre verrouillée de l'intérieur. Autour d'elle, un second mari plus jeune, deux fils dont un marié, une dame de compagnie, une «protégée», les domestiques et les jardiniers, et à l'arrière-plan, deux médecins, un jeune pharmacien, un tribunal avec le risque d'erreur judiciaire, et d'autres personnages moins importants. Inutile de vous embrouiller avec leurs noms. Comme le veut le genre, les soupçons les plus lourds se portent successivement sur plusieurs avant la surprise finale.
La toute première enquête de Poirot, publiée en 1920, se déroule à trois niveaux : les inspecteurs officiels qui chez
Agatha Christie ne font que de la figuration, Hercule Poirot qui révèlera l'assassin, et Hastings, le narrateur, qui essaie vainement de comprendre Poirot, dans une sorte d'enquête sur l'enquête pour rallonger le plaisir.
Je ne vous révélerez évidemment pas le nom de l'auteur du crime, mais je vous livre tous les indices: de la strychnine, des somnifères et du bromure (mais quand ont-ils été administrés, et comment, dans le café, dans le cacao ou dans le médicament)? Tout n'agit pas dans le même délai, et aucune hypothèse ne tient. Il y a ensuite du feu dans la chambre en plein été, un morceau de testament et un ou deux flirts et de la jalousie. Est-ce là-dedans que se trouve le mobile du crime? Il y a une empreinte digitale accusatrice, une tasse brisée, une tasse manquante, l'autopsie, les analyses du café et du cacao (mais ne sont-elles pas fausses ?), un mystérieux morceau d'étoffe verte, une tâche de bougie sur le tapis, un guéridon renversé qu'on n'entend ou qu'on n'entend pas, une fausse barbe, des éléments de preuves retrouvés dans un tiroir (mais il est ouvert à tous), d'autres dans un vase et dans un coffre au grenier, des clés perdues ou retrouvées, la seule tasse de café qui soit sans sucre, (indice capital, mais ça ne vous aidera pas), un testament antérieur, des bruits de dispute, des bégonias nouvellement plantés, des déclarations contradictoires sur l'heure de certains événements, des petits mensonges qui n'ont peut-être rien à voir avec le crime, et enfin une sonnette sabotée. Allez voir où est l'aiguille dans cette botte de foin. Tout cela est nécessaire aux fausses pistes et à la vraie.
Ajoutez les petites phrases habituelles du genre «Pas maintenant, j'ai besoin de réfléchir», «J'ai déjà fait quelques déductions», «Poirot fut sur le point de parler, mais il se ravisa», «Maintenant, Poirot, peut-être voudrez-vous me dire ce que cela signifie», «Cette fois, c'est une idée gigantesque, et c'est à vous, mon ami, que je la dois».
Les faits se passent pendant la 1ère guerre, avec la reconnaissance d'
Agatha Christie pour les Belges: «Elle a fort aimablement étendu son hospitalité à sept de mes compatriotes qui, hélas, sont des réfugiés. Nous autres, Belges, nous nous souviendrons toujours d'elle avec reconnaissance».
Il y a aussi le portrait de la défunte, «éprise de notoriété charitable et mondaine avec un faible pour les inaugurations et les fêtes de charité», et d'autres descriptions d'ambiance qui font le charme des romans d'
A. Christie.
Enfin, pour expliquer le titre assez étrange, Styles est simplement le nom de la maison qui, devenue pension de famille, sera le lieu de la dernière, «
Poirot quitte la scène».