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Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Quelques mots sur Cocteau, ou le miroir aux alouettes.

« Je vous livre le secret des secrets. Les miroirs sont les portes par lesquelles la Mort va et vient. Ne le dites à personne. du reste, regardez-vous toute votre vie dans une glace et vous verrez la Mort travailler comme des abeilles dans une ruche de verre. »

Je vais essayer d'expliquer l'appréhension que j'avais avec Cocteau. Il y a toujours chez cet auteur quelque chose d'agaçant ; comme une insupportable légèreté de l'être et du talent. On a peur d'être pris au piège, que ce ne soit qu'un tour de passe-passe. Aux pièges du sophiste et de l'esthète, du « tout ça pour ça », du mondain, du poète excessif donc insignifiant. Aujourd'hui nous pourrions dire en un sens que Cocteau est, peut-être plus qu'un dandy, la première figure « pop » de l'histoire.

Et pourtant, on sent qu'il y a plus que ça. On sent qu'il y a quelque chose de magistral chez ce « touche à tout ». On est immédiatement dans l'onirisme avec Cocteau. C'est un enchanteur, éternel enfant terrible, qui écrit comme on lance un sortilège.

« La frivolité est dure comme de l'acier » écrivait Montherlant ; Cocteau lui détestait qu'on eût pu le penser frivole, fantasque et superficiel, tout au contraire, la poésie fut pour lui une affaire d'un sérieux abyssal.

Dans cette oeuvre de jeunesse rien n'est laissé au hasard, chaque détail de la scénographie, ambitieuse et technique (une tête qui parle, des personnages traversant un miroir…), est pensé et dicté par le dramaturge.
C'est aussi l'occasion d'une réflexion sur les liens entre l'inspiration créatrice et la difficulté d'être du poète, une fois que la machine infernale du succès est enclenchée, « Que pense le marbre dans lequel un sculpteur taille un chef-d'oeuvre ? Il pense : on me frappe, on m'abîme, on m'insulte, on me brise, je suis perdu. Ce marbre est idiot. La vie me taille, Heurtebise ! Elle fait un chef-d'oeuvre. Il faut que je supporte ses coups sans les comprendre. Il faut que je me raidisse. Il faut que j'accepte, que je me tienne tranquille, que je l'aide, que je collabore, que je lui laisse finir son travail. »

Le mythe antique d'Orphée est revisité dans cette pièce sous l'angle de la modernité. Modernité d'abord dans le couple que forme Orphée et Eurydice. Un couple au bord de la crise de nerf, entre passes d'armes, réconciliations et incompréhension mutuelle.
« Que savons-nous ? Qui parle ? Nous nous cognons dans le noir ; nous sommes dans le surnaturel jusqu'au cou. » Modernité ensuite dans l'abandon d'un certain académisme de forme, on ne s'attend pas à trouver d'éléments comiques a priori dans ce drame antique et pourtant. On devine également, chez le jeune dramaturge, l'influence du dadaïsme et du surréalisme (dont Cocteau fréquenta les chantres, de Man Ray à Tzara, en passant par Mina Loy) et les prémices de l'absurde, déjà présents chez l'ubuesque Alfred Jarry, dans le refus de faire sens, avec le cheval notamment.

« Ma vie commençait à se faisander, à être à point, à puer la réussite et la mort. Je mets le soleil et la lune dans le même sac. Il me reste la nuit. Et pas la nuit des autres ! Ma nuit. » Encore une fois, « qui parle ? ».
D'Orphée ou de Cocteau on ne sait plus très bien. D'ailleurs ce double, cet alter égo créé en 1925, le 24 septembre, à Villefranche-sur-Mer, le poursuivra toute sa vie, le legs de Cocteau c'est le Testament d'Orphée, des paupières peintes sur des yeux clos, à jamais dans sa nuit. « Turn around bright eyes… »

« Qu'il est laid le bonheur qu'on veut. Qu'il est beau le malheur qu'on a. » Impossible de dire ce qu'il y a au tréfonds de son art mais, finalement, comme dirait le Bartleby de Melville « I would prefer not to ».

Cet équilibriste des lettres reste incandescent, en apesanteur. Cette oeuvre épouse sa morphologie : légèreté d'une plume, évanescence d'une fumée d'opium, mais écrite avec le sang du poète.

Qu'en pensez-vous ?
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Je sais que je risque de me répéter dans toutes les pièces de théâtre que je vais critiquer mais je n'y peux rien, c'est un fait. le théâtre est, pour moi, quelque chose qui doit être vu ou, du moins, entendu, et dont je ne pourrais certainement pas vous rendre un parfait résumé ici rien qu'en couchant des mots sur, non pas une page blanche comme je rêverais de le faire ! (Ce que j'entends pas là, c'est écrire bien entendu) mais ici.

Bref, essayons néanmoins. Ici Jean Cocteau réactualise l'un des plus belles légendes de la mythologie grecque : celui d'Orphée. Ici, il n'y a que très peu de personnages principaux : Orphée, son épouse Eurydice et Hertebise qui est vitrier de métier mais qui est aussi un ami du couple. Dans les premières scènes, il est également question d'un cheval blanc pour lequel Orphée s'est pris de sympathie et qu'il a décidé d'installé dans le petit cocon conjugal. Il lui parle tellement que sa femme en devient jalouse et décide de se tourner vers la reine des Bacchantes afin qu'elle l'aide à trouver un poison mortel pour qu'elle puisse se débarrasser de ce cheval qui monopolise toute l'attention d'Orphée.
Cependant, je ne vais pas trop vous en dévoiler puisque je suppose que vous connaissez tous plus ou moins le mythe d'Orphée ou que, si ce n'est pas le cas, vous ne manquerez pas de vous renseigner à ce sujet, les choses vont prendre une toute autre tournure !

Bien que je ne sois pas particulièrement une grande fan de Jean Cocteau, j'avoue que cette pièce est assez originale et très bien écrite. de plus, elle se li en un rien de temps, alors surtout n'hésitez pas à la découvrir !
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J'admire toujours le talent de Jean Cocteau.
Il propose ici une adaptation du mythe d'Orphée et Eurydice, située dans un monde moderne et onirique. Tout le monde aime Orphée, même La Mort. Et pour le poète, la manière de rester dans les mémoires en devenant immortel est de se lier à elle...
Pièce de théâtre mais en même temps synopsis du film interprété par Jean Marais, Orphée demeure une pièce intemporelle.
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