Et toujours les forêts (
Sandrine Colette)
On préfère ne pas trop y penser (le climat qui pourrait irrémédiablement s'emballer, les soubresauts militaro-géostratégiques un peu partout sur la planète, la menace nucléaire et de ses déchets cultivés en semis par-ci par-là, …), mais que voulez-vous, on aime jouer à se faire peur. Et on n'est jamais contre un petit film, une petite série ou un petit roman post-apocalyptique.
Alors d'accord, admettons : un jour, quelque chose advient soudainement, et tout est décimé, brûlé, tué. Pratiquement plus aucun humain à la surface de la planète, plus de vie, plus de nature, plus rien. On n'en connait pas la cause, mais on s'en moque après tout (à quoi bon se poser la question, puisque de toute façon, il ne demeure plus rien ensuite ?). Reste ce jeune Corentin, sauvé miraculeusement. Seul, il n'a qu'une idée en tête, quitter la mégapole où il se trouvait à ce moment-là, et retourner aux « Forêts », lieu de ses origines, et tenter de retrouver ce qu'il lui reste de famille.
Ok, admettons.
La première partie (avant l'apocalypse) n'a pas réellement d'intérêt. Elle vient toutefois planter un décor et un passé au jeune Corentin. A l'opposé, ce qu'il adviendra dans l'avenir, personne n'en saura rien.
Ce qui nous intéresse ici, c'est cet entre-deux, cet immédiatement-après (même si cela se compte ici en une petite poignée d'années en l'occurrence). Passée la sidération et les premières constatations de l'état du monde (sans réellement d'intérêt à mon sens), certains thèmes abordés, mieux rendus que d'autres, deviennent alors plus intéressants : qu'est-ce qu'espérer, vivre, survivre, si une éventuelle renaissance de la nature devait prendre des dizaines, voire des centaines d'années ? (« Voilà, se disait-il, le monde dix-huit ans après […] Combien d'années avant que l'univers soit à nouveau accueillant ? ») Qu'est-ce que tomber dans la misère, voire redevenir sauvage après avoir connu l'abondance ? (« Mathilde se souvenait qu'avant, dans ce qui était l'Inde, la plupart des vivants ne faisaient qu'un seul repas par jour »). Qu'est-ce que se reproduire, élever des enfants, tenter de perpétuer une humanité dans ces conditions, que leur transmettre, si la quasi-totalité de notre passé et de notre héritage a totalement disparu ? Qu'est-ce qu'un couple, une famille – au sens des conceptions d'avant – après, dans la survie, après le choc ? Etc.
Alors bien entendu, on ne pourra pas s'empêcher de tiquer sur certaines contradictions, incohérences ou bizarreries dans cette ère post-apocalyptique. Mais admettons (cela permet éventuellement, éventuellement, d'apprécier le peu de chance de survie après une telle catastrophe à moins de quelques miracles … ?).
Une lecture généralement fluide, aisée, même si je ne suis pas un fan absolu des phrases courtes, hachées, saccadées. Je ne suis pas totalement fan non plus des cliffhangers tels qu'ils sont utilisés ici (ah on croyait que …, mais en fait non, si on revient un peu en arrière c'est pas tout-à-fait ça … ; le summum de l'indigeste advenant lors de la scène finale de rencontre avec un groupe d'errants, non, là, trop c'est trop).
Au final, un assez bon roman, avec de bons moments … si l'on accepte certains postulats capillotractés.