J'ai été sensible, dans une des nombreuses critiques lues de "
On était des loups", qui a le vent en poupe sur babelio en ce moment, à ce qu'Antyryia évoquait de la relation parent-enfant dans ce roman. Une sorte de degré 0 de ce lien, un retour à l'animalité, à des liens inconditionnels. J'aime les auteurs capables de mener ce type de questionnements. Aussi, connaissant mes gouts pour les lectures fantastiques, Antyryia m'a informée que je pouvais découvrir S.Collette avec
Et toujours les Forêts.
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Ma lecture fut un peu fastidieuse, malgré le style d'écriture fluide de l'autrice. Je crois que si je veux démêler l'écheveau de ce qui m'a rebutée, je commencerais par le mélange trop disparate entre le début du livre, celui de l'enfance maltraitée de Corentin, puis le récit d'un subit évènement qui détruit la surface de la planète, imaginons- nous, puisque nous n'irons jamais plus loin que jusqu'où la marche de Corentin peut nous emmener. le lien entre ces deux récits fait cruellement défaut. Je n'ai rien contre les virages à 90° qui saisissent le lecteur, l'emmènent ailleurs et parfois plus loin que là où il pensait aller, l'effet de surprise aurait pu être salvateur, mais la quatrième de couv des éditions
J-C Lattès déflore le premier quart du livre, jusqu'au moment post-apocalypse, où Corentin part en recherche de son arrière grand-mère Augustine.
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L'effet de surprise étant négligé, reste la recherche de liant entre des débuts qui ressemblent à un conte noir, où la mère de Corentin déambule dans la forêt des Forêts; un lieu mystérieux qui semble possédé de magie occulte, après avoir été séquestrée par deux sorcières pendant les six derniers mois de sa grossesse, et ce brusque passage à une dimension post-apocalyptique, où la sorcière est devenue la douce, discrète et fragile grand-mère dont il part en quête, l'espoir de la revoir étant son seul moteur pour survivre. Qui est Augustine au final? le démon qui jette une femme dehors le soir de son accouchement après l'avoir séquestrée durant toute sa grossesse? Ou l'ange qui veille sur Corentin jusqu'à son dernier souffle? L'autrice n'en dit rien et non seulement je ne vois pas où elle veut en venir dans le mélange des genres, mais en plus, je ne crois pas à ses personnages.
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On côtoie peu Marie, la mère de Corentin (pas le sujet non plus, apparemment...). L'infâme ou pitoyable marâtre, à priori juste mauvaise et égoïste, qui non seulement délaisse son enfant autant que possible mais en plus, lui souhaite de souffrir toute sa vie. "Et elle -elle ne voulait pas qu'il soit heureux"p18. Une nature perverse dans le sens le plus primaire du terme? Corentin n'est pas né d'un viol, jamais le père n'a été violent avec Marie. Cette indifférence envers lui broie le coeur, évidemment, et cette méchanceté gratuite apporte de l'incohérence.
Et de l'incohérence, niveau psychologie des personnages, il y en a beaucoup trop, ça coupe net l'empathie, et rend-aussi- la lecture fastidieuse.
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Partie post-apo, maintenant, baignée de la grisaille continue d'un ciel désormais sans soleil, et du désespoir le plus noir, lancinant, toute forme de vie ayant été réduite à néant (par "la Chose"...), la vie se résume à de la survie. Se nourrir, se protéger du froid, d'une pluie acide, des autres survivants. J'ai parfois pensé à "
Moi, Marthe et les autres" d'
Antoine Wauters, en particuliers lorsque Corentin croise d'autres survivants qui partent "vers la mer" poursuivant une chimère aussi utopique que nécessaire pour avancer. Je me suis plusieurs fois dit que Corentin pourrait croiser la "bande d'Harry" dans ce décor de
Sandrine Collette dont le style d'écriture haché, où les phrases doivent rendre état de sensations, peut aussi évoquer celui de Wauters dans son roman. de faibles échos ceci dit, car le roman de Wauters se distingue par une poésie, et un degré de dépouillement, de questions sur ce qu'est l'humanité qui m'a beaucoup plus touchée. Car les enchaînements de l'autrice m'ont souvent laissée de côté, je n'ai pas trouvé cohérent, tels qu'elle nous a présenté ses personnages et leur environnement, qu'ils se soucient de la survie de l'espèce par la reproduction par exemple. L'instinct de survie illustré par l'autrice...Une maladroite excuse au besoin d'assouvissement du désir sexuel masculin? C'est ainsi que je l'ai perçu mais je ne peux pas développer cet argument sous peine de trop dévoiler un livre déjà défloré par son éditeur.
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Laissée de côté par certains chemins pris par l'autrice, perplexe de la psychologie des personnages et enfin dubitative sur le traitement post-apocalyptique en lui-même. La Chose est tout de même perfide pour les Hommes. Elle détruit toute nature, plus un seul arbre debout, les troncs éclatent jusqu'aux racines, plus un brin d'herbe...La couleur verte n'existe plus que dans les souvenirs... Cependant certaines maisons sont entièrement épargnées? Elles sont jonchées des corps de ses occupants, mais pleines de nourriture? Il a suffit de se réfugier au fond de sa cave pour échapper à la chose. Elle passe au dessus. Mais la maison n'est pas (forcément) détruite.
Moui.
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Au final j'ai la sensation d'un roman à trous. Où il m'a manqué beaucoup pour cerner situation et personnages. Et le style de l'autrice m'est apparu en négatif. Il m'avait séduite au départ, comme craché, des phrases de deux mots, sans verbe parfois. Hachuré. Mais les hachures sont comme le vert d'eau...à moitié vide ou à moitié plein?