Il ne lui était jamais venu à l'idée qu'un spectateur pouvait souffrir. Un spectateur, c'était quelqu'un qui regarde les autres.
Ils sortent un moment sans parler. Autour d'eux il y a la vie qui passe ; la vie qui est au-dessus des rêves et des vengeances et que rien ne peut arrêter.
Ce mot de réalisme paralyse toutes les facultés de Gad. Il ne sait que répondre. Il se demande s'il ne ferait pas mieux de parler au professeur de cette poule aux yeux magnétiques, qui a tenté de le séduire comme une prostituée.
Il a des scrupules d'homme cultivé. Pour un intellectuel comme lui, faire ses besoins en plein air équivaut à une trahison envers l'esprit.
Abou Chawali tourne à droite et s'engouffre dans le sentier des voleurs. Là, l'obscurité est définitive et il doit marcher en côtoyant les huttes. Un silence sinistre règne dans ce sentier inabordable où habita, dit-on, le plus grand assassin du monde.
Le sentier de l'Enfant-qui-Pisse conduit à l'école des mendiants.
[Danger de la fantaisie]
C'est un jour comme les autres : lent, féroce et affamé de victimes humaines.
Au fond, la ruelle Noire était un endroit très calme. La misère y était posée, sérieuse, et d'une parfaite égalité d'humeur.
Ils ressemblaient à des remords ; des remords très anciens enracinés dans le sol.
On sentait que la ville voulait vivre, qu'elle avait tout pour cela, mais qu'une sorte de détresse intérieure, impitoyable, la tenait immobile avec ses lumières forcées, ses femmes stupides et son aisance criminelle.