Était-ce ce qu’elle voyait dans son expression quand elle le regardait ? Cette pensée le dérangeait tout autant qu’elle l’intriguait. Il n’aimait pas l’imaginer avec un autre homme, mais la possibilité qu’elle connaisse le corps masculin et sache comment le satisfaire le séduisait tout autant.
Il avait conscience d’être un homme aux sombres passions.
Et il voulait une femme qui soit assez brave pour les partager.
Il voulait que ce soit la femme étendue sur son lit.
Personne d’autre ne ferait l’affaire.
Durant tout ce temps, les femmes étaient apparues dans sa vie puis reparties, mais il ne les considérait guère plus que comme des fantaisies passagères – une perception mutuelle, il en avait conscience, car il n’avait rien à leur offrir, rien à leur donner de lui. Depuis qu’il était garçon, il avait su qu’il était destiné à rester seul. Quand il était enfant, il s’était tenu éloigné de ses pairs, en observateur, passant son temps à étudier auprès du clergé. Une fois homme, les autres marchaient sur des œufs en sa présence. Il n’aurait pu prétendre à plus qu’à ce respect. Même s’ils ne le considéraient pas véritablement comme leur égal, du moins le respectaient-ils.
Rien que l’imaginer allongée là l’excitait. Penser à elle étendue à son côté lui procurait également un plaisir plus profond et il décida qu’il n’allait certainement pas dormir sur son siège. Il n’était pas un garçon rougissant qui ne pouvait se contenir. Il était assurément capable de rester allongé sur un lit avec une femme sans lui faire l’amour. C’est moi qui commande à mes désirs, et non l’inverse, se dit-il.
Qu’il se soit accroché si longtemps à ses idéaux d’érudition résultait de sa fierté entêtée. Bien que ses conventions annulent ses convictions, il croyait toujours que l’esprit était un outil bien plus puissant que le corps, et le savoir, plus efficace que la force brute. Son corps pouvait lui faire défaut, mais alors son esprit le sauverait. Toutefois, si l’esprit venait à manquer… eh bien, alors… à quoi lui servirait donc un corps ?
Il dut se retenir de ne pas se pencher pour goûter à cette bouche douce et pulpeuse. Son parfum montait vers lui pour mieux le tenter… cette senteur élusive qui émanait d’elle et éveillait en lui le désir, ce qu’aucune femme n’avait fait depuis bien trop longtemps.