Première irruption dans l'univers poétique de
Sarah Crossan, solidement tenue par la main par la traduction magnifique de
Clémentine Beauvais. Et deuxième roman en vers pour ma part.
L'expérience est très différente de
Songe à la douceur, les vers apparaissent ici moins comme un jeu sur la langue que comme une façon d'épurer l'écriture, d'aller à l'essentiel, dans une langue simple, directe, percutante qui rappelle l'univers de la chanson et des paroliers.
Entraîné par ce "flow", on tourne les pages où se révèle l'histoire poignante d'Allison et Marla.
Allison est une ado en fugue, qui a fui un père violent et manipulateur pour tenter de retrouver l'ex-fiancée de celui-ci, Kelly-Anne, qui a eu le bon sens de partir un peu plus tôt. Mais tout ne se déroule pas aussi simplement... Et voici Allison sans argent, sans téléphone, sans nulle part où aller. Qui atterrit dans la maison de Marla, une vieille dame qui souffre de démence.
Profitant des trous de mémoire de Marla et de sa ressemblance inespérée avec Toffee, une amie surgie du passé de la vieille dame, Allison s'installe.
Au rythme du flow de ce long poème, des vagues de l'Atlantique sur la plage, des pas de danse de Marla et Allison, on part en quête des souvenirs trop aigus de l'une, trop effacés de l'autre. Malgré leur différence d'âge, elles se ressemblent finalement. Leurs deux solitudes se rencontrent, elles deviennent un appui l'une pour l'autre, dans l'adversité.
Je n'en dis pas plus pour ne pas spoiler cette histoire qui est à la fois douce, intense, touchante et dure parfois. Les pages se tournent, les ombres se dévoilent. C'est comme une immense toile de vie, brossée par petites touches impressionnistes.
Sous une apparente simplicité de lecture, ce roman nous emmène très loin. de quoi se ruer sur les autres titres de cette autrice :-)