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4,09

sur 721 notes
Cela faisait un an qu'il était dans ma pal, attendant le "bon" moment genre les vacances, du calme...Bref, un moment qui n'arrive pratiquement jamais. Donc, à l'occasion d'un challenge littéraire, j'ai décidé de le sortir.

Quel OLNI (objet littéraire non identifié) ! C'est un roman où se mêlent l'histoire de la famille Navidson et l'histoire de Johnny Erand. La famille Navidson arrive dans une maison , en Virginie, qui s'agrandit mais juste à l'intérieur. Un jour, une porte apparait et il y a un loooong couloir noir. Will, photoreporter, veut absolument visiter cette nouvelle pièce et organise une expédition...C'est le pitch de base.

Donc, nous avons la description de l'expédition façon reportage (style Projet Blair Witch) suivant les différents films qui ont été tournés, les annotations d'un vieil homme (aveugle) qui a "vu" le film et les commentaires de Johnny qui a récupéré le livre de Zampano (et qui raconte sa vie mais qui se mêle malgré tout au pitch de départ).

C'est un livre qui m'a demandé beaucoup d'attention de part la densité du texte par moment (le format fait qu'il y a beaucoup de mots et peu d'espaces), l'histoire somme toute complexe, des annotations parfois très utiles (parfois un peu moins utiles). Des annotations/bas de page qui font parfois 3-4 pages, des allers-retours à la fin de livre pour aller voir les différentes annexes (renseignées dans les bas-de pages), le fait de retourner le livre dans tous les sens , d'avoir un seul mot par page , des lettres manquantes...Un vrai labyrinthe !

J'ai mis longtemps avant de le terminer, parfois, je ne lisais que quelques pages car trop fatiguée le soir que pour lire plus de deux pages, parfois, c'était un peu plus ...mais malgré tout et malgré certaines longueurs, j'ai pris beaucoup de plaisir à cette lecture, à retourner le livre, à aller consulter des annexes, des photos, des pièces manquantes, etc... C'est une vraie expérience de lecture (même si je n'aimerais pas lire que des livres de cette trempe lol).

Je conseille de lire le "texte principal" en même temps que les notes bas de page même si ce sont deux récits différents. Cela ne m'a pas trop posé de problèmes.

Il y a aussi énormément de références parfois fausses (je pense :) ) et parfois, véridiques. Chapeau pour le travail.

C'est un livre qui ne plaira pas à tout le monde, il faut vraiment se laisser porter par cette ambiance et se laisser aller quitte à ne pas comprendre tout (enfin, ça, c'est vous qui voyez :-) ) .

Je ne suis pas sûre d'avoir tout compris, j'avoue :-), mais tant pis, ce n'est pas grave, j'ai pris ce pli-là. L'auteur m'a embarqué dans un labyrinthe, je me suis perdue, j'ai retrouvé mon chemin pour me reperdre de nouveau, etc...A certains moments, j'ai fait des pauses et je lisais autre chose de plus "léger" style BD.

Bref, c'est vraiment une expérience de lecture : à vous de voir si vous voulez la tenter ou pas :).
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"Accepter de se perdre est le seul moyen de trouver son chemin."

Rien que par cette citation, on devine bien que cet ouvrage ne va pas hésiter une seconde à employer tous les arguments pour nous faire méditer.

Ressentir certes mais dans la douleur, ceci suite à ses nombreux décrochages qu'il faut avoir la force de supporter sans jamais rien lâcher.

Tenir coute que coute sans sortir de ses gonds devant une mise en page surprenante, support de nombreuses bifurcations laborieuses et décalées constituant l'ensemble d'une architecture malicieuse destinée à nous égarer.

En se servant pour cela d'une déstabilisation constante ne faisant d'une attention préalablement bien affutée par sa volonté d'en découdre qu'une marionnette ballotée par tous les vents.

Un ouvrage imprévisible et déconstruit visité par un lecteur privé de véritables repères, ne faisant que parcourir quand la lucidité du récit le permet que les méandres d'une structure complexe ou l'on ne sait plus où l'on est ni ce que l'on cherche.

Description déroutante d'un environnement domestique ingérable, déblatérant au gré d'un parcours toujours incertain ses dérives soudaines.

Royaume souterrain incontrôlable et sans fond formatant les perceptions les plus folles sur toute une surface déjantée ne faisant que se nourrir de ses paradoxes.

Univers intérieur abyssal, délesté de sa logique ou tout devient incompréhensible et modulable offrant ainsi l'opportunité à sa totalité d'exprimer sa désarticulation dans un contexte n'ayant plus aucun sens.

Dédale dépressif, sans aucun repère susceptible de constituer une protection tout le long d'une substance rocambolesque agencée uniquement par ses incessantes remises en questions.

Une demeure dont chaque mètre parcouru n'est qu'un partenariat éprouvant, sombre et mystérieux, sans fil d'Ariane ne faisant de son ensemble, qu'une suite de perceptions déroutantes.

Singularité effrayante qu'il faut accepter telle qu'elle se présente sans espoir de la décrypter.

Alors chef d'oeuvre ou fumisterie? Livre culte ou enfumage ?

Ou bien tout simplement, une expérience personnelle enrichissante si l'on désire quitter momentanément un confort de lecture sans surprise en acceptant régulièrement d'être désorienté en devenant le temps d'une consultation perturbante l'icône de nos propres angoisses.
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Cette oeuvre de Mark Z. Danielewski a été rééditée dans une magnifique version collector aux éditions Monsieur Toussaint Louverture . Quel travail remarquable !

Emboîtement narratif, poupées russes de récits, ou encore mille-feuilles : peu importe le nom qu'on lui donne, c'est bien de cela qu'il s'agit ici. Parfois j'ai eu le sentiment de lire un palimpseste, où les écrits récents se superposent à ceux du passé, effacés parfois, et avec lesquels ils dialoguent.
C'est un empilement qui donne le vertige, diablement efficace.

Le roman est surtout un canular éditorial comme on en faisait bcp au 17eme : un montage avec un faux auteur, une fausse véracité, pour donner au texte sa légitimité. D'où les très nombreuses notes de bas de pages, le faux avant-propos, l'exégèse bidon du film.
Il faut le voir comme un jeu, ça allège la lecture et ça devient tout de suite assez rigolo.

Malgré tout c'est un jeu dangereux car La maison des feuilles semble impacter tous les persos à chaque niveau. Zampano est mort, Johnny devient fou, Navidson… pas mieux : finalement, les notes de Johnny offrent un second niveau de récit et racontent la spirale de folie dans laquelle il plonge. de manière assez similaire que Navidson : La maison des feuilles se lit alors comme un jeu d'illusions, de miroirs et d'échos où le but est de conserver sa raison… dans un univers qui semble irréel, reflet des esprits dérangés qui le peuplent.

Au-delà de cette construction brillante et intellectuellement réjouissante, le roman… manque pour moi d'émotions. Je n'ai pas vibré dans ces pages, comme si la déconstruction poussée de tout ce qui fait le genre romanesque avait atteint là ses limites. J'ai eu l'impression de toucher le fond sans vraiment le toucher, expérience de lecture assez dingue à faire.

Chronique détaillée sur le blog.
Lien : https://zoeprendlaplume.fr/m..
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Dans son introduction, Johnny explique comment il a trouvé un mystérieux manuscrit à la mort d'un vieil homme aveugle, décidé de le mettre en forme et de l'annoter de façon très personnelle.

Le texte se présente comme un essai sur un film, le Navidson Record réalisé par Will Navidson, un photoreporter, lauréat du prix Pulitzer.

Will qui vient d'emménager avec sa famille dans une maison en Virginie, filme son installation, réalisant une sorte de " home movie ". Tout s'annonce bien jusqu'à ce qu'il découvre une pièce qui jusqu'alors n'existait pas.

Passé l'étonnement, il se rend à une évidence troublante : la maison est plus grande à l'intérieur qu'à l'extérieur.

Navidson tente d'explorer les lieux mais, après avoir manqué se perdre, il engage des explorateurs professionnels. L'horreur commence alors. Aussi bien pour les membres de l'expédition que pour le lecteur - lui-même égaré dans le dédale des notes qui envahissent les pages comme un lierre maléfique.

Que cache la maison ? Quel est ce grondement qu'elle émet de temps en temps ? Pourquoi Johnny a-t-il ces cicatrices ? Pourquoi le manuscrit de Zampano semble-t-il le rendre fou ?



Tout d'abord je tiens à remercier mon amie Cahuète qui ne me fait pas la tête (trop facile celle-là ! ) pour m'avoir fait découvrir ce livre (puisque c'en est un ! ) , mais aussi et surtout les éditions Denoël pour la réédition. Avant sa réédition ce fut comme la quête du Graal, le bouquin vendu d'occasion à un prix défiant toute concurrence entre 80 et 150 euros, outch !!! Certes j'aime les livres, mais franchement ça m'aurait fait un chouïa mal aux fesses que de sortir une telle somme....

Me reste la dure tâche que d'expliquer.. de vous donner mon avis sera beaucoup plus simple.

12 ans, voilà le nombre d'années qu'il aura fallu à l'auteur pour écire ce livre et cela ne m'étonne point. Une oeuvre d'art de part sa conception qui n'a rien de conventionnelle, conception qui est parfois déroutante, qui n'est pas linéaire, annotations, annotations dans les annotations, des phrases qui partent dans tous les sens, des pages blanches....

Le livre est bourré de références bibliques, scientifiques, mythologiques, géologiques, philosophiques... qui peuvent parfois créer une certaine frustration (Pour ma part, la littéraire que je suis n'a rien compris aux références scientiques). Un passage oblige, car il s'agit là de "l'étude" d'une house movie et de ceux qui gravitent autour d'elle, une house pas comme les autres, une house plus grande à l'intérieur qu'a l'extérieur,...D'une maison labyrintique et infernale. Une maison qui met les personnages face à eux mêmes.

Une lecture qui demande pas mal de concentration et de calme au risque d'en perdre son latin. Mais une lecture originale, envoûtante, obsédante. Une lecture qu'il est difficile de classifier tant son genre est particulier et ce pour notre plus grand plaisir.

Un livre qui ne laisse pas indifférent mais qui au contraire nous pousse au questionnement pendant et après lecture.

Cette maison des feuilles n'est pour moi qu'une métaphore de l'existence.

Un livre hors du commun qui mérite son statut de mythe.....
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Remarque : une fois n'est pas coutume, je vous conseillerais de cliquer sur le lien vers l'article original, puisque certains "détails" de mise en forme ne passent pas sur babelio.

« Ce livre n'est pas pour vous ».


C'est par cette mise en garde que commence cet ouvrage, et ce n'est pas pour rien. La Maison des feuilles est devenue assez culte avec le temps, réputée pour sa complexité et sa mise en page atypique. de fait, ce livre ne sera pas pour tout le monde. J'avais d'ailleurs tenté une première fois de le lire, pour faire une pause après 150 pages environ car j'étais fatiguée de lutter contre lui (et contre les disgressions de Johnny, surtout, et de sa fâcheuse tendance à parler de ses parties de jambes en l'air). Et puis, presque un an après, je l'ai repris de zéro, bien décidée à aller jusqu'au bout.

Imaginez qu'à peine rentré d'un voyage de quelques jours, vous découvriez dans votre maison un espace qui n'existait pas avant votre départ. L'espace est certes étroit, sauf qu'il n'y était pas avant, ce que corroborent les mesures : la maison est légèrement plus grande à l'intérieur qu'à l'extérieur. Ça n'a l'air de rien, mais c'est le point de départ d'un cauchemar pour les Navidson, car bientôt, c'est un couloir qui apparaît, un couloir qui se mue en quelque chose de bien plus labyrinthique et terrifiant au fil des pages. Les personnages vont ensuite tenter l'exploration à plusieurs reprises, s'enfonçant de plus en plus profondément dans les ténèbres, malgré le danger qu'elle représente.


L'histoire en elle-même est sympathique, il y a même quelques passages un peu angoissants durant les explorations, et il y a toute une mise en abyme par rapport à notre propre lecture, mais ça reste une aventure somme toute classique. En réalité, ce qui est particulièrement marquant avec cet ouvrage, c'est le défi et les énigmes qu'il représente.


Car cet ouvrage est bel et bien un défi, à différents niveaux. L'histoire, tout d'abord, construire à la manière des Matriochka. le récit proposé par cet ouvrage est une sorte de thèse dont les documents ont été compilés par Johnny Errand, documents qu'il a retrouvés dans la malle d'un certain Zampano, vieil homme fraichement décédé, lequel faisait une étude académique au sujet du Navidson Record, une étrange vidéo documentaire à propos de la non moins étrange maison de la famille Navidson. Ce qui nous donne plusieurs trames narratives qui se déploient en parallèle par le biais des notes de bas de page : Johnny qui commente sa découverte des documents en disgressant pas mal sur sa vie, l'étude académique du Navidson Record, les notes d'un éditeur non identifié, ou les références bibliographiques utilisées par Zampano pour son étude. Cet enchevêtrement de notes rend très difficile une lecture linéaire et encourage les allers retours au sein des chapitres pour lire les trames une par une. Il y a des disgressions dans tous les sens, des sujets académiques qui, parfois, ne semblent avoir qu'un lointain rapport et dont la lecture se révèle très fastidieuse, et on ne sait même pas si le Navidson record est réel dans la diégèse du livre ! Et je ne parle même pas des annexes, notamment des lettres de la mère de Johnny qui viennent rajouter des pièces dans la machine.

Les notes de bas de page qui parfois occupent des pages entières, c'est une chose. La forme du texte en est une autre. C'est particulièrement fascinant, dans la mesure où la forme de la Maison (le livre) répond à ce qu'il s'y passe, de la même manière que la maison (dans le livre) semble répondre à la psyché des personnages. Certaines pages sont extrêmement denses, d'autres presque vides, certaines esquissent des dessins, d'autres proposent des textes barrés ou des mots manquants… Une mise en abyme qui, paradoxalement, renforce l'immersion tout en entravant notre lecture du livre, puisque nous devons fournir un réel effort pour avancer, comme si le livre décourageait notre exploration. D'une certaine manière, nous devenons nous-mêmes des personnages, à tenter de trouver notre chemin et du sens dans tout ce chaos.

Et comme si ce n'était pas assez compliqué, on a aussi plein de secrets cachés, avec des passages cryptés ou des personnages qui se trompent, voire ne disent pas toute la vérité, au point qu'on finit par douter de la réalité de ce qu'on vient de lire. Au fur et à mesure que l'architecture de la maison évolue, se complexifie, les personnages perdent de plus en plus pied avec la réalité et sombrent peu à peu dans la folie, y compris Johnny qui, pourtant, s'est juste occupé de compiler les notes de Zampano. La fin, notamment, est assez vertigineuse et rebat complètement les cartes.


Honnêtement, si vous voulez jouer le jeu un minimum je vous encourage à vous armer de plusieurs marques pages, d'une connexion internet, d'un bloc-notes, de post-it etc. Ce n'est pas obligatoire, mais l'ouvrage est particulièrement ludique si vous avez envie de chercher vous-même votre chemin. Je n'ai pas été jusqu'au bout de la démarche (merci à tous les gens qui se sont amusés à décrypter ce bouquin !), mais il y a de quoi y passer des heures rien qu'à tenter de décoder les secrets cachés ou essayer de comprendre ce qui est réel ou non.


Bilan
C'est assez difficile de parler de la Maison des feuilles sans gâcher le plaisir des découvertes, c'est une expérience de lecture qui doit se vivre pour vraiment comprendre l'effet qu'elle produit. Elle n'est pas pour tout le monde, soit parce que vous abandonnerez en route, soit parce que vous n'y serez pas sensible (et c'est ok). Je l'ai personnellement trouvée fascinante, à mon sens, ce livre mérite sa réputation et sa place dans les meilleurs livres fantastique/horreur.
Lien : https://limaginaerumdesympho..
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La Maison des Feuilles est vraiment une lecture particulière. J'ai oscillé pendant une bonne partie du roman entre crier au génie et l'envie de jeter le bouquin par la fenêtre...

La construction est magistrale. L'inclusion du récit dans un autre récit, avec en plus un troisième intermédiaire est bien rendue. Au final, je n'ai jamais été perdue entre les différents niveaux du roman. Qui parle est très clair, grâce notamment à la mise en page, avec une police d'écriture différente quand c'est Johny Errand qui fait les commentaires.

Cette mise en page change lorsqu'il est question de la Maison, et elle sert complètement le récit. J'ai trouvé ces chapitres d'exploration tout bonnement fascinants. Même quand le récit devient labyrinthiques, avec des notes de bas de page qui se croisent et s'entrecroisent, on arrive à se repérer.

Au delà du récit central, un grand nombre d'analyses sont menées au sein du roman, avec parfois des réflexions très poussées. Honnêtement, je ne suis pas certaine d'avoir TOUT enregistré ou compris. Pour autant, certains de ces aspects sont très enrichissants, et fournissent au lecteur des pistes de réflexion sur la nature de la Maison.

Le fond de cet univers en est enrichi d'autant, avec une multitude de références à des ouvrages divers. Je n'ai pas été voir s'ils existent, même en partie. Johny insinue en introduction que la grande majorité est fausse. Sur cet aspect, je choisis de lui faire confiance. Il est après tout dans le monde se rapprochant le plus de notre réalité.

Si le scénario du roman reste relativement simple (je ne rentrerai volontairement pas dans les détails) la lecture de la Maison des Feuilles est une expérience à part entière. le principe de la forme servant le fond est ici poussé au maximum, avec parfois un seul mot sur une page entière. C'est juste brillant.

De par cette recherche labyrinthique du récit, j'ai cependant trouvé que d'autres aspects sont plus mis de côté. Les personnages, notamment, en pâtissent, avec peu de descriptions ou de précisions sur leurs caractères. Les dialogues directs sont quasi inexistants dans le coeur du récit, avec des paroles rapportées par d'autres personnages.

Je ne suis pas non plus certaine d'avoir tout saisi sur le personnage de Johny. Au final, pourquoi le récit l'affecte-t-il autant ? Si j'ai bien compris où voulait en venir l'auteur sur la Maison et Navidson, ce personnage me reste très opaque et je n'ai pas compris ses vraies motivations ou ses réactions.

Une partie de réponse apparait dans les annexes, mais ce ne sont une fois encore que des indices.

Enfin, si j'ai beaucoup apprécié ma lecture, j'ai trouvé que ça tirais en longueur. Pour moi, le climax apparait dans l'exploration 4. La suite de cette exploration, toutes ses analyses, ainsi que l'exploration 5 (et les loooongues pensées de Johny à cette étape) m'ont paru de trop. Je comprends le point final donné à la maison, et pourtant la partie avant l'exploration 5 m'a vraiment semblé de trop.

Au fond, j'ai aimé ma lecture, et même adoré certaines réflexions proposées par l'auteur sur les récits enchâssés.

La Maison des Feuilles est un expérience de lecture, qui ne conviendra pas, je pense, je pense, à tous les lecteurs. Il faut apprécier une certaine complexité dans les romans, mais aussi de ne pas tout comprendre. Accepter de se laisser porter par le récit, en somme. Beaucoup d'éléments de réponse sont donnés dans l'avancée du roman, mais il faut de la patience... Et tout n'est pas éclairci.
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Rédiger une critique sur "La maison des feuilles" ? Vraiment pas facile quand je lis les superbes posts des autres lecteurs/trices (bravo vous d'ailleurs !).
Le livre est surprenant à tout point de vue : le format, la mise en page, l'histoire/les histoires. J'ai adoré devoir le tourner dans tous les sens, revenir en arrière, et qu'est ce que je me suis perdue dans les notes de bas de page qui n'en finissaient jamais ! En bref, une lecture TRES surprenante.
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« Ceci n'est pas pour vous. » En voilà une façon d'accueillir un lecteur ! Cela dit... Ce n'est pas hors-sujet et j'approfondirai cette phrase afin de débuter cette critique. Amateurs de certitudes inébranlables, de vérités absolues et autres révélations, passez votre chemin : ce livre n'est pas fait pour vous. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, la culture scientifique m'a été d'une grande aide pour apprécier cette oeuvre de fiction. J'entends par là, l'habitude de lire des articles et des reviews, savoir que rien n'est certain, que tout est sujet à de multiples hypothèses et que ce que l'on désigne communément par « vérité » n'est rien d'autre qu'un « consensus ». Ne partez pas, je m'explique.

Si vous vous fiez à la quatrième de couverture de ce livre, vous attendez une histoire d'horreur classique. Une famille emménage dans une maison, la maison présente des particularités inquiétantes. Dans le cas présent, il s'agit d'apparitions inopinés de portes et de couloirs sombres, de changements de dimensions internes de la maison sans que ses cotes externes ne bougent d'un iota. Vu et revu ? Et bien non ! Car cette histoire principale n'est, au final, qu'une composante presque mineure de ce que contient ce livre.

Ouvrons la première page ensemble, voulez-vous ? « Mark Z. Danielewski : La Maison des Feuilles, par Zampanò, avec une introduction et des notes de Johnny Errand, traduit par Claro, deuxième édition remastérisée Monsieur Toussaint Louverture ». Éléments fictifs et réels se mêlent déjà sur cette première page comme ils continueront à le faire tout le long du livre. de plus, elle vous présente la forme du roman que vous allez lire. Voici dans le détail et sans spoils les différentes strates de l'histoire :
1 - La famille Navidson emménage et filme ce qui leur arrive.
2 - Deux courts-métrages et un film ont été produits à partir de ces enregistrements.
3 - Des analyses, critiques, interviews et autres articles spécialisés ont été réalisés comme pour toute production cinématographique à succès.
4 - Ces données sont analysées et compilées par Zampanò qui veut produire ainsi une sorte de thèse. Il n'aura pas l'occasion de la finir.
5 - Johnny Errand met la main sur le travail de Zampanò, le met en forme, l'annote et l'envoi pour édition.
6 - L'éditeur et le traducteur font leur travail, rajoutent quelques notes à l'occasion.
7 - Et vous voici là, lecteur, avec l'ouvrage entre les mains essayant désespérément de vous dépatouiller de ce schmilblick.

Donc, ce roman que vous tenez entre les mains prend finalement la forme d'une thèse. Une thèse qui va brasser toutes les interprétations possibles sur ce qui est arrivé aux Navidson, décortiquer leurs personnalités etc., tout cela de façon froide, factuelle. Danielewski vous promènera allègrement entre les différents niveaux précédemment décris et ce n'est là qu'un aperçu du labyrinthe que vous allez devoir parcourir. L'utilisation du mot labyrinthe n'est pas anodine, mais vous verrez ça par vous-même. Pour ne pas se perdre, je vous conseille de vous accrocher à un fil d'Ariane très simple, une règle de base : une phrase commence par une majuscule et se termine par un point. Associez ce précepte bien connu à une certaine logique purement visuelle, un peu de méthodologie et vous ne vous perdrez pas. Notez bien que je n'ai pas dit que vous apprécierez forcément le voyage...

Parlons du livre en lui-même à présent. L'éditeur a fait un travail magnifique, l'ouvrage est beau. Un joli pavé de 17 x 23,5 x 3,5cm dont chacune des pages a son importance aussi dénudée ou étrange qu'elle puisse vous paraître. Enfin, vous aurez un dernier niveau de lecture ou niveau d'immersion à décrypter/subir : la typographie. Chaque « écrivain » possède sa propre police d'écriture, sa propre mise en page. C'est beau et propre, cela permet de s'y retrouver plus facilement... Pour mieux s'y perdre ! Les notes de bas de page sont abondantes et occupent parfois même plusieurs pages d'affilé. Certains mots/passages sont colorés et/ou barrés et la forme même du texte par moments évoque l'action décrite. Tout cela n'a qu'un seul but : renforcer votre immersion dans l'histoire à l'aide de procédés limite subliminaux. C'est à la fois instinctif et demandeur, facile à suivre et particulièrement tordu. Je me suis trouvé plusieurs fois à devoir marquer du doigt une fin de phrase pour lire une note de bas de page conséquente ou a devoir revenir en arrière pour vérifier une note, retrouver un passage laissé en suspension, etc. Prenez juste le temps de chercher La Maison des Feuilles dans Google Image et vous verrez quelques dispositions de pages/planches véritablement atypiques. C'est très perturbant. Il n'est pas rare qu'il faille carrément tourner le livre dans tous les sens pour parvenir à lire/subir ce que vivent les personnages.

La folie et de mise entre ces pages. Que ce soient les errements des Navidson dans leur effrayante maison, les digressions de Zampanò, les critiques scientifiques et/ou philosophiques poussées parfois à outrance, la vie de misère de Johnny Errand ou vos propres tribulations pour essayer de savoir comment digérer ce livre. La lassitude guette à chaque page. Il va vous falloir organiser votre esprit de façon multi-focale afin de réussir à suivre toutes les intrigues en parallèle. Il faut s'accrocher, ne pas perdre de vue telle intrigue sous prétexte qu'on en évoque une autre, etc. Dans tous les cas, vous n'en sortirez pas indemne. Dégoûté peut-être, perdus dans ces méandres qui vous semblent lourds, sans queue ni tête, injustifiés. Vous allez sans doute vouloir abandonner. Je comprendrai sans soucis et pourtant vous conjure de ne rien en faire. J'ai personnellement réussi à le lire d'une traite, étonnamment rapidement tellement j'étais happé à l'intérieur. Il s'agit du genre de livre qui nécessite certainement plusieurs lectures pour le comprendre intégralement, et encore, rien ne garantit que vous ne découvrirez pas de nouvelles choses à chaque nouvelle lecture. Et pourtant, comme je le disais : tout a son importance.

Exemples : un chapitre entier est dédié au traitement de l'écho. Cette notion est décortiquée sur le plan scientifique, philosophique et mythologique. Cela peut paraître de prime abord complètement hors propos. Et pourtant, dans les chapitres suivants, quand l'écho sera simplement évoqué, vous aurez toutes ces significations possibles de l'écho qui vont venir vous chatouiller le coin de l'esprit. Ces significations, ces possibilités juste en coin vont venir donner un relief énorme à un simple mot, une simple phrase. de la même façon, la mise en couleur du mot maison lui donne une certaine aura.

L'obscurité règne dans les dédales de la maison. de la même façon, elle vous envahira et ce sera votre imagination, et non pas les mots de l'auteur, qui la peuplera de vos cauchemars à son propre gré. J'ai fait une erreur une fois : j'ai lu un chapitre avant de dormir. Au réveil, la chambre est décomposée en niveaux de gris foncé, j'ai eu trois secondes de pure peur à demander à mon cerveau encore embrumé de sommeil ce qu'était cette forme sombre à quelques centimètres de ma tête. C'était mon p***** d'oreiller ! Laissez-moi vous dire que c'est long trois secondes. Mon esprit avait déjà commencé à donner de multiples formes à cette « créature-obscurité » pour reprendre les termes du livre. Jamais depuis que je suis adulte, un livre ou une oeuvre de fiction quelconque ne m'avait fait cet effet-là. D'autant plus que je ne l'ai pas spécialement ressenti pendant la lecture, c'est vicieux. Donc la lecture avant de dormir, ouais, j'adore, mais pas ce livre.

C'est vraiment bizarre, au fond, ce qu'on veut savoir, ce qu'on a envie de lire encore et toujours concerne les Navidson et leur maison, c'est ce pourquoi on a acheté le livre, c'est la racine de l'oeuvre. Tout ce qui tend à s'en éloigner nous frustre. On se dit que l'auteur a fumé, qu'il a voulu faire compliqué pour flatter un ego démesuré. Que nenni ! C'est de cette frustration, de ces digressions apparentes que sont nées la puissance et la profondeur du livre. Sinon, ce serait un roman d'horreur tout ce qu'il y a de plus classique.

Confrontez-vous aux ténèbres, tenez bien votre fil d'Ariane, gardez l'esprit ouvert et alerte afin d'appréhender toutes les possibilités et intrigues en même temps. Car c'est dans le noir, la non-certitude et dans la multiplicité des hypothèses que repose toute la beauté de cet ouvrage. Il n'y a pas de solution, que des "peut-être" et aucun consensus.

PS : Un grand merci à Onee-Chan pour cette découverte magistrale ! L'étrangeté de « Et dormir dans l'oubli comme un requin dans l'onde » fait bien pâle figure en comparaison de cette Maison des Feuilles.
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Ce roman raconte un labyrinthe, et il en est un lui-même. Autour du récit des événements centraux viennent s'encadrer deux couches de récits, l'un très analytique, l'autre plus narratif. L'un comme l'autre sont déconcertants, dans leur côté à la fois fascinant et profondément lourd à lire. L'analyse, proposée par Zampano, porte sur le film des Navidson dans lequel ils explorent leur maison, auquel il apporte une analyse universitaire parfois très poussée, et sur des sujets scientifiques très variés : la physique du son, l'architecture, le cinéma… le style est donc assez fastidieux, mais apporte parfois des réflexions que j'ai trouvées passionnantes. le second récit, quant à lui, est celui de Johnny qui découvre les notes de Zampano. J'ai eu beaucoup moins de sympathie pour ce personnage et ses errances (ceux qui l'ont lu auront le jeu de mots), principalement centrées autour des considérations malsaines qu'il a pour chacune des femmes qu'il croise…

Le récit des Navidson est, curieusement, aussi central qu'accessoire. C'est lui qui motive chacune des couches de ce récit, et ça n'est pourtant pas celui qui occupe la plupart des pages… Cette partie de l'intrigue avance donc lentement, et prend le temps de nous plonger dans une ambiance sombre et pesante, parfois presque horrifique, où les notes de Zampano et de Johnny agissent en voix-off tandis que les scènes s'étirent autour de nous. Ce récit nous entraîne toujours plus loin dans les noirceurs inexpliquées de la maison, tandis que la mise en page du livre s'adapte, s'intensifie, ou nous laisse face au vide, à l'écho de quelques mots laissés en suspens…

Attention : ça n'est pas un roman à intrigue, mais entièrement un roman à ambiance, par laquelle il faut accepter de se laisser porter. Dans la maison, le rythme est bancal, tantôt effréné, tantôt hors de toute temporalité – un effet qui est d'ailleurs accentué par les différents récits encadrés. La mise en page est l'une des plus extravagantes que j'ai pu lire : même en tant que lecteur, il faut chercher son chemin… La fin m'a beaucoup plu, bien qu'elle soit elle aussi assez déconcertante ; quelque part, j'ai trouvé que c'était un beau pied de nez à toutes ces histoires vues et revues de phénomènes fantastiques qui trouvent leur résolution après une enquête haletante…
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Qualifiée de roman culte instantané, La maison des feuilles a d'abord été publiée en ligne sous forme de feuilleton et a généré son lot de discussions enflammées sur des forums littéraires plus ou moins obscurs. Malgré une certaine notoriété, le livre est demeuré assez mystérieux. Je savais donc qu'il était très particulier, mais je ne savais pas du tout à quoi m'attendre...

Premièrement, il faut dire que ce n'est pas une lecture facile. C'est un roman à concept, et le concept prend beaucoup de place, jusqu'à prendre le dessus sur l'histoire – ou plutôt LES histoires, car les niveaux diégétiques prolifèrent! La majeure partie du roman prend la forme d'un essai décrivant et analysant un film documentaire, le Navidson Record, dont on ne sait pas trop s'il est véridique ou s'il s'agit plutôt d'une fiction présentée comme vraie, à la Blair Witch Project. le manuscrit, rédigé par un vieil ermite, trouvé par un jeune junky au passé trouble puis revu par un éditeur, est annoté par tout ce bon monde. L'histoire principale, celle de Navidson, nous est donc racontée à travers plusieurs filtres successifs. Les polices de caractère, les notes de bas de page et les renvois aux différentes annexes se multiplient, et le lecteur est constamment redirigé vers d'autres paragraphes, d'autres pages, d'autres chapitres. Impossible de ne pas perdre le fil de sa lecture, au point où ça en devient parfois frustrant! C'est vraiment méta et surchargé, et je peux comprendre que ce soit carrément indigeste pour certains lecteurs.

Mais qu'est-ce que ça raconte, au juste? L'histoire de la famille Navidson, chez qui se passent des choses étranges : des portes apparaissent, des couloirs s'allongent... et un immense labyrinthe finit par apparaître au milieu de la maison. Un endroit noir, vide, froid et terrifiant, qui n'arrête pas de changer et qui fait perdre la raison à ceux qui s'y aventure trop longtemps. Et c'est ici que notre cerveau explose, quand on réalise en jubilant l'ampleur de la mise en abymes : le livre qu'on a entre les mains est lui aussi un labyrinthe conçu pour nous rendre fous!

J'ai adoré les thèmes abordés et la façon dont la forme ingénieuse leur répond : les frontières entre le réel et la fiction s'estompent, tant pour les personnages du livre que pour le lecteur, tandis que le motif du labyrinthe fait tourner ce dernier en rond jusqu'à ce que l'histoire n'ait plus aucun sens. Il devient alors tentant d'essayer d'analyser les différents éléments du roman, de leur trouver un sens métaphorique – et les interprétations possibles sont nombreuses et sujet à débat!

Toute la partie mystère, épouvante et horreur est vraiment réussie. L'histoire est intrigante, l'ambiance est creepy et le suspense fonctionne, malgré les tentatives d'auto-sabotage de la narration constamment interrompue par des notes bibliographiques soporifiques! Les références à la mythologie ainsi que les réflexions essayistiques sur la psychologie ou le cinéma sont aussi intéressantes. La mise en page est originale et les thèmes sont vraiment bien exploités – peut-être même trop! le travail réalisé par l'auteur est vraiment impressionnant. Cependant, on ne peut pas dire que c'est un livre agréable à lire. C'est lourd, complexe et... labyrinthique! Je dois dire que j'ai mis beaucoup de temps à retrouver la sortie!

Si vous ne craignez pas de vous perdre dans ses sombres méandres, c'est un livre qui vaut le détour – ou plutôt ses très nombreux détours! –, ne serait-ce que pour son originalité et son ingéniosité.
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