AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,51

sur 1133 notes
Kamel Daoud, écrivain et journaliste algérien, répond à Albert Camus qui dans son livre "L'étranger", mondialement connu aujourd'hui, faisait assassiner un arabe par le narrateur du livre, Meursault, sur une plage d'Alger, en 1942, quelques 20 ans avant l'indépendance de l'Algérie. de la victime, Camus ne dit rien, et ne la désigne que comme "l'Arabe". Le narrateur de "Meursault, contre-enquête" déclare, lui, être le jeune frère de "l'Arabe" de Camus et lui donne enfin une identité ("Moussa") et une famille. Le pari de Kamel Daoud est risqué, très risqué même, tant est grande la renommée du livre de Camus, et celle de son auteur. Mais ce pari est à mon sens pleinement gagné. Daoud nous fait traverser le miroir (dépoli par le sable) entre "l'européen" et "l'arabe" et nous fait ressentir au plus près de la peau ce que le jeune frère de "Moussa" a vécu suite à la mort de son frère, puis pendant la guerre d'Algérie jusqu'à l'Indépendance. C'est tellement bien dit, avec une telle vérité, et aussi une telle audace que je me prends à rêver de rencontrer Kamel Daoud dans son bar du côté d'Oran pour qu'il me raconte la suite de l'histoire. Kamel Daoud a épousé la langue française qu'il manie superbement et il l'utilise pour parler ENFIN de cet arabe dont Camus n'avait rien dit dans son plus fameux livre, ne lui donnant même pas un prénom. Aujourd'hui cet "oubli" est réparé, et de quelle façon ! Chapeau bas, Monsieur Daoud.
Commenter  J’apprécie          177
Sur la base d'échos entendus à droite à gauche (ou peut-être seulement d'une promotion d'éditeur...), j'ai attaqué le livre avec un bon a priori : l'idée de revisiter un classique et essayer de rééquilibrer la balance, en tournant les projecteurs sur un laissé-pour-compte, "l'Arabe" tué par Meursault dans l'Étranger, me plaisait bien.

J'en sors plutôt refroidi, la faute sans doute à ce titre mensonger : contre-enquête. de "l'Arabe", nous n'apprenons en fait qu'une chose : son prénom, répété à souhait et ad nauseam par son frère, le narrateur. Ensuite, ce n'est qu'un étalage d'états d'âme et de rancoeur de la part de cet homme qui aura grandi dans l'ombre du meurtre de son frère et de la guerre d'indépendance. le monologue aigri du frère se transforme rapidement en d'insupportables jérémiades de pilier de comptoir, pleurant sur son sort plus que sur celui de son frère.

D'un autre côté, il faut reconnaître l'énorme travail de réécriture de l'auteur, qui livre une nouvelle version de L'Étranger, quasiment symétrique à l'originale, mais du point de vue algérien. "Aujourd'hui, M'ma est encore vivante" donne le ton d'entrée. D'autres parallèles suivront et permettront à l'auteur de glisser plusieurs questions d'actualité sur l'Algérie contemporaine (héritage de l'indépendance, religion...).

En fin de compte, mon sentiment est plutôt bien résumé par cette phrase : "Le succès de ce livre est encore intact, à en croire ton enthousiasme, mais je te le répète, je pense qu'il s'agit d'une terrible arnaque". Je suis déçu c'est certain. C'est dommage, car j'aurais surement abordé le livre différemment sans la publicité bâtie autour.
Commenter  J’apprécie          160
Ce monologue, qui ressasse les obsessions et les frustrations du présumé frère de l'Arabe tué dans l'Etranger, est-ce vraiment un roman ? Ou un long poème en prose ? Ou bien une parabole exprimant une protestation, une revendication, un manifeste ?
Meursault contre-enquête, j'avais trouvé l'idée géniale. Bâtir une fiction autour de l'Arabe tué dans un roman culte écrit en 1942 par Albert Camus, prix Nobel de littérature, humaniste visionnaire reconnu. Et pied-noir de son temps, comme le montre Kamel Daoud avec une ironie douce-amère empreinte de délicatesse. J'ai trouvé l'écriture sublime. J'ai aimé que l'auteur reste fidèle à des idéaux en porte-à-faux : indépendance nationale et laïcité à la française (mais oui), traditions et modernité. Mais j'ai fini par me perdre dans les délires répétitifs d'Haroun, le narrateur, n'aspirant plus qu'à parvenir à la fin du livre.

Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
Commenter  J’apprécie          160
Quelle idée originale et de génie que de faire une suite au roman de Camus ‘L'étranger' !
Pari réussi, puisqu'on ne tombe pas dans un règlement de compte. Belle écriture. Osé, talentueux et intelligent.
Commenter  J’apprécie          152
C'est rare quand cela m'arrive, mais j'ai calé. Non pas que ce livre soit mal écrit ou difficile d'accès, mais je n'ai pas compris le message.
La lecture des premières pages m'avait plutôt enthousiasmée. Beau style, ambiance.
Faire parler le frère de "l'arabe" assassiné sur la plage par Meursault dans l'Etranger de Camus, pourquoi pas.
Proposer une relecture, c'est possible.
Mais réinventer le personnage de Meursault ? Je n'ai pas compris l'intérêt.
C'est dommage, car l'auteur avait sans doute des messages intéressants à faire passer, il a de surcroît d'indéniables qualités d'écriture, mais je ne suis pas arrivée à achever le livre. J'en ai lu à peu près la moitié.
Si quelqu'un me conseille de poursuivre, avec quelques éclaircissements, peut-être l'achèverai-je un jour ...
Commenter  J’apprécie          150
Meursault contre-enquête (2013) est un roman de Kamel Daoud, suite, réécriture ou hommage de L'étranger (1942) d'Albert Camus. le narrateur se présente comme le frère de l'arabe anonyme tué dans le roman original. Il veut présenter sa version des faits. Un court roman original et intéressant.
Commenter  J’apprécie          130
Et bien, j'ai failli ne pas le finir ce petit roman de 150 pages ; j'ai failli abandonner à moins de la moitié. Il faut dire que je ne comprenais pas du tout où voulait en venir Kamel Daoud. Pendant plus de 50 pages c'est un vieillard qui ressasse qui ressasse qui ressasse encore le fait que son frère, le fameux Arabe de l'Etranger, n'ait pas été nommé. de plus, les personnages de Meursault contre-enquête sont absolument détestables: la mère est une caricature de la Méditerranéenne stupide, aigrie, jalouse, quasiment incestueuse. le fils et frère de l'Arabe ( Moussa en réalité) est insignifiant, dominé, revanchard, ivrogne, probablement menteur. Avec un tel début, on aurait pu croire à un roman écrit par un indigéniste. Je ne comprenais absolument pas comment ce livre avait pu être encensé par la critique et recevoir le Goncourt des lycéens. Je ne comprenais pas en quoi Meursault contre-enquête était un hommage à Camus. J'ai quand même décidé de continuer et bien m'en a pris car, au-delà du fait que Kamel Daoud écrit extrêmement bien, j'ai fini par comprendre que Meursault contre-enquête est bel et bien un contrepoint de l' Etranger. Il y a un effet de miroir entre les deux livres et le propos est loin d'être aussi simpliste qui n'en a l'air. Meursault interroge sur la colonisation et sur la manière dont elle est ressentie, sur la vie et sa valeur et sur le rapport aux autres. C'est pourquoi, au final , j'ai beaucoup aimé cette lecture qui m'a donné envie de relire l'Etranger.
Commenter  J’apprécie          132
Le narrateur de cette histoire, Haroun,est le frère de l'arabe tué par Meursault.
Ancien fonctionnaire à l'inspection des domaines, Haroun est un vieillard plein de rancoeur. Il vit à Oran. Sa M'ma est encore vivante. Attablé dans un bar, buvant du vin, il raconte son existence. A qui s'adresse-t-il ? à lui-même ? à Meursault ? à Camus ? au lecteur ?

Dans la première partie de l'ouvrage il parle surtout de Moussa, son frère, "l'arabe" assassiné. Sa mère ne se remettra jamais de ce deuil : la tombe est vide, le corps n'a jamais été retrouvé. L'ombre de ce frère a affecté toute sa vie :
"j'ai tant de fois souhaité tuer Moussa pour retrouver la tendresse perdue de M'ma, pour récupérer mon corps et mes sens, pour... Étrange histoire tout de même. C'est ton héros qui tue, c'est moi qui éprouve de la culpabilité, c'est moi qui suis condamné à l'errance".... (P57)

Dans la dernière partie Haroun parle de l'Algérie actuelle, de l'Indépendance à laquelle il n'a pas participé ce qui lui sera reproché lorsqu'il sera interrogé pour avoir assassiné "le roumi Joseph" :
"...Il se mit à bégayer qu'il y avait une différence entre tuer et faire la guerre, qu'on était pas des assassin mais des libérateurs, que personne ne m'avait donné l'ordre de tuer ce français et qu'il aurait fallu le faire avant. "avant quoi ?" ais-je demandé. "avant le 5 juillet ! oui avant, pas après, bon sang !" (p. 119).

L'auteur fait de nombreuses références au livre de Camus en prêtant à son personnage des événements et des actes identiques ou contraires à ceux de Meursault :
L'incipit : "aujourd'hui maman est morte" ; "Aujourd'hui , M'ma est encore vivante",
l'assassinat : Meursault abat un inconnu appelé l'arabe, Haroun abat un français, Joseph Larquais,
Meursault est aimé de Marie, Haroun aime Mariem.
Dans les dernières pages, Meursault a une altercation violente avec l'aumônier de la prison, Haroun avec l'imam.

Enfin, la dernière phrase des livres : "il me reste à souhaiter qu'il y ait beaucoup de spectateur le jour de mon exécution et qu'ils m'accueillent avec des cris de haine" (A.camus). "je voudrais moi aussi, qu'ils soient nombreux mes spectateurs , et que leur haine soit sauvage". (K.Daoud).

Bon livre mais certains passages m'ont paru un peu nébuleux.
Commenter  J’apprécie          130
Dans L'étranger, le roman d'Albert Camus, en 1942, Meursault, le héros, abasourdi par le soleil, tue un arabe sur une plage. Pourtant cité de nombreuses fois, Camus n'a pas donné de nom à cet arabe. de plus, lors du procès, on reproche davantage à Meursault le comportement à l'enterrement de sa mère que cet assassinat.
Kamel Daoud tente de redonner une identité à l'arabe de Camus lui donnant un nom, Moussa Ouled El-Assasse, une vie, un pays. C'est son frère, Haroun qui, dans un bar d'Oran, confie cette histoire à un universitaire spécialiste de Camus.
Si il donne une identité à son frère, jamais il ne prononcera le nom de Camus ni le titre de son célèbre roman. Ce sera L'autre écrit par Meursault.
L'oeuvre de Camus, Kamel Daoud la connaît parfaitement, jouant à copier des situations, à construire comme en miroir des faits et sentiments. Haroun ira jusqu'à commettre un crime contre un français. Oeil pour oeil, dent pour dent. Et pour cela, il sera arrêté et interrogé par un colonel. Là, on lui reprochera davantage le fait de ne pas avoir pris le maquis que d'avoir tué. Encore un autre parallèle.
Si je me suis sentie mal à l'aise face à cette colère, certes justifiée d'Haroun, j'ai apprécié ce jeu de miroirs, sans peut-être n'en avoir détecté la totalité et surtout cette comparaison avec Caïn et Abel, en image de la situation de l'Algérie avant l'indépendance.
» Tu saisiras mieux ma version des faits si tu acceptes l'idée que cette histoire ressemble à un récit des origines : Caïn est venu ici pour construire des villes et des routes, domestiquer gens, sols et racines. Zoudj était le parent pauvre, allongé au soleil dans la pose paresseuse qu'on lui suppose, il ne possédait rien, même pas un troupeau de moutons qui puisse susciter la convoitise ou motiver le meurtre. D'une certaine manière, ton Caïn a tué mon frère pour…rien! Pas même pour lui voler son bétail. »
Derrière la haine de l'assassin entretenue par une mère inconsolable, il y a la rage contre le colon. Meursault tournant » en rond dans un pays qui ne voulait pas de lui ni mort ni vivant. le meurtre qu'il a commis semble celui d'un amant déçu par une terre qu'il ne peut posséder. » a tué un arabe » comme on tue le temps« .
Haroun avait sept ans lors du meurtre. Il a passé sa vie entre les peurs et le chagrin de sa mère, la mémoire du cadavre de son frère jamais retrouvé, emporté par la mère et l' absence du père et de figures masculines, » un adolescent piégé entre la mère et la mort. »
« C'est pourquoi je vais faire ce qu'on a fait dans ce pays après son indépendance: prendre les pierres des anciennes maisons de colons et en faire une maison à moi, une langue à moi. »
Cette lecture est une continuité, une complémentarité à l'oeuvre de Camus. Kamel Daoud la maîtrise et nous éclaire avec cet autre regard, cette analyse pointue, ce droit de réponse dans une langue précise, harmonieuse. Elle donne une place aux natifs de cette terre, même si ils vivent dans les quartiers pauvres, souffrent de la faim, relégués hors des habitations colonisées.
Les tourments d'Haroun m'ont toutefois paru aussi accablants que le soleil d'Alger pour Meursault. D'un adolescent brisé, il est devenu un adulte aigri, haineux, ne croyant plus ni en la religion ni en l'amour. Ainsi, les colons n'ont pas pris que la terre, ils ont aussi laissé un lourd héritage dans les coeurs et les âmes des gens du pays.
Lien : https://surlaroutedejostein...
Commenter  J’apprécie          130
Camus crée un personnage de papier, Meursault, dans l'Etranger, Kamel Daoud lui donne vie, ainsi qu'à ses actes, et à la victime, comme si l'histoire était réelle. Camus n'est jamais cité, le postulat de départ est le roman de Meursault, écrit par lui-même après son crime.

De son acte criminel, en tuant un arabe sans nom entre midi et quatorze heure sur une plage sous un soleil de plomb, à l'Algérie d'aujourd'hui analysée par Haroun, un vieil arabe marginal, en passant par la condamnation à mort de Meursault pour avoir mal enterré sa mère, le personnage de Daoud mène l'enquête et nous donne une vision de cette histoire qui est le contre-pied de la version de Camus.

Car se contenter de Camus, c'est oublié que l'Arabe avait un nom, un frère cadet, et une mère qui ne s'est jamais remise.
Le frère cadet, c'est Haroun, le narrateur, qui confie son histoire à un auditeur anonyme dans un bar, potentiel écrivain intéressé par sa version des faits.

Ce personnage est le prétexte pour analyser la société contemporaine et analyser la montée de la religion: les remarques sur les bars, de plus en plus nombreux à fermer, sur le métier du vin, devenu haram (illicite), sur la récitation du Coran, sur l'embrigadement à la mosquée le vendredi et sur l'arabité en sont quelques exemples.

Mais à aucun moment vous n'aurez droit à un pamphlet ou à un discours révolutionnaire. Non, c'est beaucoup plus subtil, finement amené, servi sur un plateau aux lecteur au fil du récit d'Haroun, ce vieil algérien si lucide dans sa marginalité.

Quand on sait que ce qui a motivé la fatwa qui vient de tomber sur Kamel Daoud a pour motifs ''hérésie, mise en doute du Coran, atteinte à la langue arabe", tous les ingrédients sont dans ce livre.
Mais ce qui est condamné est plutôt sous la plume de l'auteur un appel à la modernité, à la liberté et à l'ouverture d'esprit, contre l'obscurantisme de tous les -ismes.

Et maintenant, vous n'avez plus qu'à relire l'Etranger, sous cet éclairage nouveau, et à vous amuser à retrouver les passages de l'original auxquels Daoud fait de nombreux clins d'oeil. L'occasion de relire un classique souvent lu au lycée!
Commenter  J’apprécie          130




Lecteurs (2488) Voir plus



Quiz Voir plus

Le Minotaure

Qui sont les parents du Minotaure

Poseidon et Athéna
Pasiphae et minos
minos er athena

4 questions
1 lecteurs ont répondu
Thème : Le Minotaure 504 de Kamel DaoudCréer un quiz sur ce livre

{* *}