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Osamu Dazaï (1909-1948), l'enfant terrible des lettres japonaises a composé Soleil couchant après la capitulation du Japon. le livre est publié en 1947 qui est aussi l'année de naissance de sa fille. En 1948 paraît son autre chef d'oeuvre, La déchéance d'un homme et puis Osamu se suicide. Dans Soleil couchant, le désenchantement stoïque, la révolte scandaleuse et l'angoisse auto-destructrice que l'écrivain confesse, sans masque, par l'intermédiaire de trois personnages se confond avec le profond désarroi de tout un pays au sortir de la guerre. "Shayō, le Soleil couchant" fait sensation dès sa sortie. Très vite, l'expression « peuple du Soleil couchant » se répand pour désigner l'aristocratie japonaise en voie de disparition. La force et la modernité du livre proviennent de cette authenticité incomparable associée à une très grande maîtrise littéraire. C'est aussi un livre qui fait la part belle aux femmes.


Kazuko, la jeune narratrice, vit avec sa mère qu'elle admire profondément dans une maison du quartier résidentiel de Nishikata à Tokyo. Elle est divorcée et privée d'horizons. En plein désarroi. La mort du père et la défaite du Japon lors de la Seconde Guerre mondiale ont considérablement réduit les ressources de la famille. Il a fallu à contre coeur écouter l'oncle Wada qui s'occupe du budget de la famille, vendre la villa, renvoyer les domestiques pour déménager dans une petite maison de la péninsule d'Izu, disposant d' un salon chinois et d'une grande chambre -supérieure- occidentale. La fragile harmonie de la vie à la campagne, où Kazuko cultive la terre et soigne sa mère malade est perturbée par l'apparition d'un serpent, symbole funeste dans la famille. Naoji, le frère de Kazuko, écrivain et ancien opiomane qui était porté disparu est de retour...

L'écriture d'Osamu Dazaï n'est pas linéaire mais spiralaire. le livre s'ouvre par la fin d'un dialogue. La mère est en train de manger un potage et pousse un cri. La narratrice pense qu'un cheveu est tombé dedans. La mère nie. Suit une ellipse où la narratrice décrit les différentes manières de tenir sa cuiller à soupe et présente les membres de la famille. En fait le cri de la mère n'est pas lié à un cheveu mais à un souvenir de mauvais présage. Un après-midi Kazuko alors petite fille avait brûlé les oeufs d'une couleuvre, pensant qu'il s'agissait de ceux d'une vipère et s'était fait gronder. Quand le père était mourant, la mère crut voir une corde noire au pied du lit. Il s'agissait d' un serpent qui se faufila dans le couloir et disparut. Alors qu'elle marchait près de l'étang afin de couper des roses pour le service funèbre, Kazuko le vit. Puis le même jour, elle le retrouva dans les iris alors qu'elle traversait un jardin (pour aller prendre un recueil de peintures de Marie Laurencin). Il fit frémir sa langue qui avait l'air d'une flamme, il paraissait chercher quelque chose. Elle pensa alors qu'il s'agissait d'une femelle. Mère et fille ont songé ensemble qu'il s'agissait de la mère des oeufs brûlés dix ans plus tôt. A présent Kazuko attribue la détérioration de la santé de sa mère au geste sacrilège des oeufs brûlés et culpabilise. Ce motif du serpent réapparaîtra à différents moments du roman avec celui du feu. Ils sont annonciateurs d'événements funestes mais aussi d'une renaissance à la fin du livre.

Autre caractéristique du style d'Osamu Dazaï, le recours aux journaux intimes et aux lettres à l'intérieur du récit. Les trois personnages ne communiquent jamais directement.
Naoji réapparaît et fait vivre un enfer quotidien aux deux femmes à cause de ses addictions et de son caractère suicidaire. La mère l'aime absolument sans jamais se plaindre. Kazuko est jalouse et révoltée. D'abord elle a un secret. Ensuite à cause des dépenses du frère pour acheter de la drogue et de la maladie coûteuse de la mère, l'oncle Wada suggère que Naoji se remarie. Trop, c'est trop ! Cependant elle tombe sur le journal intime de son frère. Elle découvre alors l'écrivain qu'il est, son désespoir et sa révolte. Kazuko enfermée dans son rôle de domestique et de garde-malade, de ses taches subalternes et répétitives, tombe amoureuse de Uehara, l'écrivain mentor de son frère. Elle lui écrit trois lettres sans obtenir de réponses...A la fin elle trouvera la lettre-testament de Naoji. Un texte magnifique à lui tout seul, testament de l'écrivain. Naoji demande à être enterré dans le kimono de sa mère. Kazuko a pris en son sein la force de sa mère et aussi la liberté individuelle de son frère. Elle est bien décidée à se battre dans ce Japon nouveau.

Il y aurait bien d'autres choses à dire sur ce court roman que l'on peut trouver dans deux traductions. Les pages sur la mère sont bouleversantes, le testament du frère est un texte sensationnel à lui tout seul, un cri. Je vous renvoie aux excellentes critiques des amis babelionautes.
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Soleil couchant, c'est le titre de ce roman mais c'est également une expression qui s'applique à l'aristocratie japonaise, en déclin après la Seconde guerre mondiale. Certains possèdent des titres de noblesse mais pas tous n'ont le raffinement, le ton, le maintien, tout ce qui symbolise et représente un aristocrate. Mais les temps sont durs et certains, s'ils possèdent toutes les qualités requises, n'ont plus les moyens financiers qu'ils avaient. C'est le cas de la famille de Kazuko. Cette jeune femme au tournant de la trentaine, divorcée, éprouvée par des amours malheureux ou incompris, est retournée vivre chez sa mère malade dont elle s'occupe dans le plus grand dénuement. le père est décédé il y a un certain temps. le frère Naoji est revenu de la guerre drogué et alcoolique, lui soutirant de l'argent.

J'aime beaucoup les romans qui dépeignent les fins de règne, quand des gens s'accrochent aux traditions propres à des époques révolues. Soleil couhant est exactement cela. Sans argent ni qui que ce soit pour accorder de la valeur à leur noblesse, Kazuko et sa famille sombrent dans la déchéance. Ils sont malmenés par une vie qui ne leur fait plus de place, qui n'a plus de sens pour eux. Cette histoire, c'est aussi celle de l'auteur lui-même, Osamu Dazai. le parcours de Naoji ressemble au sien (aristocrate, mère malade, études délaissées, alcool) et ses préoccapations le rejoignent (les pensées suicidaires). Et il y a aussi un peu de Kazuko en lui, je suppose. Tous des âmes sensibles.

Justement, il se dégage du roman Soleil couchant une grande sensibilité, tellement qu'on ne peut en vouloir aux personnages pour les choix qu'ils font. Leur histoire, c'est celle de beaucoup de Japonais aux prises avec le poids des tradition, le choc d'une société en mutation, la quête de l'amour et, surtout, le désespoir d'une génération. Touchant ! Un roman fascinant et pertinent pour comprendre je Japon de l'après-guerre.
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À mi-chemin entre la confession et la chronique historique, ce roman d'Osamu Dazai relate le déclin de l'aristocratie japonaise après 1945, à travers le destin symbolique de la famille de l'héroïne prénommée Kazuko.

Les valeurs de l'aristocratie se retrouvent bafouées et brisées par la défaite. Parmi ces valeurs on trouve en particulier celles du christianisme, qui furent un temps prisées de l'élite japonaise pendant la première moitié du XXème siècle.

Dans ce contexte, Dazaï élabore une métaphore filée où le serpent fait le pont entre le jardin d'Eden et le Zarathoustra de Nietzsche. Cette trajectoire est empruntée par Kazuko, dans l'espoir de faire naître un homme nouveau qui serait à même de surmonter la crise morale décrite par Dazaï, et qui n'est pas sans rapport avec le suicide de ce dernier.

De fait, les passages épistolaires mettant en scène Naoji, le frère de Kazuko, se lisent comme le testament de Dazaï. Cyniques et désespérées, ces lettres sont le reflet négatif de celles pleines d'espoir que Kazuko adresse à son amant, un écrivain dans lequel on reconnaît aussi les excès et l'iconoclasme de l'auteur. C'est en fait le tour de force de Dazaï d'avoir réparti ses traits de caractère entre l'ensemble de ses personnages, tout en conférant à chacun une personnalité distincte. En adoptant une voix féminine, il se place du point de vue des femmes qui ont partagé sa vie dissolue. Faute de pardon, il se fait poète de la honte via l'étrange (dis)harmonie de ses personnages et de leurs névroses, élaborant ainsi une oeuvre-phare du shisōsetsu, littéralement « roman du je ».
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Un magnifique court récit sur la fin d'une époque et un pays en changement !
Ce pays est bien entendu, le Japon, le pays du Soleil Levant mais Osamu Dazai va nous décrire le couchant de son pays au travers du Crépuscule de l'aristocratie en cette période d'après-guerre.

C'est l'histoire d'un triangle de personnages, Kazuko, son frère Naoji et leur mère. Un triangle, car au-delà de leurs liens familiaux, il semble y avoir d'autres liens qui les entrainent les uns avec les autres et les emmêlent dans le fil de leur déchéance.
Les propriétés de ce triangle sont selon moi difficiles à définir. Un triangle quelconque, isocèle ou équilatéral selon que nous regardions, le côté ascendant-descendants, l'impact de chacun de leurs actes, la chronologie de leur mort.

En effet, au moment de devoir se résoudre à vivre plus simplement, il ne reste de cette famille aristocrate que Kazuko et sa mère mourante. Son père est déjà mort, son frère Naoji est porté disparu au combat et seul un oncle lui reste assez proche.
Nous allons les suivre vers leur progressive déchéance avec leur perte de repères, les désenchantements, la décadence, puis la révolte, quelle qu'en soit la forme. Et pour cela, Osamu Dazai va nous donner à lire de nombreux dialogues, et surtout des lettres.

La question posée est alors qu'est ce qui est à l'origine de leur devenir, l'un d'entre eux, tous ou aucun et ce sont seulement tous les changements en cours dans leur pays ?

La particularité de ce récit pour moi a été que je l'ai fini, puis y suis revenu régulièrement. J'ai relu de nombreux passages dans différents ordres, un passage en appelant un autre. Je ne l'ai pas relu pour savourer de nouveau quelque chose que j'avais initialement apprécié comme pour d'autres livres mais pour une meilleure compréhension et au fur et à mesure comme par nécessité.
Et à chaque relecture, ma vision changeait, il prenait de l'ampleur, devenait de plus en plus intense car j'y entrevoyais davantage. Il y a bien plusieurs niveaux de lecture. le premier niveau, en lecture linéaire, est déjà fort agréable, suivre l'évolution de Kazuko dans son adaptation aux changements de vie. Néanmoins, le niveau suivant, en lecture je dirais « labyrinthique » (mais je ne connais pas le vocabulaire littéraire adéquate car pas non plus cyclique, si l'un d'entre vous pouvait me renseigner !?!) est bien plus et je sais que c'est cela justement qui va me rester de ce livre.
Cette structure se superpose en fait parfaitement à ce que j'ai pu aussi percevoir des liens entre ces trois personnages. J'ai suivi le fil qui les enserre progressivement et forme un motif équivalent à celui d'une toile d'araignée avec un résultat tout aussi fatal que pour sa proie.

Je ne lui ai pourtant pas mis la note maximale uniquement par ressenti personnel et en comparaison de ce que j'ai pu ressentir à la lecture d'autres auteurs japonais comme Yukio Mishima.
Cependant, il est certain que je vais poursuivre avec Osamu Dazai, non seulement après la lecture de ce récit mais aussi de sa biographie.
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Une famille d'aristocrates se voit ruinée à la fin de la seconde guerre mondiale. « Tels sont les gens du Soleil couchant » (lancée par Osamu Dazai, cette expression a fait fortune au Japon, au point de qualifier aujourd'hui, jusque dans les dictionnaires, les membres déchus de l'aristocratie) (extrait de la quatrième de couverture). Elle doit se résoudre à quitter sa luxueuse maison pour déménager dans un chalet de montagne plus sobre. Cette famille est composée de la mère et de Kazuko, la fille. « A présent, Mère était ruinée. Elle avait tout dépensé pour nous, pour Naoji et pour moi-même, sans nous refuser un yen, et elle était forcée de quitter la maison où elle avait passé tant d'années, pour entreprendre une vie de misère dans un pavillon, sans la moindre servante. » le père est mort dix ans auparavant et le fils, parti dans les îles du sud pacifique n'a pas donné de nouvelles. Jusqu'au jour où l'oncle Wada leur apprend qu'il est toujours en vie et qu'il va revenir une fois qu'il sera désintoxiqué de toutes ses drogues. En effet Naoji est un drogué et ce depuis longtemps.

C'est vraiment très dur pour la mère de partir ainsi : « Je vais à Izu parce que tu es avec moi, parce que j'ai charge de toi. (…) – Et que feriez-vous si vous ne m'aviez pas ? demandai-je malgré moi. Mère fondit en larmes. – Je n'aurais rien de mieux à faire que de mourir. Je voudrais mourir dans cette maison où ton père est mort. » Kazuko, la narratrice, comprend alors le désespoir « Pour la première fois de ma vie, je réalisai quel enfer horrible, lamentable et sans espoir de salut représente la ruine. » Les débuts sont difficiles, Kazuko provoque un incendie sans le vouloir et c'est pour elle un terrible déshonneur. Elle aurait pu mettre le feu à tout le village alors de maison en maison elle va présenter ses excuses et remettre une liasse de billets. Elle ira travailler dans les champs, elle a été mobilisée, et Naoji reviendra. Mais que de façon ponctuelle car il ira ensuite régulièrement à Tokyo pour s'alcooliser avec un certain Monsieur Uehara Jirô, auprès duquel il contractera des dettes. Kazuko rencontrera cet homme une fois et elle tombera amoureuse de lui. Cependant cet homme l'ignorera sans répondre à ses lettres. La mère a des problèmes de santé et petit a petit son état se dégradera.

Dans ce roman très bien écrit, on nous parle du désespoir humain, de la condition de ces aristocrates déchus avec la seconde guerre mondiale, où l'aristocratie prendra un sacré coup de scalpel. Comment se comporter, comment vivre lorsqu'on perd son statut, sa richesse. Comment se recréer des repères quand les valeurs ne sont plus les mêmes et que tout ce que nous connaissions s'envole en fumée. Comment vivre avec la peur de l'avenir ? La force de garder certaines traditions de noblesse. On y parle aussi du désir vital pour une femme d'avoir un enfant et de tout ce qu'elle est prête à faire, aussi par amour. Ici on trouve toute la volonté de vivre de Kazuko et de sa croyance en l'avenir et tout le désespoir de son frère. Une souffrance de vie. La jalousie entre un frère et une soeur. Une écriture qui dépeint parfaitement le trouble de cette période difficile et transitoire au Japon, les émotions des personnages, leurs malaises et leurs préoccupations.

Et sans dire de qui il est, il faut savoir que dans ce roman est écrit un testament qui est, selon moi, une merveille d'écriture et qui relate parfaitement les errances mentales et la guerre intérieure d'une personne. On retrouve aussi dans ce roman l'expression parfaite de la déchéance physique pour certains mais aussi l'amour tortueux, l'amour plein, l'amour assouvi, l'amour secret ou encore l'amour platonique. L'amour familial est, de même, très présent dans cette histoire. Et tout ceci dans une société en pleine mutation. Cette histoire écrite par Osamu Dazai est forte de signification quant à un pan de l'histoire du Japon. C'est un livre de dramaturge, il est à prendre comme tel, une lecture très intéressante d'après moi. La plume y est parfois poétique et parfois violente. On y perçoit toute le tumulte, les tourments et la souffrance de cet auteur, suicidé alors qu'il n'avait pas encore 40 ans. Mais ici une personne essaie de s'en sortir, une raison de vivre non négligeable, mais je ne peux vous en dire plus…
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Curieux roman que Soleil couchant ! Curieux et néanmoins plaisant, attachant, original !
Kazudo, la narratrice, et sa mère doivent quitter leur très belle demeure de Tokyo faute de pouvoir en assumer financièrement l'entretien. Nous sommes durant la seconde guerre mondiale. Elles partent s'installer dans un modeste chalet de la campagne. Kazudo va travailler la terre, participer aux tâches de la maisonnée. C'est aussi où le fils de la famille revient sous totale dépendance à la drogue.
Il ne faut pas chercher dans ce court roman une quelconque action ; le rythme est assez lent, la narration sous le point de vue de la fille peut sembler un peu monotone, et assez lisse. Malgré tout il est assez caractéristique de cette époque, en décrivant une société à la croisée des chemins, une société en train de perdre ses repères, une société qui en quelque sorte entre dans l'ère moderne et qui regarde, incrédule, la fin d'une époque et constate son déclin sans paraître capable de s'adapter à ce qui semble se préparer.
Ecrit avec beaucoup d'élégance, de concision et de justesse, ce roman m'a parfois décontenancée sans jamais entamer ma curiosité.
De littérature japonaise pur jus, dans ce qu'elle comporte d'originalité, dans son abord un peu froid, exotique et parfois hermétique.

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Texte étrange ou je dirais plutôt un récit écrit par une jeune femme révoltée mais qui cherche un but à sa vie , à la continuité d'une vie autre que celle qu'elle a connu.
L'écrivain parle de la déchéance de l' Aristocratie dans un Japon en plein changement dans un pays déboussolé et ruiné. Lui même détruit par la drogue et l'alcool se suicidera avec sa maîtresse en 1948.
Dans son livre il aborde les thèmes de :
- l'amour maternel,
- l'amour que porte la fille à sa mère dont elle estime ne pas être payée en retour ; sa mère vouant une adoration inconditionnelle à son fils ,
- la déchéance de la famille d'Aristocrates qu'ils sont et le mal être à vivre comme gens du peuple .
Tout un cheminement au travers des pensées de Kazuko nous raconte leurs vies, l'aboutissement irrémédiable de leur mal être et pour elle cependant cette envie d'inventer sa propre liberté.

* Je tiens à remercier la masse critique pour m'avoir sélectionné . Ai reçu ce livre très bien emballé par les Editions Les Belles Lettres .
Suis ravie de l'avoir lu même si le début ne m'emballait pas spécialement, j'ai pu au fil des pages apprécié cet auteur qui m'était inconnu jusqu'alors et que je relirais avec plaisir.

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Dans un quartier huppé de Tokyo, Nishikata, Kasuko, jeune femme de vingt-neuf ans vit avec sa mère. le père est décédé depuis une dizaine d'année et le frère, Naoji, est à la guerre.
Kasuko nous raconte les bouleversements de la société nippone après la guerre, qui a tout dévasté. Les valeurs ont changé, il faut s'adapter coûte que coûte. Mais comment faire face, quand on a eu une vie protégée ?
Les changements ne sont pas seulement matériels.
« Ma mère ne m'avait jamais, au grand jamais, parlé de sa détresse jusqu'à ce jour ; et ces violents sanglots étaient un spectacle qu'elle ne m'avait jamais encore donné. Ni lorsque mon père était mort, ni lorsque je m'étais marié, ni lorsque j'étais revenue enceinte chez ma mère, ni lorsque j'avais à l'hôpital mis au monde un enfant mort-né, ni, lorsque moi-même malade, je m'étais alitée, ni non plus lorsque Naoji s'était mal conduit…non, jamais ma mère n'avait laissé voir une telle détresse. »
Ces deux femmes, enfermées dans une relation silencieuse, vont devoir tout quitter pour s'installer à Izu, dans une propriété à la campagne. C'est l'exil.
Kasuko, montre les fissures créées par ces changements par un attachement obsessionnel à des détails : des oeufs de serpent brûlés, un feu déclenché par des braises mal éteintes, qu'elle rattache à la dégradation qu'elle observe chez sa mère. Et en même temps, le concept de devoir et d'honneur perdure : « A l'heure qu'il est, appartenir à la famille impériale ou à la noblesse, ce n'est plus ce que c'était ; et pourtant, si cela doit périr, j'ose le dire : périssons en beauté. »
Concernant Naoji, il est vivant mais il est retourné à son addiction : l'opium.
En conséquence Kasuko se voit assigner par son oncle Wada la tâche de se trouver un nouveau mari ou « travailler » mais selon un critère restrictif, question d'honneur et pour alléger les charges de l'oncle. Elle est piégée et va se révoltée contre ce diktat afin de trouver sa liberté.
Eclate enfin ce qui était tu et insupportable pour Kazuko : « Et vous, quand vous apprenez que Naoji va venir, me voilà tout d'un coup devenue pour vous un fardeau, et vous me dites d'aller me placer comme domestique dans une grande famille ! Trop, c'est trop ! »
Naoji va plonger le lecteur dans les affres de la création, écrivain conscient d'avoir du génie mais pas de reconnaissance et la dichotomie entre ce qu'il veut exprimer et ses écrits…
Une conscience prégnante que le suicide sera sa seule issue honorable (l'auteur s'est suicidé avec sa compagne à l'âge de trente-neuf ans).
« Pour un homme il est impossible de continuer à vivre sans se dire des choses telles que : je suis un être d'élite. »
J'ai aimé ce roman pour cette originale étrangeté qui pour moi préfigure une belle réflexion sur le monde et donne des clefs sur l'évolution de ce pays.
Une écriture double, féminine et masculine qui nous fait passer par différentes phases, de l'empathie à la distanciation, cet effet yo-yo qui nous garde en éveil sur un propos aussi profond que le style est fluide.
La noirceur que l'on met en exergue chez cet auteur me semble exagérée, elle me parait mâtiner de lucidité, que chacun choisit d'affronter ou non.
Oui le nihilisme de Dazai Osamu – Naoji est omniprésent mais la lumière est donnée à travers cette voix de femme qu'est Kazuko, c'est d'une force incroyable, car elle montre qu'après l'effondrement des valeurs qui suit la défaite du Japon en 1945, un pays qui voit tout disparaitre a tout à reconstruire. Qui mieux qu'une femme, qui s'est vu attribuer des rôles sans que la société ne s'interroge sur leur bien-fondé, peut relever les défis comme le déclassement et ses corollaires, le désespoir d'un monde qui sombre…interdite de séjour ou en exil dans sa propre société, elle ne peut qu'être l'étendard de la révolte nécessaire à la Vie. L'auteur est très original dans cette démarche et par son écriture qui sait se faire féminine quand c'est nécessaire, il montre un aspect qui caractérise le Japon à cette période mais va au-delà des frontières.
Au vu de ce qui se passe dans le monde actuel, certaines voix de femmes portent des révoltes salvatrices.
Si ce livre date de 1947, il reste sur une réflexion universelle et donne sens à la belle littérature, celle qui demande une lecture exigeante comme la vie.
Merci à Masse critique Babelio et aux éditions Les Belles Lettres.
Chantal Lafon-Litteratum Amor 21 octobre 2017.
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Alors que les forces américaines occupent le Japon après la guerre, l'histoire traite du déclin moral d'une famille aristocratique.

Kazuko, une jeune femme née dans la noblesse mais désormais pauvre. Même si elle porte des vêtements occidentaux, son regard est japonais ; sa vie est statique et elle reconnaît qu'elle est spirituellement vide. Au cours du roman, elle survit à la mort de sa mère aristocratique et de son frère sensible et toxicomane Naoji, un intellectuel ravagé par les siens et par les échecs spirituels de la société.

Il s'agit d'une histoire tragique et vivante de la vie dans le Japon d'après-guerre.
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- Soleil couchant d'Osamu Dazai -

Soleil couchant (斜陽 [shyayô]) est un roman d'Osamu Dazai sorti en 1947. le roman nous fait vivre une période de la vie de Kazuko et sa famille appartenant à l'aristocratie japonaise. Selon le style du Watakushi shōsetsu, beaucoup utilisé par Dazai, c'est Kazuko qui parle, elle nous raconte un tournant de sa vie : de sa vie en tant que fille et soeur à sa vie en tant que femme. Dans ces années de transition entre l'avant-guerre et ce nouveau Japon d'après-guerre, la société change et Kazuko aussi...
Lien : http://carol-knows-good-blog..
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