Il fallait que je nous trouve un endroit pour la nuit. J'espérais réussir à remettre de l'ordre dans mes idées le lendemain.
Peut-être que dans ces moments-là j'étais un peu jalouse de vous. Et je lui en voulais presque d'écourter ces matins en partant nager. M. prend rarement sn temps. Comme s'il était conscient d'une urgence qui m'échappait.
Certains matins tout me semble limpide, résultant d'une logique évidente, ruisselant au gré des forces extérieures, de mon désespoir, de mes atavismes. À d'autres moments, je me vois comme un monstre, une créature que je ne reconnais pas, qui m'aurait possédée dans un moment de vulnérabilité.
Tout s'est arrêté. Toutes mes sensations. Juste le silence. La collision avec le réel arrache tout, brise l'entendement, écorche si profondément que les émotions se taisent. Pourquoi mon cœur ne s'est-il pas arrêté lui aussi ?
Il n'y a pas de morale à cette histoire. Tout ce que je sais, c'est que je vous dois les faits.
Je veux qu'il y ait des fleurs, des belles, pas les couronnes des funérariums, des fleurs de prairie, je veux de la terre, du feu, des étoiles, des odeurs vraies, du temps, autant qu'on veut, des mots pour lui, des larmes faites maison, pas un deuil en plastique, à la chaîne, professionnel, rentable.
Le silence. Tout s'est arrêté. Toutes mes sensations. Juste le silence. La collision avec le réel arrache tout, brise l'entendement, écorche si profondément que les émotions se taisent. Pourquoi mon cœur ne s'est-il pas arrêté lui aussi ?
J’avais entendu dire que ça skiait encore tout là-haut, à grand renfort de canons à neige. Je n’ai jamais bien compris ce goût de s’entasser dans des bennes à humains pour aller se déchirer les ligaments croisés entre la raclette et le vin chaud. Peut-être que je rate quelque chose. Romain adorait le ski. Il l’adore toujours. Moi j’ai plutôt tendance à penser que l’humain a davantage été programmé pour la sieste, la cueillette et la baise, comme tous les grands primates, mais chacun son truc…
(Page 167)
M. m’avait appris à prendre ma place, à prendre forme. Avant lui, j’étais une matière molle, presque liquide, qui s’ajustait aux nécessités de l’autre.
En m’interrogeant continuellement sur mes besoins, il m’avait appris à m’y intéresser, à les autoriser. À m’autoriser. Il me laissait de l’espace sans laisser de vide. Je me suis solidifiée à son contact, un noyau s’est formé au centre de la matière molle.
(Page 155).
C’est fou le pouvoir que j’ai. Si je décide qu’il ne m’a pas violée, le viol n’a pas eu lieu. C’est magique. Pas de douleur, donc pas de victime, donc pas de crime. Circulez.
(Page 112).