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3,68

sur 310 notes
Sophie Divry m'intéresse depuis ses premiers écrits par le choix de ses sujets, par ses audaces stylistiques et sa capacité à se renouveler.
Son dernier roman n'échappe pas à la règle. Il commence par un univers carcéral digne des meilleurs romans noirs pour continuer sur un récit post-apocalyptique puis s'achever par une note plus intimiste. Par sa maîtrise des appositions et des ruptures de styles, l'auteur transforme une oeuvre dont le principe aurait pu devenir indigeste en un récit d'une grande cohérence doublé d'une véritable élégance formelle.
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Un jeune gars de banlieue, Joseph Kamal, se retrouve à la fois sans famille et emprisonné. Son frère a été abattu lors du braquage où lui même a été arrêté. Joseph n'a rien d'un récidiviste, il découvre l'univers carcéral, et le lecteur avec lui. J'avoue que je ne m'attendais pas à un tel début, avec une sensation d'enfermement, d'étouffement, puissamment rendue par les mots. Puis un événement, d'origine nucléaire, rapidement évoqué, précipite Joseph dans un monde radicalement différent. Il se retrouve en effet seul dans une zone contaminée, la majorité de la population étant morte des suites des radiations, sauf une faible minorité dont il fait partie. Il pourrait choisir de rejoindre la zone protégée, mais préfère s'installer dans un hameau vidé de ses habitants. La sensation de solitude qui suit la promiscuité carcérale est d'autant plus forte, une solitude qui n'est pas choisie, mais qui arrange bien Joseph après l'inhumanité de la prison, et la peur que lui inspiraient ses codétenus.

Joseph n'est pas vraiment un manuel, ni quelqu'un de proche de la nature, il doit apprendre tous les gestes, se documenter pour connaître ce qui l'entoure, s'adapter à la région où il est réfugié. Les évocations de la nature et des saisons ne sont peut-être pas le point fort de l'auteure, mais elle sait parfaitement se mettre à la place du personnage et dans ses pensées, faire ressentir ce qu'il ressent, pousser à imaginer ce qu'on ferait à sa place, comment on appréhenderait l'environnement, les plantes, les animaux…
Sophie Divry montre en écrivant ce roman, comme avec ses précédents, qu'il est possible de raconter une histoire en s'attachant aussi à la forme même du roman. En trois parties, correspondant, si on veut, aux trois fins du monde du titre, elle nous emmène dans un univers radicalement différent de celui de ses autres romans, dans un style bien distinct aussi, avec des passages du « il » au « je » qui rythment le texte.
Elle dit dans une interview avoir lu et été inspirée par le mur invisible de Marlène Haushofer ou La petite lumière d'Antonio Moresco plus que par Robinson Crusoé. Comme dans ces romans, c'est de solitude qu'il s'agit, et de se créer un univers qui soit vivable lorsqu'on est seul. Mais tout d'abord, l'être humain est-il adapté à la solitude ? Dans l'atmosphère d'inquiétude concernant le futur qui est celle de notre époque, les romans traitant de survie solitaire sont nombreux, et celui-ci y a toute sa place, et se révèle passionnant jusqu'à la dernière ligne.
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Je tiens tout d'abord à remercier les éditions Noir sur blanc et Babelio pour l'opération Masse critique qui m'a permis de découvrir cette auteure.

Trois fois la fin du monde. Pourquoi pas deux ou simplement une ?
Parce que dan la vie de Joseph Kamal, dans son long parcours vers la rédemption il fallait qu'il chute trois fois pour se relever.
Mais quelles chutes !
D'abord la prison ; pris en flagrant délit suite à un braquage qui a mal tourné (son frère y perdra la vie) Jo se retrouve dans le milieu carcéral où son monde pour la première fois s'écroule. Déshumanisé, brutalisé, avili, le héros mourra et deviendra autre. Ce parcours initiatique éliminera en lui tout espoir envers les hommes.
Puis viendra la Catastrophe. Salvatrice. La liberté retrouvée, Joseph se transformera en paysan d'opportunité, s'obligeant aux arts ancestraux de la culture des sols avant de soi-même se cultiver. Ses animaux le ramèneront vers l'amour des autres.
Enfin, l'incendie, catastrophe de petite échelle, dévoilera le regard de Joseph sur son avenir. Seul, ignoré du monde sauvage dans lequel il vit, il fera le constat brutal que la vie est trop dure sans autrui. Un signe dans le ciel, mystique, le guidera.
D'une puissance insoupçonné, Trois fois la fin du monde est un roman d'anticipation, de survie. Superbement écrit, il ne peut laisser indifférent le lecteur. La première partie du récit fait froid dans le dos. L'univers carcéral est parfaitement retranscris dans sa violence psychologique. La terreur qu'il inspire paraît juste.
La deuxième partie fait un peu penser au roman de Marlen Haushoferle mur invisible. On a parfois l'impression, comme le héros d'ailleurs, qu'un mur le sépare du reste du monde et d'observer Jo dans une immense cage vivarium où des éléments sont ajoutés avec minutie.
La troisième partie, la plus courte, laisse le lecteur pensif. Tout ça pour ça finalement ?
Mais oui, le chemin de la rédemption est parfois long et tortueux. le parcours de Joseph ne ressemble à nul autre pareil et en cela il est magnifique.
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Trois fois la fin du monde. Joseph K l'aura vécue trois fois.

La fin de son monde à lui, brisé par la Prison.
Plus de famille, plus de frère, plus d'amis. Ne reste que la violence.

La fin d'un monde, dévasté par la Catastrophe.
Plus d'humanité. Ne reste que quelques survivants.

La fin d'un homme ?
Survivre. Apprivoiser la Nature. Surmonter la solitude.

Un roman de science-fiction court et efficace, troublant mais n'est-ce pas là justement la patte de Sophie Divry ?

Du Tout au Rien, à moins que ce ne soit le contraire… Il y avait les hommes et leur inhumanité, ce qui les a conduits à disparaître, laissant place à un monde vierge de toute cruauté. Joseph peut enfin goûter à la liberté, à une solitude tant rêvée qu'elle pourrait être synonyme de bonheur, lui apportant apaisement et quiétude.
Si ce n'est que… se confronter seul à une Nature qui reprend ses droits, c'est dur, surtout quand on n'y est pas préparé. Il faut vaincre ses peurs, abandonner ses colères, se défaire de tout contact social, au risque de côtoyer sa propre folie.

Un livre d'une grande poésie, à portée philosophique.
Sophie Divry possède ce talent rare d'écrire avec une grande justesse les états émotionnels, depuis une palette large pour ne garder sur le final que les fondamentaux.

J'ai aimé. Beaucoup aimé.
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Décidément, Sophie Divry est une bonne auteur et surtout elle est capable de se renouveler, de nous faire entrer dans des univers très différents d'un roman à un autre : dans une bibliothèque "Cote 400", dans la peau d'une demandeuse d'emploi "quand le diable sortit de la salle de bain" et dans une femme malheureuse en couple "la condition pavillonnaire".
Cette fois, c'est radicalement différent. le héros joseph Kamal est un jeune intérimaire de 22 ans qui a accompagné son frère Tonio dans un braquage qui a mal tourné et se retrouve en prison. La première partie du roman raconte son incarcération, l'ennui, la promiscuité, les disputes et brimades.
Cette période de détention prend fin brutalement lors de l'explosion d'une centrale nucléaire : une partie de la France est évacuée, les survivants doivent gagner la "zone libre". Or Joseph choisit de rester, il va occuper une cabane puis une maison et se battre pour survivre, il va lui falloir cultiver ses légumes, défricher ... Sa vie ressemble alors à celle de Robinson Crusoé.
Au départ, il apprécie énormément cette liberté et et solitude, vu qu'il avait partagé une cellule minuscule avec 5 autres détenus.
Peu à peu, il se sent seul, il a besoin de contacts, besoin de tisser des liens avec des êtres humains. Il va apprivoiser un bélier et une chatte.
Je ne dévoilerai pas la 3ème partie du livre, qui s'apparente aussi à la fin de ce nouveau monde qu'il s'était créé.
J'ai beaucoup apprécié ce roman, original et qui fait réfléchir sur la solitude, l'humanité, la place de l'homme dans la nature, la civilisation ...
Je le recommande.
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Joseph vient d'être arrêté. Il a voulu aider son frère à braquer une banque et celui-ci a été abattu sous ses yeux.
Lui, le gentil de la famille, doit s'adapter à la prison, à la fouille au corps, à la brutalité des gardiens et des détenus, au froid, aux odeurs, au bruit et à la solitude, mais aussi au manque d'intimité, aux combines et surtout à ceux qui profitent de sa crédulité...maintenant qu'il est affaibli et hanté par la mort de son frère.
Mais alors que tout va mal pour lui, une explosion nucléaire vient le sauver de cet horrible cauchemar. Il réussit à sauter du camion qui emmène les détenus hors de la zone contaminée. Les rescapés sont peu nombreux et les survivants se battent pour quitter au plus vite les lieux.
Resté seul dans la zone interdite, Joseph s'installe dans une ferme abandonnée. Il reprend peu à peu goût à la vie, tout d'abord en abandonnant ses scrupules et en allant se servir dans les fermes délaissées pour se nourrir et organiser son premier hiver. Puis il prend contact avec la nature, avec la terre, le rythme des saisons, et approfondit ses connaissances en matière de culture et d'élevage grâce à des ouvrages laissés ici ou là.
Enfin, il retrouve un peu de chaleur humaine en adoptant des animaux attirés par sa présence...un bélier et un chat qu'il va couvrir d'attention et qui vont devenir sa raison de vivre.
Plongé dans la solitude, sans espoir de revoir un jour toute trace d'humanité, Joseph découvre une vie dont il ne connaissait même pas l'existence. Mais un nouveau drame bouleversera pour la troisième fois sa vie.
Il laissera alors sa détresse l'ensevelir jusqu'à la folie...

C'est un roman d'une grande force poétique qui nous amène à nous interroger sur notre besoin inné de communication, les dégâts liés à la solitude mais aussi sur notre société en général et ses rouages.
Joseph malgré sa peur d'être retrouvé et de devoir retourner en prison, rêve au fond de lui, comme le faisait Robinson sur son île déserte, d'être découvert et de recevoir un signe de vie des "autres"...

L'homme est-il fait pour vivre seul ?

C'est un roman de contraste qui nous fait passer du bruit au silence, de l'horreur de l'enfermement à la liberté, de la dépression à l'espoir d'une vie nouvelle, de la violence à la tendresse...et aussi du "je" plus intimiste au "il" d'un observateur extérieur et de l'argot de la prison à un langage plus poétique...

C'est un roman qui sonne toujours juste. Les pages sur l'accueil de Joseph en prison font froids dans le dos et celles où il déploie toute sa tendresse pour apprivoiser les animaux sont émouvantes.
L'auteur fait preuve d'une justesse de ton, d'une sensibilité et d'une finesse remarquable pour nous faire entrer dans les pensées de ce jeune homme solitaire, tout juste sorti de l'adolescence, qui va devoir survivre seul plutôt que de revivre l'enfer et c'est ce qui donne à ce roman original, une portée exceptionnelle.

A noter...
Le roman a reçu durant le mois d'octobre le Prix de la page 111, "le plus absurde des prix littéraires" d'après son fondateur ! Un prix qui existe depuis 2012 et dont je n'ai entendu parler que l'année dernière en me baladant sur le net.
Lien : http://www.bulledemanou.com/..
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J'ai lu ce court roman avec curiosité et aussi suite au coup de coeur des Lectures d'Antigone : Trois fois la fin du monde….. Je ne comprenais pas trop mais à la lecture du résumé cela m'a interpellé. Passer du monde carcéral au monde libre dans la nature : un choc sûrement.

Joseph découvre la prison en même tant que la douleur de perdre son frère, son mentor, ce grand frère qui était sa seule famille. Désormais il est seul au milieu de voyous, de clans, dans des cellules où règnent la loi du plus fort, du plus puissant, de celui qui a le plus de pouvoir sur les autres détenus. Il va connaître l'isolement au milieu des autres, la saleté, la perte d'intimité.

Il n'était pas préparé à cela : les humiliations des fouilles, l'attente et l'espoir d'une visite, le sentiment d'injustice suite à la mort de son frère, la perte de repères.

La description du milieu carcéral est parfaitement rendue : étouffante, crasse et violence sont omniprésentes.

Une découverte qui tourne au cauchemar.

Une catastrophe intervient. On ne sait rien sur son origine, il n'est question que de radiations. Peut-être une catastrophe nucléaire, mais la nature est préservée, non contaminée, et Joseph va se retrouver seul, isolé dans la campagne, sans âme qui vive, sans électricité. Personne n'a survécu que lui pense-t-il sauf peut-être plus loin, ailleurs. Il va falloir à nouveau qu'il s'adapte à un nouvel environnement : passer de la prison à la totale liberté, du désoeuvrement à l'activité intense, planifier, réfléchir pour trouver une solution à chaque difficulté ou problème.

Tout est à portée de mains : grandes surfaces, réserves de nourriture dans les habitations. Il n'y a qu'à se servir mais il faut penser à long terme…. Et cela suffit-il à son bonheur ?

C'est la partie que j'ai préférée : peu à peu Joseph va devenir un Robinson. Il va réapprendre les gestes des premiers hommes.

Il a du travail. Beaucoup de travail. Mais tout s'accomplit en son temps. C'est un homme couvert de temps. (p117)

Mais l'homme n'est pas fait pour vivre seul et il va avoir besoin de trouver son Vendredi.

L'écriture est précise, concise, chaque sentiment est parfaitement décrit. On se glisse dans le personnage de Joseph qui pénètre à chaque fois dans des mondes qui lui sont inconnus : prison, nature. L'homme a d'innombrables ressources. Retrouver de vraies valeurs, trouver le bonheur, la sérénité, le sentiment du travail accompli voilà ce que Joseph va trouver. Mais cela suffit-il au bonheur ?

Où se trouve le paradis, l'a-t-il trouvé ?

Il s'agit presque d'un roman philosophique : le monde, notre monde peut basculer à tout moment, passer d'un univers à l'autre, comment nous y adapter, comment parvenir à y vivre. Nous pouvons transposer dans beaucoup de situations ce basculement que l'humain peut connaître (peut-être pas dans des formes aussi extrêmes) au cours de sa vie. Ne jamais croire que tout est définitif, la pensée de l'homme évolue comme les besoins. Vivre seul rend-il plus heureux, l'enfer c'est les autres mais peut-on se créer un paradis et y être heureux, cela suffit-il ?

Sophie Divry ne donne pas de réponse : elle nous laisse y réfléchir, faire le cheminement avec Joseph comme Robinson l'a fait avant lui, vivre totalement seul est-il préférable pour se préserver de la folie des hommes.

Est-ce que l'enfer c'est les autres, la société ? Peut-on vivre en ce passant des autres ?

J'aime beaucoup quand un (ou une) auteur parvient de façon concise, limpide à exposer un sujet de réflexion profond. On ressort d'une telle lecture avec des envies de retrouver de vraies valeurs, un retour aux sources.

C'est une jolie découverte sur un thème déjà exploité mais transposé dans notre monde complexe basé sur la possession, le pouvoir.
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Trois parties :
1. le prisonnier. Joseph Kamal se retrouve en prison après un braquage qui a mal tourné. Non seulement il n'a plus de famille, il vient de perdre son frère lors de ce hold-up, mais l'univers de la prison ne lui épargne aucune violence physique ni aucune humiliation morale. Son quotidien est un cauchemar, pire, un enfer : la promiscuité avec les codétenus est une épreuve insoutenable.
2. La catastrophe. Une explosion nucléaire a eu lieu, « La moitié de l'Europe irradiée. La moitié de la France évacuée. » Joseph Kamal a réussi à s'échapper, il erre… (Partie de transition ?)
3. le solitaire. Décidé à rester dans la zone contaminée pour éviter d'être repéré et éventuellement de nouveau arrêté, Joseph Kamal découvre la solitude extrême dans la nature avec comme seuls compagnons les animaux.
Bon, il faut tout de suite que je vous avoue que je n'ai pas bien compris le sens profond de l'oeuvre. Je suis donc allée écouter quelques interviews de l'auteur ici et là sur la toile et… je reste toujours aussi dubitative.
Que dit l'auteur ? Elle explique qu'elle a voulu montrer que si l'homme vivait difficilement avec les siens, il supportait aussi très mal la solitude. Je suis bien d'accord, ça me paraît à peu près évident, mais pourquoi avoir placé Joseph K. - tiens, ça me rappelle quelqu'un! - en prison ? Un tel choix a certes le mérite de proposer un symbole efficace de la condition humaine - « l'enfer, c'est les autres », n'est-ce pas ?- mais favorise-t-il l'identification du lecteur au personnage ? Il est permis d'en douter. Et pourtant l'auteur dit vouloir nous faire ressentir quasi physiquement ce que ses personnages vivent. Pourquoi alors ne pas avoir placé Joseph Kamal dans un cadre plus banal, le coeur d'une ville surpeuplée, par exemple, situation dans laquelle chacun peut se reconnaître ?
Second problème : l'organisation en parties bien distinctes : j'ai eu l'impression d'une espèce de collage un peu artificiel, de l'ordre de la démonstration - l'enfer de la promiscuité/transition/l'enfer de la solitude - et tout cela m'a donné le sentiment d'une mécanique un peu trop didactique.
Enfin, pour ce qui est de la robinsonnade, Sophie Divry avoue s'être inspirée du livre de Marlen Haushofer : le Mur invisible, formidable roman qui raconte l'histoire, sous forme de journal, d'une femme qui, après une catastrophe mondiale, se retrouve seule dans un chalet en pleine forêt, séparée du monde par un mur invisible. Effectivement, les deux histoires sont proches et l'on sent très clairement que Sophie Divry n'avait qu'une hâte : en venir à cet épisode, le vrai coeur de son projet. Pour montrer quoi ?
Que la solitude est difficile et que finalement, il vaut mieux vivre parmi les hommes (même en prison) ? Je trouve que le lecteur est laissé un peu à la surface des choses et dans l'impossibilité de se saisir d'un indice qui lui permettrait de tenter une analyse, de se lancer sur une piste philosophique, métaphysique…
Autre élément qui m'a beaucoup gênée : le passage du « je » au « il », du point de vue interne au point de vue omniscient, ce qui produit un effet étrange. Je pense qu'il aurait mieux valu se décider pour l'un ou l'autre. J'ai trouvé que ce « choix » relevait plus d'une hésitation. Peut-être aurait-il été préférable d'opter pour un point de vue omniscient afin d'éviter l'écueil du langage banlieue dont on sent ici un peu l'artificialité...
Pour conclure, je dirais que la très belle écriture poétique de Sophie Divry ne m'a pas permis, cette fois, d'oublier totalement des partis pris romanesques moyennement convaincants et un message qui m'a semblé assez convenu.
Cela ne va certainement pas m'empêcher d'attendre avec impatience son prochain roman, car Sophie Divry a du talent, et ça, j'en suis bien persuadée !
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Je viens de refermer la dernière page de Trois fois la fin du monde et la prison est à présent dans mon dos. J'ai presque oublié mon passage parmi les taulards, les exclus et les loosers. J'ai presque oublié les brimades et les coups dans la gueule. Quelques images au milieu des odeurs de merde se sont incrustées dans la corné. Avec la peur. La peur que ça recommence. Cette putain de peur qui me prend et qui me susurre à l'oreille ; – Tu vas replonger. Tu vas replonger. Mais tout ce truc-là, nauséeux jusqu'à faire du mal aux anges est derrière moi. Il y a une eu une catastrophe. Il y a eu un recommencement. A présent, j'ai de quoi tenir. J'ai de la beauté en rab'. J'ai le Causse pour réserve. J'suis un hors sol, j'suis un citadin, un petit urbain et j'ai tout à apprendre dans ce monde sans maitre. J'suis ma nouvelle geôle. Et là, partout, de l'herbe qui encense l'air, de la pierre qui pousse entre le lierre, de la caillasse qui se consume en plein cagnard. J'ai les paysages du causse en cinémascope. J'ai le coeur solitaire, aussi, le coeur sauvage et solitaire. J'suis enfermé dans ma bergerie, dans mille hectares de terre sauvage. Et j'ai Fine, ma chatte sur les genoux, et Chocolat, le mouton, la brebis, j'sais pas, j'y connais rien en ovin, qui broute le foin que j'me suis coltiné à récupérer. Je me sens seul au monde, j'suis si seul. Quand la dernière page de trois fois la fin du monde est tournée, je sens ce poids qui pèse, là encore et encore. le poids de la solitude. Je sens le causse derrière moi, autour, au-dessus, sur ma droite, sur ma gauche. Et encore la solitude, pesante, oppressante, vivante, qui m'accompagne, me cajole, me dorlote, m'assassine. Et je respire la terre, je regarde le ballet des oiseaux, des animaux de la forêt. Je regarde la danse des étoiles, la course des nuages et je rêve…
Je songe à ces amis qui parfois me propose un roman, en me disant ; « – lis le, tu verras ».
Le livre qu'on n'aurait pas ouvert autrement, parce que l'histoire semble connue d'avance, parce qu'un titre n'emporte pas l'adhésion, parce qu'un autre livre appel et dis, moi d'abord, moi d'abord, s'ouvre sur une première page. Et on entend dans un recoin de sa tête le copain qui répète ; « – Lis le, tu verras ».
Ce copain pour le roman de Sophie Divry, c'est toi Babelio, c'est vous les édition Notabilia, c'est masse critique. Une proposition de lecture. le livre s'ouvre. On ne sait pas ce qu'on va découvrir. Parfois c'est bof. Parfois c'est ah tiens. Parfois c'est merde alors…Et parfois le silence et la bouche ouverte sont la seule chose qu'on est capable d'exprimer. L'émotion a pris le dessus… Sophie Divry sait à tour de rôle se jouer de nous. Elle nous prend par la main pour un rodéo de senteur, de couleur, de sensation. Elle nous prend la main pour nous faire éprouver la violence, la violence jusqu'à l'écoeurement, et soudain, sous les excréments de la cour, derrière les murs de la taule, le causse. La beauté de la nature décrite avec les mots justes. Des mots qui raisonnent. L'alternance de l'utilisation de la première personne et de la troisième, avec parcimonie, cette alternance procure une sensation de va et vient. A tour de rôle on est Joseph Kamal et le spectateur. “On” et “je” s'épousent. Mais surtout, c'est la qualité des descriptions, le détail dans l'émotion qui emporte l'adhésion. On est littéralement dans le lot, perdu, en compagnie de Joseph. Merci à l'opération masse critique pour cette belle découverte.

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Sophie Divry surfe sur la vague du "nature writing" pour ce troisième roman .
Elle prend pour point de départ un individu commun, Joseph Kamal, à qui il arrive une grosse tuile: entraîné par son voyou de frère dans un braquage loupé, il va se retrouver à purger une peine de prison, seul, de surcroît, son frère ayant été abattu par un policier durant l'attaque.
Il découvre un univers sordide, d'une violence insupportable… presque inhumaine.
Et c'est alors que ce produit une catastrophe nucléaire. Il survit, mystérieusement, comme un nombre limité d'êtres humains qui vont décider de se rassembler dans une zone non contaminée étroitement surveillée. Pour Joseph, il est hors de question de vivre à nouveau dans des conditions d'enfermement. Il va choisir de se cacher, et de profiter de la vie en solitaire, au milieu de la nature et de tout ce qu'elle peut lui donner: de l'eau, de la chaleur, de quoi se sustenter; ainsi que de la compagnie, en la personne d'un mouton et d'une chatte.

C'est ici une ode à la nature certes poétique, mais également ancrée dans un réel des plus contemporain, avec une exacerbation de la part obscure de l'être humain, responsable de tant de malheurs dans un univers équilibré, à l'origine.

Le teste se lit très bien, avec passion, mais il est à regretter que certains passages tournent un peu en rond, comme si l'auteure perdait le souffle initial de sa propre création….
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