Un peu d'histoire : Fin 1938, le gouvernement d'Édouard Daladier pour contenir l'afflux de Républicains et de membres des Brigades internationales fuyant la guerre civile en Espagne, vote une série de lois pour isoler ces étrangers «indésirables». Dans l'improvisation, sont alors érigés dans le sud de la France des camps de concentration destinés à contenir tous ces «indésirables».
Plus tard, le 15 mai 1940, est organisée dans Paris une rafle appelée celle des «femmes indésirables», toutes juives ou d'origine étrangère. Ces «femmes indésirables» ont toutes une particularité : celle de ne pas avoir d'enfant. Parmi elles se trouvent des ressortissantes allemandes qui ont fui le régime nazi.
Elles sont dès ce jour de mai 1940 plusieurs centaines à être arrêtées et retenues par les forces de police françaises dans un lieu qui deviendra tristement célèbres deux ans plus tard : le Vélodrome d'Hiver (Le Vel' d'Hiv'). Après plusieurs jours de détention, elles sont transportées par trains entiers vers le sud de la France et notamment vers le camp de Gurs, près d'Oloron Sainte-Marie, dans les Pyrénées. C'est dans ce camp qu'elles retrouveront les milliers de détenus fuyant la Guerre d'Espagne.
Parmi ces nombreuses femmes «indésirables» regroupées à Gurs, deux jeunes allemandes, Lise Malher et Eva Platz. La première est juive, la seconde est aryenne. Elles ont lié connaissance dès leur détention au Vel' d'Hiv'. Dès lors, elles ne se quittent plus et se retrouvent sous la lettre G baraque 25, les «coordonnées de leur naufrage».
Elles deviendront l'une pour l'autre bien plus que deux codétenues : deux vraies amies qui mêleront leur histoire, leurs désillusions, leurs espoirs, leurs envies.
La vie du camp, le hasard et la proximité avec les autres prisonniers, vont leur faire rencontrer des êtres à part: Suzanne la jeune française au caractère bien trempé, Sylta, l'ancienne couturière russe, la riche et sémillante Bianca Tarkow, la très dévouée infirmière suisse Elsbeth
Kasser, le chef du camp Eric Davergne, les réfugiés espagnols Ernesto et Pedro jamais très loin, etc. Tous ces personnages vont chacun à leur niveau faire naître à l'intérieur du camp et entre eux comme des îlots d'espoir et d'entraide. D'amour aussi. C'est ainsi que naîtra le Cabaret bleu, le nom d'une mini-troupe (dont feront partie Lise et Eva) qui donnera des représentations de théâtre et de chansons toutes très appréciées dans le camp.
En écrivant ces lignes, je me rends compte combien j'ai été attaché à l'intrigue et aux personnages de ce roman de
Diane Ducret. Conjuguer l'Histoire officielle et le genre romanesque sur un sujet aussi délicat que les camps de concentration en France durant la Seconde guerre mondiale était un pari risqué. Il a été réussi.
Grâce à une écriture élégante et généreuse, à un propos tout à fait crédible (l'auteur s'est appuyé sur d'anciens témoignages de prisonniers du camp de Gurs),
Diane Ducret a fait des Indésirables un roman particulièrement attachant, une fable humaniste, un hommage saisissant à toutes les femmes qui dans leur coeur, dans leur chair et dans leurs convictions ont défendu une certaine idée de la liberté pour l'époque et pour leur pays durant la Seconde guerre mondiale.