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Vous aussi, ça vous dirait bien d'aller ailleurs, surtout en ce moment hein ? Partir, arpenter le monde.. Tiens, vers quels horizons, vous dirigeriez-vous, là, tout de suite si vous aviez la possibilité de vous télétransporter ? Où rêvez-vous d'aller marcher ? Quel monument brûlez-vous de visiter ?
Le journaliste britannique Geoff Dyer, grand spécialiste de jazz, a cette chance de voyager pour son travail : il rédige en effet des chroniques pour le New Yorker ou le Financial Times et ce qui m'a mis sur sa piste, c'est l'article d'Emmanuel Carrère dans le Monde du 2/12/20 qui avoue : « j'ai lu tous ses livres et j'attends qu'il en paraisse un nouveau comme on attend des nouvelles d'un ami. »
En fait, Dyer est un double de Carrère : il est à la fois extrêmement sombre, sans illusions, et fabuleusement drôle (Carrère lui-même le présente comme un mélange de Thomas Bernhard et Woody Allen!), un homme amoureux des lieux et étranger au monde, ici et ailleurs, sans cesse... Franchement, ce recueil d'articles est délicieux d'autodérision et d'intelligence : Dyer apparaît comme un antihéros poltron, hypocondriaque, étourdi, déçu, fatigué, embarqué dans des périples qui prennent très vite l'allure d'antivoyages : documents paumés dans l'avion, rien à voir à l'arrivée (soit parce qu'il n'y a effectivement rien ou pas grand-chose, soit parce que la déception est grande et c'est comme s'il n'y avait rien) ou bien une fatigue telle qu'il n'a qu'une envie : aller se coucher (c'est tellement crevant les voyages!) Bref, c'est souvent plus ou moins raté ou alors, l'intérêt du déplacement ne se trouve pas précisément là où on l'attendait…
Finalement, pourquoi voyage-t-on ? Que cherche-t-on et que trouve-t-on ailleurs ? Est-on capable de voir ce qu'il y a à voir (si tant est qu'il y ait quelque chose à voir!) N'est-ce pas dans le fond une entreprise vaine que de voyager ?
Laissez-le vous raconter son voyage à Longyearbyen pour contempler des aurores boréales, qu'il ne verra évidemment pas ! Tout est hors de prix en Norvège, la température est une vraie torture (sans compter qu'il fait nuit noire quasiment vingt-quatre heures sur vingt-quatre : « Pourquoi diable choisir de vivre dans un tunnel ? » se demande-t-il et quand, en plus, vous vous lancez dans une balade en traîneau … Ah, cette balade en traîneau, franchement rien que pour ce texte, vous pouvez investir dans l'achat de ce livre ! C'est hilarant, burlesque à souhait ! « Le terme norvégien correspondant à la notion de « balade » pourrait au mieux se traduire par « âpre combat pour la survie » dit-il et il ajoute : « je ne prêtais pas attention aux instructions qu'on nous donnait pour attacher les harnais, et de toute façon j'avais du mal à entendre quoi que ce soit à travers l'épaisseur de ma parka, de la capuche relevée de ma combinaison de ski, et le bruit infernal des aboiements de quatre-vingt-dix huskies d'Alaska, dont la moitié en chaleur, trépignant d'envie de cavaler ou de forniquer ou les deux. »
Et ce déplacement à Tahiti pour un article sur Gauguin, les documents oubliés dans l'avion, un musée fermé, des tas de corps tatoués et assez moches, des boissons ultra-sucrées et une sacrée envie de rentrer : « Nous sommes ici pour attendre à l'aéroport de Hiva Oa sous une humidité poisseuse et pour éprouver une bonne fois pour toutes ce qu'il nous est déjà arrivé d'éprouver, quoique de manière fugace, à savoir qu'au fond, nous sommes tout de même contents d'être venus même si nous avons passé notre temps à le regretter. Nous sommes ici pour nous assurer que notre ceinture est bien attachée, que notre tablette est bien relevée et que notre siège est bien redressé avant le décollage et l'atterrissage. Nous sommes ici pour aller ailleurs. »
Peut-être le meilleur du meilleur est-il « White Sands » : Dyer et sa femme traversent en voiture l'État du Nouveau Mexique. le sable s'étend sur la route, la lumière est aveuglante. Pas un chat. Soudain, un auto-stoppeur leur fait signe, trois secondes d'hésitation, ils s'arrêtent. Échange cordial, deux trois banalités, ils repartent. Silence serein. Tout à coup, un panneau : « INFORMATION / NE PRENEZ PERSONNE EN STOP/ CENTRES PÉNITENTIAIRES DANS LA RÉGION » La nuit tombe. Changement d'ambiance dans la voiture. le thriller s'installe tandis que passe à la radio « Riders on the storm » des Doors… « There's a killer on the road/ His brain is squirmin' like a toad » Inénarrable...
Recueil d'articles de presse, journal de voyage, essai, « Ici pour aller ailleurs » nous fait surtout découvrir la personnalité d'un homme fin, sensible, cultivé, drôle, tellement drôle… Car finalement, plus que les lieux dont il nous parle, c'est lui qui gagne à être connu… Une chouette rencontre en tout cas !

Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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je n'ai pas été aussi enthousiasmée par la lecture de ces souvenirs de voyage. J'en attendait plus au vu des critiques dithyrambiques que j'avais lues.

Je ne nie pas la qualité d'écriture , mais je m'attendais à plus de légèreté et d'humour. la première histoire m'a passionnée, notamment la tirade sur les visites guidées. Mais la suite m'a parue plus poussive.
Je suis passée à côté
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"Cela valait-il la peine de faire tout ce trajet pour voir quelque chose que nous risquions de ne pas voir ? Ma foi, les pèlerins continuèrent d'affluer même pendant les longues années au cours desquelles il n'y avait vraiment rien à voir, il aurait donc paru assez pusillanime de ne pas tenter notre chance."

Geoff Dyer entraîne le lecteur dans une grande balade touristique aux quatre coins du globe. Il fait le récit, non sans humour, de ses pérégrinations et surtout des déconvenues qui s'y sont imposées, avec bien souvent un sacré décalage entre l'image fantasmée et la réalité de terrain. Mais, au final, les situations les pires sont celles qui laissent des souvenirs impérissables. On les regrette sans les regretter. Et de tout façon, si on est ici, c'est pour aller ailleurs.

"L'ampleur et la fréquence de mes déceptions ("Je suis par terre, mais pas encore vaincu", fanfaron - pleurnichait Gauguin) étaient la preuve que j'attendais et désirais encore beaucoup du monde, qu'il continuait de m'inspirer de grandes espérances. le jour où je ne serai plus capable d'être déçu, la romance sera terminée ; autant dire que je serai mort."

J'ai adoré les récits de son voyage en Polynésie française sur l'île Hiva Oa sur les traces de Gauguin, de ses visites du Lightning Field au Nouveau-Mexique et de la Spiral Jetty dans l'Utah, de l'épisode de l'auto-stoppeur en plein White Sands, et de son périple norvégien pour voir une aurore boréale.
De très bons mauvais moments !

Un recueil riche en réflexions, en introspection et en émotions, dans lequel on apprend beaucoup sans bouger !
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Guide d'anti-tourisme corrosif ou journal de voyage décalé, voici un recueil distrayant dans lequel l'auteur s'attache avec humour à détailler tous les "ratés" de ses voyages qui deviennent au final ce dont on se souvient, bien sûr.
De la Cité interdite à la Californie en passant par la Norvège, le Nouveau Mexique et la Polynésie, la découverte n'est jamais celle que l'on attend et même s'il s'agit d'une aurore boréale pour laquelle l'auteur a fait des milliers de kilomètres, c'est son absence qui justifie le chapitre qui lui est consacré !
J'ai eu un peu de mal avec les références musicales des 2 ou 3 derniers chapitres... étant absolument ignare sur le sujet jazz.
Au final, je suis quand même allée regarder avec intérêt sur internet chacun des lieux visités par Geoff Dyer !
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Geoff Dyer, né en 1958 à Cheltenham, est un écrivain britannique. Enfant d'un père tôlier et d'une cantinière en milieu scolaire, il obtient une bourse pour étudier l'anglais au Corpus Christi College de l'Université d'Oxford. Une fois ses études terminées, il part pour l'Amérique où il devient conservateur en chef chez Saatchi Art de Los Angeles. Ici pour aller ailleurs, paru cet automne, est un recueil d'articles pour divers magazines remaniés pour l'occasion.
Un peu moins d'un dizaine de textes de voyages, mais pas dans le sens traditionnel où les voyages vous font rêver ou frémir, l'auteur adopte une approche plus intellectuelle – néanmoins très abordable par tous – faite d'interrogations du genre « où allons-nous ? » et son corollaire « où n'allons-nous pas ? », sur le temps qui passe etc.
Ces récits sont sérieux pour certains, plein d'humour pour d'autres, les deux à la fois souvent. Les voyages vont nous mener à Pékin et la visite de la Cité interdite avec une jeune guide qui va faire battre le coeur de l'Anglais ; dans la ligne souriante encore, cette escapade au Nord de la Norvège où il fait un froid de gueux pour que sa femme puisse voir une aurore boréale. Là nous avons l'angle classique des récits de voyages.
Plus pointu, ce séjour en Polynésie pour le centenaire de la mort de Gauguin, ce qui nous vaut un portrait cocasse du peintre émoustillé par les vahinés : « Et tout en cherchant à comprendre ce qui se passait dans leur tête, il ne dédaignait pas de leur mettre la main dans la culotte, ce que les autres colons jugèrent d'un oeil sévère et possiblement envieux. » Ca se complexifie avec des visites de lieux pour y admirer du land-art : Spiral Jetty (« Jetée en spirale ») est une oeuvre de Land art réalisée par le sculpteur américain Robert Smithson au bord du Grand Lac Salé en avril 1970, ou encore The Lightning Field créée en 1977 par Walter de Maria et installée au Nouveau-Mexique, aux Etats-Unis.
Peut-être préférerez-vous visiter la maison de Theodor Adorno, le philosophe allemand, à Los Angeles. A moins que ce ne soient les Watts Towers dans cette même ville. Si tout l'ouvrage ne mégote pas avec les références culturelles littéraires, cinématographiques voire photographiques, ces deux récits font appel à ses profondes connaissances du jazz. Il y aborde entre autre, un point qui m'a particulièrement intéressé car commun à ma propre expérience (moi dans le registre du rock), comment des photos de pochettes d'albums de disques peuvent nous inciter à aller voir sur place ces lieux…
Le livre est très bien écrit, intelligent mais bourré de cet humour british impayable ; on suit Geoff Dyer avec curiosité, étonné par son regard original sur les choses et les lieux, son caractère « discutable » (souvent prêt à critiquer) ou même peu charitable (quand il abandonne un autostoppeur dans une station service et s'en félicite ! A sa décharge, il avait une excuse ( ?) et vous la découvrirez dans un texte limite angoissant, voir pour ceux qui connaissent « Riders On The Storm » des Doors).
Attentes contrariées et espoirs déçus, interrogations existentielles, tentatives pour comprendre ce qu'un lieu donné signifie et pourquoi nous nous y rendons, telles sont les grandes lignes de cet ouvrage original ne manquant pas d'intérêt.
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une autre façon de voyager par nos temps de tourisme de masse
par un écrivain anglais lecteur d'Adorno et passionné de Jazz:
non sans une pincée d'humour britannique.
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Souvent les Anglais nous horripilent - l'inverse est également vrai. Par exemple au rugby. Ou (parce qu'on y a souvent été confronté) dans le business. Nos systèmes de valeurs, nos histoires, nos visions du monde diffèrent, auxquels se mêlent, persistantes, de vieilles rivalités de vieilles puissances. Ne roulent-ils pas à gauche ? Ne mangeons-nous pas des cuisses de grenouilles ? Il est pourtant des choses qu'ils nous envient, et pas seulement le Périgord ou la French Riviera. Et nous de même, pas seulement les Windsor (je plaisante) ou Bojo (je plaisante toujours). Plus sérieusement, ce que nous leur envions (entre autres), ce sont des écrivains tels que Julian Barnes, Jonathan Coe, Alain de Botton, Nick Hornby ou... Geoff Dyer. Mais où, à quelles sources, dans quels foyers, sur les bancs de quelles écoles, apprend-on cet esprit so british, ce flegme à toute épreuve, cet art permanent du décalage, de la mise à distance, du non-sense ?

Geoff Dyer donc, et son livre Ici pour aller ailleurs, recueil d'articles publiés dans divers journaux et magazines, New Yorker, Observer, FT, Harper's Magazine ou Granta : excusez du peu.

Et ?

Et c'est un festival d'intelligence appliquée aux voyages. Enfin aux voyages, qu'on vous explique, on n'est ni chez Arthur Rimbaud période Aden ni chez Henry Morton Stanley période Tanganika. On est en Chine, en Polynésie, dans divers états des États-Unis, en Norvège mais dans des conditions vraiment confortables. Peut-être inspiré par Céline qui estimait que "voyager, c'est bien utile, ça fait travailler l'imagination", Geoff Dyer s'est dit Banco, avec elle faisons aussi travailler le reste, l'humour, la désinvolture, la culture (très belles pages sur Gauguin, irrésistibles sur Adorno), le contre-pied, la passe sur un pas.

Un conseil : n'attendez pas ici le prochain confinement pour embarquer ailleurs avec Geoff.
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Voilà, je pense que c'est xxx qui a attiré mon attention sur ce livre : les mots importants étaient là, voyage, humour anglais, et, cerise sur le gâteau, disponible à la bibli!

L'humour est bien là et j'ai tout de suite adhéré, mais il ne faut pas s'attendre à des voyages narrés classiquement. Visiter la cité interdite est l'occasion de faire connaissance de Li, puis direction la Polynésie sur les traces de Gauguin. "Il y avait également quelque chose à vous fendre l'âme dans le spectacle de ces chauffeurs de bus prêts à 'transférer' les touristes dans leurs hôtels au luxe barbare : bâtis comme des piliers de rugby, biologiquement programmer pour écraser le Quinze de la Rose, ils en étaient réduits à jouer les bagagistes confits en politesse." Puis le lecteur découvre des coins paumés des Etats Unis dédiés au Land art, le Lightning Field, Spiral Jetty, apparaissant ou non selon le niveau de l'eau (Utah).


Le voilà parti avec son épouse à la recherche d'aurores boréales, donc l'hiver plein nord! Froid, obscurité. Verront-ils la fameuse aurore boréale espérée?

En tout cas, ils prennent en stop un type dans un coin perdu, et s'ensuit une séquence de peur...

Ils habitent Los Angeles, et là aussi ils découvrent la demeure d'Adorno et les Watts Towers.
Non, ce n'est pas un livre de voyage de plus, les réflexions et la personnalité de l'auteur sortent de l'ordinaire.
Lien : https://enlisantenvoyageant...
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Sur une échelle allant de Joseph Mitchell à Hunter S. Thompson, autres sortes de reporters déviants, disons que Geoff Dyer s'implique bien plus que le premier dans ses récits; hormis d'atroces éruptions cutanées dues à la chaleur", il ne se met que rarement physiquement en danger comme le second... On s'ennuie un tantinet lorsqu'il conte sa découverte du Lightning field, fleuron du land art. On rit par contre à gorge déployée à la lecture de White Sands, lorsque sa femme et lui prennent un individu potentiellement dangereux en auto-stop, et que leur embarras devient presque palpable.
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L'auteur nous livre un récit de voyage non conventionnel. Avec beaucoup d'humour, il nous narre ses voyages a travers la planète pour visiter la muraille de chine ou la tombe de Gauguin. Un regard distancié qui nous fait beaucoup de bien grâce a un humour acerbe et un point de vue inédit. Un vrai plaisir de lecture.
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