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sur 727 notes
Compositeur talentueux, mondialement et universellement connu pour son "Boléro", Maurice Ravel est décédé en 1937 de troubles cérébraux. Jean Echenoz raconte les dix dernières années du musicien, de façon romancée, et dresse le portrait d'un personnage public qui fait des tournées, de nombreux concerts, fraie avec de nombreuses personnalités, mais aussi d'un solitaire à qui on ne connait aucune vie sentimentale, qui va perdre petit à petit toutes ses facultés cognitives. Un personnage mystérieux, qui n'a laissé pour seules traces que son immense oeuvre musicale mais très peu de photos et aucun enregistrement de sa voix.


Ce récit commence lorsque Ravel s'apprête à partir pour une tournée de quatre mois aux les Etats-Unis. Ce sont les fastes des premières classes à bord du transatlantique Le France, du pont duquel le compositeur contemple la mer, "dans l'idée d'en extraire une ligne mélodique, un rythme, un leitmotiv, pourquoi pas." On peut être un grand compositeur sans pour autant être un grand musicien : la veille de son arrivée, il donne un petit concert et exécute son Prélude en La mineur : "il ne possède pas une grande technique, on voit bien qu'il n'est pas exercé, il joue rapidement en accrochant tout le temps. […] Bref il joue mal mais enfin bon, il joue. Il est, il sait qu'il est le contraire d'un virtuose mais, comme personne n'y entend rien, il s'en sort tout à fait bien." C'est donc un étrange personnage que ce Ravel présenté par Echenoz, avec élégance et un humour parfois ravageur, qui voyage avec un escadron de valises contenant une soixantaine de chemises, vingt paires de chaussures, soixante-quinze cravates et vingt-cinq pyjamas, n'a jamais vraiment travaillé le piano qui demandait trop d'efforts physiques, ou s'énerve quand Paul Wittgenstein enjolive la partition de son Concerto pour la main gauche ; de son Boléro, inspiré du travail à la chaîne, il s'étonnait de son succès, et a dit d'une spectatrice criant au fou à la fin du concert qu'elle au moins avait tout compris. C'est un personnage touchant aussi que ce petit homme à la carrure de jockey, à qui l'on ne connaît aucune relation amoureuse et qui a toujours vécu seul, qui assiste impuissant à sa lente et inexorable déchéance, incapable de reconnaître ses oeuvres en concert, qui dit à sa fidèle pianiste Marguerite Long que c'est quand même terrible ce qui lui arrive.

Lien : http://usine-a-paroles.fr/le..
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Première des trois fictions biographiques écrites par Jean Echenoz, celle-ci est consacrée à Maurice Ravel. Une nouvelle fois, l'écriture de Jean Echenoz m'a saisie, et c'est en peu plus d'une heure que j'ai avalé ces pages. Une écriture concise, avec toujours une petite pointe d'ironie, de dérision, d'euphémisme qui ne le laisse pas indifférente.
Ravel était un génie, on le découvre dans ses dix dernières de vie, un homme élégant et très courtisé, un être carré qui se rassurait par le moyen de rituels précis et qui attachait une importance hors norme à ses vêtements et ses accessoires. mais aussi ... insomniaque, sous l'emprise du doute, de la maladie et de la solitude.
L'auteur s'est beaucoup documenté sur le célèbre musicien et le témoignage que nous livre Jean Echenoz est remarquable.
À l'instar de ce qu'il nous a proposé dans Des Éclairs, l'auteur nous dépeint la société de l'époque, ici celle de l'entre-guerre, à coup d'une multitude de détails (des marques de voitures en passant par les habits, les objets de cette période...). Beaucoup de petites précisions, que je n'ai pas toujours trouvées très pertinentes ... mais celà n'enlève rien au fait que cette bio fiction est très bien réalisée, à l'écriture fluide et que je trouve particulièrement agréable.
Ravel, ce génie, ce héros malgré-lui, est bouleversant sous la plume de Jean Echenoz, nous marchons dans ses pas, partageons son intimité et ses rencontres avec les célébrités de l'époque, l'accompagnons dans sa traversée de l'Atlantique en 1927, assistons à sa tournée triomphale aux États-Unis, à la création de son célèbre "Boléro"et du "Concerto pour la main gauche", écrit pour le célèbre pianiste Wittgenstein, et devenons en fin de course, témoin de sa chute folle ...
Quel plaisir de découvrir la vie d'une personnalité mondialement connue avec Jean Echenoz. Mieux que Wikipedia, il n'y a pas à dire !

Ce roman a été adapté au théâtre, avec une mise en scène  de Anne-Marie Lazarini. Et me voici partie à la recherche de l'enregistrement de la pièce.
Lien : https://seriallectrice.blogs..
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Ravel a de quoi enchanter. Merveilleusement bien écrit, il offre une peinture du quotidien d'une rare pudeur. A la fois précis, concis et juste, le style d'Echenoz se fait mélodique. C'est là un bel hommage au compositeur. Les concerts, les honneurs sont toujours croqués avec espièglerie. Les années de la maladie, enfin, sont traitées avec une retenue qui n'empêche pas l'émotion. Roman très court, cent-vignt pages, mais pur bonheur de lecture. Echenoz est digne d'un Flaubert. La première phrase est un alexandrin et celles qui suivent de petits bijoux ciselés avec un art maîtrisé à la perfection. Echenoz, assurément l'un des plus grands romanciers de ce siècle.
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Un peu déçu par la lecture de ce roman. J'ai été intéressé par la description de cet environnement mondain de la fin des années 20, du luxe des paquebots et des hôtels. Mais à part ça je suis resté un peu sur ma faim. Mais ce n'est pas la premiere fois avec Jean Echenoz. L'exercice de la brièveté peu s'avérer virtuose. Pas dans ce cas.
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En venant ajouter une critique supplémentaire après tant d'autres, je vais essayer de ne pas répéter ce qui a été déjà été écrit. A l'image de ce que fait Echenoz en écrivant sur Ravel, je vais essayer d'aborder les choses sous un angle singulier, non sans avoir au préalable, rappelé la très grande qualité stylistique du roman. L'écriture est précise, très évocatrice, drôle. du grand art.
C'est une approche bien singulière que choisit Echenoz, bien éloignée des codes habituels de la bio : son roman-biographie commence lorsque Ravel est âgé de 52 ans et couvre les dix dernières années de la vie du musicien. Mais quand je dis 'couvre', c'est vite dit. Car le roman est construit de périodes très denses et qui le sont de moins en moins au fur et à mesure qu'il se déroule. Les 43 premières pages (je les ai comptées) soit plus du tiers du livre sont consacrées au départ de Ravel pour les Etats-Unis en 1928 et à son voyage sur un paquebot transatlantique. C'est à dire quelque chose qui a duré 5 ou 6 jours. Ensuite le deuxième tiers du roman (à peu près) couvre le reste de l'année 1928 : la tournée aux Etats-Unis proprement dite, le retour en Europe et la composition du Boléro. Et finalement le dernier tiers couvre les 9 dernières années de la vie de Ravel en se concentrant sur quelques 'évènements' comme la composition du Concerto pour main gauche pour le pianiste Wittgenstein, la tournée européenne de 1932 ou l'accident de taxi de la même année, ...
La construction du livre est à l'image de l'évolution de l'état de santé de Ravel : cela se dilue et l'absence devient de plus en plus présente. Malgré la légèreté de l'écriture d'Echenoz, cela contribue à renforcer la tonalité de tristesse, qui domine dans cette vie de Ravel, Un homme célébré et entouré mais qui semble irrémédiablement enfermé dans la solitude.
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Nous sommes passées à Ciboure devant la maison  de Ravel qui naquit le 7 mars 1875.

J'ai donc choisi Ravel d'Echenoz pour accompagner ces vacances.

Ce court roman (123 pages) n'est pas vraiment une biographie. L'auteur choisit de commencer en 1927. Ravel a plus de 50 ans. Des années de jeunesse et d'apprentissage, je n'apprendrai rien. Ravel est en partance pour une tournée américaine triomphale. L'auteur est romancier, pas musicologue, de la composition je n'apprendrai pas grand chose.

En revanche, Ravel a du style, c'est un dandy qui emporte des malles et des malles d'habits qu'il accorde avec soin. Ravel a du style et Echenoz aussi! Je me suis délectée de ses phrases incisives, ironiques, élégantes. Elégance aussi des décors surtout la traversée transatlantique en Première Classe à la table du Commandant! Ravel a sillonné les Etats Unis à bord de trains de luxe, racontés avec un luxe de détails.

Le Boléro est composé comme une mécanique inspirée par une usine au Vésinet.

On assistera aussi à la rencontre avec le pianiste manchot et à la création du Concerto pour la main gauche.

Les tournées s'enchaînent, et la fatigue, l'insomnie, le déclin, l'accident...qui conduisent à la fin. Mais toujours avec élégance!
Lien : https://netsdevoyages.car.blog
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J'ai d'abord été très agacée par la préciosité du récit, les détails vestimentaires, le vide aussi. Et puis comme ce livre m'a été offert, j'ai continué ma lecture. Je me suis sentie aussi seule que ce pauvre Ravel. La solitude l'a accompagnée jusqu'à son dernier souffle. Et finalement c'est très touchant.
Lien : http://objectif-livre.over-b..
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Retour de l'église Saint Pierre de Montfort l'Amaury pour les Journées Ravel (le quatuor, emporté par le Quatuor Ébène), je lis le roman éponyme d'Echenoz sur le plus grand musicien français depuis Rameau. Parfaite transition de l'humour au drame.

Premier tableau. Ravel à 52 ans est au sommet de sa gloire. Echenoz le traque dans l'intimité, rédige au présent une introspection impatiente, colérique, drôle, mêle les dialogues aux descriptions, il est parfaitement informé ou d'une assurance souveraine dans l'invention. « Regard noir, vif, inquiet, sourcils fournis, cheveux plaqués en arrière et dégageant un front haut, lèvres minces, oreilles décollées sans lobes, teint mat. Distance élégante, simplicité courtoise, politesse glacée, pas forcément bavard, il est un homme sec mais chic, tiré à quatre épingles vingt-quatre heures sur vingt-quatre » (p 21-2). Ravel prend le bateau pour l'Amérique et une tournée triomphale, exténuante. Il raconte le voyage à son ami et voisin Jacques de Zogheb (un écrivain oublié, il a existé). « Ce qu'il y a de bien avec lui, c'est qu'il ne connaît pratiquement rien à la musique, on peut ainsi discuter d'autre chose. Mais comme il ne demande sur ce point qu'à s'instruire, Ravel peut en parler avec plus de liberté, comme quand Zogheb lui demande, au fond, Chopin, qui c'est. C'est bien simple, répond Ravel en écrasant sa cigarette, c'est le plus grand des Italiens » (p 66).

Deuxième tableau, tragique, Ravel a 57 ans. Après un accident de taxi, sa pensée lui fait défaut. Bientôt il ne sait plus conduire l'orchestre, il ne sait plus nager, signer, écrire, il ne reconnaît plus sa musique, il ne peut plus parler. On le drogue, on le montre aux meilleurs spécialistes du temps, Vincent l'opère malgré l'opposition d'Alajouanine, il meurt.

Le livre ne parle pas de musique. Certes, on y trouve le Concerto en sol, la prétention de Wittgenstein sur le Concerto pour la main gauche, la popularité effarante du Boléro, « vide de musique ». Mais rien sur l'émotion qui inspire ou qu'inspire la musique, comme dans Boussole, Vernon Subutex ou le salon du Wurtemberg, trois fictions qui mettent en scène un musicologue, un interprète, un musicien. Quignard confirmait dans le salon qu'il est difficile d'en parler : « Je n'ai pas souhaité ici parler de musique, parler du coeur sans voix, du coeur muet et sonore ».
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Echenoz, avec sa belle écriture très visuelle, nous raconte, dans une ambiance 'années 30', les 10 dernières années du compositeur fort soucieux de son 'paraître', adulé aux états unis, puis sa santé se dégradant suite à un genre d'Alzheimer, sa triste fin de vie abrégée par une trépanation pas trop réussie.
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Le grand public ne connait Maurice Ravel que par le (trop) fameux Boléro. Pourtant, par son oeuvre située à mi-chemin entre la musique classique et la musique contemporaine, il s'inscrit parmi les plus grands compositeurs français de tous les temps; il a connu la célébrité de son vivant. Voilà pour le musicien lui-même. Mais qui connait vraiment l'homme qui se cache derrière le compositeur ? Quelques photos nous montrent un homme mince et plutôt élégant; on sait qu'il a eu une vie mondaine liée à sa notoriété et qu'il est resté célibataire.
Jean Echenoz s'est emparé du personnage et s'est documenté très sérieusement sur sa personnalité et sur le cours des dix dernières années de sa vie. Il pousse à fond ses traits de caractère: il en fait un dandy passablement obsessionnel, pas mécontent d'avoir atteint une célébrité universelle. L'écrivain nous présente Ravel comme une personne originale, certes, mais au fond irritant et peu sympathique; le ton employé pour le décrire est très souvent distant et persifleur. Quant à son oeuvre musicale, elle est précisément mentionnée, mais pas analysée en détails, ni valorisée à sa juste valeur. C'est du moins mon avis personnel.
J'avais eu la même sensation au sujet de "Des éclairs", une biographie romancée de l'ingénieur Tesla, qui m'avait semblé encore plus cruelle. Je trouve un peu injuste de traiter des personnages célèbres un peu "par-dessous la jambe", sous couvert d'évocations romanesques qui se veulent impertinentes. Il y aussi le style inimitable d'Echenoz, brillant, avec ses phrases courtes qui sont comme des coups de griffe: on aime ou on n'aime pas.
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