Ce roman a été déstabilisant pour moi. Déjà, l'auteure, Sacha, est une femme. J'étais persuadée que c'était un homme. Et Yan, son personnage principal, est une femme aussi. Pour moi, Yan est plus un prénom masculin, j'ai vraiment eu du mal à m'y faire, ça a été la catastrophe. Ma cervelle de Yop m'a agacée en refusant d'admettre que Yan était une femme (quelle tête de pioche, peut-être devrais-je consulter…). Ou comment un simple petit détail de rien du tout peut compromettre une lecture. Mais heureusement, Sacha était là pour remettre mes pauvres neurones dans le droit chemin !
Yan Lebrun, « La Tiote », spécialiste en criminologie, travaille à la PJ de Lille. Elle enquête avec son collègue Mika, « Granulé », sur le meurtre d'un journaliste, tué sauvagement à son domicile. Autre intrigue, c'est Barthélémy, « Brath », et Michel, qui se voient charger d'un suicide par…décapitation. Étrange manière d'en finir avec la vie, non ? Deux enquêtes menées de front, qui se rejoindront peut-être à un moment de l'intrigue. Deux affaires qui vont mener nos policiers dans les bas-fonds de Lille, où des sujets graves et très intéressants sont plus qu'abordés. J'ai appris beaucoup de choses sur l'homosexualité dans des pays où elle est considérée comme illégale, où la honte et la dissimulation sont de règle, pour échapper à de terrifiantes représailles. Je suis allée approfondir le thème sur internet, et ce que j'ai lu rejoins la parole de Sacha et fait vraiment froid dans le dos. La partie relative au journalisme d'investigation s'est également avérée passionnante.
Sacha aborde également un autre sujet délicat, non mentionné dans le résumé, je n'en parlerais donc pas. Yan décrit « l'Araignée » qui la bouffe de l'intérieur avec beaucoup de justesse. L'occasion pour l'auteure de nous démontrer que le rôle du subconscient est loin d'être secondaire, et que l'on peut compter sur la puissance du mental sur le physique.
J'ai été émue par ce que vit Sacha, par son courage et sa détermination. C'est une femme très forte, qui vous insuffle de l'énergie et de la positivité, que j'ai pris plaisir à suivre du point de vue privé. C'est ce que j'ai aimé dans ce roman : on n'est pas juste face à des enquêteurs payés pour résoudre des meurtres. On est face à des hommes et des femmes qui ont une vie personnelle, des émotions et des attentes. Et qui forment une grande famille. J'ai vraiment beaucoup apprécié le portrait fait des personnages. Je me suis attachée à eux.
La plume de Sacha sait être délicate et sensible au bon moment, et devenir vive et percutante à d'autres, rendant la lecture très agréable. Elle maîtrise son sujet, aussi bien en terme de procédures judiciaires (Sacha est une ancienne flic) et en terme de connaissance de l'Araignée (les notes de l'auteur à la fin m'ont émues). L'humour est présent, grâce aux répliques de nos protagonistes, ou encore à leurs surnoms, même les voitures de fonction en ont un. Cela rapproche lecteur et personnages et permet une belle immersion dans l'histoire.
« Tout le monde a un surnom ici, même les véhicules de la PJ. C'est leur monde à eux, leur seconde famille. Un repère dans une réalité qui montre l'être humain dans ce qu'il fait de pire. Ils passent plus de temps ensemble au boulot qu'avec leurs femmes et leurs enfants, alors ces surnoms, ce microcosme qu'ils se sont créé, c'est leur point d'ancrage à l'image d'une bulle d'air qui remonterait des profondeurs. »
Niveau enquête, j'ai assez rapidement pu placer quelques pièces du puzzle, mais il m'en manquait tout de même pour découvrir le schéma final ! Je me suis régalée car les investigations sont détaillées à l'extrême, Sacha place le lecteur au coeur de l'enquête. A nous les témoignages, les debriefings avec l'équipe, les constatations, les autopsies, le jargon des flics (no panic, tout est expliqué !). J'ai vraiment eu l'impression d'être avec eux dans les locaux de la PJ, et cette plongée est absolument géniale !
Un roman très riche et instructif, embarquant le lecteur qui ne souhaite qu'une chose : être absorbé par les pages et le récit. Une très belle lecture que je vous conseille. Lancez-vous, faites connaissance avec Yan, vous ne le regretterez pas !
« le matraquage de tronche symbolise la rage, la haine pure et simple. La vengeance me semble une piste intéressante, mais je ne sais pas encore dire pourquoi. En criminologie, la strangulation signifie que l'on veut faire taire la personne. On veut qu'elle arrête de parler. le fait de porter des coups au visage peut faire ressortir la frustration, la volonté de prendre l'ascendant sur l'autre, ou les deux à la fois. »
Je remercie les Éditions Taurnada pour cette lecture.
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