Ce roman c'est tout d'abord ce personnage central qui sort des cadres formatés :
Eugène Terredefeu .Alors que sa lignée familiale lui assure un train de vie de notable , il se rêve propriétaire d'une station service à l'ancienne , où l'on sert encore les clients . Mais un pompiste en costume trois pièces s'il vous plaît . On a beau faire un métier salissant on peut aimer bien s'habiller !
Alors qu'il parle avec difficulté la langue de
Shakespeare il parvient à se faire embaucher de l'autre côté de l'Océan Atlantique , chez les ricains de la Côte Est , à Plymouth . Cette petite ville paisible fait partie du mythe américain car c'est là que les premiers colons anglais ont débarqué au début du XVIIe siècle . A lui les grands espaces et le rêve américain à portée de main !
Eugène était pompiste en costume il deviendra libraire ...en costume .
C'est vrai que son style vestimentaire détonne dans la communauté , alors qu'un acte abominable vient d'y être perpétré : une joggeuse enceinte a été sauvagement assassinée . dans un parc .
Le calme et la sérénité du lieu , tant espéré par Eugène , vont laisser place à l'inquiétude grandissante des habitants et l'angoisse de savoir qu'un criminel rôde dans les parages , capable de répéter son crime odieux .
La pression sur les épaules de Saul , le chef de la Police locale , assisté du jeune Finnigan , un brin misogyne et arrogant , va grimper d'un cran alors que vient de débarquer Lilly , agente du FBI , originaire du coin , qui a bien l'intention de démêler cette affaire à sa façon ,
C'est sans côté sur Eugène , le passionné de romans noirs et d'occultisme , dont la curiosité et la passion pour les grands détectives du cinéma , vont l'amener à conduire ses propres investigations , au guidon de son fidèle destrier mécanique , si l'ado au style gothique , dénommée à propos , Poison, lui en laisse le temps ..
La richesse de ce récit ce sont ensuite les autres protagonistes de cette histoire incroyable . Des personnages aux multiples facettes , comme l'agente du FBI , Lilly Anak , cette amérindienne en froid avec son père qui lui reproche d'avoir rompu avec les coutumes de son peuple .
Puis la fluidité de l'écriture , un style parfaitement rythmé , teinté d'humour , et cette force du mal , bicéphale , tapie dans l'obscurité , ébranlant les certitudes des lecteurs comme celles des forces de l'ordre , font le reste . Un équilibre précaire entre la bienveillance des uns qui se manifeste avec une certaine légèreté du ton et la quête malsaine et maladive des autres , qui s'instaure alors peu à peu , vaille que vaille .
Et ce final , totalement déstabilisant , qui clôture en beauté ce livre .
Une vraie réussite .