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sur 330 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Médée n'est pas la plus ancienne pièce d'Euripide, mais c'est la plus ancienne tragédie de l'auteur dont le texte nous soit parvenu (Alceste n'étant pas rangée dans la catégorie des tragédies), et l'on est certain qu'elle fut créée en -431. Médée y apparaît en tant qu'infanticide, et correspond donc à l'image que nous nous faisons d'elle aujourd'hui, bien qu'elle n'ait visiblement pas toujours été considérée comme telle dans la mythologie grecque. Euripide, inventeur de Médée tuant ses enfants ? Ce n'est sans doute pas aussi simple, car la question d'une Médée infanticide ou de la culpabilité des Corinthiens dans le meurtre des enfants se posait déjà à l'époque d'Euripide.


Ce qui est à peu près sûr, c'est que la Médée que nous voyons au début de la pièce a déjà du sang sur les mains. Elle a été bannie de son pays, a tué son frère, puis manipulé les filles de Pélias pour qu'elles tuent leur père, tout ça pour les beaux yeux de Jason. Et après quelques années heureuses en Corinthe, lors desquelles ils ont deux enfants ensemble, ne voilà-t-il pas que Jason répudie Médée pour épouser la fille de Créon, le roi (il n'a rien à voir avec le Créon de Thèbes, qui ne peut tout de même pas être partout à la fois). La pièce s'ouvre sur les inquiétudes de la nourrice, qui n'a que trop bien compris ce qui risquait d'arriver par la suite, puis sur les lamentations de Médée. Et ne voilà-t-il pas qu'en plus d'être répudiée, Médée se retrouve bannie de Corinthe, alors qu'elle n'a plus nulle part où aller - on se doute bien que sa famille ne va l'accueillir à bras ouverts. Et d'une Médée criant et se lamentant sur son sort, on va passer à une Médée rusée, qui va discourir avec le choeur, Créon, ou Jason - on notera au passage que, bien que Sophocle ait alors déjà introduit le troisième protagoniste dans le théâtre grec, Euripide n'en fait quasiment pas usage (c'est à peine si trois acteurs se croisent à un moment donné de la pièce). Toute l'action va se concentrer sur la solution que doit trouver Médée à sa situation, discutant ou s'engueulant avec Créon ou Jason, mais dévoilant peu à peu son plan au choeur. Médée n'est que vengeance, elle ne laissera pas passer l'affront qu'on lui a fait, ce que craint effectivement Créon tout en se montrant tout de même un peu naïf, et ce que ne comprend absolument pas Jason (il faut croire que c'était un couple mal assorti dès le départ, c'est quand même un peu gros de ne pas connaître sa femme à ce point !) Et donc, le plan de Médée se déroulera selon ce qu'elle a prévu. Beaucoup de violence à la fin, donc.


Ce qui est évident, c'est que Médée prend toute la place dans la pièce, au point qu'il n'y a même pas de divinité. Et selon certains critiques, s'il n'y a pas de divinité, c'est que la divinité, c'est Médée elle-même. Il est vrai que ce personnage est issue d'une ascendance assez prestigieuse, le Soleil lui-même étant son ancêtre. On peut donc comprendre que, réagissant à la manière d'une divinité, elle ne puisse accepter d'être répudiée par Jason. Rien ne dit réellement qu'elle soit jalouse, amoureuse, et du coup rancunière comme le pense Jason, qui lui agit en homme ordinaire (mais où est le héros qu'on nous a tant vanté ???), et donc épouse la fille de Créon pour des motifs... raisonnables. Au-delà du sort réservé aux femmes, dont parle beaucoup Médée mais dont il n'est pas certain qu'elle se soucie tant que ça, c'est de l'humiliation d'être traitée en femme ordinaire qu'il s'agit. Jason voudrait la voir réagir en épouse normale, mais Créon n'est pas si bête, et la nourrice sait encore mieux ce qu'il en est : il n'y a rien de "normal" chez Médée, il y a surtout une femme complètement à part, qui doit faire semblant d'utiliser le langage des autres pour mieux les tromper (on se demande décidément à quoi ressemblait son mariage avec Jason...) et mener sa vengeance à son terme.


Alors tout de même, il y a ce fameux monologue de Médée, qui a fait couler beaucoup d'encre, où elle semble tergiverser. D'un point de vue actuel, ça ressemble étonnamment à un trouble de l'identité - deux personnalités en une seule femme qui donneraient leur deux points de vue opposés : "le meurtre des enfants est inévitable" versus "le meurtre des enfants n'est pas un élément obligé de la vengeance". Peut-être est-ce là la marque que Médée est une humaine malgré tout, et une mère, mais qu'elle doit, du point de vue qui est finalement le sien tout au long de la pièce, en passer par ce questionnement et cette épreuve pour se dépasser, dépasser sa condition de femme, d'épouse, de mère, mais surtout d'humaine, pour assouvir une vengeance qui a peut-être beaucoup à voir avec son ascendance divine. Car c'est bien, non pas un dieu ou une déesse, mais une Médée triomphante qui surgit dans les airs - avec en sus des prophéties peu engageantes pour Jason à la bouche. Ce qui fait davantage sens que les habituels deux ex-machina tombant du ciel qui nous agacent tant (et qui agaçaient déjà les commentateurs de l'Antiquité, il me semble, bien que ça ait dû en jeter visuellement), comme par exemple dans Iphigénie à Aulis.


Reste qu'Euripide, en composant une tragédie avec une ligne directrice apparemment très claire et lisible, ainsi que des dialogues s'inscrivant dans une forme de classicisme, a finalement créé un personnage emportant tout sur son passage, faisant quasiment voler en éclats les questions d'éthique et de morale, resté fortement ancré dans les esprits pour de nombreux siècles, et éclipsant quelque peu les autres variantes de Médée.
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Pour une tragédie grecque antique, j'ai trouvé le texte de "Médée" d'Euripide assez facile à lire. Il faut dire que l'écriture et la place du choeur de femmes nous y aide.

Médée, éprise de Jason lorsqu'il a débarqué pour conquérir la Toison d'or, a tout quitté pour le suivre. Elle a eu recours aux pires stratagèmes, dont la trahison des siens, pour permettre au héros de triompher de ses épreuves. Afin de la remercier, Jason l'a prise pour épouse et l'a emmenée dans sa fuite. Ils ont eu deux enfants. Mais le conte de fées vire rapidement au drame. Et c'est ce qui nous est relaté dans la pièce.

De retour à Corinthe, Jason va rapidement préférer la fille du roi Créon. Médée va être bannie par ce roi qui a donné sa fille à Jason.
S'inspirant de la légende des Argonautes, Euripide raconte alors comment cette magicienne d'origine royale et divine devient une meurtrière sans scrupules et une mère infanticide qui égorge de ses propres mains leurs deux garçons, fruits de cet amour trahi.
Dès lors, l'ambitieux Jason, désespéré, va tout perdre.

Au départ l'idée de vengeance ne m'a pas vraiment plu car ce n'est pas mon tempérament. Mais la puissance de caractère de cette femme m'a emportée au delà de mes apriori. Et cette passion amoureuse jusqu'à la folie a fini par me bouleverser.

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Médée est une femme qui vieillit, une mère qui a donné des enfants à son mari, une "sorcière" qui inquiète par sa maîtrise de techniques et de sciences que certains appellent magie parce qu'ils ne les comprennent pas. Mais surtout, c'est une étrangère qualifiée de barbare car non grecque. Et il semble que ce soit le principal reproche qui permette à Jason de l'exclure. Et c'est ce qui le fait la plus souffrir : elle souffre de l'exil, loin de sa patrie et de ses proches. C'est aussi pour cela qu'elle est malheureuse, parce qu'elle est seule et sans soutien.
Cette tragédie porte en elle le malheur dès le début, le poids du destin est annoncé et il est inéluctable : Médée va tuer ses enfants, c'est annoncé.
Mais comment ne pas ressentir de la compassion pour cette femme rejetée par son mari pour une autre plus jeune et plus puissante, se justifiant par un discours violent contre les femmes.
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Sur ordre de son oncle Pélias, Jason doit aller récupérer la Toison d'Or, gardée par le roi de Colchide, AEétès, père de Médée. Jason embarque avec les Argonautes et arrive chez AEétès. Cupidon, sur ordre de sa mère Aphrodite, lancera sa flèche amoureuse dans le coeur de Médée, qui aussitôt brûle d'amour pour Jason. Comme elle est aussi magicienne, elle déjoue tous les pièges que son père avait posés à son amoureux, et ainsi ils peuvent fuir ensemble en Grèce avec la Toison d'Or. Lorsque le roi AEétès découvre le vol de la Toison d'Or et le départ de Jason avec sa fille Médée et son fils Apsyrtos, il les poursuit. Pour ralentir la course de son père, Médée tue son frère, le découpe, et balance les morceaux en mer qu'AEétès récupère. Puis elle organise l'assassinat de Pélias qui avait trahi Jason. Ils s'installent à Corinthe où Créon est roi. Ils ont 2 enfants, tout se passe bien jusqu'à ce que Jason la délaisse pour Glauké, fille de Créon avec laquelle il se marie. La vengeance de Médée sera terrible. Usant de ses pouvoirs de sorcière, elle élimine Glauké et son père, puis tue ses deux enfants avant de quitter Jason et Corinthe pour Athènes où elle rejoindra Egée pour d'autres aventures dont la tentative d'assassinat sur Thésée. (quel palmarès !)
2000 ans, 2 siècles ou 20 ans, dans les actes ingrats et assassins où la mythologie est absente, la réalité cruelle des infanticides ne nous épargne pas. Quelles en sont les causes ? Multiples certainement. La jalousie, l'humiliation, la honte, le désespoir, les différentes psychoses. Comment les comprendre, les juger, les pardonner ?
Toujours amoureuse de Jason, Médée est doublement trahie : sans son aide, Jason n'aurait pu revenir au pays avec la Toison d'Or ; puis, il la répudie pour convoler avec la fille du souverain, ce qui l'honore d'un statut royal. Les enfants issus de cet hyménée seront les héritiers du trône ; ceux de Jason et Médée alors irrémédiablement condamnés à l'exil ou assassinés. Médée ne peut supporter cette éventualité, de plus, Jason leur est attaché. Exhortée par le roi et son ex à quitter la contrée et abandonner ses enfants, elle infligera à Jason un double châtiment en supprimant sa nouvelle épouse et ses enfants. C'est d'une banalité en fait !!

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Oeuvre antique, théâtrale, ce n'est pas forcément le type de livre qu'on a envie de lire si on est pas passionné par ce genre. Pourtant, les mots d'Euripide défient le temps et nous livre un texte intemporelle, les paroles d'une femme bafouée par son amant que rien n'arrêtera...
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Je m'attendais à lire l'histoire banale d'une femme trompée qui se venge su son mari. J'ai été cependant très surpris par les mots utilisés par Corneille pour montrer la colère que ressens Médée. le champ lexical de la mythologie est extrêmement présent, ce qui peut parfois brouiller le vrai sens des sentiments.
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Je connais mal la littérature grecque antique, mais cette tragédie d'Euripide a été un plaisir à lire. La pièce est courte, avec un texte ramassé mais diablement efficace, autour du personnage central et fascinant de Médée, épouse répudiée et mère tragique.
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