La Querelle Des Investitures (Les Grandes Crises De L'Histoire)

Un ouvrage majeur sur un sujet d'importance dans l'histoire médiévale, celui des difficiles rapports entre le pouvoir civil, représenté ici principalement par l'Empereur allemand mais aussi par les rois de France et d'Angleterre, et le pouvoir religieux, symbolisé dans l'Occident chrétien par la papauté.
Pour mieux stopper le mouvement qui conduisait le pouvoir politique à empiéter sur le pouvoir spirituel, les Papes des XIe, XIIe et XIIIe siècles, soutenus par de nombreux abbés placés à la tête des communautés monastiques et par des théologiens et penseurs issus du rang de ces dernières, imaginèrent un vaste mouvement de réforme qui visait autant à tracer les frontières entre les autorités temporelles et le domaine ecclésial, en redéfinissant les prérogatives propres à chacun, de manière à éviter que les empereurs, les rois et les princes se mêlassent de la nomination des évêques, rôle que les papes entendaient se réserver, qu'à définir les rapports entre les uns et les autres. Trop d'intrusions des premiers dans ce domaine avaient entraîné des excès et des tensions toujours plus fortes avec la papauté et une partie du clergé proche de cette dernière. C'est ce que l'on appela la Querelle des Investitures, et la tendance des autorités laïques à se mêler de ce qui ressortissait à la sphère religieuse et à user à son gré des successions aux sièges épiscopaux et de tous les privilèges afférents prit le nom de simonie (ou trafic des biens spirituels), scandale dénoncé par les initiateurs du mouvement de la réforme grégorienne. Ceux-ci ne s'en tinrent pas à cette lutte difficile contre des rois et des empereurs qui pouvaient faire usage de la force pour imposer leurs volontés mais qui hésitèrent parfois quand les papes et les évêques brandirent devant eux la menace de l'excommunication et de l'interdit (l'image de la pénitence de Canossa imposée à l'Allemand Henri IV qui dut se jeter aux pieds du pape Grégoire VII surgit ici immanquablement ; la diète d'Augsbourg fut censée marquer la volonté des deux pouvoirs de chercher un compromis). L'Eglise, pour ne pas être critiquée elle aussi pour ses contradictions intérieures et évoluer vers plus de cohérence, dut procéder à son propre aggiornamento en luttant contre ceux de ses membres qui ne respectaient pas les devoirs de chasteté et de continence auxquels ils étaient tenus (on appelait cela le nicolaïsme).
Le livre d'Augustin Fliche, spécialiste en son temps de l'histoire de l'Eglise, n'a pas pris une ride. Espérons que des historiens sauront reprendre le sujet en le réactualisant, car le travail de Fliche continue de faire autorité mais le thème appelle sans doute de nouvelles lectures des événements qui ont jalonné cette longue Querelle des Investitures.
François Sarindar, auteur de : Lawrence d'Arabie. Thomas Edward, cet inconnu (2010).