Après le monumental "piliers de la terre" et le très décevant " monde sans fin" voici le 1er volume de "la chute des géants".
Cette nouvelle fresque historique a pour cadre le début du XX siècle qui commence de facto, en 1914 avec effectivement la chute (définitive) de l'Europe.
Comme dans ses précédentes oeuvres
Ken Follett met en scène des "gentils", des vrais aristocrates dans leur vie et leurs actes. le lecteur fait connaissance avec cette famille de mineurs gallois les Williams, qui n'ont de cesse de vouloir mettre un peu d'humanité par leur action politique et syndicale pour survivre dans ce monde si peu fraternel, avec Walter et Maud de "bonne" noblesse prussienne et anglaise qui vont s'aimer d'un amour absolu, transcender les frontières, l' intolérance et les évènements dramatiques. Gus le conseiller politique du président Wilson libéral et amoureux de la piquante et charmante journaliste Rosa. et Gregori le révolutionnaire romantique russe complètent cette famille sympathique.
Fatalement se dressent les affreux, le réactionnaire et odieux comte Fitzherber et Otto le père de Walter dont l'adhésion future au nazisme ne fait aucun doute.
Tout ce monde vit, s'agite, intrigue dans le contexte du drame épouvantable qui s'annonce. Certains protagonistes sont témoins et acteurs directs des évènements un peu comme les Siorac dans Fortune de France du regretté
Robert Merle
Sans surprise, Ken Follet a procédé à un travail d'historien remarquable pour rapporter l'engrenage infernal qui aboutit à la guerre. Ces événements sont bien connus grâce notamment à des travaux universitaires d'historiens comme
René Girault,
Raymond Poidevin , Renouvin ou des livres plus grand public comme ceux de
Pierre Miquel ou d' Hélène Carrière d'Encausse pour tout ce qui touche à la révolution russe. Cela n'enlève rien au mérite de
Ken Follett d'avoir su présenter avec une précision minutieuse sous un format romancé ces faits historiques. Je formulerai néanmoins deux reproches. le premier est de n'avoir quasi pas évoqué les épreuves abominables subies par les hommes dans les tranchées. Dans une oeuvre de près de 1 000 pages telle que cette « chute des géants », qui a pour ambition d'immerger le lecteur dans la réalité sans fard de l'époque et de coller à la « grande histoire » , relater cet aspect était un passage incontournable, au moins autant que les chapitres sur le front oriental des péripéties anecdotiques de l'armée Koltchak .
La seconde réserve concerne ce relativisme quant aux responsabilités du déclenchement du conflit. Il est indiscutable qu'il y a eu dans tous les pays des va t-en guerre criminels et qu'un climat belliqueux général, conjugué à un jeu de domino d'alliance infernal ont lourdement pesé. Mais il n'en demeure pas moins que la responsabilité dans la crise finale de l'Allemagne est réelle en ayant encouragé l'Autriche Hongrie dans ses initiatives mortifères. Il y avait déjà eu d'autres crises sérieuses mais cette fois ci la voie diplomatique a été délibérément ignorée
Ceci étant dit cette oeuvre est à mon avis une authentique réussite et ce d'autant que le scénario général est connu, les dénouements individuels fatalement prévisibles dans ce contexte sans surprise. Les profils des protagonistes sont parfaitement dessinés et leurs aventures orchestrées par une logique bien huilée pour garder l'intérêt du lecteur au fil des chapitres.
En conclusion un très beau livre