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Mais, pour revenir aux choses sérieuses, il est vrai que l'Histoire des différents peuples Thays tourne autour de ces divinités gardiennes, cristallisation en quelque sorte du désir collectif et éperdu de sécurité chez des âmes enfants, douces, contemplatives et religieuses. Ce n'est pas tout le temps efficace, semble-t-il. Mais comme il faut des générations pour l'esprit humain puisse faire le bilan d'une croyance ou d'une idée, les fétiches agissent toujours dans l'intervalle comme bienfaisants dissipateurs d'angoisse. Ce qui a son prix, la quiétude étant pour ces Asiatiques la condition indispensable du bonheur.
Ainsi, les Siamois, les Laotiens, les Cambodgiens, - qui sont les premières vagues de la vieille vieille invasion Yunnanaise, légérement métissée de Khas, tandis que les Pocks en sont l'arrière-garde, - les Laotiens, les Siamois, les Cambodgiens, avec chacun un vatphra-kéo - naturellement - ont le fameux Bouddah d'Emeraude. Luang-Prabang l'a possédé lui-aussi. Et il lui reste toujours son antique Bouddha palladium, le Prabang en Or.
C'est précisément une caractéristique vitale, une tradition essentielle, que l'on ne conçoit pas de peuple Thay sans la figure centrale d'une divinité tutélaire.
Cependant, il serait inexact de croire au monopole.
Bien avant eux, l'Hellade avait Pallas. Et la Carthage de Salambo, le voile de Tanit.
D'autres exemples se retrouvent chez d'autres peuplades sur d'autres continents; avec autour, le fatal et identique déroulement des courants de foi, des convoitises des voisins, des jalousies, des haines, des guerres rapaces, des ruines nationales et des carnages sans merci.