Dragons et serpents.
Vivant dans les entrailles de la Terre, doté de poumons crachant le feu, d'ailes d'oiseau et d'écailles de serpent, le dragon symbolise à lui seul les quatre éléments de la tradition occidentale, ainsi réunis en une seule créature capable d'inspirer les plus épouvantables cauchemars.
Il offre des significations contradictoires et exprime le paradoxe qui réside au cœur même de la vie - l'interdépendance de la lumière et des ténèbres, de la création et de la destruction, du masculin et du féminin.
Mais, plus que ces opposés, le dragon personnifie la source unique dont ils tirent leur origine.
Il n'est ni bon ni mauvais en lui-même : il symbolise l'énergie primordiale du monde matériel, qui peut être indifféremment utilisée pour le Bien ou pour le Mal.
En Orient, où l'accent a toujours été mis sur les aspects positifs de cette énergie, il est traditionnellement appréhendé comme la synthèse des caractères bénéfiques des éléments.
Unissant l'eau (écailles, forme reptilienne), la terre (caverne) et l'air (ailes, souffle), il représente l'union de la matière et de l'esprit.
Pour les hindous, il produit le soma, le breuvage d'immortalité;
En Chine, où il draina la Terre au début des temps, il accompagne les saisons et sert de monture aux Immortels.
Bien qu’ils représentent des aspects universels de la psyché humaine, l’animus et l’anima sont modelés par l’expérience individuelle, et vice versa. Un enfant qui a eu de mauvaises relations avec sa mère, par exemple, développera une anima négative qui influencera en général ses rapports avec le sexe opposé et pourra même affecter son équilibre psychique. De la même façon, une femme, lorsqu’elle tombe amoureuse, peut, contre toute raison et malgré l’avis opposé de ses proches, investir l’élu de son cœur des qualités positives de son animus.
D’autres archétypes mettent en œuvre de puissants processus.
Alors que celui de la mère, représentant l’aspect dispensateur de vie et d’amour de la nature humaine, apparaît dès la naissance, avec l’allaitement et les soins, celui du père n’émerge-et ne peut émerger – que plus tard. Le père est le maître du monde matériel, temporel, tandis que la mère règne sur le monde invisible des émotions et des sentiments. Sous son aspect positif, l’archétype du père est le protecteur, le roi sage et bon de la légende, celui qui enseigne et applique la loi en toute équité. Sous son aspect négatif, c’est un tyran, un être diabolique, le dieu Cronos dévorant ses propres enfants. (page 14)
En occident, avec l’association du serpent à Satan, le Tentateur, le christianisme a fait du dragon un symbole effrayant du chaos, de la force destructrice aveugle, du Mal intrinsèquement lié au monde de la matière. Au Moyen Age, il était fréquemment montré comme le gardien jaloux d’un trésor (la sagesse spirituelle), ou le geôlier impitoyable d’une jeune vierge (la pureté) prisonnière dans son antre souterrain.
Par extension, le dragon en est venu logiquement à symboliser, dans la civilisation occidentale, le monde des émotions et les profondeurs insondables de l’inconscient. Il figure l’animal tapi à l’intérieur de nous, les énergies primitives qui, si nous les libérions, nous ramèneraient immanquablement au niveau des bêtes.
Le dragon sortant de la mer : en Occident, on y voyait le symbole du surgissement brutal des énergies maléfiques de l’inconscient.
St Georges et le dragon (repro p 80) Cette icône du Ixe siècle, représentant Saint Georges triomphant du dragon, symbolise la victoire de l'esprit sur la matière, du Bien sur le Mal, de la lumière divine (figurée par la lance) sur les ténèbres infernales.
Le Yi King
Vivons-nous dans un univers dans lequel les objets et les événements sont uniques et sans relations les uns avec les autres, ou au contraire tout ce qui se produit fait-il partie d’un seul grand tout, immense et cohérent, d’un flot ininterrompu de transformations s’étendant des causes premières au futur le plus éloigné ?
Un esprit rationaliste penchera inévitablement pour la première hypothèse.
Mais le mysticisme, les conceptions traditionnelles du monde et les théories les plus avancées de la physique moderne se réclament de la seconde.
Si cette vision balistique est exacte, ce que nous appelons le hasard n’existe pas.
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L’anima, la personnification des éléments féminins de la psyché masculine (ou image universelle de la femme présente dans l’inconscient de tout homme), peut apparaître dans les mythes sous forme de déesse ou de prostituée, de fée ou de sorcière.
Sous son aspect négatif, l’anima est souvent représentée comme une femme fatale, une séductrice qui use de ses charmes pour attirer puis rejeter ou humilier l’homme et le soumettre à sa volonté. Dans ce tableau, elle est figurée par Salomé, l’héroïne biblique qui persuada le roi Hérode de faire décapiter Jean-Baptiste en l’envoûtant avec ses danses.
Sous son aspect positif, l’anima est perçue comme un guide spirituel, possédant la science secrète des mondes visibles et invisibles.
Ces caractéristiques étaient autrefois projetées sur les navires (la langue anglaise a d’ailleurs conservé leur genre féminin) et représentées dans leur figure de proue, dont le capitaine était le mari symbolique - cela pourrait expliquer pourquoi il devait couler avec son bâtiment.
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