Dans «Michel» on inculque aussi, doucement, presque insidieusement (et certains intellectuels ne devaient pas manquer alors de s’élever contre ce "viol des jeunes esprits"), les valeurs principales de la vie en société telles qu’elles sont défendues par le modèle judéo-chrétien et intello-matérialiste en cours à l’époque : le respect des autres, des anciens et de la parole donnée, le courage, l’amitié, l’honnêteté, la tolérance, la politesse, la valeur du travail, les méfaits de l’ignorance et des superstitions.
L’auteur était un vrai provincial aux origines profondément enracinées en Picardie, région qui n’était alors pas la plus «glamour » ni la plus facile à vivre sans doute.
Il était devenu instituteur, métier éminemment réaliste et qui a – c’était du moins une certitude à son époque – une finalité sociale pragmatique et utile.
Il avait également vécu la guerre de l’intérieur, expérience qui à l’évidence ne devait pas contribuer au romantisme ni à la poésie
vaporeuse.
Ces composantes de sa vie avaient dû faire de lui un homme sensé, les pieds sur terre, réaliste et bardé de quelques certitudes.
La vraie intelligence, celle du coeur, n’a rien à voir avec la fortune
ou le rang social. Il s’agit bien là d’un des messages portés avec obstination par Georges Bayard.
On le voit bien, a contrario, avec d’autres personnages de la série, négatifs ceux-là, qui alimentent les ragots ou les haines irraisonnées (et injustifiées !) contre les « étrangers ».
Certains citadins transplantés et argentés ou certains autochtones bien installés sont des exemples flagrants, et parfois même presque des caricatures, du mauvais esprit étriqué et sans envergure qui fait tant de mal dans la vie de tous les jours et dans le simple voisinage.
Il n’y a donc dans «Michel» que du concret, du réel, du palpable,
de l’explicable. Et du terroir. Toutes choses que les lecteurs
pouvaient eux-mêmes connaître. On trouve dans certains livres pour enfants des souterrains improbables et interminables et des trésors enfouis depuis des siècles que des bandes de mouflets retrouvent en deux jours et à mains nues. Langelot est, à dix-huit ans, un agent secret d’élite. Les Six Compagnons bénéficient du flair et du courage extraordinaires d’un berger allemand comme il n’y en a jamais eu aucun autre (heureusement qu’ils l’ont, d’ailleurs, parce que sinon, ils ne sont pas toujours très futés…)
L’humanisme et la tolérance sont ainsi des valeurs largement défendues par l’auteur qui fait de Michel et de ses copains ses porte-parole. Ne soyez pas excentriques ni marginaux, reprenez les certitudes et les croyances de vos pères – qui ont fait leurs preuves ! –, mais ne soyez ni naïfs ni obtus.