Par une fraîche matinée de mai, en l’année 1652, trois jeunes gens franchissaient sans bruit, dès le point du jour, la clôture en pieux de la bourgade naissante qui comptait alors à peine deux cents âmes. Fuyant les regards indiscrets, ils partaient joyeusement pour une excursion de chasse dans les marais du lac Saint-Pierre, — prolongement du fleuve s’avançant dans les terres, — où le gibier d’eau de toutes sortes abondait.
Les noms de deux de ces étourdis ne sont pas parvenus jusqu’à nous. Le troisième s’appelait Pierre-Esprit Radisson. Âgé de seize ans à peine, il était venu de Paris avec sa famille l’année précédente.
Aux Trois-Rivières, Radisson retrouva son beau-frère la tête pleine de projets d’exploration. Groseilliers venait justement de passer plusieurs mois dans la contrée du lac Nipissing et de la baie Verte, ou des Puants, où il avait suivi le Père Druillettes. De nouveau, il y avait entendu les Indiens parler de pays immenses, — auprès desquels la Nouvelle-France d’alors se réduisait à des proportions ridicules, — de grands fleuves rivalisant avec le Saint-Laurent et de mers communiquant avec toutes les parties du monde.