Danser les ombres

Ils sont nombreux à déambuler dans les rues de Port-au-Prince en ce 11 janvier 2010.
Lucine est revenue en ville après cinq années d'absence. Elle avait été de toutes les luttes contre la dictature d'Aristide, elle rêvait de justice et de liberté. Elle avait laissé derrière elle sa jeunesse pleine d'espoir pour retourner à Jacmel et élever les enfants de sa soeur Nine, éternelle amoureuse, éternelle blessée par les hommes. Mais Nine est morte et Lucine vient demander des comptes au lâche qui a engrossé sa soeur.
Saul, brisé par son enfance de bâtard, brisé par les coups infligés par les partisans d'Aristide. Saul se rêvait médecin mais il n'a jamais obtenu son diplôme. Saul soigne quand même. Il apporte un peu de réconfort, soulage un peu de la douleur des plus défavorisés dans les quartiers pauvres de Port-au-Prince.
D'autres encore vont se croiser en ce dernier jour d'insouciance : Firmin, Tess, Pabava, Sénèque, Jasmin, Lily, Mam' Viviane, Ti Sourire. Et tant d'autres anonymes, peuple de Port-au-Prince, riches ou pauvres, morts ou vivants, qui font vibrer, tourbillonner cette ville grouillante de vie.
Ils ne savent pas de quoi sera fait demain…Le 12 janvier, jour funeste où la terre va trembler pendant trente-cinq secondes.

Superbe plume de Laurent Gaudé qui en quelques portraits bien brossés nous invite à découvrir l'histoire du peuple haïtien, de ses luttes contre la dictature et la misère, de ses croyances. Des tontons macoutes des Duvalier père et fils à la répression sanglante d'Aristide, ils ont connu la torture, voire la mort, pour avoir contesté un pouvoir autoritaire et inégalitaire. Mais ils restent profondément attachés à la vie, à leur pays, à leur ville. Port-au-Prince, faite de bric et de broc, de bruit et de fureur, de taudis et de maisons de maître. Port-au-Prince qui va s'effondrer comme un château de cartes, laissant sur le pavé les riches et les pauvres, les vivants et les morts.
Laurent Gaudé convoque toute la mythologie vaudou pour nous entraîner dans une folle sarabande à travers la ville meurtrie, la ‘'ville tremblée''. Une danse débridée durant laquelle les ombres doivent laisser la place à la lumière d'un avenir à reconstruire.
Magnifique roman d'amour… pour Haïti, pour l'être humain, pour la fraternité, pour la liberté, pour la révolte, Danser les ombres mêle poésie et violence, réalisme brut et onirisme vaudou.
A lire.

Dans une Haïti en proie au déchirement de la Terre, les hommes fraternisent et s'entraident. J'ai lu ce livre il y a quelques années maintenant. Mais plus que l'histoire, se sont des sensations que je retiens: de la tristesse bien sûr mais aussi une histoire fraternelle, des morts qui côtoient les vivants pour les épauler et inversement... Un chef d'oeuvre!

“Que la vie soit joyeuse ou rude, mais qu'elle soit intense.”
Vieux Coicou, 80 ans

“ Tout pouvait reprendre. Cela ne serait que cinq années perdues. Qu'est-ce que cela faisait?” Lucine

Laurent Gaudé après m'avoir emmené en Afrique pour assister à la mort du roi Tsongor, dans le désert Africain auprès de Salina et ses trois fils, en Italie chez les Scorta, un peu partout dans la nuit Mozambique... m'a fait chavirer aux Caraïbes.

L'histoire se passe en Haïti. 
Le destin amène plusieurs personnes à se trouver à Port-au-Prince, 5 ans et quelques mois après la chute du dictateur Aristide. La lutte est encore dans tous les esprits échauffés.
Nous y découvrons une galerie de personnages aux vies abîmées, aux existences mises de côté, ayant fait de mauvais choix ou des choix pour de mauvaises raisons ou encore, par empathie. Ce sont des personnes voulant se libérer du joug de la nécessité.
Des personnes à deux doigts de s'accorder à eux-même cette liberté tant idéalisée!
Tous se demandant si ce qui compte, c'est l'instant ou la mémoire?
Ces personnages (Lucine, Saul, Domitien, Lily…) ont une chose en commun : ils sont à quelques heures de savourer un goût nouveau de vie, ils entrevoient un monde qui renaît, ou alors une vie retrouvée, ils le sentent dans leur sang, dans leurs tripes, dans leurs coeurs et ils ont cette force inouïe de vivre à nouveau, à corps et à coeurs perdus…
Ce qui compte, alors, c'est l'instant?

Je ne sais pas si vous vous souvenez de la date de la chute d'Aristide en Haïti. C'était le 29 février 2004, suite à un coup d'État.
Cinq ans et quelques mois plus tard, pourrait donc nous amener en 2009, ou bien… en 2010… et pourquoi pas le 12 Janvier 2010, c'est un jour comme un autre après tout.
La journée est déjà bien avancée quand, Lucine se décide à aller voir le père de sa nièce, orpheline de mère à Petion-Ville, la réaction de CETTE personne, changera le court de sa vie, ensuite, elle se laissera cueillir toute entière à sa nouvelle vie qui l'attend. Elle est prête. Elle marche. Elle est sûre d'elle.

16 heures 53 minutes et 10 secondes

 Depuis le début, quelque chose se trame dans l'air, il y a une chose invisible qui rôde, un sort vaudou ? Lucine a reçu sur son front un Vévé par l'esprit Ravage au début de cette histoire... La mort règne c'est sûr ! Les meurtres sont-ils encore envisageables ? Des trahisons ? Mais à ce moment-là, c'est une déchirure...

Je lisais et j'ai vu que j'étais au milieu de la page 137 sur 250 pages : 
Et la voilà, notre héroïne… c'est elle:  la terre qui protège, la terre qui gronde, la terre immense, elle est vaste, elle est insondable dans son ensemble et elle veut danser.

Vu comme ça, si elle veut danser, tout va bien… A hauteur d'homme : LA TERRE TREMBLE.
Que deviennent ces personnes si avides de vie, dont Laurent Gaudé vient de nous dresser le portrait pendant la moitié du roman? Je suis tellement attachée à eux, que je ferme le livre précipitamment. Ce n'est pas possible, qu'est-ce que l'auteur leur a réservé… Pas maintenant, il va tout dévaster. Vont-ils s'en sortir? L'auteur nous laisse le choix d'arrêter de le lire ou de continuer à cet instant.
Leurs vies devaient s'améliorer, pas être réduite en cendre.
La tension à ce moment-là du livre est terriblement oppressante… Elle tremble, mais cela pouvait être un battement anodin? Dans ma tête j'imagine tous les scénarios possibles pendant plusieurs heures. Quand je reprends le livre, et que j'avance ce n'est plus la même histoire. 
Ils restent les vivants et tous leurs morts, les souvenirs...
Et je ne vous dis rien de la suite du livre…
Vous avez compris de quoi il s'agit : le séisme en Haïti d'une magnitude de 7,3 sur l'échelle de Ritchter…qui a ravagé la ville de Port-au-Prince. 
Il y a eu 280.000 morts, 300.000 blessés et il a fait 1,3 millions de sans-abris. le 12 janvier 2010.

J'ai eu un énorme coup de coeur pour ce livre, je ne m'en déferai jamais croyez-moi, il est passionnant, il est déchirant, empli de vie et de mort… au point que dans mon classement personnel il passe devant "Salina : les 3 exils" qui était mon roman préféré depuis que j'ai commencé à lire dans ma vie.
Je vous encourage vivement à découvrir ce trésor !

Je l'ai attendu avec impatience, et puis un jour, c'est arrivé, J.M le Clézio rejoignait les Nobel. Cette reconnaissance dont il n'avait pas besoin, je gage que Laurent Gaudé la reçoive à son tour. Au fil des années, il construit une oeuvre magnifique dont notre humanité s'honore.

Ce livre est une véritable ode à Haïti. Une première partie du roman pose les personnages et l'île d'Haïti. On y perçoit tout l'amour que les habitants ont pour leur île malgré la pauvreté et les difficultés de vie. Les personnages sont très réussies et nous embraquent dans leur île. La seconde partie se déroule après le séisme où les distinctions entre les habitants s'effacent pour faire place à la solidarité entre les insulaires. Enfin, la dernière partie est une réflexion sur la mort en se servant des croyances haïtiennes. Ce roman est véritablement envoûtant et il vous prend pour ne plus vous lâcher. UN REGAL.

Le roman se passe à Port-au-Prince en Haïti .Dans la première partie , nous faisons connaissance de toute un galerie de personnages ,femmes et hommes , noirs et blancs , pauvres et riches ,jeunes et vieux , et de leurs problèmes personnels , de famille , d'avenir , de maladie … le passé douloureux des dictatures (Duvallier,Aristide) marque plusieurs générations. Cependant une intense faim de vivre , d'amitié émerge en particulier d'un groupe d'amis réunis Chez Fessou , une ancienne maison close. le séïsme vient fracasser ces vies modestes et les confronte encore une fois au malheur individuel et collectif . Gaudé aime et nous fait aimer ses personnages , leur volonté de surmonter le pire, leur irrépressible vitalité , leur sens de la solidarité . Sans pathos , il tisse une fable teintée de fantastique qui est une leçon d'espérance et un cri d'amour pour un peuple martyrisé par l'histoire et les éléments. Remarquable roman.

Ouvrir un roman de Laurent GAUDE, c'est pour moi jouer à pile ou face : où j'adore, où j'abandonne.

Et comme je vais faire un article complet, j'ai adoré. Pas tout de suite au commencement de ma lecture. Il m'a fallu un peu de temps pour placer les personnages et leur histoire, la cartographie de la ville.

Et puis le charme des longues phrases envoûtantes de l'auteur a opéré.

J'ai aimé les personnages : les gentils de la villa Fessou, mais aussi le méchant Matrak qui ne trouve plus sa place depuis la fin de la dictature.

J'ai aimé Nine qui aime les hommes, sa simplicité, et j'ai pleuré de rage avec elle quand les hommes étaient violent avec elle.

J'ai aimé Lily qui ne veut pas mourir entre les murs aseptisés d'un hôpital.

J'ai aimé Mme Kénol qui reconnait son fils dans le fils bâtard de la bonniche et lui donne son nom.

J'ai aimé sa cuisinière, Dame Petite, qui fait danser les morts et les vivants afin que chacun retourne chez soi.

Un roman magnifique et juste qui m'a fait verser des larmes de tristesse et de joie.

Quelques citations :

Les gens s'énervent. Ils ont besoin de colère. Cela leur fait du bien après tant de terreur.

Ils savent qu'ils ne pourront faire autrement et c'est contre cela qu'ils s'énervent. La rage de devoir céder.

(…) pleurer encore, ce sera un profond soulagement… Il va leur ouvrir à tous pour qu'ils aitent le temps de s'assoir, de dire ce qu'ils ont vécu, de montrer leurs plaies, et ce ne sera pas rien.

Si la République avait à choisir un slogan, ce serait : « Consommation, satisfaction et tombola ! ».

L'image que je retiendrai :

Celle du personnage féminin vaudou Madame Brigitte, épouse de Baron Samedi.
Lien : https://alexmotamots.fr/dans..

Laurent Gaudé a vraiment l'art de nous plonger très rapidement dans l'atmosphère haïtienne. Dès les premières pages, il y a les couleurs, le marché, la chaleur et puis ce je ne sais quoi de mystérieux, de croyances et d'interactions avec les esprits.
Ensuite, apparaissent les personnages principaux de ce roman. Lucine, qui veut vivre sa vie et ne plus la subir, Saul, qui cherche sa voie entre sa relation difficile avec sa belle-mère et son désir d'améliorer le sort des Haïtiens et toute une série de proches qui gravitent autour d'eux et nous donnent un aperçu des différentes classes sociales en Haïti.
Par un heureux hasard, Saul et Lucine vont se rencontrer et s'aimer. Mais trente-cinq secondes vont changer leur vie à tous : la terre va trembler trente-cinq secondes !
Suivent alors des pages magnifiquement écrites dont je ne raconterai rien, il faut les découvrir !
L'écriture de Laurent Gaudé m'a vraiment séduit, je me sentais à Haïti, je côtoyais les Haïtiens, je tremblais, j'espérais avec eux. C'est le premier roman de lui que je lisais, j'en lirai d'autres...

Le contexte : le tremblement de terre de Port-au-Prince en 2010. Laurent Gaudé nous raconte l'histoire de quelques habitants que le destin a réunis avant le grand cataclysme. À travers leurs histoires, c'est aussi celle de ce pays qui nous est contée : la dictature, ses atrocités, la pauvreté, mais aussi la force de ce peuple éprouvé de tant de manières. Joli coup de Laurent Gaudé. Je le placerai dans mon top 5 des romans de cet auteur. On y retrouve son écriture si belle, ses personnages forts et sa poésie si particulière.

Je n'avais pas lu la 4e de couverture avant d'emprunter ce roman, je savais juste que l'histoire se passait en Haïti... Je me suis retrouvée soudainement projetée, sous le coup de multiples et très vives émotions, en ce 12 janvier 2010, où j'ai du attendre de longues heures avant d'avoir des nouvelles de deux amis très chers... qui s'en sont heureusement sortis. Cette histoire, empreinte d'une grande poésie, oscillant entre réalité et fantastique, m'a donc touchée en plein coeur...