Intermède récréatif de L.Gaudé, dans l'attente d'une création plus consistante. C'est très curieux, ce texte ressemble à un échauffement narratif, l'auteur semblant en quête d'une histoire à raconter. Il convoque l'histoire parisienne et ses personnages rencontrés au hasard d'une interpellation, homme-ombre qu'il suit, précède, dans une brillante sarabande. Il laisse vagabonder ses références personnelles, intimes ou culturelles, cultuelles aussi, pourrait-on dire, repères dans une ville-monde foisonnante, mélange d'époques, la mort croise le chemin du vagabond de la nuit, la folie s'invite au théâtre, les interconnexions se font et se défont, naissance à la gare Montparnasse, fin du voyage à la Gare de l'Est, descente vers l'aube qui pointe, le réel temporel reprend ses droits, l'ombre, témoin de la nuit, repart en quête d'un guide mémoriel, autre vie, autres lieux, infini de possibles dans l'entrelacs des rues parisiennes, si riches, ruisselant d'histoires à conter, coups de fusil, libération, espoir.
Les mystères de Paris, la Chouette rencontre Thénardier, Javert n'est pas loin, et
François Villon bamboche à tout va, Artaud verbalise son séjour aveyronnais et je joue au frisbee sur la parvis de Notre-Dame, j'ai vingt ans et je ne laisserai personne dire que c'est le plus bel âge et pourtant, ça l'est, celui où l'on ne meurt qu'une fois, pas le temps de renaître, de se repaître d'illusions jusqu'à
la nausée. Monsieur
Sartre à la terrasse du café de Flore, regardait les jeunes filles passer sur le boulevard en pensant à Simone qui, elle, libérait le beau sexe de ses multiples carcans et lui, se perdant dans un romantisme prolétarien déjà condamné par
L Histoire.
Paris est une fête pour qui le veut, pour qui en a les moyens, intellectuels, cognitifs ou financiers, gros mot lâché, omniscient aujourd'hui.
Définitivement, les rues sont plus belles la nuit.
Je me suis un peu amusé après la lecture de cet exercice de style mais imaginer Paris en ce jour, la nuit vide de ses habitants, couvre-feu d'une occupation virale improbable, politique du pire.
Sous le pont Mirabeau coule la Seine...