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Citations sur Camarade Papa (99)

Dans la tribu des Boni-marrons, le manioc est la plante de la liberté, dit Yolanda. S’échappant dans la forêt inexplicable loin des terres des escla-vageurs, les Boni-marrons affamés ont observé les hommes de la zone, les Amazoniens. Ils les ont vus enterrer un bout de bois devenu en quelques semaines un gros tube Hercule que les hommes de la zone appellent manioc. C’est le nom d’une princesse qui s’est sacrifiée pour que le tube Hercule pousse. Les Boni-marrons ont fait comme les hommes de la zone et n’ont plus jamais eu faim. Le manioc les rendait si forts qu’ils sont devenus esclavengeurs, à se battre pour libérer les autres esclaves et rester libres.
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Mais que vaut telle religion lorsqu’est en jeu la vie de son homme-destin, celui que la devineresse voit dans l’alignement des cauris jetés le jour de la naissance, celui que la prépubère chante dans les assemblées au clair de lune, qui apparaît dans les songes la nuit des premières menstrues. L’homme ignore tout de sa femme-destin, elle seule peut se révéler à lui.
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En agny, évanouissement, coma et mort sont le même mot. Il ne faut donc pas s’agenouiller en dévotion lorsqu’un mort ressuscite, même après trois jours. Le fait est courant à cause de la confusion lexicale. La chrétienté n’aurait pu naître en ces contrées : le Jésus agny n’aurait attiré aucune curiosité.
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Dans la terre, il y a les plantes et les esprits. Les plantes se nourrissent d’eau, les esprits de sang. Aux plantes, la nature offre la pluie ; aux esprits, les hommes offrent les guerres et les sacrifices. Aucun sacrifice, aucune guerre ne se fait sans musique. Eugène Cébon comprend que nos armées aussi s’étripent en musique, que nous ne nous massacrions jamais sans tambour ni trompette. « Dabii, les peaux ont plusieurs couleurs. Mais les esprits de tous les hommes ont une seule couleur, celle du sang. »
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Elle arrive un de ces matins-là. Elle progresse, un pas après l’autre. Elle gravit lentement la colline, un palier après l’autre, une étape après l’autre. Elle devait arriver, elle est là. Je ne sais quel visage lui présenter, quelle posture lui offrir. Une lame de froid me tétanise, une vague de chaud me remue. Fondent les dernières résistances en mon corps. Fourmi au bout du petit orteil devient fourmilière dans la jambe. Perle au front devient torrent aux épaules. Notre rencontre est scellée depuis La Rochelle. Elle m’enlace, m’étreint. Un tourbillon m’aspire dans le portail de ses délires. Père romain et sa morve ultime, mère avalée dans un nuage de talc, vagues déferlantes de piments, usines dragons, cloîtres éventrés, Chassepot caméléons, plage chantante, horizon dansant, nègres vibrionnants, coloniaux démiurges, horde indolente, forêts sorcières, moustiques vampires, tirailleurs cannibales, prince en marmite, interprète pantomime, crocodile iodé, crabes-tapis… et les tresses hirsutes, le ventre étoilé, la peau sans teint, la buveuse de lumière, les jambes fuseaux… Je suis à elle. La fièvre palustre est là !
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les fourous, furieux moucherons, sont engourdis par la rosée sur leurs ailes ; chouettes, hiboux, chats-huants, tous les bruyants ailés nyctalopes sont cois dans leurs arbres ou cavernes ; les insectes aux systèmes d’alerte avancés s’accordent un repos ; les ténèbres de la nuit se révulsent et laissent filtrer des bleus encore trop profonds pour chatouiller les rétines ; des toits de chaume des cases-cuisines en contrebas fument, volutes de fumée en concurrence avec les nappes de brouillard. Tout ce qui possède une surface dégouline. L’atmosphère est tellement saturée qu’on peut boire l’air. Passée la sensation d’étouffement, la forte hygrométrie installe une grisante réminiscence d’un temps placentaire. Si un jour quelque plumitif explorateur décrit l’Afrique comme le berceau d’une humanité primitive dans un éden sauvage, il l’aura imaginé dans ces instants fugaces. Déjà percent de fins rais dans les nuages indéfinis émanés de la terre, exsudés des plantes. Avec la multitude des trouées dans le couvert végétal, ils se rassemblent en faisceaux. Traverser l’eau en suspension leur fait l’effet de passer une lentille grossissante. La température frôle déjà les maxima alors que le soleil ne s’est pas encore extirpé de l’horizon de sylve. De même qu’il n’y a presque pas de crépuscule, il n’y a presque pas d’aube. Je l’observe tous les matins. Laudes à Assikasso est le miracle des aurores.
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Quand exceptionnellement on abat un pachyderme, on se délecte de sa viande, sa queue est transformée en chasse-mouches de prestige, on tresse ses poils en bracelets tellement solides qu’ils se transmettent de génération en génération, mais les ivoires… En échangeant défense d’éléphant contre verroterie et tissus de couleurs, le piroguier apollonien pense le marin hollandais idiot, qui de son côté est convaincu de traiter avec un crétin sans nom. Marché de double dupe. La valeur est relative, l’appât du gain universel.
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Le concept de prison n’existe pas, alors le mot n’a aucun équivalent agny. Pour les coupables jugés les plus amoraux, le châtiment est post mortem. Lorsqu’ils décèdent, leurs cadavres sont mutilés et jetés sans sépulture dans un bois maudit. Ainsi, la mauvaise âme ne trouvera jamais repos et si par extraordinaire elle se réincarne, on la reconnaîtra à ses stigmates. Une telle idée de la justice implique une capacité de pardon au-dessus de la moyenne chrétienne. Pour un vivant, la peine capitale est l’expulsion du clan, l’exil forcé loin de la famille, loin de la tribu, loin des ancêtres.
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En général avant le tub du matin, enfants et adultes s’adonnent à une activité commune à l’humanité entière, mais ici pratiquée après un rituel des plus curieux. Une poire rigide, vidée et asséchée, percée à son bout effilé et sur son flanc est emplie d’extraits liquides de plantes écrasées avec des piments. Les mères se saisissent des enfants, leur introduisent le pointu de l’instrument dans l’anus et, par l’orifice externe, soufflent la potion dans leurs entrailles. Une fois libres, il faut voir les minots courir se soulager au premier bosquet. Sans pudeur, les adultes s’adonnent au même manège, femmes entre femmes, hommes entre hommes, avant de s’alléger en des broussailles plus éloignées. Les flatulences s’entendent de très loin en écho. Où la première incommodité gastrique déclenche des cataractes dysentériques chez l’Européen, le transit intestinal agny a besoin d’être motivé de la sorte. Les couples formés pour s’administrer cette version de l’instrument de Molière se marquent une grande confiance. Un poison inoculé par cette voie est d’une violente efficacité. Frères de poire, à la vie à la mort ! Je trouverai d’autres moyens pour exprimer ma confiance.
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Faire peser le silence est une parole forte.
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