Au bout du compte, la guerre de Troie aura bien lieu…
Malgré son intelligence, son prestige, ses mille ruses et sa volonté farouche de l'empêcher, Hector n'est pas de taille à lutter contre la fatalité du destin et l'idiotie des va-t-en-guerre.
Reprenant l'histoire de l'Iliade d'
Homère,
Giraudoux laisse les Troyens s'entredéchirer en attendant une délégation grecque dirigée par Ulysse qui doit demander réparation suite à l'enlèvement de la belle Hélène par Pâris. Pour éviter la guerre entre Grecs et Troyens pour une question d'honneur, Hector qui, lui, en revient épuisé et écoeuré, demande à Pâris de la laisser repartir, mais le puissant clan des bellicistes ne l'entend pas de cette oreille.
Deux choses me plaisent dans cette pièce que je lis pour la première fois (hé oui, je suis passé au travers au lycée !)
Son côté intemporel, d'abord. Bien sûr, elle fut représentée pour la première fois en 1935, et on ne peut la comprendre sans connaître son contexte historique : celui d'une époque qui fonçait droit vers la guerre.
Giraudoux pousse un cri pacifiste, mais un cri désespéré, d'un pessimisme noir, puisque les hommes qui s'agitent dans cette pièce se montrent incapables de saisir cette opportunité de contredire l'histoire en refusant de faire la guerre de Troie. Mais les arguments développés pour ou contre la guerre sont de toutes les époques. La guerre qui donne un sens à la vie et qu'on accepte de perdre au nom d'un idéal, d'une patrie ou d'une religion… Ou bien la guerre que l'on refuse parce qu'elle tue autant les ennemis que les proches, et éloigne les enfants de ses parents, ou le mari de son épouse… Question vraiment épineuse !
Son côté décapant, ensuite. Priam, Hector, Hélène, Andromaque, Cassandre, Ulysse, tous ces personnages de légende, ces êtres suprêmes, majestueux, olympiens, en train de discuter le bout de gras au coin d'une table et de se donner des surnoms du genre « ma petite chérie » a quelque chose de très drôle et de rafraichissant.
En bref, je ne regrette pas d'avoir passé un peu de temps à lire cette pièce et, vraiment, j'espère pouvoir un jour la voir au théâtre.